Produit d'une longue enquête, cette brochure avance des points de vue, des conclusions sur le mouvement contre les licenciements à Longwy, et plus généralement sur ce qu'est aujourd'hui une politique de la classe ouvrière dans la crise.

Cette brochure est donc faite pour être commentée, discutée, soumise aussi à d'autres points de vue.

NOUS SOUHAITONS EN DÉBATTRE AVEC VOUS.

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Samedi 24 Février 1979 à Longwy :
Réactions de sidérurgistes, après l'attaque du commissariat, au discours de Porcu,
député P.C.F. de Longwy
(Photo U.C.F.M.L.)

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GROUPE POUR LA FONDATION DE L'UNION DES COMMUNISTES DE FRANCE MARXISTES-LÉNINISTES

UCFML

 

LONGWY 1979 :

illusions et réalité

de la lutte de classe ouvrière

 

EDITIONS POTEMKINE

 

Les "coups de poing" ouvriers ne renversent pas le cours des choses.

                Depuis le début de la crise, la riposte ouvrière aux fermetures d'usines et au chômage se cherche.
                Quelques escarmouches et beaucoup de défaites.
                En Décembre 1978, la révolte de Longwy éclate contre le plan de licenciement. Elle porte beaucoup d'espoir.
                Qu'est-elle devenue, que nous apprend-elle ?
                C'est ce à quoi cette brochure tente de répondre.

PLAN DE LA BROCHURE

I) Longwy, l'acier et la crise.
II) Les faits au fil du mouvement.
III) Les grandes périodes du mouvement et leur signification.
IV) Longwy : un exemple de ce que veulent aujourd'hui le PCF et la CGT face au mouvement de masse.
V) Critiques des justifications à l'engagement syndical CFDT.
VI) Le groupe pour la fondation de l'Union des Communistes de France Marxistes-Léninistes (U.C.F.M.L.) enquête à Longwy; et pour ne pas manquer à une bonne tradition : la situation actuelle et nos tâches.
Annexe : Documents

 

LONGWY, L'ACIER ET LA CRISE

                LONGWY: le Pays-Haut Lorrain. Ancienne ville d'eau, passée au moule de l'industrialisation lourde capitaliste du 19 ème siècle, Longwy est aujourd'hui une croix noire sur les tablettes gouvernementales.
                L'arrêt de mort l'a saisi quand, à l'automne 1978, l'État décide de "restructurer" brutalement la sidérurgie française Dirigée par des maures de forges, véritables féodalités locales qui n'avaient réussi à se concentrer en Lorraine que depuis 10 ans et sous la pression directe de l'État, la sidérurgie française avait accumulé un certain retard face aux nouvelles caractéristiques du marché mondial de l'acier: rivalité dans la recherche de matières premières (fer) et de sources d'énergie bon marché, spécialisation croissante dans la production des aciers, apparition de nouveaux pays producteurs (Corée du Sud, Brésil...), agressivité des concurrents capitalistes directs (Japon, Italie...), redistribution des cartes au sein du Marché Commun en faveur des producteurs les mieux préparés à cette évolution (Allemagne Fédérale, Luxembourg).
                Ce retard fut un temps masqué par la formidable croissance des besoins en acier dans la période d'essor de l'économie mondiale capitaliste. La production d'acier en France est passée de 5 millions de tonnes en 1946 à 27 millions en 1974. Mais, déjà pendant cette période, se mettait en place le nouveau dispositif de production qui impliquait à la première crise importante la mort des anciens centres de production (Denain, Lorraine). Ce dispositif, c'est la sidérurgie sur l'eau avec les deux grosses unités de Dunkerque et de Fos, utilisant le minerai de fer Mauritanien.
                La coexistence des deux dispositifs dura jusqu'en 1974, la perte de productivité étant compensée par un endettement croissant des groupes sidérurgiques et des subventions massives de l'État.
                Mais jusque là, pas de diminution massive d'emplois, sauf celle de Lorraine en 1965 (11 000 emplois), provoquée par des concentrations financières et partiellement compensée par les 6000 créations d'emplois de Fos.
                En 1977, avec la crise et la concurrence redoublée des marchands d'acier, les grands groupes sidérurgiques français (Usinor, Sacilor-Sollac, Chiers-Chatillons...) se retrouvent en état de faillite et deviennent un gouffre financier pour l'État.
                Dans la crise, la logique impérialiste est implacable. Ce que l'État n'avait pu faire aux moments de l'implantation de Dunkerque et de Fos pour des raisons politiques et sociales, il va le tenter à chaud: concentration de la production sur Fos, Dunkerque et le groupe Sacilor-Sollac en Lorraine, élimination de Denain-Valenciennes et de Longwy.
                Dès 1977, le plan de restructuration s'applique: 9000 emplois supprimés en Lorraine, principalement à Thionville, mais aussi à La Chiers-Longwy. Mises à la retraite anticipée, mutations à Usinor-Longwy, licenciements d'ouvriers immigrés, tels commencent à être les masques grossiers du chômage.
                A l'époque, pas de réelle bataille: les immigrés licenciés ni vus ni connus (cela reste dans les souvenirs de beaucoup d'entre eux), une marche de sidérurgistes de Thionville sur Paris et déjà l'échec.
                Les syndicats ont jusqu'au dernier moment trompé leur monde et n'ont jamais préparé la population à l'éventualité pourtant plus que probable de la liquidation de la région. Fixés sur l'horizon de la. nationalisation manquée de 1978, engoncés dans la redistribution des surprofits de la croissance impérialiste, leur politique était que cela dure, en plus et en mieux.
                Mais, à l'automne 1978, la bourgeoisie Giscardienne se sent suffisamment forte pour passer à l'offensive: Denain rayé de la carte, Longwy aussi à peu de choses près. Concentration à Dunkerque, Fos, Metz, spécialisation dans les produits plats (les tôles. Longwy sort surtout des produits longs - poutelles, cornières, ronds à béton).
                L'État prend le contrôle des groupes sidérurgiques pour éponger les pertes et maintenir l'édifice branlant en l'amputant de sa partie dite non-compétitive.
                A la clef: plus de 20 000 emplois supprimés sur 2 ans . 6000 suppression d'emplois sur les 10 000 de la sidérurgie à Longwy.
                2500 sont prévus pour 1979 à La Chiers qui doit fermer presque complètement et à Usinor 3000 sont programmés pour 1980.
                Mais ces chiffres ne donnent encore qu'une faible idée des effets dans la région. Longwy s'est industrialisé avec l'acier et en porte partout la trace: d'énormes installations très étendues découpent le paysage, organisent le fil de la production - de la mine de fer au laminoir - dispersent l'habitat très bigarré.
                Ici, tout dépend de l'acier: les autres usines (cimenteries, transports, usines à tube...), les écoles, les commerces.
                Ville profondément ouvrière et populaire. Jusqu'à la bureaucratie d'État qui s'est faite toute petite: pas de caserne, de sous-préfecture, de grandes administrations.
                Liquider des emplois dans la sidérurgie, c'est donc provoquer d'autres licenciements en cascades qui vont s'empiler mécaniquement. C'est le début d'un engrenage: renvoi des intérimaires, licenciements dans les usines du pourtour de la sidérurgie (l'entreprise de travaux-publics Bertoldi, plus de 300 personnes, a été mise en liquidation judiciaire au mois d'Août 1979), expulsion d'ouvriers immigrés, exode des jeunes et fermeture des écoles techniques.
                 Engrenage d'autant plus redoutable :
            1- qu'il va apparaître aller de soi : si l'acier est parti, à quoi bon le minerai, les camions, les réparations, la formation ... ?
            2- que ses effets seront plus échelonnés et moins visibles alors que les victimes seront tout aussi nombreuses et ne bénéficieront d'aucune convention sociale.
                Région vivante, Longwy n'est désormais promise qu'au dépeuplement, au vieillissement de la population, à la déqualification, à la perte de la vie sociale.
                Un cimetière d'installations où quelques nouvelles usines d'OS viendront fixer le minimum de gens pour que la région se prolonge dans cette vie retirée. Renversement complet : Longwy offre l'exemple assez rare d'une région passant sans transition de l'effervescence industrielle au dépérissement.
                Certes, en rachetant l'usine de Rehon à la société belge Cokerill (note 1), Usinor maintient une production d'acier à Longwy en bricolant une seule unité à partir des 3 usines existantes: La Chiers (agglomération du minerai), Usinor (hauts fourneaux et laminoirs), Rehon (hauts fourneaux, aciérie, laminoirs). Bricolage peu rationnel d'autant qu'il sera alimenté en lingots venant de Neuves-Maisons (Sud de Nancy) et de Dunkerque ! L'État n'aura pas à aller chercher trop loin les motifs d'improductivité qui justifierons la fermeture complète de Longwy.
                En fait le maintien d'installations réduites à Longwy sont dictées par la nécessité, d'une part de lui faire jouer le rôle de réserve de production face aux à-coups de la demande, et d'autre part de graduer la mise en sommeil de la région. Enfin ce regroupement ne termine pas la restructuration de la sidérurgie à Longwy : il en ouvre la nécessité à Rehon qui jusqu'à maintenant en a été tenu à l'écart, protégée par son statut belge.
                La politique qui consiste à reporter une partie des effectifs de La Chiers et d'Usinor sur Rehon débouche inévitablement sur une nouvelle compression globale d'emplois, une fois la restructuration de La Chiers et d'Usinor accomplie.

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Note 1: L'ensemble sidérurgique de Longwy était composé de 3 usines: La Chiers (1600), Usinor-Longwy (7500), Cokerill-Rehon (4000). Chacune d'entre elles possédaient le processus de production complet (hauts fourneaux, aciérie, laminoirs).

 

LES FAITS AU FIL DU MOUVEMENT

 

DÉCEMBRE 1978 :
12 Dec. Annonce du plan de licenciement.
16 Dec. Création de "Radio-S.O.S.- Emploi" par la CFDT.
19 Dec. Grande manifestation à Longwy: 25 000 personnes.
Création de l'intersyndicale CGT-CFDT-FEN.
 
JANVIER 1979 :
4 Janv. Manifestation à Nancy. Affrontements près de la préfecture.
12 Janv. Grève générale. Manifestation régionale à Metz : de 60 à 80 000 personnes en Lorraine.
Vagues d'occupations:
16 Janv. La Banque de France (F.O.) .
17 Janv. La gare de Longwy (CFDT)
18 Janv. Le centre des impôts (CGT)
23 Janv. Le central téléphonique (CFDT)
24 Janv. Journée "Flammes de l'espoir". Manifestation de 15 000 enfants des écoles.
25 Janv. Grève et manifestation des lycéens: 2500 lycéens dans la rue, s'étant mobilisés de façon indépendante.
29 Janv. A l'initiative de la CGT, de la CFDT et de F.O., occupation du Comité d'entreprise de La Chiers et séquestration du directeur. Intervention de la police avec bousculade.
30 Janv. Manifestation de riposte à l'intervention policière de la veille:
première attaque du commissariat.
 
FÉVRIER 1979 :
6 Fev. Rencontre syndicats-Boulin (ministre du travail). Occupation de la sous-préfecture de Briey (CFDT).
8 Fev. Opération "coup de poing", déchargement de minerai (CFDT).
11 Fev. "Coup de poing" contre les entreprises d'intérim.
16 Fev. Grève générale-ville morte: blocage des magasins. Barrage des postes-frontières. Occupations de l'Union Métallurgique Lorraine (UML) et de la poste.
20 Fev. Relais de télévision occupé (CFDT).
22 Fev. 1ère émission de télévision "S.O.S. Emploi". L'EDF coupe le courant plusieurs fois sur ordre de la préfecture.
23 Fev. Alimentation électrique du relais rétablie par la CFDT qui investit un transformateur. Nuit du 23 au 24 Février :
- 2 heures du matin : intervention des forces de l'ordre au relais de télévision. Relais évacué. Les ouvriers de la ville, prévenus par les sirènes d'Usinor, n'ont pas eu le temps de monter jusqu'au relais. Rassemblement en ville.
- 3 heures du matin: manifestation.
- de 5 à 8 heures du matin: attaque du commissariat.
24 Fev. Manifestation régionale du PCF dans Longwy, drapeaux tricolores et costumes régionaux en tête. Pas un mot sur les événements de la nuit.
25 Fev. Manifestation de l'Intersyndicale "contre la répression" jusqu'au relais de télévision.
 
MARS 1979 :
Début Mars: Plusieurs occupations de gares: Longwy, Metz... Plusieurs trains de minerai vidés. Johnny Halliday invité par la CFDT à venir visiter les usines, un soir après un gala.
10 Mars Manifestation au Parlement de Strasbourg.
16 Mars Occupation par la CFDT de la centrale à oxigène d'Usinor
à Herserange (banlieue de Longwy).
17 Mars - Création par la CGT de sa radio "Lorraine Coeur d'Acier"
- Réunion publique de l'U.C.F.M.L. à Longwy.
23 Mars Marche sur Paris de la CGT. La CFDT de Longwy y participe finalement sous le dénominatif "Inter Longwy". 60 000 personnes à Paris. Mot d'ordre principal "Unité-Action... avec la CGT".
26 Mars Brouillage des radios par des hélicoptères.
 
AVRIL 1979 :
6 Avril Réunion de "synthèse" à Dunkerque. Annonce du plan de "suppression d'emplois" (proposition des 5 millions, mutations, pré-retraites et formations).
Fin Avril La CGT lance une grève dans une équipe d'Usinor contre les 1ers effets du plan: des mutations. Cette grève va entraîner le lock-out progressif jusqu'au 7 Mai.
 
MAI 1979 :
1er Mai - PC-CGT manifestent sur la place de Longwy-Haut.
- la CFDT harcèle toute la journée les très nombreux CRS groupés près du Commissariat.
5 Mai Réunion d'information et de soutien au foyer Sonacotra de Mont-Saint-Martin en grève des loyers depuis Septembre 1978.
7 Mai Le Lock-out à Usinor amène des syndicalistes jusqu'aux bureaux de la direction. Séquestration. Arrivée de CRS. 3000 personnes se rassemblent devant les bureaux. Long face à face tendu.
Pendant ce temps, les directeurs quittent l'usine, promettant de négocier le lendemain sur les mutations.
8 Mai Négociation... à Metz. Sur les 12 mutations, 6 sont reculées.
15 Mai Les brouillages des radios s'amplifient.
17 Mai La CGT occupe le relais de télévision contre les brouillages.
Les manifestants sont repoussés violemment par les CRS continuellement présents au relais depuis le 24 Février .
Les manifestants se regroupent en ville. La nuit: affrontements dans le centre-ville. La CGT, parallèlement, "saccage" différents lieux publics (banques, centre des impôts). C'est la première fois que des manifestants sont arrêtés: 5 arrestations dans la nuit.
22 Mai Venue de Marchais à Longwy pour un meeting régional dans le cadre des élections européennes. 7000 personnes y assistent.
25 Mai Procès des 5 arrêtés. Ils sont acquittés.
 
JUIN 1979 :
2,3,4,Juin Fête de la jeunesse du PCF.
Juin... Vague de contrôle d'identité, de perquisitions...
Fin Juin La CFDT essaye de faire renaître l'Intersyndicale.
29 Juin Faible manifestation de "l'intersyndicale".
 
ÉTÉ 1979 :
Juillet Alors qu'en Avril le patronat en attendait 200, 1500 personnes ont demandé la prime de départ volontaire de 5 millions.
4 Août Fermeture de l'usine de la Chiers. Essai symbolique de la CFDT de La Chiers de mettre le haut-fourneau en marche.
Mi-Aout La CFDT emprunte la coupe de France de football du club de Nantes.
Fin Août A propos de la Chiers :
- la CGT organise un défilé de 300 personnes, cercueil en tète.
- la CFDT rassemble devant l'usine une centaine de personnes.
 
SEPTEMBRE 1979 :
Début Septembre : " semaine d'action " timide de la CGT, quelques blocages de routes
Effets des licenciements de la sidérurgie: des entreprises de sous-traitance faute de travail, licencient ou ferment. BERTOLDI: entreprise de travaux publics ferme : 360 licenciements.
Nuit du 14 au 15 Septembre: La CGT Bertoldi bloque la nationale. Des pneus brûlent. Des ouvriers de l'entreprise bousculent, avec leur camion de levage de 80 tonnes, 4 cars de police qui en ressortiront bosselés.
15-16 Sept. Journée portes-ouvertes au Foyer Sonacotra de Mont Saint Martin.

