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Extrait du livre "Un autre regard sur Staline" de Ludo Martens Le Pacte
germano-soviétique:
Hitler arrive au pouvoir le 30 janvier 1933. Seule
l'Union soviétique en comprend tous les dangers pour
la paix mondiale. En janvier 1934, Staline déclare au
Congrès du Parti que "la 'nouvelle' politique
(allemande) rappelle dans ses grandes lignes la politique de
l'ex-kaiser qui fit occuper, un temps, l'Ukraine et
entreprit une campagne contre Léningrad, après
avoir transformé les pays Baltes en une base
d'opérations pour cette campagne". Il déclare
aussi: "Si les intérêts de l'URSS commandent un
rapprochement avec tels ou tels pays qui n'ont pas
intérêt à voir violer la paix, nous le
faisons sans hésitation."(1) En 1935, l'Italie fasciste occupe l'Ethiopie. Face au
danger de l'expansion fasciste, l'Union soviétique
propose dès 1935 un système de
sécurité collective en Europe. Dans cette
perspective, elle conclut des traités d'assistance
mutuelle avec la France et la Tchécoslovaquie. A la mi-mai, Hitler concentre ses troupes à la
frontière tchécoslovaque. L'Union
soviétique, liée par un traité au pays
menacé, masse plus de 40 divisons à sa
frontière occidentale et rappelle 330.000
réservistes. Mais en septembre, l'Angleterre et la
France se réunissent à Munich avec les
puissances fascistes, l'Allemagne et l'Italie. Ni la
Tchécoslovaquie ni l'Union soviétique n'ont
été invitées. Les grandes
"démocraties" décident de livrer à
Hitler la région des Sudètes, partie
intégrante de la Tchécoslovaquie. Dans la
foulée de cet acte perfide, l'Angleterre signe le 30
septembre une déclaration avec l'Allemagne où
il est dit que les deux puissances expriment le désir
"de ne jamais entrer de nouveau en guerre l'un contre
l'autre "(2). Néanmoins, l'Union soviétique
propose son aide à la Tchécoslovaquie en cas
d'agression allemande, mais cette offre est
déclinée. Le 15 mars l939, la Wehrmacht
s'empare de Prague. En démembrant la
Tchécoslovaquie, Hitler offre un morceau du
gâteau au gouvernement réactionnaire polonais
qui mord à l'appât avec avidité... En mai 1939, l'armée japonaise agresse la
Mongolie, liée à l'Union soviétique par
un traité d'assistance militaire. Le mois suivant,
les troupes soviétiques, dirigées par un
officier inconnu, Joukov, engagent la bataille avec
l'année japonaise. C'est un affrontement militaire
d'envergure: le Japon perd plus de 200 avions et plus de
50.000 de ses soldats sont tués ou blessés. Le
30 août 1939, les dernières troupes japonaises
quittent la Mongolie. Le lendemain, une autre
frontière de l'Union soviétique s'embrase:
l'Allemagne envahit la Pologne. Tout le monde savait cette
agression imminente: pour se ménager une position
optimale et déclencher la guerre soit contre
l'Angleterre et la France, soit contre l'Union
soviétique, Hitler devait "régler le sort" de
la Pologne. Revenons un peu en arrière. En mars 1939,
l'Union soviétique entame des négociations
pour former une alliance antifasciste. L'Angleterre et la
France manoeuvrent et laissent traîner les choses. Par
cette altitude, les deux grandes "démocraties" font
comprendre à Hitler qu'il peut marcher contre Staline
sans être inquiété à l'Ouest. De
juin à août 1939, se tiennent des pourparlers
secrets anglo-allemands: en échange du respect de
l'intégrité de l'Empire britannique, les
Anglais promettent à Hitler la liberté
d'action à l'Est. Le 29 juillet, Charles Roden
Buxton, du Labour Party, remplit une mission secrète
pour le premier ministre Chamberlain auprès de
l'ambassade allemande. Il développe le plan suivant:
"La Grande-Bretagne se déclare prête à
conclure avec l'Allemagne un accord délimitant les
sphères d influence. (...) En août 1939, les négociations entre l'Angleterre, la France et l'Union soviétique entrent dans leur phase finale. Mais les deux puissances occidentales envoient à Moscou des délégations de second rang, sans mandat pour conclure une convention. Vorochilov exige des engagements contraignants et précis pour qu'en cas de nouvelle agression allemande, les alliés entrent en guerre ensemble. Il veut savoir combien de divisions les Anglais et Français opposeront à Hitler en cas d'agression contre l'URSS. Il ne reçoit pas de réponse. Il veut aussi conclure un accord avec la Pologne pour que les troupes soviétiques puissent rencontrer les nazis sur le territoire polonais en cas d'agression allemande. La