Staline face à l'attaque des armées fascistes

Solidaire -hebdo du Parti du Travail de Belgique- n°9 (1028) 2 mars 1994 p.22

International

Staline face à l'attaque
des armées fascistes

A propos des premiers mois de la guerre contre le fascisme, Khrouchtchev écrit: "Après les premiers désastres sur le front, Staline pensa que c'était la fin. Staline cessa de faire quoi que ce soit. Il était démoralisé pendant les quatre premiers mois de la guerre."(l) Elleinstein en rajoute: "Le 22 juin, Staline disparut totalement. Buvant force vodka, il ne dessaoula pas pendant onze jours." (2) Un parmi les dizaines de mensonges "classiques" répétés jusqu'à devenir vérité incontestable. Regardons donc de plus prêt l'action de notre Staline, ivre mort depuis onze jours et démoralisé pour encore quatre mois...

Ce 22 juin 1941,à 3h40 du matin, des avions allemands ont bombardé des villes frontalières; Staline convoque le bureau politique. Il comprend mieux que quiconque à quelle sauvagerie son pays sera soumis. Joukov se rappelle cet instant dramatique. "Staline était un homme volontaire qui comme on dit, n'avait pas froid aux yeux. Une seule fois je l'ai vu assez abattu. Ce fut à l'aube du 22 juin I941."(3) Joukov propose alors d'attaquer immédiatement les unités ennemies. Staline lui dit de rédiger une directive. Elle part à 7 h 15. "Elle ne correspondait plus à la réalité et ne fut pas appliquée," note Joukov.(4) L'affirmation de Khrouchtchev selon laquelle Staline "ordonna qu'il ne soit pas répondu au tir allemand" est donc un bobard.(5)
"Après le 22 juin 1941," dit Joukov, "et pendant toute la durée de la guerre, Joseph Staline assura la ferme direction du pays, de la guerre et de nos relations internationales." D'ailleurs, ce même 22 juin, Staline prend des décisions importantes. Joukov en témoigne: "Vers 13 heures, Staline m'appela: "Nos commandants de fronts n'ont pas une expérience suffisante dans la conduite des opérations militaires. Le Bureau politique a décidé de vous envoyer sur le Front Sud-Ouest". En fin de journée, Joukov se trouve déjà à Kiev. Suivant les directives de Staline, dès le 24 juin, Joukov lance les 8ème et 15ème corps mécanisés à l'offensive. Ce fut "une des premières contre-attaques déclenchées avec succès".(6)
Face à la guerre-éclair des nazis, la désorganisation, les défaites, les pertes importantes étaient en grande partie inévitables. Le fait majeur est que l'armée et ses cadres dirigeants ont livré une résistance acharnée, implacable et, par des combats héroïques, ont commencé à créer dès les premiers jours les conditions de l'échec de la guerre-éclair. Et tout cela a été possible, en grande partie, grâce à la direction énergique de Staline.
Le 26 juin, le front de l'Ouest est rompu et les nazis se ruent sur Minsk capitale de la Biélorussie. Le soir, Staline convoque Timotchenko et Joukov: "Réfléchissez ensemble et dites ce qu'on peut faire dans la situation qui s'est créée." Joukov rapporte: "Toutes nos propositions furent approuvées par Staline: créer sur les itinéraires menant à Moscou une position de défense échelonnée en profondeur, épuiser l'ennemi et, après l'avoir arrêté sur les lignes de défense, monter une contre-offensive quand les forces nécessaires seraient rassemblées, grâce à l'Extrême-Orient et de nouvelles formations. "(7)


Le 7 novembre 1941, l'armée fasciste se trouvait aux portes de Moscou. Lançant un défi aux nazis, Staline décida de maintenir la traditionelle parade militaire. Sur la Place Rouge, son discours historique marqua un tournant dans la guerre antifasciste.

"II s'agît
de la vie ou de la mort
de l'Union soviétique"

Le 3 juillet 1941. Staline prononce son célèbre discours radiodiffusé. Son contenu a marqué tous les Soviétiques par sa simplicité et sa volonté farouche de vaincre. Staline dit notamment: "L'ennemi est cruel, inexorable. Il s'assigne pour but de s'emparer de nos terres arrosées de notre sueur, de s'emparer de notre blé, de notre pétrole, fruits de notre labeur. Il s'assigne pour but de rétablir le pouvoir des grands propriétaires fonciers, de restaurer le tsarisme, d'anéantir la culture et l'indépendance nationales des Russes, Ukrainiens, Biélorusses, Lituaniens, Lettons, Estoniens, Ouzbeks, Tatars, Moldaves, Géorgiens, Arméniens, Azerbaïdjans et autres peuples libres de l'Union soviétique: de les germaniser, d'en faire les esclaves des princes et des barons allemands. Il s'agît ainsi de la vie ou de la mort de l'Etat soviétique; il s'agit de la liberté ou de la servitude des peuples de l'Union soviétique. Que nos nommes soient exempts de peur dans la lutte et marchent avec abnégation dans notre guerre libératrice pour le salut de la Patrie, contre les asservisseurs fascistes. Le grand Lénine, qui a créé notre Etat, a dit que la qualité essentielle des hommes soviétiques doit être le courage, la vaillance, l'intrépidité dans la lutte, la volonté de se battre aux côtés du peuple contre les ennemis de notre Patrie. L'Armée et la Flotte rouges ainsi que tous les citoyens de l'Union soviétique doivent défendre chaque pouce de terre soviétique, se battre jusqu'à la dernière goutte de leur sang pour nos villes et nos villages. Il nous faut organiser une lutte implacable contre les désorganisateurs de l'arrière, les déserteurs, les semeurs de panique, les propagateurs de bruits de toutes sortes, anéantir les espions, les agents de diversion, les parachutistes ennemis. Dans les régions occupées par l'ennemi, il faut former des détachements de partisans à cheval et à pied, des groupes de sabotage pour lutter contre les unités ennemies, pour attiser la guérilla en tout lieu. En avant vers la victoire. "(8)
Le 10 juillet, commence la bataille de Smolensk. Après la prise de cette ville stratégique, les hitlériens pensent pouvoir se ruer sur Moscou, située à moins de 300 km. Mais la bataille pour Smolensk fera rage pendant deux mois ! "Elle joua un rôle important dans la période initiale de la guerre. Les hitlériens y avaient perdu 250.000 soldats et officiers. Nous avions ainsi gagné du temps pour prendre des mesures défensives en direction de Moscou. "(9)