 

LES GRANDES PERIODES DU MOUVEMENT ET LEUR SIGNIFICATION

 

DÉCEMBRE et JANVIER :

                Stupéfaction face à la condamnation à mort de toute une région en pleine vitalité, et fortement peuplée.
                Stupéfaction qui se donne d'abord dans des rassemblements, journées ville-morte opérations style "flammes de l'espoir " avec toute la jeunesse scolaire rassemblée. Ce sont des temps de riposte molle, triste, élus en tête, qui vont vite être dépassés.
                Seule, dans cette période, une initiative lycéenne se démarque: à l'appel d'un Comité Lycéen indépendant, se déroule le 25 Janvier une manifestation de 2500 jeunes du lycée d'État et du CET contre les licenciements, pour le droit de vivre, étudier et travailler au pays.
                A la suite de cette manifestation, ce Comité demande le droit de participer aux réunions de l'Intersyndicale de la ville. Droit qui lui sera sèchement refusé sur le thème: "La situation est bien assez compliquée au niveau des ouvriers. Pas besoin des lycéens". 

FIN JANVIER-DÉBUT MARS: LA COLERE CONTRE L'ÉTAT ET LES AFFRONTEMENTS DU 24 FÉVRIER :

                L'ampleur de l'attaque déplace vite le terrain de la riposte des usines à la ville entière. Tout un chacun a un membre de sa famille travaillant dans la sidérurgie. La sidérurgie anime toute la région et c'est à l'échelle de la région et de tous ceux qui y vivent que la riposte se développe : ainsi, dans la rue, se retrouvent très vite, avec les sidérurgistes, des jeunes, lycéens, chômeurs, employés, des immigrés , des femmes.
                C'est l'époque, à l'initiative de la CFDT locale, des opérations " coups de poings ".
                Elles visent d'abord les organismes patronaux (l'U.M.L.: Union Métallurgique Lorraine) à Longwy, ou la paralysie du trafic ferroviaire.
                Parce que ces opérations sont populaires, va vite s'organiser une concurrence entre CGT et CFDT pour les mener.
                Ce ne sont plus les organismes patronaux, mais tout ce qui matérialise l'État qui va être touché: occupation de la sous-préfecture de Briey le 8 Février; occupation du relais de télévision de Longwy à partir du mercredi 21 Février. Ainsi 60 000 personnes de la région pourront pendant quelques jours compléter leur programme TV par des diapositives sur la lutte et des appels à la solidarité.

La nuit du 23 au 24 Février :
                Un moment fort et un tournant. Au bout de 3 jours d'occupation du relais, 200 CRS interviennent, dans la nuit du Vendredi au Samedi 24, vers 2 heures du matin. A l'intérieur, 150 personnes environ: la CFDT Longwy. des jeunes, des éléments de la population venus passer la nuit là, ainsi que des militants dont quelques uns de l'U.C.F.M.L.
                Certains veulent résister. Le dirigeant CFDT, Robert Giovannardi, donne l'ordre de se rassembler dans la cour. Quelques instants auparavant, un coup de téléphone a été donné à Usinor, pour alerter les ouvriers et leur demander de mettre en marche la sirène de l'usine. Au relais, seuls quelques uns sont au courant de ce dispositif d'alerte. C'était la seule chose qui avait été prévue en cas d'intervention des CRS.
                Dans la cour, le commissaire somme de partir. La sortie se déroulera quelques instants plus tard, entre deux rangées de CRS, sans que les ouvriers d'Usinor aient pu arriver. En fait, on saura ensuite qu'ils ont été bloqués plus bas par d'autres CRS.
                Les occupants du relais se replient dans la ville, rejoints par les ouvriers d'Usinor. Les forces se rassemblent dans une manifestation au centre-ville. Ce sont environ 500 personnes qui vont se retrouver sur la place centrale. Que faire ? Retourner au relais ? Inutile. Les CRS ont évidemment pris soin de retirer immédiatement des éléments vitaux du relais-émetteur. La manifestation passe par Usinor d'où elle ressort précédée de 2 gros fenwicks (engin de levage) de l'usine, elle se dirige vers le commissariat qui subira l'assaut pendant trois heures.
                Cette épisode marque le développement d'une incontestable violence de masse anti-Étatique. Dans le même temps débutent les négociations entre Etat, patronat et syndicats au niveau national.
                Quel va être alors le devenir de la révolte de masse ? Quel va être le bilan de la nuit du 24 Février ?
                - Ou il sert d'appui et d'incitation à ce que le mouvement constitue son autonomie, ses propres mots d'ordre, sa plate-forme de négociations et son plan de bataille, et alors la révolte de masse aura ouvert une capacité effective de lutte ouvrière et populaire.
                - Ou, s'il n'en est rien, elle n'aura servi que de faire-valoir dans le jeu propre des syndicats dans leur négociation avec l'État. 

MARS-AVRIL: LA MANIFESTATION CGT DU 23 MARS ET LES HÉSITATIONS FACE AUX NÉGOCIATIONS :
                Les limites de I'explosion violente de la révolte apparaissent dès le lendemain des affrontements du 24 Février. Le PCF et la CGT reprennent l'initiative en proposant la marche du 23 Mars à Paris.
                Immédiatement, les murs de Longwy sont recouverts de l'appel: " Tous à Paris le 23 Mars" signés PCF ou CGT. La CFDT, au départ, s'oppose à cette manifestation, sans rien proposer d'autre que de lutter à la base, au pays, entre sidérurgistes. Signe de faiblesse. Elle n'a aucune proposition à faire au mouvement.

La manifestation du 23 Mars à Paris :
                C'est un défilé pour la CGT, où le mot d'ordre le plus scandé sera " Unité-Action avec ta CGT". Badges CGT. Déploiement CGT. Rien n'est dit de particulier aux questions de Longwy: licenciements de sidérurgistes, femmes sans travail depuis longtemps, immigrés menacés d'expulsion, lycéens futurs chômeurs. Grande opération publicitaire pour le PC et la CGT. cette marche n'a regroupé du monde que parce que c'était la seule initiative d'ampleur nationale proposée.
                Pendant ce temps. État, patronat et syndicats négocient. Les résultats tombent le 6 Avril. A sa façon, Etchegaray, PDG d'Usinor. applique le mot d'ordre de l'Intersyndicale :
                - pas de licenciements: que des suppressions d'emplois (pour 79. 40 mises en formation, 190 départs " volontaires" avec 5 millions, 800 mutations, 1500 préretraites).
                - maintien des installations : la sidérurgie continuera de vivre à Longwy. Avec 3 usines, on en fera une. (Voir notre analyse détaillée des négociations dans le tract N°4).
                Les semaines suivantes vont être celles de l'hésitation et du doute: la conscience que l'État ne cédera pas facilement se développe chez les sidérurgistes et dans la population.
                Ce temps creux d'un mois va être le temps d'évaluer la solidité de l'adversaire et aussi de l'inquiétude sur les moyens réels dont disposent les ouvriers et le peuple de Longwy pour le faire reculer. 

MAI-JUIN: SURSAUT DANS LES USINES ET DÉFAITISME.                

                Le 1er Mai. voit réapparaître les échauffourées entre CFDT et CRS près du commissariat, pendant que se déroule, bien plus loin, le meeting syndical de la CGT (environ un millier de personnes).
Les affrontements près du commissariat ce jour-là, n'ont pas du tout le même caractère de masse que les précédents. Les militants CFDT s'y retrouvent seuls.
                Quelques jours avant, une grève des aciéristes avait éclaté à Usinor, à l'annonce de la suppression d'une équipe et de la mutation d'une douzaine d'ouvriers. Ce sont les premiers effets concrets du plan de restructuration d'Etchegaray. Cette grève amène le lock-out progressif de toute l'usine.
                Grève aux aspects contradictoires: elle touche le problème du moment (les mutations), mais menée par la CGT dans la forme de l'occupation stérile d'Usinor, elle est vouée à l'échec.
                Un élément nouveau et intéressant intervient cependant le 7 Mai.
Ce jour-là. la CFDT jusque là largement extérieure à la grève des aciéristes réussit à provoquer la séquestration de la direction d'Usinor. Les CRS arrivent et. peu de temps après. 3000 manifestants ouvriers mais aussi de la population, prévenus par voitures-sonos et par les radios, se retrouvent face à eux devant les bureaux d'Usinor. La tension monte d'autant plus que le célèbre Porcu. député PCF de Longwy. s'en mêle, s'interpose, crie à la provocation et négocie le recul des CRS contre le départ des patrons par une porte dérobée. Concentrés dans leur face à face avec les CRS, les manifestants en oublient l'enjeu essentiel: l'arrêt des mutations, objectif de la séquestration.
                Ce jour-là. les questions de l'usine auraient incontestablement rassemblé la population. Les vrais problèmes étaient abordés. Mais le thème " CRS. hors de Longwy " prit le dessus et recouvrit l'objectif central : les négociations se poursuivirent le lendemain à Metz ! Sur les 12 mutations 6 seront repoussées provisoirement.
                Quelques jours après, dans la nuit du 17 au 18 Mai, de nouveaux affrontements violents éclatent. Au départ, le brouillage des radios CGT et CFDT provoque une manifestation principalement cégétiste au Bois de Châ, lieu du brouillage et du relais de télévision. Elle se heurte au mur des CRS. C'est ensuite le rassemblement en ville et des actes gratuits de saccages de l'hôtel des impôts, de banques et de vitrines de magasins par de jeunes cégétistes. Violences assez impopulaires.
                Un combat de rue s'improvise dans la nuit. Les 1500 personnes du départ se dispersent. Beaucoup prennent peur devant le caractère inorganisé des affrontements. Le local CFDT est encerclé, canardé par les CRS. Cette nuit-là. 5 manifestants sont interpellés et inculpés. C'est la première fois aussi que les CRS prennent l'offensive.
                Le procès des inculpés à Briey se conclura par un non-lieu une semaine après.
                Parallèlement à ce sursaut de révolte, le défaitisme et le découragement montent.
                Sur les véritables questions (primes de départ volontaire avec 5 millions, mutations, retraites, formation), aucune directive claire n'est donnée, La révolte est désormais principalement alimentée par la présence des CRS dans la ville ou devant l'usine.
                D'où cette situation paradoxale où la présence des CRS rassemble un millier de gens dans la rue pendant que des ouvriers de plus en plus nombreux acceptent la prime de 5 millions. 

LA PHASE ACTUELLE : DEFAITE ET TEMPS DU BILAN:
                Personne ne peut masquer la défaite : La Chiers fermée, la restructuration commencée à Usinor, 1500 ouvriers partis avec la prime de 5 millions, des jeunes qui quittent le pays. Quelques barouds d'honneur (tentatives de la CFDT de bloquer la mise en sommeil définitive des hauts-fourneaux de La Chiers. début Août). Mais dans 1es usines sidérurgiques, on accuse le coup. Il ne s'y passe rien.
                Ceci ne veut pas dire que la bataille soit terminée: les licenciements vont se poursuivre dans les entreprises sous-traitantes, la question de l'usine de Rehon n'est pas encore réglée.
                Mais ici et ailleurs, il est impossible de ne pas tenir compte des batailles menées a Longwy depuis Janvier et de leur échec.
                Au terme de ces huit mois, il est impossible de réfléchir la lutte contre les licenciements sans en tenir compte, comme si la défaite, la récupération globale du PCF, l'impuissance de la CFDT et l'engagement des révolutionnaires n'avaient pas eut lieu, à tout le moins, il ne faut pas que Longwy soit une leçon perdue. D'où l'urgence du bilan.

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DE L'ACTION, DE L'INITIATIVE, MAIS PAS DE NOUVEAUTÉ FONDAMENTALE A LONGWY.
                Longwy a mobilisé l'attention, l'intérêt, pour deux raisons essentielles :
                - c'est d'abord un des rares exemples où la lutte contre les licenciements s'est accompagnée d'une mobilisation populaire : l'action ne se place plus seulement dans l'usine mais aussi dans la ville, ce ne sont pas seulement les sidérurgistes qui interviennent, mais aussi les jeunes, les chômeurs, les ouvriers et employés d'autres entreprises.
                - c'est ensuite la violence. L'attaque répétée du commissariat, les opérations coup de poing, les heurts fréquents avec les CRS, ont fait la une d'un temps de l'actualité et la réputation de Longwy.
                Cet intérêt est en partie justifié : il s'est passé à Longwy des choses qui ne se sont pas passées ailleurs. Cependant, les apparences sont parfois trompeuses. Regardons-y de plus près.

a) SUR LA MOBILISATION POPULAIRE 

                Longwy a une géographie particulière. La géographie industrielle et urbaine de la première époque du capitalisme : les usines sidérurgiques très étendues organisent la ville, ses quartiers, ses jardins, ses collines boisées. Les autres industries, les commerces, les écoles, toute la vie sociale - il y a encore peu régentée par les maîtres de forge - en dépendent. Aussi, quand l'État annonce la suppression de 6000 emplois, il n'y a pas de familles, d'autres usines, de commerces, d'écoles, qui ne soient pas touchées.
                La mobilisation populaire s'organise plus facilement et sur un terrain qui est d'emblée la ville.
                En mettant en place le nouvel urbanisme des années 60, l'impérialisme savait bien ce qu'il faisait. Fos, Flins .... des zones d'habitat concentrées et séparées, les usines au dehors de la ville voire aux champs, des temps domicile-travail très longs. A Longwy, comme tout est enchevêtré, même s'il y a de la distance, il y a une plus grande proximité dans les rapports sociaux et, partant de là, une libération plus immédiate de l'explosion populaire. Mais la médaille a son revers. D'une certaine manière, la formation spontanée du camp populaire contre les licenciements ne doit pas dispenser pour autant de travailler à son unité politique, c'est-à-dire à sa véritable force. Le poids de la classe ouvrière est tellement fort qu'il entraîne, par un phénomène de masse, le reste de la population : où iraient donc les jeunes des écoles, que feraient les femmes de la ville ? à qui vendraient les commerçants ? ...
                Toute la ville, au départ, est engagée. Dans de grandes démonstrations de masse d'abord, dans le soutien largement partagé aux actions violentes ensuite.
                Mais cette unité spontanée, cet élan populaire ne vont pas résister aux temps et contre-offensives de l'État. On s'apercevra que les sidérurgistes sont eux-mêmes divisés au regard des formes d'action, des objectifs, que les autres fractions du peuple ( les jeunes par exemple et leur proposition de participer à l'Intersyndicale ) ont un rapport épisodique, ponctuel à la lutte et ne sont pas vraiment engagés dans la bataille.
                D'où vient cette faiblesse interne au camp ouvrier et populaire ?
                Parce que l'essentiel n'a pas été tenu : l'émergence d'un point de vue de classe des ouvriers sidérurgistes face aux modalités concrètes du plan de l'État et d'Usinor.
                Notre expérience de révolutionnaires organisés nous montre que chaque fois qu'une victoire a été remportée, c'est parce qu'une résistance prolongée avait pu s'organiser, qu'elle était structurée et que celle-ci n'est possible que structurée par la conscience politique, la compréhension de ce qu'il faut faire de la politique sur ses propres forces et être autonome. Cette résistance, elle est nécessaire non parce qu'elle permettrait de gagner du temps, mais parce qu'elle permet de trouver la véritable alternative qui unifie le peuple et lui donne la force nécessaire pour remporter la victoire.
                Nous qui sommes présents à Longwy, c'était du point de vue de cette expérience pour l'apporter en appui que nous pouvons parler. 
                On nous dira : il y avait un mot d'ordre : " Aucun licenciement, pas un boulon démonté, maintien de la sidérurgie à Longwy" ; il y avait une tactique : "percuter I'État" au moyen d'opérations coup de poings et de manifestations violentes, il y avait enfin la section syndicale CFDT comme point fixe organisé.
                Parlons du mot d'ordre :
                Il se veut sans concessions et sans compromissions. Mais quelle réalité a-t-il ? Quel objectif fixe-t-il au mouvement ? Nous avons toujours pensé que, sous sa dureté apparente, ce slogan pouvait recouvrir les plus grandes capitulations (voir nos tracts en annexe). A preuve, le plan d'Etchegaray, le PDG d'Usinor, en est une application ironique :
                - aucun licenciement : d'accord, il n'y aura que des suppressions d'emploi : mutations, retraites, formations, départs "volontaires" à 50 000 F.
                - pas un boulon démonté : maintien des installations pour l'instant (sauf l'usine de la Chiers).
                - la sidérurgie vivra à Longwy : avec 3 usines, on va en traficoter une seule, à partir des unités les plus compétitives.
                        Ce mot d'ordre n'avait pas de réalité par rapport à la force du mouvement et les objectifs qu'il pouvait s'assigner. Car de deux choses, l'une :
- ou bien le mouvement est d'une grande force et alors ce mot d'ordre est en retrait de cette force. Il doit alors réfléchir à inclure des transformations sur le travail, dénoncer l'intérim, l'inégalité des droits des immigrés.
                - ou bien, et c'était le cas, le mouvement n'avait pas de force et alors, c'est un mauvais mot d'ordre car il fait silence sur la tactique du mouvement, il ne correspond pas à sa capacité effective de résistance et à l'état réel des rapports de force. Le mouvement n'avait pas de plateforme, pas de mots d'ordre point par point. Dans ces conditions, le mot d'ordre général fonctionnait de manière symbolique.
                A notre point de vue, les choses se sont jouées sur deux batailles tactiques :
            1 - les négociations usine par usine :
                Elles ont été un des premiers points de la contre-offensive étatique, précédant même le plan social.
                A partir de ce moment, la révolte des sidérurgistes de Denain, des Ardennes et de Longwy s'est trouvée divisée et prisonnière de propositions particulières. On entrait dans la logique du capital, et dans la logique CGT-CFDT, rendue inévitable par l'inexistence d'un plan de combat ouvrier autonome. Personne ne s'est battu pour refuser ces négociations usine par usine. D'ailleurs, de manière générale, le mouvement n'a jamais été capable de peser sur les termes de la négociations, faute d'une organisation propre, porteuse de sa plateforme de classe, y participant directement. Il n'y a jamais de bonnes négociations par syndicat interposé.