Pologne refuse rendant ainsi impossible tout accord militaire effectif. Staline comprend parfaitement que la France et l'Angleterre préparent un nouveau Munich, qu'elles sont prêtes à sacrifier la Pologne dans l'espoir de faire marcher Hitler contre l'Union soviétique. Ace moment, Hitler était déjà arrivé à la conclusion que la France et l'Angleterre avaient moins de capacité et de volonté de résister. Il décide de s'emparer de l'Europe occidentale avant de s'attaquer à l'URSS. Le 20 août, Hitler propose à 1'Union soviétique un pacte de non-agression. Staline réagit promptement et, le 23 août, le pacte est signé. Le 1er septembre, Hitler attaque la Pologne. L'Angleterre et la France sont prises à leur propre piège. Ces deux pays ont facilité toutes les aventures d'Hitler dans l'espoir de l'utiliser contre l'Union soviétique. Depuis 1933, ils n'ont cessé de vanter les mérites d'Hitler dans le combat contre le communisme. Maintenant, ils se voient obligés de déclarer la guerre à l'Allemagne nazie... sans avoir la moindre intention de la faire effectivement. Sur le front de l'Ouest, aucune bombe ne vient perturber la tranquillité des nazis... En revanche, une véritable guerre politique interne est déclenchée contre les communistes et, le 26septembre, le PCF est interdit et des milliers de ses membres sont jetés en prison. Henri de Kerillis écrit: "Une tempête indescriptible souleva les consciences bourgeoises. L'esprit de croisade souffla en furie. Il n'y eut qu'un cri: guerre à la Russie. C'est à ce moment que le délire anticommuniste atteignit son paroxysme." (4) A ce moment, Staline dit avec une grande perspicacité à Joukov: "Le gouvernement français, qui a Daladier à sa tête, et le gouvernement anglais de Chamberlain ne veulent pas s'engager sérieusement dans la guerre contre Hitler. Ils espèrent toujours pousser Hitler à une guerre contre l'Union soviétique. S'ils ont refusé en 1939 de réaliser avec nous un bloc antihitlérien, c'est qu'ils ne voulaient pas lier les mains d'Hitler, ils ne voulaient pas l'amener à renoncer à son agression contre l'Union soviétique. Mais rien ne sortira de tout cela. Il leur faudra payer eux-mêmes pour leur politique à courte vue". (5) L'Union soviétique a conclu le Pacte avec la
claire conscience que, tôt ou tard, la guerre avec
l'Allemagne nazie serait inévitable. Une fois que
l'Allemagne eût décidé de conclure un
accord avec l'URSS, Staline extorqua à Hitler le
maximum de concessions afin de se ménager les
meilleures positions pour la guerre à venir. La
Pravda du 23 septembre 1939 écrit: "La seule chose
qui était encore possible, c'était de
préserver de l'invasion allemande l'Ukraine
occidentale, la Biélorussie occidentale (deux
provinces qui avaient été arrachées
à l'Union soviétique en 1920) et les pays
baltes. Le gouvernement soviétique a fait prendre
à l'Allemagne l'engagement de ne pas franchir la
ligne formée par la Thasse, le Narew, le Boug et la
Vistule". (6) La droite prétend que le Pacte a prouvé la "collusion" entre Hitler et Staline. Or, l'histoire a montré que le Pacte germano-soviétique a constitué la clé de la victoire dans la guerre antifasciste. Cela semble un paradoxe, mais le Pacte a été un tournant qui a permis la préparation des conditions de la défaite allemande. En août 1939, l'Union soviétique s'est
trouvé devant le danger mortel de voir se constituer
un front unique antisoviétique de toutes les
puissances impérialistes. Avec le soutien tacite de
l'Angleterre et de la France, l'Allemagne pourrait,
après avoir occupé la Pologne, continuer sur
sa lancée et entamer la "guerre-éclair "
contre l'URSS, tandis que le Japon attaquerait la
Sibérie. L'Union soviétique n'aurait pas pu
survivre, la principale force antifasciste aurait
été détruite, le fascisme aurait
dominé le monde. LUDO MARTENS ( l ) Rapport au XVIIe Congrès, Ed. en langues étrangères, Moscou, I952, p.22-23. (2) Documents et matériaux se rapportant à la veille de la Deuxième Guerre mondiale. Ed. en langues étrangères, Moscou, 1948, tome, 1. p. 282. (3) Documents et matériaux...; Archives Dirksen, tome II, Ed. en langues étrangères, Moscou, 1948, II, p. 112- 113. (4) Cité dans: La Grande Guerre Nationale de l'Union soviétique. Ed. du Progrès, Moscou, 1974, p.20. (5) Joukov, I. p.250-251. (6) Déborine Grigori, Les secrets de la Seconde Guerre mondiale. Ed. du Progrès, Moscou. I972,p.35.(7) Churchill, tome 2. p. 51-52 |