Les nazis pénètrent dans Moscou

Le 30 septembre, les nazis commencent l'offensive finale pour prendre Moscou. 450.000 habitants de la capitale, dont 75 % de femmes, sont mobilisés pour édifier des fortifications et des défenses anti-char. Les troupes du général Panfilov mènent des batailles mémorables pour la défense de "la chaussée de Volokolamsk", immortalisées dans le roman du même nom d'Alexandre Beck.(l0) Moscou est bombardée. Une partie de l'administration est évacuée. La panique commence à s'emparer des habitants. Mais Staline décide de rester à Moscou. Les batailles deviennent de plus en plus acharnées et, début novembre, l'offensive nazie est stoppée. Après avoir consulté Joukov, Staline prend la décision d'organiser la parade militaire traditionnelle du 7 novembre sur la place Rouge. Un véritable défi aux troupes nazies campées aux portes de Moscou. Staline prononce un discours qui sera diffusé dans tout le pays. "L'ennemi est aux portes de Leningrad et de Moscou. Il comptait qu'au premier choc, notre armée serait dispersée et notre pays mis à genoux. Mais l'ennemi s'est cruellement trompé. Notre pays, tout notre pays, a formé un seul camp militaire pour assurer, de concert avec notre armée et notre flotte, la débâcle des envahisseurs allemands. Peut-on douter que nous pouvons et devons vaincre les envahisseurs allemands ? L'ennemi n'est pas aussi fort que le représentent certains intellectuels apeurés. Le diable n'est pas aussi noir qu'on le fait. Camarades soldats et marins rouges, commandants et travailleurs politiques, partisans et partisanes ! Le monde entier voit en vous une force capable d'anéantir les hordes d'invasion des bandits allemands. Les peuples asservis d'Europe, tombés sous le joug allemand, vous regardent comme leurs libérateurs. Une grande mission libératrice vous est dévolue. Soyez donc dignes de cette mission. Que le drapeau victorieux du grand Lénine vous rallie sous ses plis !"(11)
Le 25 novembre, quelques unités fascistes pénètrent dans la banlieue sud de Moscou. Mais l'attaque est contenue. Pendant tout ce temps, de nouvelles troupes venues de tout le pays parviennent près de Moscou. Même pendant les moments les plus dramatiques, Staline a gardé ces forces stratégiques en réserve. Rokossovski écrit: "Cela exigeait un calcul rigoureux et une énorme maîtrise de soi."(12) Staline décide d'une grande contre-attaque qui débute le 5 décembre et au cours de laquelle 720.000 soldats rouges repoussent 800.000 hitlériens de 100 à 300 kilomètres. "Pour la première fois, les "invincibles" troupes allemandes étaient battues, et battues pour de bon. Devant Moscou, les fascistes avaient perdu plus de 500.000 hommes, 1.300 chars.2.500 canons, plus de 15.000 véhicules automobiles et beaucoup d'autres matériels. L'armée d'Hitler ne connaissait pas encore de telles pertes. "(13) La bataille de Moscou a été le véritable tournant de la guerre antifasciste, moins de six mois après le début de la guerre-éclair. La volonté inébranlable et l'énorme capacité d'organisation de Staline y ont contribué pour beaucoup.

LUDO MARTENS

(I) Branko Lazitch: Le Rapport Khrouchtchev. Ed du Seuil. Paris. 1976, p. 109 et 74. (2) Elleinslein: Staline, Ed. Marabout, 1986, p.269. (3) Joukov: Mémoires, Tome I, Ed Fayard, Paris, 1970, p.395. (4) Ibid.. p.351. (5) Lazitch, p. 107. (6) Joukov,p.395-396; 354 et 359. (7) Joukov, p.379. (8) Staline, tome XVI, éd. NBE, 1975, p. 16-17. (9) Joukov,p.406. ( 10) Alexandre Beck: La Chaussée de Volokolamsk. éd. Bordas, Paris, 1946. (11) Staline, tome XVI, p.3 8. (12) Rokossovski: Le Devoir du Soldat. Ed. du Progrès, Moscou. 1988, p.94.(13)Ibid.,p.72.

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