            2 - la prime de 5 millions, mutations, mises à la retraite :
c'est-à-dire la façon dont le patron a divisé.
                Combattre les manœuvres patronales, c'était affirmer le droit au travail au pays, c'était mettre au point une riposte qui bloque point par point ces propositions. C'était prendre en mains les questions réelles du mouvement. On peut en donner plusieurs exemples :
                - sur les mutations : la révolte, le rassemblement devant Usinor le 7 Mai (voir la chronologie) ouvrait certainement la voie à une mobilisation ouvrière et populaire contre les cas concrets de mutation apparaissant jour après jour à partir de Mai.
                - sur les immigrés : les immigrés étaient confrontés à un triple problème : menace de licenciement de l'usine, menace d'expulsion de leur logement pour les résidents du foyer Sonacotra de Mont Saint Martin (ayant rejoint depuis un an la grève nationale des foyers Sonacotra sur la plateforme du Comité de Coordination), menace de non-renouvellement de leurs papiers.
                Se pencher sur la question réelle du sort des immigrés à Longwy devait être autre chose que de leur dire de se joindre aux manifestations, autre chose que de leur proposer un coup de main technique ( tirage de tracts, surveillance autour du foyer ). Ce devait être leur donner une place particulière dans les mobilisations, dans les mots d'ordre, dans la constitution d'une plateforme. C'est dans ce sens que nous avons soutenu une réunion d'information au foyer en Mai (voir tract n°5 : Sonacotra, Sidérurgie, même combat).
                Ce qu'on peut dire, c'est que la première étape d'une bataille prolongée passait indiscutablement par la constitution d'une force ouvrière contre les propositions patronales. Par exemple, un engagement des sidérurgistes à respecter le refus de ces propositions, engagement dégagé et confirmé périodiquement en assemblées générales.
                Sous réserve de cette unité, il était alors possible de mettre toute la ville dans le coup en organisant une résistance civile prolongée : grève des notes d'EDF, de gaz, de loyers... Avec une politique de diffusion active de cette résistance par une mobilisation de la jeunesse, des immigrés, des quartiers. Autour du développement de cette résistance aurait pu s'élaborer petit à petit une plateforme d'ensemble du mouvement incluant les objectifs sur les licenciements, mais aussi d'autres mots d'ordre de classe : les aspirations de la jeunesse, les dénonciations du système de l'intérim... Cette plateforme discutée, précisée, aurait donné un contenu vivant et mobilisateur au mot d'ordre : " Droit de travailler et vivre au pays ", qui, faute de cela, est resté à l'état de symbole. 

b - SUR LA VIOLENCE

                La nouveauté viendrait-elle de la violence ? La violence en 68, c'était en soi une marque de résistance par rapport à la société impérialiste française. Et la violence à Longwy ?
                Elle traduit d'abord une très grande tension, une très grande colère populaire, une forte détermination. En cela, elle est largement partagée. Sa pratique est de masse : jeunes, vieux, hommes, femmes, sidérurgistes, autres ouvriers, employés ... Elle reflète aussi la particularité du terrain. A Longwy, les flics sont en terre étrangère : pas d'appareil d'État, pas de caserne . Tout se cristallise par conséquent autour de la bâtisse du commissariat, plantée dans un milieu peu familier aux CRS : de grandes usines où il ne fait pas bon se risquer, zone idéale de repli, des tas de zones d'ombre (bois, jardins escarpés), des ramifications de chemins de fer. Si l'on ajoute que les flics ont pris initialement comme tactique de se retirer de la ville, de ne pas engager de grosses forces, on comprend comment la force populaire a pu se libérer violemment et avoir quelques succès tactiques sur le terrain.
                Dans un premier temps, elle a été le porte parole de la colère et dans un deuxième temps, toute entière tournée vers la présence des flics et déconnectée des questions réelles. La recherche de l'affrontement devient la seule politique réellement suivie, dans l'espoir de redonner au mouvement un souffle qu'il n'a plus. C'est notamment l'épisode du 1er Mai où la CFDT bloque le commissariat. C'est aussi cela le 7 Mai, alors qu'il existait là un objectif réel à la mobilisation: les mutations; c'est encore cela dans la nuit du 17 au 18 Mai (Voir chronologie).
                La présence des flics devient la raison d'être de la mobilisation, elle fixe les énergies. Ce type de violence, manifestation de diversion plus que de force, a fini par lasser, ou par faire peur (le 17 Mai), et n'intéresse plus grand monde.
                Nous sommes pour la violence de masse, mais la violence ne permettra jamais de faire l'économie de la politique. Sans politique, la violence n'est qu'un rideau de fumée au profit, en fin de compte, du PCF et de la CGT. Elle devient un moyen publicitaire de faire valoir leur propre politique, d'alerter l'opinion sur les discours démagogiques de Marchais à propos de la sidérurgie nationale. Quand elle n'est pas tout simplement une carte dans la manche des syndicats pour obtenir de ne pas perdre complètement la face dans les couloirs ministériels.
                Le seul moment qui fait un peu exception, c'est l'occupation du relais de télévision le 23 Février. Il y a là une contre-offensive et un pouvoir populaire qui se manifestent et qui sont à défendre. C'est dans les affrontements de cette nuit-là qu'il y aura le plus grand enthousiasme la plus forte participation de masse. Mais la violence reste largement inorganisé, en tout cas impréparée à tenir le relais. Longwy montre qu'il faut cesser d'identifier lutte de classes et violence, de faire de la violence le signe unique de reconnaissance d'une lutte de classe.

 

LONGWY : un exemple de ce que veulent aujourd'hui le PCF et la CGT face au mouvement de masse

 

                Le PCF et la CGT ont été des acteurs importants voire centraux de la situation à Longwy, même s'ils connurent des moments de flottement lorsque la révolte vint à dépasser le rituel classique des délégations-d'élus-aux-pouvoirs-publics et des manifestations-parades, disons de fin Janvier à début Mars: premières opérations coup de poing, attaques de commissariat, occupations de la sous-préfecture de Briey et du relais de télévision...
                Malgré la publicité faite autour d'elles, les opérations de La CFDT ne doivent pas faire illusion. D'une part, le PCF et la CGT ont été les interlocuteurs privilégiés de l'État. D'autre part, ils ont orienté de façon décisive non pas nécessairement tel ou tel moment de la lutte, mais le cours général de la tentative de résistance aux licenciements qui s'est terminé par la débâcle que l'on sait.
                C'est essentiellement après les journées du 23-24-25 Février (occupation du relais T.V. et attaque de masse du commissariat) que le PCF précise son dispositif politique. Confronté à une forte colère de masse, il ne pouvait se résoudre à n'apparaître que sous le visage du député Porcu calmant les foules dans les moments chauds face aux CRS.
                A notre sens, au travers de Longwy, on peut dire que, face aux luttes de masse, le dispositif politique du PCF articule 3 éléments:
              - son projet de capitalisme d'État
              - l'existence de la révolte de masse
             - la figure qu'il prétend se donner de "seul parti d'opposition".

1) LE P.C.F., LE CAPITALISME D'ÉTAT ET L'ACIER:

                Quel est, en effet, le programme du PCF sur la sidérurgie: Nationalisation des groupes sidérurgiques et de leurs filiales, maintien voire extension de la capacité productive par modernisations des installations anciennes (à Longwy, construction d'une aciérie à oxygène à Usinor). Il est relayé en cela par la CGT dont les affiches proclament l'État gaspilleur de fonds: "700 milliards pour liquider la sidérurgie, 200 millions d'investissements pour la sauver". Confrontation absurde entre 2 chiffres qui ne sont pas comparables. 700 milliards c'est le prix politique à payer pour acheter la liquidation de la région (convention sociale). 200 millions, c'est le calcul idiot des frais de modernisation des installations sans tenir compte des contraintes du marché impérialiste de l'acier et de la possibilité de vendre.
                Accusant l'État Giscardien de brader l'industrie française en faveur de celle de l'Allemagne, le PCF n'hésite pas à faire propagande pour une capacité française de 31 millions de tonnes ( la production record en France a été de 27 millions de tonnes en 1974). Auquel cas, il deviendrait nécessaire de réembaucher !
                Mais comment écouler cet acier ? En satisfaisant les besoin de consommation des gros utilisateurs d'acier, automobile, appareils ménagers, équipement collectifs... Bref en relançant la consommation populaire. Argument de propagande démagogique et irréaliste dans son application. On sait bien que la production d'acier n'est pas principalement destinées à la consommation intérieure privée ou publique mais par l'industrie des biens d'équipement (machine-outils...), l'industrie d'armement et l'exportation.
                En réalité, pour être crédible, le programme du PCF suppose une autre logique économique centrée sur l'Étatisation de la production et la relance par un programme d'armement. Il exige donc que le PCF soit au pouvoir, par un moyen ou par un autre, et qu'il puisse développer son projet de société, un capitalisme bureaucratique d'État où celui-ci régimente toute la production et la vie sociale.
                Or aujourd'hui, le PCF n'a pas les moyens de ce pouvoir ci donc de son programme. Le marchepied précédent -l'Union de la Gauche - s'est effondré et le suivant n'est pas encore apparu.
                Alors quels rapports peut-il y avoir entre le programme du PCF et les intérêts des sidérurgistes, de leur famille, du peuple de Longwy ? Aucun immédiatement, Et d'ailleurs, personne n'a jamais manifesté en disant nous voulons être nationalisé, nous voulons une gestion démocratique...
                Le programme du PCF n'est donc pas, en tant que tel, un programme de luttes, d'objectifs immédiats. Comment alors s'en sort-il ?

2) LES REVENDICATIONS DE MASSE ET LE P.C.F. :

                En période de crise, et tout particulièrement à Longwy, ces revendications sont au nombre de 3 : garantie d'emploi, salaire, condition de travail.
                Là-dessus le programme du PCF ne définit aucun objectif concret de mobilisation, aucune plate-forme de combat.
                D'autre part, le PCF n'a pas de politique de soutien du mouvement, à sa dynamique de masse propre. Tout au contraire, il s'efforce de canaliser la vague de révolte ouvrière et populaire née de la colère en cloisonnant la ville et en se faisant le gardien des divisions sociales. Le PCF n'a jamais fait ni soutenu la moindre proposition d'unifier les combats dispersés des ouvriers de la Chiers et d'Usinor, d'alerter à temps ceux de Rehon, de répondre aux aspirations à une mobilisation populaire de la ville et de la région. Il a, au contraire, constamment cherché à désamorcer tout ce qui, dans la révolte, allait dans le sens de la formation d'un camp ouvrier et populaire, (exemple le 23-24 Février et les 7 et 8 Mai).
                Alors, que fait le PCF s'il ne peut mobiliser autour de son programme et du renversement du gouvernement (Barre à la porte) et s'il ne veut pas soutenir le mouvement dans sa dynamique propre ?
                Dans cette période à la fois de crise, d'accentuation considérable de la politique anti-populaire Giscardienne et de bilan de l'échec de l'Union de la gauche, période où les tactique politiques sont à redessiner, le PCF n'a guère le choix. Il lui faut se reconstituer une base de masse et une identité politique populaire qui ne peut plus être celle portée par le programme commun.
                L'exemple de Longwy est éclairant à ce sujet. Que commence à dire le PCF ? "Vous avez raison de vous révolter, vous avez raison de ne croire qu'en la lutte face à ce gouvernement sans pitié". Il se déclare pour la révolte dans toutes ses composantes, il est pour les mouvements sociaux, sachant bien que la révolte brute, dispersée, ne donne jamais rien d'elle-même.
                Toute son opération consiste alors à lui désigner comme cible le pouvoir Giscardien, de la réduire à une dénonciation coléreuse du Giscardisme, terrain où le PCF va pouvoir se présenter comme la chambre d'écho et l'instrument politique nécessaire par où toute révolte doit passer.
Le PCF n'a pas aujourd'hui une tactique exclusivement parlementaire face au mouvement de masse, comme au temps du programme commun. C'est-à-dire il ne dit pas seulement: "votez pour nous". Il n'est pas mécontent au contraire du caractère extra-parlementaire que prennent souvent les opérations coups de poings, actions illégales, violentes... Les approuver, s'en réclamer, voire les organiser, c'est un moyen pour lui de travailler à son audience de masse et de conquérir dans l'opinion le rôle de seul parti d'opposition au gouvernement actuel, en attendant le jour où cette nouvelle sève populaire lui permettra de négocier un compromis parlementaire plus avantageux avec d'autres forces politiques bourgeoises.
                Ainsi, pour reconstituer une dynamique parlementaire, le PCF est aujourd'hui contraint de jouer sur l'extra-parlementaire, les mouvements sociaux, d'en faire sa base d'appui et de différence par rapport au P.S.
                Cette nouvelle tactique du PCF rend par conséquent plus complexe le rapport des masses à lui.
                De quoi est fait ce rapport aujourd'hui ?
                De situations de résistance, de critique de la politique du PCF par les gens. A Longwy, elles ont joué sur deux points principaux. Résistance au chauvinisme d'abord. Malgré ses efforts les plus odieux, sa campagne n'est pas passée. Le chauvinisme n'est jamais devenu une revendication de masse. Choses vues: rappel des morts de 1870-14/18-39/45 pour s'opposer à "l'invasion du minerai allemand" ; 2 immigrés CGT tenant une banderole " Giscard-Barre vendus à l'étranger " dans une journée ville-morte; déchargement de minerai étranger; piquets favoris aux frontières.
                Résistance aussi à sa volonté de calomnier, de vilipender tous les affrontements et les formes de révolte qui n'étaient pas sous son contrôle: " éléments extérieurs ", "provocateurs du pouvoir"... Le PCF n'a pas réussi à imposer ces images dans l'opinion à Longwy, surtout aux moments les plus chauds, où on a par contre beaucoup entendu "Porcu-vendu, Porcu démission, Porcu au couvent".
                Résistance des masses au PCF, soit, mais aussi situations de dépendance, de suivisme relatifs qu'il nous faut comprendre.
                - Le PCF leur présente d'abord l'avantage de proposer son programme oppositionnel d'apparence radicale: le PCF, on ne sait pas exactement ce qu'il veut, on peut même suspecter ses objectifs, mais on ne peut pas le critiquer de n'être pas contre le gouvernement Giscard et de le montrer constamment avec éclat. Sur ce plan, tandis que le PCF est radicalement oppositionnel, le PS est radicalement nul. En cultivant cette caractéristique, le PCF rencontre la traditionnelle modalité d'opposition à l'État chez les ouvriers français, considérablement renforcée ici par l'attaque contre la sidérurgie Lorraine.

L'ultra-chauvinisme du P.C.F.
(Photo UCFML)

                C'est tout à fait le cas des 6000 personnes de Longwy venues manifester à Paris le 23 Mars. Sceptiques sur l'issue de ce type de journée ils y ont néanmoins participé car l'appel du PCF et de la CGT leur offrait l'occasion d'un rassemblement central contre l'État.
                Il ne fait pas de doute que le PCF va travailler dans les prochains mois dans cette voie, à renforcer cette image de lui-même, d'autant qu' elle lui permet de masquer le vide complet actuel de son alternative de pouvoir et de contrebalancer le caractère en fin de compte parlementaire de sa stratégie à moyen terme (comme tous les partis bourgeois. Marchais travaille bel et bien pour les présidentielles).
                - Le PCF. ensuite, cultive la faiblesse politique des masses. C'est pour lui une règle: délégation de pouvoir, culte des experts, chauvinisme, corporatisme, hiérarchisation, cloisonnement des usines entre elles...
                Sa propagande n'est que basse démagogie sur les tendance ouvrières spontanées, qui ne manquent pas de se développer dans une société impérialiste. Sa défense de la sidérurgie en est un excellent exemple. Pour justifier ses objectifs irréalistes de production d'acier, il est ainsi obligé de définir un modèle de consommation et de vie typique du paradis impérialiste perdu : des voitures partout, des appareils ménagers, des ZUP, le nucléaire, le Concorde, le France, et tout le non-dit: les chars, les canons et les avions de guerre.
                Habitués à vivre dans une société impérialiste, les ouvrier français en subissent aujourd'hui durement la crise. Face aux licenciements et à la vie chère, le PCF ne cherche nullement à forger la conscience d'abattre la nature impérialiste de la société française, mais à projeter chez les ouvriers français la possibilité d'une société impérialiste sans crise avec le PCF à sa tête.
                Il entretient ainsi les sidérurgistes dans l'irréalité la plus complète: "Il est possible de développer la production de l'acier, l'emploi et les salaires". Irréalité qui se redouble d'humeur guerrière envers l'Allemagne de l'Ouest.
                Cette propagande a un but bien précis: emporter l'adhésion des masses à une politique Étatique fantôme et symbolique, dans l'état actuel des choses. A Longwy et ailleurs, le PCF n'a ni tactique du mouvement, ni la capacité de renverser Giscard-Barre. Incapable d'alternative, il ne lui reste plus qu'une chose: faire vivre le fantôme, aux yeux des masses, c'est-à-dire la politique et le programme qu'il aurait s'il avait le pouvoir et qu'il veut d'autant plus en opposition radicale à Barre qu'il n'est pas prête de les appliquer.
                Comme un fantôme ne peut qu'être fantôme, les gens qui entrent dans cette propagande n'ont aucune capacité d'attaquer dans la réalité l'État, de se forger leur plate-forme de combat et des moyens de l'appliquer.
                Ainsi, à Longwy, des objectifs, de plate-forme et de moyens organisés de les réaliser, il n'y en a pas eu. Il y a eu le discours grandiloquent du PCF comme bruit de fond et l'impuissance à contrer les effets réels du plan de liquidation comme réalité.
                Mais le discours du PCF n'a pas pour fonction de transformer la réalité. Les intérêts des ouvriers de Longwy, en dernier ressort, il s'en fout et il les sait condamnés. Ce qui l'intéresse en faisant vivre son fantôme de politique, c'est nullement d'empêcher le plan mais de faire adhérer les gens à son appareil. Il criera d'autant plus fort et plus haut, voire en bluffant, qu'il couvrira aux yeux des masses son inefficacité qu'il sait totale sur le terrain.
                Après tout, le PCF a un maniement réaliste et sans merci de cette réalité politique, à savoir que l'appareil est essentiel.
                Mais cette tactique ne peut tenir qu'à une condition: que le mouvement de masse ne se libère pas de sa zone d'influence politique et qu'il y reste confiné dans l'impuissance et la fureur. C'est pourquoi le PCF ne supporte pas et réprime toute tentative d'organisation autonome. Tout ce qui est en dehors de lui n'est qu'ennemi. Le droit à la différence idéologique: il ne connaît pas. L'accepter reviendrait pour lui à détruire la tutelle qu'il prétend imposer aux gens et à finir comme un haricot sec échoué sur la plage.

3) LE COMPORTEMENT DE LA C.G.T. A LONGWY :
                Le PCF et la CGT offrent d'eux-mêmes aujourd'hui le visage d'une forte unité. Marchais n'hésite pas à qualifier la CGT de "seule organisation revendicative de classe" et à trouver publiquement légitime qu'elle se tourne, dans ces moments difficiles, vers le "seul parti de classe : le PCF". L'objectif politique du PCF et de la CGT est bien entendu le même, mais les deux appareils ne sauraient être confondus: il y a division des tâches entre les deux, division dans laquelle la CGT occupe un rôle particulier dans le rapport à la révolte de masse.
                Ainsi à Longwy jusqu'à la mi-Février, le schéma est plutôt classique: le PCF occupe le terrain des élus, des conseils généraux, des mairies et la CGT encadre les processions, se faisant souvent accuser d'être le bras répressif du PCF dans la classe ouvrière contre les coups de colère. Des jeunes attirés par le côté spectaculaire des actions de la CFDT parlent de quitter la CGT si cela ne change pas.
                On voit alors la CGT transformer son jeu. D'abord en se lançant dans des opérations coups de poings, en s'engageant dans certains affrontements avec comme fer de lance sa commission jeunes, puis en reprenant elle-même l'initiative sur le terrain des usines après le 23 Mars. Initiative qui culmine dans la grève des aciériste contre les mutations à Usinor.
                Dans cette période, son jeu est double. Elle cherche d'abord à se rendre beaucoup plus intérieure à la révolte, à s'attirer la sympathie des jeunes en poussant à la violence sur le terrain sans jamais cependant la revendiquer publiquement (saccage de l'UML le 24 Février et des banques le 17 Mai). Elle participe alors à cette agitation fébrile qu'elle sait aveugle.
                Entre aussi dans cette tentative l'installation de la radio CGT "Lorraine Coeur d'Acier". La CGT a fort bien senti qu'il lui fallait griller la radio rivale "S.O.S. Emploi", liée à la CFDT. Elle y a mis la puissance de l'émetteur, 2 journalistes professionnels et a su habilement donner la parole à toutes sortes de gens: féministes, anti-nucléaires, trotskystes... La CGT se dépouillait de son image sectaire, condition impérieuse pour que sa radio soit écoutée, tout en se faisant l'organe de large diffusion de ses thèses.

                De l'autre côté, elle verrouille les usines et la pénétration possible de la colère populaire vers celles-ci. Les usines resteront calmes, séparées de l'agitation urbaine et lorsque celle-ci retombe fin avril, elle se permet d'organiser la grève des aciéristes dans une forme qui la voue à l'échec : l'occupation morne des installations par les sidérurgistes.
                Cependant, à cette même époque, il y a toute une effervescence dans les usines: coups contre les contremaîtres, tension dans les ateliers. La CGT va s'efforcer de contenir cette agitation, sa grande peur ayant été pendant tout le mouvement, que les usines deviennent "zones libérées", "zones ouvertes" sous la pression des ouvriers eux-mêmes.
                Tentative de s'intégrer à l'agitation de rue, verrouillage des usines, telle a été la tactique de la CGT, faite à la fois du constat de la révolte et de la volonté d'en avoir le contrôle.

                On voit alors réapparaître le PCF dans l'image plus flatteuse du parrain avisé de la révolte. Marchais débarque le 22 Mai pour rafler les bénéfices politiques de l'agitation, le PCF organise sa fête de la jeunesse début Juin... Début de l'après XXIIIème congrès et de la nouvelle tactique du PCF: "agitation à la base" que la CGT est chargée tout à la fois d'entretenir et de rendre stérile, présentation du PCF comme le débouché politique obligé du mouvement, comme la condition de son efficacité future. 

CRITIQUES DES JUSTIFICATIONS A L'ENGAGEMENT SYNDICAL CFDT

                Nous avons souvent discuté avec les militants CFDT de Longwy, fait des choses ensemble et eu l'occasion d'une réunion particulière avec eux. D'accord sur un certain nombre de critiques que nous faisions de la situation, ils ont cependant présenté un ensemble de divergences concernant principalement la question de l'engagement dans la CFDT.
                Ces militants étant représentatifs d'un certain courant, nous pensons nécessaire de reprendre ici la critique détaillée des justifications qu'ils ont apportées à leur militantisme CFDT.
                Cinq arguments principaux ont été apportés :                
                l. "Il faut voir où en sont Les gens dans les usines, le contact avec le syndicat, c'est le premier pas de leur prise de conscience.
Par conséquent, si d'emblée vous critiquez le syndicalisme. les gens ne peuvent pas vous comprendre".
                2. "C'est pas dans leur nature que les syndicats sont aujourd'hui réactionnaires, mais dans leur direction, leur appareil :
Il y a une possibilité de les investir de l'intérieur. Le pouvoir de Maire n'a tenu qu'à un cheveu au dernier congrès de La CFDT à Brest. Il faut retrouver un syndicalisme révolutionnaire qui conteste l'Etat, la société, le capitalisme".
                3. "Dans une lutte comme celle de Longwy, les intérêts des ouvriers, des gens sont les mêmes. Et pourtant il y a division syndicale. Les gens ne le comprennent pas. Il faut retrouver cette unité, condition d'une vaste mobilisation, et en particulier la retrouver contre ces partis qui placent leur intérêt propre en dessus des intérêts des gens d'ici".
                4. "Le travail de la politique révolutionnaire des partis n'a pas été fait, d'accord, mais nous, on a fait le notre. II est des choses qu'on ne peut pas assumer en tant que syndicat".
                5. "Il n'est pas contradictoire d'être dans les syndicats et de travailler à un parti révolutionnaire. Les révolutionnaires ont aussi leur place dans les syndicats".
                Ces justifications reposent sur une idée simple et fortement répandue depuis l'adoption de la charte d'Amiens (1906) par le mouvement syndical : la distinction entre luttes revendicatives et luttes politiques et la préservation des syndicats de l'influence des partis.

                Ainsi, la première :
                " le syndicalisme, premier pas de la conscience ouvrière "

                Nous ne sommes plus au XIXème siècle où la révolte ouvrière est, du fait de son existence même, anticapitaliste. Temps où l'Etat envoyait la troupe pour empêcher les grèves, où tout était fait pour briser le droit des ouvriers à s'organiser. Là, oui. le syndicat était le premier pas d'une conscience anti-capitaliste.
                Mais depuis cette époque, la nature de ce qu'est un combat de classe a changé. La société française, de capitaliste, est devenue impérialiste, vivant du pillage d'autres peuples et la bourgeoisie a remanié son système politique interne.
                Les partis censés représenter la classe ouvrière se sont trouvés inscrits dans le parlementarisme bourgeois et le syndicat est devenu l'instrument d'une redistribution d'une partie du surprofit, tiré de l'impérialisme, au profit d'une fraction des ouvriers.
                L'apparition de l'impérialisme et du parlementarisme a ouvert la possibilité de la compromission et de la collaboration syndicalistes, de la perte de l'autonomie de la classe ouvrière et du peuple par rapport à la bourgeoisie. L'exemple achevé est la débâcle du syndicalisme révolutionnaire de la fin du 19 ème - début du 20 ème siècle qui a trouvé son point final dans l'Union sacrée chauvine et impérialiste de 14-18.
                Le syndicat devenu rouage essentiel de la société impérialiste est désormais étranger à toute entreprise révolutionnaire.
                Avec le syndicalisme, triomphe l'idée "le système tel qu'il est peut être amélioré". La revendication sans fin comme moteur d'évolution du système, tel est l'objectif que fixe le syndicalisme à toute révolte.
                Le problème n'est donc plus aujourd'hui d'attiser le ras le bol mais d'en faire une révolte politique consciente, organisée. Toute possibilité d'être victorieux a désormais cela comme condition.
                Sacrifier la politique révolutionnaire, c'est sacrifier le devenir des révoltes voire même, dans la conjoncture de la crise leur possibilité.
                A l'encontre de la politique syndicale, il ne suffit pas de constater que les syndicats sont toujours pris à revers et débordés par les mouvements de notre temps : 68, grèves sauvages des OS, irruption des immigrés, des femmes dans la lutte des classes. Il faut aussi se rendre à l'évidence que seules les révoltes qui ont leurs propres mots d'ordre, plateforme et formes d'organisation, bref celles qui sont liées à une politique de classe, sont capables d'une efficacité réelle contre le patronat et l'Etat : grèves des OS de 73, mouvement Sonacotra.
                A Longwy, où et quand les syndicats se sont-ils portés à la tête du mouvement dans ses moments forts, ses moments vrais ? Tout au plus a-t-on vu des dirigeants CFDT utiliser le paravent commode de la démocratie pour ne pas prendre la tête de la colère ouvrière et populaire, comme le 24 février. Dans la classe ouvrière, le syndicalisme est bien l'instrument d'une conscience, celle qui consiste à inscrire toute révolte dans l'horizon du capital, horizon indépassable. Oui, le syndicalisme est le premier pas de cette conscience là, il cultive l'intérêt catégoriel en particulier, la promotion et l'arrivisme social, la lutte comme ressort infini du capital. Éternité des luttes syndicales, éternité du capital.
                Qu'on réfléchisse la passivité ou le pessimisme de l'ouvrier français aujourd'hui, c'est-à-dire en fin de compte son acceptation de la société impérialiste française et de ses effets pratiques sur le travail, la vie ... et l'on verra que la politique syndicale en est la base ouvrière organisée.

                Ainsi la deuxième justification :
                " c'est pas dans leur nature que les syndicats sont aujourd'hui réactionnaires, mais dans leur direction, leur appareil
"

                Nous donnons volontiers acte aux militants CFDT qu'ils ne suivent pas la position de leur fédération, position ouverte de collaboration de classe. Les militants CFDT de Longwy sont sur des positions de combat et ils y réfléchissent.
                Cependant ces militants ont recours, pour s'expliquer, à une problématique bien usée : base contre sommet, "masses" du syndicat contre appareil.
                Il serait temps que ces militants réfléchissent enfin à la question de savoir pourquoi les syndicats ont invariablement toujours eu des directions suivant une politique bourgeoise, une politique de collaboration. Où sont les contre-exemples ? Vous nous direz : le syndicalisme révolutionnaire d'avant 14, le syndicat rouge, le syndicat pur ? Mais ce syndicalisme là a été défait, s'est révélé incapable d'offrir une issue révolutionnaire, a fini par engendrer la lassitude et le parlementarisme et, plus catastrophique encore, a sombré dans le ralliement à la guerre impérialiste de 14-18 ?
                Ne nous racontez pas d'histoires : une organisation dont la direction pratique une politique bourgeoise constamment, sur une longue période de temps est nécessairement une organisation interne au monde politique de la bourgeoisie. Une organisation est de la politique qu'elle suit et a l'appareil qu'elle mérite. Changer d'appareil, c'est changer d'organisation ET de politique. Vous est-il venu à l'idée de vous demander pourquoi la CFDT au label si démocratique - raison pour laquelle certains ouvriers combatifs croient pouvoir y développer la lutte de classe - était capable d'autant de centralisme bureaucratique comme dans l'affaire de Dunkerque ? La CFDT n'est-elle démocratique qu'à raison de ce qu'on ne s'écarte pas trop de la ligne du bureau confédéral ? Le débat libre et démocratique dans la CFDT s'arrête là où commencent les vrais choix politiques : rapport à l'État, au patronat, aux autres syndicats et aux partis. Là il y a une ligne et une seule et ceux qui s'en écartent sont rappelés à l'ordre, désavoués ou exclus. Cette ligne centrale de la CFDT, vis à vis de laquelle, sur les affaires importantes chaque militant est sommé de se soumettre - ou de s'en aller - c'est celle de l'acceptation du dispositif économique, social et politique de la société française actuelle, marquée par l'intégration du syndicalisme à l'Etat.
                La vérité est là : le syndicalisme est devenu un rouage de l'État, Depuis en particulier la dernière guerre. l'Etat bourgeois a incorporé les syndicats à ses plans, ses commissions, ses tables rondes, développé les conventions collectives, les comités d'entreprises et depuis 68 les sections syndicales d'entreprises, bref le syndicat comme institution permettant aux capitalistes de réguler le cours inévitable des grèves et le taux des salaires. En contrepartie. l'État redistribue par le canal syndical à certaines fractions d'ouvriers les miettes des surprofits tirés de l'exploitation d'autres peuples ou des couches surexploitées du prolétariat de France (immigrés, femmes, jeunes ...)
                C'est de là que le syndicalisme a tiré sa force : d'être à la table de l'État ou du patronat celui qui va redistribuer ces miettes, ces avantages soigneusement hiérarchisés selon une politique de division de la classe ouvrière. C'est pour cette fonction que l'on s'adresse au syndicat, que l'on y adhère ou que l'on s'y résigne.
                Le syndicalisme est donc devenu une institution qui se nourrit du jeu existant à l'intérieur de l'État, jeu permis par l'existence de la France comme puissance impérialiste. De là que dans le champ ainsi tracé par le syndicalisme, les ouvriers qualifiés français notamment ont "intérêt" à la surexploitation des immigrés ou au pillage des peuples d'Afrique. Peut-on aller chercher ailleurs la raison profonde du racisme et du chauvinisme de certains ouvriers français ?
                Pourquoi en est-on venu là ? Il faudrait pour cela faire l'histoire des grands tournants de la politique du PCF (notamment 34-36. 45-47 et ses effets sur le syndicalisme). Cette transformation a pu se faire sur la base de la distinction luttes revendicatives - luttes politiques. Revendications et politique : deux temps, deux mesures. Les revendications PUIS la politique. Le syndicat PUIS le parti. Les revendications ainsi déconnectées de la politique révolutionnaire, enfermées dans les murs de l'usine et de l'opposition au seul patron par un type d'organisation d'où est exclue la politique consciente, c'est sans aucun doute ce qui a permis à l'État
                1. de s'intégrer le syndicalisme et d'en faire un organe de régénération du capitalisme.
                2. de donner comme idée et pratique de la politique la seule politique parlementaire. La politique, c'est l'ailleurs de l'usine, les élections, les partis parlementaires. L'effet du syndicalisme aura été de renforcer ce que les syndicalistes "révolutionnaires" de la charte d'Amiens prétendaient repousser : le parlementarisme. On retrouve aujourd'hui chez les syndicalistes ce mépris des partis, des élections, et en fait le constant recours à elles (on finit par voter).
                Si donc les appareils syndicaux se trouvent toujours en collaboration avec l'État (Mai 68, Grenelle ; aujourd'hui les négociations sur l'acier...), c'est qu'ils sont de cet État.
                Le syndicalisme, c'est la raison d'Etat dans le mouvement ouvrier et populaire. Quand on entend Chérèque, Maire ou Séguy, on entend toujours la logique d'Etat (même si cela n'est pas la même logique).
                On le sait admirablement aujourd'hui car avec la crise. l'Etat n'a plus nen a redistribuer. Le canal syndical se trouve desséché et impuissant. La CGT compense cette impuissance par le moulin à paroles, la CFDT développe ouvertement la mentalité de crise, la nécessité de la restructuration. La raison d'Etat devient évidente et n'a plus l'habillage des surprofits redistribués de la croissance impérialiste.

                Sur la troisième justification :
                " ce qui a manqué pour répondre aux questions posées, c'est l'unité syndicale à la base. Retrouver l'unité du 19 décembre devient le slogan d'où peut surgir le second souffle "

                Voir le tract CFDT en annexe où le slogan est lancé comme conclusion au recensement des points négatifs et des problèmes qui subsistent.
                C'est par ailleurs un thème souvent entendu : "les querelles politiciennes ont divisé les masses unies. C'est la cause de l'échec. Débarrassons nous de ces querelles et retrouvons les aspirations unitaires de la base".
                Le syndicalisme se mord la queue et prouve son impuissance : il n'a pas d'autre chose à proposer que ce qui a déjà fait faillite.
                Son seul bilan de l'histoire, c'est de vouloir effacer le temps, de remettre le compteur à zéro comme si de rien n'était. Giovanardi, dirigeant CFDT local, parle même dans Libération de retrouver "la lutte des ancêtres".
                Recommencer inlassablement ce qui a toujours échoué, tel est en raccourci l'anarcho-syndicalisme. Et sur quoi s'appuie-t-il pour faire passer cette impasse pour une idée d'avenir ?
                Sur le bon droit des luttes, l'éternité des révoltes : battus peut-être, mais toujours révoltés, il faudra toujours se battre... Et là, dans la révolte qui se dresse et se redresse, nous saurons trouver l'unité des gens qui en veulent, qui n'acceptent pas, qui disent non.
                A ce bon droit, ils opposent la politique, chose louche, loin des masses et qui les divise.

                Mais dans la colère, la révolte, les masses sont unies sur quoi ? Le fait que des gens se rassemblent en nombre dans une manifestation même violente ne dit rien en soi de leur unité profonde. A Longwy, les gens se sont révoltés contre Usinor et l'Etat, mais est-ce que c'est une unité ? Non car les ouvriers ne sont pas unis entre eux, ils ne se sont pas unis sur des cibles concrètes comme les 5 millions, ils ne se sont pas unis non plus sur la violence ou le type de violence ... Alors, à quoi sert de revendiquer une unité à la base, unité abstraite.

                En vérité, l'unité est à construire. L'unité n'est jamais donnée par l'attaque de l'adversaire, ou s'il y a unité dans ce cas elle est purement défensive et s'effiloche quand l'attaque se précise, divise. L'unité est affaire de conscience, de politique, d'organisation. Pour en venir à l'unité, il faut en venir à la politique.

                Sur la quatrième justification :
                " les syndicats ne peuvent tout faire, les partis n'ont pas fait leur travail "
 
                " les syndicats ne peuvent tout faire " :

                Ils n'ont effectivement -pas tout fait-. Les questions essentielles de la bataille n'ont pas été prises en main : pas de véritables mots d'ordre, pas de conception des étapes successives de la bataille, et par conséquent pas de politique de mobilisation de l'ensemble du peuple de Longwy autour des sidérurgistes.
                La section CFDT a sonné le tocsin, mobilisé les énergies, entretenu la flamme de la révolte et sert aujourd'hui de mauvaise conscience vivante d'un combat qui a filé entre les doigts, face aux capitulards divers de la CFDT nationale et de la CGT. Mais elle n'a jamais dirigé la bataille ouvrière, elle n'a pas non plus su souder l'unité d'un camp populaire.
                Non par manque de volonté, mais parce que le cadre syndical n'est pas fait pour cela. Toutes les tentatives de constituer le syndicat comme direction de la lutte ont été des échecs. La CFDT a cherché constamment à répondre à cette question en soutenant ou en ressuscitant l'Intersyndicale à laquelle par ailleurs elle ne croyait pas du tout. Tentative d'une réunion de l'Intersyndicale élargie aux associations professionnelles pour recréer l'élan de décembre.
                L'Intersyndicale fonctionne comme le mythe d'une direction que les militants cédétistes ne veulent pas assumer eux-mêmes. On verra plus loin pourquoi.
                Mais si les syndicats ne peuvent -tout faire-, c'est-à-dire l'essentiel, à quoi servent-ils alors ?
                A préparer la base, le terrain pour les partis. Aux syndicats, le contact patient avec les ouvriers, l'expression de la révolte, aux partis de prolonger cette action.
Mais " les partis n'ont pas fait leur travail "
                Pourquoi ? Parce que ce sont des partis bourgeois dont le travail ne peut pas être d'assurer la direction de la bataille ouvrière et populaire contre les licenciements ?
                Pour le PS, sans aucun doute. Les CRS, créatures des socialistes, Mitterrand et la guerre d'Algérie, le programme commun, le recentrage socialiste autour du maintien de la société bourgeoise actuelle depuis les élections de Mars 78 ; tout cela c'est à peu près clair.
                Et le PCF ?
                Le PC, parti anti-démocratique, parti récupérateur, parti chauvin, parti dont l'appareil fait peur. De ce point de vue, parti détesté. D'un autre côté, le PC réunit du monde contre l'État actuel. Parti d'opposition dont le poids peut faire aboutir des revendications syndicales. On est contre le parti-appareil, le parti-État, on est avec le parti d'opposition, le parti syndical.
                Aujourd'hui, le PCF est un parti d'opposition. On ne peut donc être contre lui au point de le critiquer ouvertement devant les masses, encore moins de lui opposer un autre projet politique. Demain, s'il vient au pouvoir, on sera contre lui comme contre tout pouvoir oppressif.
                Au fond, ce qui est aujourd'hui reproché au PCF c'est de ne pas être le relais politique des revendications sociales, de ne pas faire écho aux aspirations de masse. Mais de se servir d'elles pour son propre compte, de subordonner les intérêts des gens à son intérêt de parti, d'appareil.
                Et pourquoi ? Par antidémocratisme, parce qu'il est pour une société hiérarchisée, bureaucratique où l'Etat s'infiltre partout.
                Nous disons nous un capitalisme bureaucratique d'Etat, où le parti s'identifiant à l'État qui, lui même, colonise et régente toute la société, organise un nouveau type de bourgeoisie, d'oppression et d'exploitation. Bourgeoisie des fonctionnaires d'Etat, syndicaux et du parti.
                Mais alors, si nous ne sommes pas loin d'être d'accord là-dessus, sur ce que veut le PCF, pourquoi l'entretenir dans l'image flatteuse du parti d'opposition, pourquoi ne pas lui opposer un autre projet de société, une autre politique, un autre type de parti ? Pourquoi ne pas déclarer les hostilités à TOUTES les bourgeoisies, y compris bourgeoisie bureaucratique d'Etat, et conquérir ainsi son autonomie de pensée, d'action, d'organisation ?
                Comment peut-on critiquer le PCF et continuer à marcher derrière ? Car tel est le résultat : Comme il n'y a jamais de rupture CFDT-PC au nom de l'unité syndicale, la CFDT finit TOUJOURS par céder à la fin. L'exemple de la marche du 23 Mars sur Paris est là pour le rappeler. On en arrive à cette situation paradoxale où des militants combatifs, des militants qui se réclament de la lutte des classes, travaillent, dans les faits, et au bout du compte, au renforcement du PCF ? Car quelle force politique s'est renforcée dans la lutte à Longwy sinon la CGT et le PCF ?
                Les cédétistes combatifs finissent par fonctionner comme groupe de pression du PCF même si, par ailleurs, leur direction nationale travaille avec le PS.
                Ces militants doivent être logiques avec eux-mêmes : le résultat - faire tomber les gens dans les bras du PC - est contradictoire à leur intention : s'y opposer. La critique du PCF doit aller jusqu'à offrir une alternative en termes de parti, de politique révolutionnaires sinon cette critique - de pure forme - ne sert qu'à alimenter celui qu'on veut dénoncer.
                Alors si le syndicat ne peut constituer la direction de la bataille, si on ne peut faire confiance aux partis PC-PS, que faire ?
                Et surtout comment se considérer soi-même ? dans quelles responsabilités va-t-on s'engager au regard de l'intérêt profond des sidérurgistes et des gens de Longwy, au regard de ce qu'on sait être les conditions d'une vraie bataille :
                - élaboration d'une plateforme et de mots d'ordre de classe,
                - définition d'une tactique prolongée,
                - constitution d'un camp populaire : intégration de la question des immigrés, des femmes, des jeunes au combat,               
                - faire le travail de masse nécessaire pour tout cela, soutenir les organisations nouvelles et nécessaires à ce travail.               
                La combativité, l'agitation ne sauraient cacher qu'il y a eu démission dans les faits sur toutes ces questions.
                On retrouve là la question syndicale et la cinquième justification.
 
                Sur la cinquième justification :
                " II n'est pas contradictoire d'être dans les syndicats et d'être pour la construction d'un parti révolutionnaire"
 
                Le syndicat prétend être le premier pas d'un combat plus décisif, politique. Mais regardons les faits : l'engagement dans le syndicat joue contre l'engagement dans la politique révolutionnaire.
                L'engagement syndical sert de refuge : il permet de déléguer les tâches de direction politique, d'autonomie ouvrière, d'avant-garde, ailleurs et donc à d'autres, tout en continuant de cultiver son statut de révolté, d'oppositionnel, sans mauvaise conscience.
                Nous avançons une certitude : si les camarades combatifs de Longwy n'avaient trouvé cette structure refuge de la section syndicale de Longwy - sorte d'équivalent syndical des comités d'action de 68 - ils n'auraient pu aussi facilement refuser les responsabilités dirigeantes, d'avant-garde qui sont les leurs.
                A y bien regarder, la démocratie CFDT sert de paravent commode pour ne pas assumer la direction d'ensemble du mouvement et lui permettre de franchir les étapes supérieures.
                Les militants sont d'autant plus démocrates qu'ils refusent d'être dirigeants. Dans le même esprit, la critique de la CGT, et du PCF comme récupérateurs sert de cache-misère à ses propres faiblesses et son incapacité à donner au mouvement les moyens et la pensée de sa victoire. Dans le mouvement de Longwy, il n'y a pas eu de direction démocratique révolutionnaire analogue à celle du Comité de Coordination Sonacotra, par exemple. A aucun moment, les militants combatifs n'en ont eu la détermination.
                Au fond, à ne pas s'engager véritablement dans la lutte politique, ces militants CFDT n'ont pas d'ambition pour ce qui est de mener la bataille de classe. A vrai dire, ils ne prennent pas de risques, ni celui de la gagner, ni celui de la perdre. Ils s'installent dans la figure du peuple malheureux et révolté sans aucune capacité de tenir le terrain politique par rapport à la bourgeoisie.
                Leur problème c'est de n'avoir confiance ni dans le mouvement politique de masse, ni dans eux. L'engagement syndical, c'est cette absence de confiance, c'est la lutte des classes dans les paroles, les gestes de révolte et le refus de faire l'indispensable travail d'avant-garde.

 

L'U.C.F.M.L. ENQUETE A LONGWY
et pour ne pas manquer à une bonne tradition :
LA SITUATION ACTUELLE ET NOS TACHES
 
                En février 79. nous décidons de mener l'enquête à Longwy. 8 mois après, quels
enseignements en retirons-nous ?
         1. Longwy, c'est l'occasion pour les forces politiques et les syndicats de redéployer leur politique sur le terrain face à une révolte de masse. Nous en avons aujourd'hui une meilleure connaissance :
                - Abrité par les paravents syndicaux. l'Etat giscardien s'est lancé dans une politique anti-populaire, brutale et d'envergure. Dans cette affaire de la sidérurgie, il a en même temps mis au point son dispositif de division de la colère ouvrière : primes de départ, pré-retraites, mutations. Dispositif que nous devons désormais apprendre à combattre.
                - Le syndicalisme a démontré sa totale impuissance à enrayer le plan de liquidation et même à le faire reculer sur un seul point significatif. Sur place, leurs objectifs grandioses, et leurs discours enflammés sont à la mesure de leur faiblesse pratique. Dans les négociations centrales, c'est l'inefficacité la plus totale. Le syndicalisme va traverser une période difficile qu'il essaiera de masquer par un plus grand recours aux actions spectaculaires et symboliques du type opérations coup de poing.
                - Le PCF, en panne de politique parlementaire, compte effectuer sa "traversée du désert" en prétendant s'adosser à la révolte ouvrière et populaire. C'est pour lui une nécessité. "Union à la base". " autogestion ", "vive les mouvements sociaux", "seule la lutte paye", et pourquoi pas "c'est tous ensemble qu'il faut lutter"... deviennent les thèmes du renforcement de son appareil, dans un nouvel espace politique, à défaut de projet Union de la gauche ou autre avec le PS.
                Ayant une sainte frayeur d'un mouvement politique de masse qui lui échapperait, le PCF s'efforce de défaire la révolte de sa force, de sa voix propre, de l'user sur place par un activisme sans cibles, pour ensuite être en mesure de lui faire annoner le b.a.ba de son jeu personnel contre le giscardisme. 
                Dans les révoltes du type Longwy, il y a toujours, à leur pointe, des militant en recherche d'une authentique lutte de classes. A Longwy. c'est sous le label "CFDT locale" qu'ils ont déployé leurs efforts. A ces camarades inventifs et dynamiques, nous sommes opposés sur la question du syndicalisme, et par voie de conséquence sur celle du parti révolutionnaire à construire. Non, comme une question de principe, mais parce qu'une fois de plus Longwy montre que, dans l'étape actuelle, c'est OU l'engagement dans les syndicats OU l'engagement révolutionnaire organisé, la capacité d'être jusqu'au bout des dirigeants de classe dans ces révoltes de masse. Le sort de ces révoltes, leur possibilité de victoire, même partielle, sur une question aussi difficile que les licenciements se jouent dans l'apparition et la consolidation de tels noyaux ouvriers dirigeants. Il n'y a pas d'autre voie pour opérer la rupture avec les faiblesses avouées d'aujourd'hui.

                 Tout ceci, nous pensons en avoir donné les faits, les détails et les épisodes marquants dans cette brochure que nous avons voulu tenir au plus près des questions vécues pendant ces huit mois de colère, d'espoir mais aussi d'échec a Longwy (1)

          2. Nous n'avons pas découvert de "merveilles politiques" à Longwy. La colère de masse et l'espoir qui en est surgi sont venus buter sur l'état actuel de la classe ouvrière ; à Longwy, il n'est malheureusement pas plus avancé qu'ailleurs et le mouvement n'a pas fait avancer de manière significative la capacité de lutte contre les licenciements ; de ce point de vue essentiel, cette lutte ne peut fonctionner comme exemple positif.

                 La crise actuelle révèle impitoyablement l'étendue de la division de la classe ouvrière, phénomène qui n'est pas nouveau mais qui est considérablement mis a nu à travers les plans gouvernementaux de reconversion.

                 A un moment où la classe ouvrière ne voit pas d'horizon collectif immédiat, l'État mène une intense campagne idéologique de fuite dans les comportements individuels. La prime de départ de 5 millions en est 1'exemple achevé : l'État "achète" le chômage transformé en marchandise monnayée à des prix différents selon le rapport de force : 5 millions en Lorraine. 1 ou 2 millions dans des régions plus calmes. Les autres portes de sortie offertes, les mutations et les pré-retraites, enferment tout autant les ouvriers dans une impasse personnelle.

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Note 1 : Dans ce panorama des forces politiques, on nous excusera de taire silence sur le P.S. Mais celui-ci fut totalement absent de cette bataille. Il était par ailleurs globalement d'accord avec le plan de restructuration. Notons, pour terminer, les résidus hargneux des féodaux de l'acier (Labbé à Longwy). liés en général à l'étiquette gaulliste, dont les positions électorales sont entrées dans une irréversible décadence.
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                 Formes particulières du temps de la crise, elles viennent s'ajouter aux grandes divisions que nous connaissions déjà: ouvriers français/ouvriers immigrés, embauchés/intérimaires ou temporaires. OS/OP, hommes/femmes, jeunes/agés... Elles expliquent largement que l'usine de la société impérialiste française soit le lieu actuel de la révolte sourde, mais aussi du silence du combat, de l'exploitation et de l'oppression humiliantes mais aussi de la résignation.
                 Cette situation ne peut durer sans danger. D'abord, sans unité politique de la classe ouvrière, les mobilisations populaires contre les licenciements sont lourdement hypothéquées. Longwy le montre abondamment.
                 La colère, telle une traînée de poudre s'étend très rapidement à toute la ville. Ce succès laisse toutefois la situation intérieure aux usines inchangée et, dans une certaine mesure, couvre cette faiblesse de l'enthousiasme du peuple retrouvé dans sa colère unanime, alimentée par la haine des forces de répression. Cette phase s'étend à Longwy de Janvier à Mars.
                 Mais ensuite lorsque ce qui vient en jeu, ce sont les négociations centrales et la capacité de s'opposer aux mesures de la convention sociale, on retrouve la question-clef: y a-t- il oui ou non. dans les usines, une force ouvrière, une force de classe ?
C'est pourquoi en Avril, l'attention revient sur les usines dans l'attente d'y voir apparaître des formes concrète de riposte aux mutations, aux primes de départ "volontaire" - et qu'a tout le moins, un débat interne aux usines se fasse jour sur ces questions pour qu'ensuite puissent se redessiner, autour de ces ripostes, les nouvelles formes de soutien populaires. Tout le monde attendit, ouvriers sidérurgistes y compris, mais ne vit rien venir. Les syndicats ne prirent aucune initiative et la seule chose intéressante de la période - la grève des aciéristes d'Usinor contre les mutations - fut laissée à l'étouffoir de la CGT. Nous-mêmes à l'époque n'avons pas saisi l'importance de ce moment, centrant par exemple la riposte à la prime de 5 millions beaucoup plus au niveau de la ville qu'à celui de l'usine.
                 De façon plus large, cette absence de direction révolutionnaire de la classe ouvrière risque de placer les autres combats populaires soit dans des situations difficiles d'isolement (mouvement Sonacotra, lutte anti-raciste...), soit de freiner leur apparition (logement, vie chère...).
                 Les formes de riposte qui se cherchent contre la crise et l'offensive gouvernementale mettent en jeu, en pratique et pas simplement en théorie, le rôle dirigeant de la classe ouvrière. Quand elle ne l'assume pas, en particulier dans les combats d'usine, la situation d'ensemble est mauvaise.
Dans la période actuelle, c'est pour nous la question centrale, prioritaire sur laquelle travailler: dans ces temps de crise, commencer à changer le cours des choses du point de vue des usines. 
                 De quel point d'appui disposons-nous pour le faire ?
- D'abord de quelques idées sur la manière dont le combat ouvrier contre les licenciements peut se développer, que l'expérience de Longwy précise:
                 -1) SUR LA FORMATION DES MOTS D'ORDRE ne pas travailler sur le symbolique, mais dans le réel. Nous avons vu que les mots d'ordre généraux à Longwy n'avaient aucune efficacité pratique, sinon celle de couvrir la capitulation.
Ne parlons pas des moyens de les réaliser et des étapes à franchir. Ils allaient de la croyance aux rassemblements de foule, à l'imaginaire trotskyste de la grève générale et de la coordination des luttes, en passant par les tenants des escarmouches de rue.
Il est absolument nécessaire d'ajuster des mots d'ordre aux forces réelles du mouvement, de fixer à celles-ci des batailles possibles et d'en prévoir les étapes successives. Ce qui implique une capacité d'analyse de la situation, des forces en jeu et, de faire l'hypothèse de l'objectif central de la bataille et d'engager le combat autour de lui. Ainsi sur quoi était-il le plus possible de remporter une première victoire: contre la prime de 5 millions, contre les mutations ?
 
                 -2) SUR LE RAPPORT AUX NÉGOCIATIONS AVEC L'ÉTAT: a condition d'avoir clarifié sa propre plate-forme, il devient ensuite essentiel de poursuivre son autonomie jusqu'aux négociations, leur contenu et leurs modalités. N'avoir aucune pensée des négociations, c'est se condamner à subir la tactique de l'adversaire, en l'occurrence les négociations usine par usine dans le cas de la sidérurgie.
 
                 -3) LE DÉVELOPPEMENT DU CAMP POPULAIRE :
Nous avons déjà développé ce point dans le corps de la brochure. Ce camp doit être
concrétisé par le travail d'une charte sur le droit à travailler et à vivre au pays, qui devient le flambeau unificateur de la bataille.
 
                 -4) L'EXIGENCE D'UNE AUTONOMIE EN MATIERE D'ORGANISATION :
Rien de tout cela n'est évidemment possible s'il n'existe pas de forme d'organisation autonome de la bataille.
Cela n'a jamais été le cas à Longwy: l'action, l'élaboration de la tactique ont été étroitement dépendantes du jeu propre des syndicats. Aucun comité révolutionnaire des ouvriers, de quartiers, ni même d'assemblée populaire ne sont apparues.
- Mais ces idées ne suffisent pas. il faut aussi la force de leur lancement et de leur réalisation: un noyau d'ouvriers révolutionnaires, unifiés à ces idées au nom d'une conception, d'une pensée de la politique, de son état actuel et de son histoire en France.
                 Sinon, pourquoi vouloir engager ce combat difficile, prolongé, comment comprendre les difficultés, comment pouvoir les surmonter ? 
                 Le nez sur l'épisode du moment, se laissant principalement guider par leurs réactions sensibles et immédiates aux événements, prisonniers de la conception syndicaliste des choses, les militants combatifs de Longwy se sont vite retrouvé grillés de vitesse par la contre-offensive de l'État, transformés en arrière-garde résistante d'une mobilisation défaite sur l'essentiel.
                 Il y a, de ce point de vue, une très mauvaise tradition en France chez de nombreux ouvriers combatifs: celle d'ignorer superbement la pensée politique révolutionnaire du prolétariat : le marxisme. Le marxisme n'est pas une simple théorie, ni non plus une encombrante réflexion dogmatique et poussiéreuse. C'est une politique concrète, une capacité de transformer les situations, une possibilité de victoire.
                 Les ouvriers ne peuvent contourner ce marxisme-là. ce marxisme vivant, ce marxisme de notre époque qu'est le maoïsme, lui-même continuateur du marxisme et du léninisme dans le temps de la lutte sur 2 fronts: la bourgeoisie classique et cette bourgeoisie nouvelle apparue de l'intérieur même des expériences révolutionnaires avec la dégénérescence de l'U.R.S.S. et de nombreux partis communistes.
Comment mener la lutte des classes sans avoir sa propre conception du monde, sa propre conception de la politique ?
                 Marx a énoncé cette idée essentielle, passée ensuite dans l'histoire, que les ouvriers n'existent comme classe capable de transformations révolutionnaires que s'ils ont une pensée et une pratique de la politique entièrement dégagées de celle de la classe bourgeoise. Sinon, c'est, au bout du compte, et toujours, la défaite assurée en dépit de toutes les énergies et de tous les sacrifices. Leçon essentielle que Marx tira des expériences révolutionnaires manquées du XIXème siècle et en particulier de la Commune de Paris.
                 Le marxisme n'est rien d'autre que le moyen pour la classe ouvrière de penser sa politique et de la faire. L'histoire s'est chargée de montrer qu'en dehors du marxisme, il n'y avait rien d'autre qui puisse assurer cette autonomie politique des ouvriers, et leur capacité de victoire.
                 La bourgeoisie, depuis, s'est toujours acharnée à combattre le marxisme, à le réduire, c'est la tâche de ses partis, en particulier des partis sociaux-démocrates dont le PS est aujourd'hui l'héritier direct.
                 La politique de classe, la politique marxiste a depuis toujours également été l'objet de perversion, de détournement, non plus de ses ennemis ouverts - les bourgeois affichés - mais de gens qui, au nom de la classe ouvrière et dans les mots même du marxisme, propose une nouvelle politique réactionnaire et impérialiste (de pays socialiste, l'U.R.S.S. est devenu un pays social-impérialiste, le PCF se déploie dans l'objectif du capitalisme bureaucratique d'État).
                 Le faux marxisme est devenu la caution historique d'une nouvelle bourgeoisie - celle des Brejnev et des Marchais - et alors même qu'une politique révolutionnaire des temps actuels se développait: la révolution culturelle en Chine, où, pour la première fois dans un pays socialiste, le marxisme se retrempa dans la lutte révolutionnaire d'un peuple contre une fraction de l'État et du parti qui couvrait sa politique bourgeoise d'un marxisme réduit à l'état de catéchisme hypocrite.
                 Nous pensons que les ouvriers révolutionnaires doivent s'approprier le marxisme de notre temps et apprendre à en faire eux mêmes leur arme lucide dans les batailles politique contre la bourgeoisie.
                 Pour cela, ils ont besoin d'un lieu qui leur soit propre, en rupture totale avec tous les appareils à penser et à faire de la société politique bourgeoise: partis parlementaires, syndicats.
                 Ce lieu, ce parti révolutionnaire est en train de se faire, c'est le travail politique de l'U.C.F.M.L. Il ne pourra se faire que si les ouvriers révolutionnaires en font leur tâche d'aujourd'hui.
                 C'est pourquoi notre organisation, qui est toute entière tournée vers cet objectif depuis sa fondation il y a 10 ans, existe.
                 C'est pourquoi nous avons mis en place de nouvelles formes d'organisation ouvrière et populaire qui sont la réalité déjà existante et à développer de cet objectif :
             - les noyaux ouvriers communistes de l'U.C.F.M.L, où des camarades ouvriers s'emparent de la politique marxiste, travaillent, à leur façon et à leur rythme, à la politique de classe et à leur propre extension.
             - les Comités Populaires Anti-Capitalistes (C.P.A.C), où des ouvriers, des employés, des immigrés, des femmes s'engagent dans les batailles concrètes contre la crise pour y forger l'unité politique du peuple et élaborer un programme révolutionnaire détaillé de mobilisation populaire.
                 Renforcer ce dispositif, c'est aujourd'hui ce qui va de l'avant dans la lutte des classes en France.

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                 Produit d'une longue enquête, cette brochure avance des points de vue, des conclusions sur le mouvement contre les licenciements à                             Longwy, et plus généralement sur ce qu'est aujourd'hui une politique de la classe ouvrière dans la crise.
                 Cette brochure est donc faite pour être commentée, discutée, soumise aussi à d'autres points de vue.
                 NOUS SOUHAITONS EN DÉBATTRE AVEC VOUS.
                 CONTACTEZ LES DIFFUSEURS OU ÉCRIVEZ NOUS à l'adresse suivante :
                 " LE MARXISTE-LÉNINISTE " BP 278 - 75 827 Paris Cedex 17

 

Documents

 

DOCUMENT No 1 : "POUR QUE VIVE LONGWY"
Groupe pour la fondation de l'Union des Communistes de France Marxistes-Léninistes.
                 Votre combat, celui des ouvriers et du peuple de Longwy, de Lorraine, a aujourd'hui une grande importance.
                 Contre le chômage, les licenciements, c'est l'explosion au grand jour de la colère. Mouvements violents, actions décidées contre le patronat mais aussi contre I'État (prise du relais T.V., attaque du commissariat). Mouvement dans lequel s'engagent aussi des jeunes, des médecins, des commerçants.
                 Que va devenir le mouvement ? Que veut-il ? Que peut-il ? Quel est son plan à lui et les forces effectives pour la gagner ?
                 On ne peut les résoudre qu'en s'appuyant sur l'expérience passée. Et en France, c'est du côté du dernier grand mouvement de masse, de Mai 68, qu'il faut regarder. D'accord, c'était un mouvement d'ensemble, pas local, mais il y a beaucoup de choses à en apprendre pour ici.
                 Mouvement violent, attaquant l'État, qui s'est terminé où ? Autour d'une table, avec les
                 syndicats CGT/CFDT et Pompidou, signant les accords de Grenelle.
      Notre organisation, l'U.C.F.M.L. est née de ce mouvement. Comme ici à Longwy, nous avons été et nous sommes des révoltés qui s'affrontent à la bourgeoisie et à l'État. Mais nous avons observé aussi les échecs, essayé de les comprendre et dégagé des leçons générales de l'expérience des mouvements anticapitalistes. C'est ce qu'on appelle la politique révolutionnaire du peuple, dont l'axe pour nous est d'édifier un authentique parti révolutionnaire: parti des ouvriers, français et immigrés, parti des femmes, des jeunes.
                 La politique, c'est l'idée que l'histoire ne se recommence pas a chaque révolte, qu'il y a toute une expérience accumulée sur laquelle s'appuyer. Sinon, la révolte si grande soit-elle, se casse les dents.
          Sérieusement. 10 ara après 68 (sans parler de 36), qui peut penser qu'il suffit d'un grand mouvement pour être victorieux ? Dix mois après le                 lamentable fiasco de l'union de la gauche aux élections, qui peut encore croire que PC et PS sont des partis de changement révolutionnaire ?                               Alors, aujourd'hui, c'est à travers cette expérience qu'il faut examiner l'avenir proche, les projets, les plans en présence. 
 
                -1) Le PCF-CGT,
Eux, ils ont un projet d'ensemble. Dans la sidérurgie, ils avaient soutenu les investissements de l'État. Ils critique Giscard-Barre, mais leur seule proposition, c'est les nationalisations d'ensemble. En fait, si le programme commun était passé, et si donc on les avait vu à l'oeuvre, ou bien le PCF aurait fait un putsch (amenant un capitalisme du style des pays de L'Est), ou bien le PS aurait imposé un projet de restructuration quasi identique au projet actuel. Leur politique, en plus, est raciste, chauvine. Les élections Européennes ne sont pas loin.
 
                -2) La CFDT :
En apparence, elle ne fait pas de politique, mais des actions. Les actions coups de poing expriment bien la révolte. Mais elles ne peuvent constituer, à elles seules, une politique, avec un plan de bataille, des directives, des forces constituées. La CFDT, c'est deux choses liées : d'un côté des actions dures, de l'autre, quand il s'agit de rapports avec l'État, le gouvernement, le patronat, elle finit toujours par faite cause commune avec La CGT. Car, sans projet d'ensemble, elle est désarmée quand les choses en viennent à l'État, et finit par suivre les autres forces.
 
                -3) Pour avoir une politique bonne pour less ouvriers et le peuple c'est à dire une politique révolutionnaire, que faut-il réfléchir ?
D'abord, quels sont les mots d'ordre du mouvement ? Bien discuter ce qu'on entend derrière " pas un seul licenciement ". Ce mot d'ordre concerne les ouvriers sidérurgistes bien sûr, mais le mouvement doit être étendu à tout le peuple, prendre en compte tous les intérêts : ceux des ouvriers des autres usines, des chômeurs, des chômeuses, des jeunes des immigrés.

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                Comment organiser tout le peuple, autour de quelles idées et actions, maintenant : grève générale, refus de payer les impôts, paralysie complète de la ville ? Nous avons aujourd'hui, pour ce mouvement, 2 convictions :
                - la première, c'est que le peuple ne peut déléguer à quiconque la tâche de répondre à ces questions à sa place, ni aux partis, ni aux syndicats. Il faut un grand débat de masse.
                - la seconde, c'est qu'il faut avoir un point de vue sur la proposition de la marche sur Paris: pourquoi celle marche a-t-elle lieu maintenant ?
Qu'en penser ? Si on est contre, que proposer d'autre qui aille dans le sens du renforcement du mouvement ?
                - Nous, on est CONTRE la marche de la CGT: Noyer le mouvement dans une manifestation générale de mécontentement, c'est l'empêcher de poursuivre son propre développement. Cette marche, pour le PC-CGT, c'est une opération politique pour sa campagne électorale européenne. Et souvenons-nous que beaucoup de marches (celle de Thionville, il y a 2 ans, celle des paysans du Larzac) ont été des marches d'enterrement.
- La CFDT, elle met en avant une marche des sidérurgistes. Elle met donc en avant de façon unique la question de la sidérurgie. Par rapport aux problèmes actuels du mouvement, de ses mots d'ordre, nous pensons que cette marche n'est pas une bonne initiative, prise d'ailleurs dans l'esprit de concurrencer la CGT. Car, au lendemain de la marche, les problèmes seront les mêmes (et en plus, il y aura l'arrière-goût amer de l'action qui n'aura pas servi à grand chose).
L'axe principal, pour nous, c'est la question du démantèlement de la sidérurgie. C'est là-dessus qu'il doit y avoir débat : quelle va être le plan de bataille de Longwy et de sa région, ses étapes, ses échéances, ses arrières ?
                Si on envisage une manifestation nationale, il faut le faire à Longwy. Mais à condition que les choses aient avancé ici avant.
                Pour nous, dans l'étape actuelle, nous nous engageons :
- à discuter avec vous de toutes ces questions du mouvement.
- à apporter notre expérience des succès et des échecs des mouvements anti-capitalistes du peuple.
- dans ces termes, à faire connaître partout en France (dans les usines, auprès de la jeunesse, dans les foyers d'immigrés, à la campagne…) la bataille des ouvriers et du peuple de Longwy.

                Les maoïstes de l'U.C.F.M.L. (Février)

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DOCUMENT No 2: "Comment reprendre l'initiative"
Groupe pour La fondation de l'Union des Communistes de France Marxistes-Léninistes. (12 Mars)
            OU EN EST LE MOUVEMENT AUJOURD'HUI A LONGWY ?
                Certainement dans une période de difficultés, mais aussi de vérité.
                Dans les opérations coup de poing. l'occupation du relais, les assauts du commissariat, c'est la colère qui explose et il suffit un peu d'en suivre le fil. Mais voilà, l'État et les patrons contre-attaquent, promesses "négociations" usines par usines, ouverture d'un débat parlementaire, et 5 millions... L'initiative semble changer de camp, le PCF et la CGT reprennent de ce fait du poil de la bête et organisent leur grande marche publicitaire du 23 Mars. Le mouvement est dans l'incertitude et n'a plus autant d'allant.
                POURQUOI CE PASSAGE DIFFICILE ?
C'est qu'il ne suffit plus d'être en colère, il faut aussi gagner. Et pour gagner, c'est à l'État qu'il faut se mesurer. Or le mouvement n'a actuellement aucune présence à ce niveau-là, aucune force organisée d'ensemble capable de traduire la colère en une politique de victoire.
                La violente révolte populaire se trouve alors aspirée, moulinée d'un côte par le débat parlementaire où les forces politiques bourgeoises font feu de tout bois, Marchais et Mitterrand en tête pour se replacer dans la course aux élections européennes.
                De l'autre côté par les négociations patron/État/syndicat, usines par usines, où le fait est là: rien n'est concédé ni obtenu sur les licenciements.
Cette situation n'est pas bonne. Il faut reconquérir l'initiative et pour cela, il n'y il pas d'autres moyens que le mouvement édifie sa politique à lui, sa présence face à l'État et aussi sur la question des négociations.
                La CFDT prétend contourner cette question, en poursuivant ce qui a du succès un moment: les opérations coups de poing. Mais maintenues telles quelles, elles n'offrent aucune issue et laissent le champ libre aux grandes manoeuvres du PCF. Elle s'oppose à la marche du 23, mais est incapable d'offrir une alternative sérieuse. C'est qu'elle n'a aucune politique d'ensemble.
                Elle ne veut ni vraiment du PCF, ni du PS, encore moins de la lutte des classes révolutionnaire.
Et devant son impuissance à avoir une vision politique claire, elle se console, sans vraiment trop y croire avec le socialisme autogestionnaire en laissant penser qu'on peut faire l'économie de la politique, d'un parti pour le peuple.
                La CGT, elle, travaille pour le PCF et son projet de capitalisme bureaucratique d'État comme dans les pays de l'Est. Face à la révolte des masses, le PCF, soit il la combat (sa politique en Mai-Juin 68, ou sur le nucléaire, sur le mouvement des foyers sonacotra, sur les Corses, les Bretons..,) soit il tente de s'en servit pour sa propre politique, comme en Lorraine maintenant.
                Dans ces conditions, les divisions syndicales sont normales, complètement liées aux projets politiques opposes de la CGT et de la CFDT. Exiger absolument l'unité syndicale, la mettre en avant comme moyen pour que le peuple puisse reprendre l'initiative, c'est complètement irréaliste. Et bien souvent, ceci sert d'alibi pour ne pas assumer la véritable réponse, c'est-à-dire de travailler à une autre politique que la politique des syndicats et partis actuels.
                C'est-à-dire travailler à la politique révolutionnaire
- NOUS, QUI SOMMES-NOUS ?
                - Nous sommes des révolutionnaires organisés. Notre organisation, L'U.CF.M.L., est implantée dans de nombreux endroits en France. Notre journal s'appelle "Le marxiste-léniniste".
                - Nous ne sommes pas avec le PCF. Nous pensons même que le PCF n'est pas un parti pour la révolution et qu'en fait, il la combat, comme il l'a fait en Mai 68.
                - Le nouveau parti que nous voulons n'existe pas encore. Nous n'avons pas décidé arbitrairement de le créer : tout notre travail consiste à en discuter avec les ouvriers et le peuple et dans le mouvement des luttes pour que le jour où ce parti se fondera, il soit véritablement le parti des intérêts des ouvriers et du peuple.
                - Nous sommes des maoïstes, c'est-à-dire :
MARXISTES: c'est la théorie vivante de la lutte des classes contre les bourgeoisies et pour le communisme.
MAOÏSTES: pour nous, en fin de compte, c'est le peuple qui décide, transforme et tranche sur toutes les questions ; la Révolution Culturelle Chinoise de 1966 en est une illustration, et Mai 68 en France une tentative.
Notre politique, c'est d 'avoir confiance dans la capacité du peuple, dans les ouvriers, les jeunes, les femmes, les immigrés, les paysans pauvres et moyens, les employés.
D'avoir confiance ici dans la capacité des ouvriers et du peuple de formuler leur propre politique.
                AINSI, pour reprendre l'initiative, Le mouvement est dès maintenant confronté aux questions suivantes:
                - Que veut-il ? Ou tout du moins, que refuse-t-il ? Les choses sont loin d'être claires, et le risque de division est grand sur les 50 000F, le "départ" des immigres, les pré-retraites, les sociétés de reconversion… Refaire son unité, c'est prendre position sur toutes ces questions concrètes et défendre la plate-forme du mouvement.
                - Et les jeunes chômeurs, les lycéens, les immigrés, les femmes ? Eux aussi luttent et sont des forces indispensables du mouvement. Mais leurs aspirations n'ont pas encore vraiment vécu dans le mouvement ; on considère que leur solidarité va de soi, il est nécessaire que toutes ces forces s'affirment plus elles-mêmes pour renforcer le combat d'ensemble.
                Pour reprendre l'initiative, il faut discuter mouvement. Et il faut aussi discuter politique. Nous appelons à une réunion-débat (Samedi 17 Mars à 17h30 - Hôtel de ville…) sur ces 2 Thèmes. Nous donnerons notre point de vue sur le mouvement. Nous pourrons, à partir de là discuter du votre. Nous discuterons de la politique dans ce mouvement. Et pour cela, i] faudra aussi parler politique d'ensemble.
U.C.F.M.L.

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DOCUMENT No 3: "APRES LA MARCHE ? "
Tract rédigé à l'issue de la réunion publique tenue le 17/3/79 à l'appel
des maoïstes de l'Union des Communistes de France Marxistes-Léninistes
                Vendredi dernier, 23 mars, A eu lieu la marche à Paris. 
                Et si celle marche a regroupé beaucoup de monde de différentes régions, c'est bien parce que c'était la seule initiative d'ampleur à l'échelle nationale qui avait été proposée.
MAIS QU'A-T-ELLE APPORTÉ DU POINT DE VUE DES OBJECTIFS DU MOUVEMENT ? L'ANNULATION DES LICENCIEMENTS ?
                A notre avis, pas grand chose. Le problème reste identique. En fait, les seuls que cette marche a servi, si on excepte les autonomes sur lesquels la radio et la télévision essaient de détourner l'attention, c'est la CGT et le PCF, leur projet politique et leurs ambitions électorales actuelles. Cela, est une mauvaise chose. Rien ne serait plus tragique que la juste lutte actuelle contre Giscard-Barre, bourgeoisie arrogante et cynique, anti-populaire au possible, ne serve qu'à meure en place une autre forme de capitalisme; le capitalisme bureaucratique d'État, comme dans les pays de l'Est, société où le parti est complètement confondu avec l'État. La vie y est organisée par l'État, et ce au profit d'une nouvelle classe de parvenus, d'arrivistes, de nouveaux bourgeois.
                Nous pensons que beaucoup de gens pensent comme nous. Seulement, on n'a pas forcément la force pour ne pas se laissée piéger et se soumettre aux différentes politiques bourgeoises. Toute l'histoire nous l'apprend, y compris le mouvement à Longwy depuis décembre. On finit toujours par perdre l'initiative si on ne se décide pas à faire sa propre politique en dehors des partis et syndicats actuels, si on ne garde pas la main sur les négociations, sur ce qu'on négocie, sur la façon de renforcer, consolider, étendre le mouvement. Ceux qui voudraient échapper à cette question de bâtir la politique révolutionnaire du peuple en faisant du syndicalisme, se mettent le doigt dans l'oeil. Car le syndicalisme, c'est quoi ?
                - soit la CGT, et donc la politique du PCF.
                - soit la CFDT, donc l'absence d'un projet politique d'ensemble. Elle fait dépendre, en fin de compte, des gens du PCF et de La CGT ( comme l'a montré suffisamment la marche) pour tout ce qui est politique.
                Aujourd'hui donc, pas d'autre issue que d'édifier une politique du peuple à lui. Comme il n'y a pas de politique sans parti, sans organisation pour le faire, il faut édifier un parti révolutionnaire.
                Un parti qui reste à faire, qui doit à la fois montrer sa capacité de direction, de clairvoyance dans la lutte de classe, et qui, en même temps, reste sous le contrôle vigilant des ouvriers et du peuple.
                A tous ceux qui ne voient plus que les défaites, à tous ceux qui sont enfermés dans le jeu politique bourgeois actuel (parlements, syndicats), nous opposons ici une réponse ferme : construire ce parti, entreprise commencée depuis 68, et le construire ici à Longwy dans le mouvement.
QUE FAIRE MAINTENANT ?
                Il y a les négociations usine par usine, première manière de diviser l'unité du mouvement. 
                Et que disent ces négociations ? Maintien des licenciements, plus manoeuvres de division des ouvriers.
-1) Nous pensons déjà qu'à Longwy, il faudrait travailler à l'unité entre Rehon d'un côté, la Chiers et Usinor de l'autre. C'est l'ensemble du bassin qui doit répondre et ne pas laisser se divisez, d'ailleurs des licenciements sont aussi prévus à Rehon.
-2) La prime de départ des 5 millions (5 plus 1 pour les immigrés). Elle est destinée à diviser les célibataires plus mobiles des gens qui ont une famille, une maison,.., les français des immigrés.
                Si cette prime commence à être acceptée, c'est la fin du mouvement. II ne suffit donc pas d'être contre. Il faut organiser le refus de la prime. Il faudrait que se crée des comités ouvriers de vigilance qui discutent minutieusement avec tous de ce refus, qui tiennent compte des situations particulières, difficiles, pour maintenir le front uni contre les patrons et l'État.
                Discutons de cette proposition. Déjà, des immigrés en ont discuté entre eux et sont bien décidés à refuser ensemble les 6 millions.
-3) C'est l'ensemble du peuple de Longwy qui est dans le coup.
C'est à dire aussi les jeunes, les femmes, les immigrés, les chômeurs.
Jusque là, on les a vus dans les manifestations, mais personne ne leur a jamais réellement demandé leur avis. Le mouvement ne pourra pas se consolider s'il ne fait pas place aux aspirations, aux idées de tous ces gens de Longwy.
                - Ainsi, les immigrés du foyer Sonacotra de Mont-St Martin font grève des loyers depuis 8 mois, et font partie du mouvement national de grève. Ils risquent des expulsions imminentes. L'État va essayer de développer le racisme contre eux, sur le fait qu'ils devraient partir. Il est tout à fait important de tenir compte de ces problèmes et d'affirmer, l'unité active entre français et immigrés.
                - Les jeunes des lycées et CET sont révoltés. Ils sont directement concernés par l'avenir de leur région. Ils veulent être pris en considération dans la suite du mouvement. Ils cherchent leur propre voie, leur mot d'ordre. C'est important de les soutenir et de leur donner toute la place qui leur revient.
- Les femmes révoltées sont laissées pour compte jusqu'à maintenant, mais elles sont aussi une force qui doit s'organiser.
- Combattre la division entre Rehon, la Chiers, Usinor
- Organiser le refus des 5 millions
- Prendre en compte Les intérêts des immigres, des jeunes, des chômeurs, des femmes pour se renforcer.
                3 objectifs possibles aujourd'hui dans la bataille contre les licenciements.
U.C.F.M.L.
 

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DOCUMENT N° 4: Tract à la marche du 23 Mars
(U.C. F M. L.)

 LA SITUATION EN LORRAINE, LA MARCHE DU 23 MARS LA POLITIQUE DE L'U.C.F.M.L.

1. La situation en Lorraine :

Nous en sommes. Dores et déjà , 3 points sont importants :
1) Faire partager la conviction que la révolte violente laisse en blanc pour l'instant la question d'une véritable politique face à l'État et à la bourgeoisie. De là : la CGT, le PCF mais aussi le PS et pourquoi pas le RPR, sont libres de faire leurs choux gras d'une colère que pourtant ils redoutent. Le mot d'ordre " pas un seul licenciement et maintient de la sidérurgie ", s'il n'est pas accompagné d'une authentique politique du mouvement et de son organisation interne, peut rapidement se dégonfler. Le fait d'accepter ou non la prime de départ volontaire de 50 000F est un élément essentiel de la division des sidérurgistes, alors qu'il est donné comme un point de négociation parmi d'autres.
2) II est inutile de se lamenter plus longtemps sur la division syndicale et de courir après une unité illusoire. La division syndicale, c'est une division entre deux politiques, celle du PCF-CGT, celle de la CFDT. Il est complètement illusoire de vouloir ressouder deux politiques contraires et qui surtout ne sont ni l'une ni l'autre l'expression d'une politique révolutionnaire.
                La seule et vraie question, c'est de construire la politique du peuple et de commencer à la faire apparaître dans la révolte de Denain et de Longwy.
3) Une politique autonome du peuple ne commence qu'à partir du moment où on s'est exprimé sur ce qu'on veut. C'est loin d'être clair encore aujourd'hui. Peut-être est-il nécessaire de dire ce qu'on ne veut pas. De l'énumérer. Pas un seul licenciement est un mot d'ordre général mais aujourd'hui mou dans la réalité si on ne détaille pas les choses, si le peuple n'a pas là-dessus son propre plan de bataille.
                De plus, parmi les sidérurgistes, il y a des Français et des immigrés, ceux-là même qui font grève dans les foyers Sonacotra. Se sont aussi battus les jeunes chômeurs, les femmes, les lycéens et les ouvriers des usines non sidérurgistes.
                Déjà une série de directives se dessinent : contre les 5 millions, pour l'unité avec les chômeurs, les femmes, les immigrés, les jeunes. La semaine passée, à l'initiative de l'UCFML s'est tenue une réunion à Longwy. A partir du moment où la colère s'empare d'une ville, d'une région, ce serait s'affaiblir considérablement que de ne pas voir comment le mouvement peut faire droit et place aux chômeurs, aux jeunes, aux immigrés, aux femmes. Or, dans ce domaine rien n'a encore été fait.
                Il faut trouver aussi les formes de rassemblement, de mobilisation, d'action qui permettent l'avancée sur ces questions, et la consolidation d'une force politique autonome. C'est le point de départ d'une politique qui soit réellement capable de faire reculer l'État. L'État a reculé devant les actions coup de poing et la colère populaire. L'État ne reculera que s'il a peur du peuple. 
 
2. La marche PCF-CGT :
                La marche de ce Vendredi 23 à Paris, est une initiative de la CGT et du PCF face aux licenciements dans la sidérurgie en Lorraine, mais aussi une pièce dans sa politique d'ensemble face à la politique giscardienne.
                La marche s'inscrit de plus dans la conjoncture particulière des élections cantonales et des élections européennes.
                La volonté du PCF et de la CGT est de clore la phase de la violence populaire, de l'empêcher d'aider à la constitution d'une véritable force du peuple sur ses propres objectifs, et en définitive de faire servir le temps des coups de poing comme une force de pression pour obtenir que Barre tienne à nouveau compte de la CGT. Alors que depuis l'échec des élections de 78, la collusion avec l'État lui était plus difficile. Le PCF, lui, vise, sur le dos du peuple, à devenir la seule force d'opposition, brandissant son " pouvoir " sur les masses.
 
                Le peuple a aujourd'hui 2 ennemis :
a- La bourgeoisie giscardienne et l'État complètement déchaînés contre le peuple depuis la victoire aux législatives de Mars 78, attelés à 2 grands projets :
- restructurer l'économie c'est-à-dire le profit impérialiste avec une pratique d'un cynisme absolu face au peuple : C'est non seulement le chômage, les licenciements, la liberté des prix et des loyers mais aussi la politique du nucléaire, la désertification des campagnes, l'oppression accrue sur les employés, la restructuration du système scolaire.
- essayer de transformer la France en un pays raciste avec une véritable politique d'apartheid à l'égard des immigrés (répression de la lutte des foyers Sonacotra, non renouvellement des cartes de séjour des ouvriers immigrés, en particulier Algériens, attentats racistes) et contre les étudiants étrangers (circulaire Bonnet)
                Le gouvernement prépare des lois véritablement odieuses contre les étrangers qui seront encore plus vulnérables et à merci des décisions de police. Prochainement nous appellerons à une manifestation pour nous y opposer.
                Ça c'est la bourgeoisie impérialiste ; impérialiste ne signifie pas simplement les expéditions militaires à l'étranger (Zaïre, Liban), c'est aussi la société impérialiste en France.

 

Vue de la manifestation du 23 mars

(Photo UCFML)

 

                b- 2ème force politique contre le peuple et sa révolte : le PCF. Son projet de société, c'est le capitalisme bureaucratique d'État, la dictature des gestionnaires, des experts et des chefs syndicaux. Le PCF veut une société impérialiste mais de type nouveau, c'est l'État qui détient le capital, c'est l'État qui distribue les profitss et bien évidemment c'est le PCF qui contrôle l'État. Il compte maintenir le colonialisme, le néo-colonialisme et tout ce qui supporte l'impérialisme français dans une politique générale qui vise non à augmenter le pouvoir des masses et à faire dépérir l'État comme dans le socialisme, mais au contraire à étatiser complètement la vie des gens.
                Nous maoïstes, nous combattons sans merci la bourgeoisie impérialiste mais aussi le PCF et avec lui la CGT. Mais aussi la CFDT qui, tout en grognant, travaille à la même politique. Nous sommes contre le syndicalisme qui, soit est une pièce de la politique du PCF(CGT), soit fait : croire que l'on peut se passer de politique (CFDT)
 
3. Qui sommes - nous ?
                1. Des révolutionnaires maoïstes, c'est-à-dire des gens qui sont pour l'unité du peuple contre la bourgeoisie et l'impérialisme. Nous sommes une organisation implantée dans de nombreux endroits en France. Notre journal s'appelle " Le Marxiste-Léniniste ".
                2. Le nouveau parti que nous voulons créer n'existe pas encore. Nous n'avons pas décidé arbitrairement de le créer. Tout notre travail consiste à en discuter avec le peuple et dans le mouvement des luttes pour que le jour où ce parti se fondera, il soit véritablement celui des intérêts révolutionnaires des ouvriers et du peuple.
                3. Nous sommes :
- marxistes : c'est la théorie vivante de la lutte de classe contre la bourgeoisie et pour le communisme.
- maoïstes: Notre politique, c'est d'avoir confiance dans les capacités politiques du peuple, dans les ouvriers, dans leur lutte contre le capitalisme et la crise ; dans les jeunes, dans leur refus de la société d'aujourd'hui, dans leur volonté d'autre chose, leur capacité à se lier au peuple et d'en être ; dans les femmes qui sont une grande force de révolte et de transformation ; dans les paysans pauvres et moyens qui sont ce que nous appelons le peuple des campagnes.
                Nous sommes de tous les combats anti-capitalistes d'aujourd'hui :
- contre les licenciements, contre l'intérim, contre les cadences
- Pour : à travail égal, salaire égal, droit au travail pour tous,
Nous nous battons contre le remembrement autoritaire en Bretagne, contre la politique du nucléaire, des camps militaires, et contre tout ce qui vise à chasser les gens des campagnes au profit de la société bourgeoise.
- Les immigrés sont pour nous une partie intégrante de la classe ouvrière, supportent aujourd'hui en première ligne les licenciements et la crise, mais aussi les expulsions, rafles et attentats. Nous nous battons pour l'égalité complète des droits entre français et immigrés et nous soutenons la grève des foyers Sonacotra dirigée par le Comité de Coordination.
                Le Parti à l'édification duquel nous travaillons est celui de cette politique et de ces combats. Nous vous appelons à rejoindre ces combats et à travailler avec nous à cette politique.
                                                                                                                                                Les Maoïstes de l'UCFML
 
                Pour discuter de la situation en Lorraine, de notre politique.
                REUNION : JEUDI 29 MARS - à 20 heures 30 Salle Saint-Bruno. 9 rue Saint Bruno, Métro : Marcadet

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DOCUMENT No 5 " DÉBATTONS DE LA NOUVELLE SITUATION ". (U.C.F.M.L.). 15 AVRIL.
                Les 2 mois qui viennent vont être décisifs pour l'avenir de Longwy. Le mouvement est entré dans un creux avec et depuis la marche du 23 Mars. Pendant ce temps l'État a mené avec les syndicat de pseudo-négociations et cherche à imposer ces conditions.
                Quelle est le résultat de la réunion de synthèse du 6 Avril ?

La Chiers

effectifs actuels                       1750
suppressions d'emplois         1270
(1979) dont :
retraites (50 ou 55 ans)           360
licenciements 5 millions         86
mutations Nves-Maisons      364
mutations Usinor-Longwy    420
division formation                 40
Licenciements 1980
              train à feuillard         280
Maintien                                 140 (aglomération)
                                                 disparition aciérie
                                                 et haut-fourneaux

 

Usinor-longwy

7450
1220
 
1120
100
 
 
 
2700 prévus
 
300 (cokerie)
licenciement 80
suspendus avec
Discussion en cours
Usinor-Cokerill, sur
L'usine de Rehon.

 

  
Que faut-il en penser ?
-1) Le plan de liquidation est maintenu. Les " concessions " (report de licenciements) d'Etchegaray sont uniquement dues au fait qu'il n'a pas déjà mis la main sur Rehon.
-2) L'État joue les installations contre les hommes, " Maintien des installations " annoncent les journaux. Mais il y a déjà, dès cette année, 2080 postes supprimés dans les deux usines.
Maintien des hommes au travail ici, OUI !
Maintien d'installations qui se vident, NON !
-3) A sa manière, Etchegaray applique le premier mot d'ordre, celui de l'Intersyndicale :
- aucun licenciement : voyons, il n'y a que des suppressions d'emplois, mais pas de licenciement. Ce ne sont que mutations, retraites, formations, départs " volontaires " à 50 000F
- pas un boulon démonté : maintien des installations pour l'instant (sauf la Chiers).
- la sidérurgie vivra à Longwy, avec trois usines, on va en traficoter une seule, bien " compétitive ", comme un jeu de mécano : agglomération (Chiers), cokerie (Mont Saint Martin), hauts-fourneaux (Usinor) aciérie et laminoirs (Rehon) trains finisseurs (Usinor).
               Evidemment, ce qu'on ne dit pas, c'est que le jour où cette usine sera mise sur pied, il y aura des milliers de licenciements, à Usinor comme à Rehon. Et là, ils ne pourront plus tranférer d'une usine à l'autre car les vases communicants seront bel et bien percés !
               Que faire, quel objectif, quelle lutte maintenant ?
               Ne restons pas crispés sur un mot d'ordre qui a épuisé tous ses effets, battons-nous sur le vrai terrain, celui de l'intérêt fondamental des ouvriers et du peuple de Longwy : le droit de travailler et de vivre ici.
Car le résultat de la " synthèse ", c'est déjà des gens qui vont partir.
    - les mutés, les départs à 50 000f, les gens " formés " (pour quelle destination ?) sans compter les mises à la retraite anticipée qui vont diminuer la valeur des retraites dans une société qui est déjà fermée aux gens âgés.
    - et puis pour tous ceux qui entourent la sidérurgie, ceux de Bertoldi, de Mousset, de Casole, du gros œuvre, de la sous-traitance, il n'y aura même pas de mutations ni de 50 000F. Ce sera le licenciement direct. Chez les marchands d'hommes que sont Crémona, Weit, etc… ce sera la fin de mission comme ils disent ! Fin de travail sur un simple coup de téléphone, l'insécurité totale et pour beaucoup, les immigrés, la menace de l'expulsion du territoire.
        Ce sont aussi des changements importants dans le travail :
        Passage en discontinu, suppression d'équipes, pertes de salaire, et inévitablement l'intensification du travail alors que des licenciements sont prévus. Déjà des révoltes contre cela et contre les chefs ont eu lieu à Usinor.
        Voilà ce qui, en tout état de cause, est déjà promis à Longwy.
VA-T-ON ACCEPTER CELA MOYENNANT QUELQUES FAUX-SEMBLANTS, OU VA-T-ON SE BATTRE, TOUS ENSEMBLE, POUR VIVRE ET TRAVAILLER ICI, SANS PERTES DE SALAIRE NI DE QUALIFICATION ? Telle est la question, posée clairement !
- camarades immigrés, faites valoir auprès de tous votre expérience de déracinés, d'éxilés, de sans-famille !
- Jeunes et chômeurs, faites valoir votre droit à bâtir votre avenir ici, selon vos aspirations, vos diplômes.
- Femmes, osez dire ce que voudra dire pour vous le départ et la mort lente d'une ville !
Tous ensemble, que cette force soit un appui solide pour que les sidérurgistes puissent effectivement refuser les 50 000 F, les mutations. la formation...
Nous proposons d'en débattre en vue de reprendre l'initiative.
l'action (manifestation etc…) sur un objectif précis qui marque un nouvel élan populaire dans les deux mois qui viennent. Réunion-publique : Samedi 21 avril (Hôtel de ville…)
U.C.F.M.L

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DOCUMENT No 8: "SONACOTRA, SIDÉRURGIE, UN SEUL COMBAT !" (U.C.F.M.L.)
 
LE COMITÉ DE RÉS1DENTS DU FOYER SONACOTRA DE MONT-SAINT MARTIN APPELLE A UNE RÉUNION DE SOUTIEN ET D'INFORMATION LE SAMEDI 5 MAI à 15 H au FOYER !
Depuis 8 mois en grève des loyers, les résidents de Mt St Martin font partie du grand mouvement des foyers Sonacotra. qui sous la direction d'un Comité de Coordination national et régional, et sur la base de sa plate-forme, concerne plus de 130 foyers et 40 000 personnes.
Cette lutte, aujourd'hui, il faut la soutenir, et ce plus que jamais. La Sonacotra et l'Etat ont décidé d'expulser les résidents. A Strasbourg, les CRS ont encerclé le foyer au petit malin, jeté les résidents dehors, fermé les portes à clef et mis les affaires des résidents dans des sacs poubelles sur le trottoir !
        ICI AUSSI, LES EXPULSIONS PEUVENT COMMENCER DES DEMAIN !
C'est pourquoi il fau aller à cette réunion du Comité de Résidents pour se préparer à empêcher les expulsions.
Ce n'est pas une simple question de solidarité. Le mouvement Sonacotra est important pour tous : qu'il se termine et tout le monde en sera affaibli !
        -1 La lutte de la Sonacotra défend le droit à des logements corrects et des prix justes.
        -2 Elle est le seul exemple d'un mouvement tenant tête à l'État depuis 4 ans. Pour tous ceux qui se demandent comment vaincre la politique de l'État. être capable de lui résister de manière prolongée, elle est un grand exemple et un précieux encouragement.
        -3 Les expulsions des foyers ne feraient que préparer l'expulsion du territoire. Stoléru veut mettre les immigrés sous sa botte en faisant un chantage sur le renouvellement des papiers. Il lui faut commencer par briser le mouvement Sonacotra. L'acceptation des discriminations contre les étrangers, c'est comme cela que l'Holocauste a commencé !
Français , immigrés. Anti-racistes, levons nous contre les lois Stoléru, pour l'égalité complète des droits entre Français et immigrés. 
        -4 Ici, la lutte de la Sonacotra et la lutte contre les licenciements doivent marcher d'un même pas. Que l'État réussisse à licencier, muter, appliquée son plan et il pourrait liquider la grève de la Sonacotra. Et vice-versa. Ces deux mouvements contre la politique d'État sont indissociables !
                Voilà pourquoi nous soutenons cette réunion organisée par le Comité de Résidents, et nous vous appelons à y aller, que vous soyez français ou immigres !
Les maoïstes de I'U.C.F.M.L.

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DOCUMENT No 7: Tract CFDT - 28 Juin
SOS EMPLOI CFDT                 Le 29 Juin, tout peut changer, si nous le voulons tous !
 
Gouvernement et patronat trompent les travailleurs.
        Des discussions sont engagées, alors que le plan industriel n'est pas modifié. Depuis 3 mois, avec l'opération 5 millions, ils veulent détruire la lutte de Longwy en la pourrissant de l'intérieur.
        Les promesses d'emplois (OS sur les chaînes automobiles venues d'ailleurs) qui s'évanouissent. montrent à l'évidence que cette opération démagogique a pour but principal de faire avaliser le plan de démantèlement.
ETCHEGARRAY A MENTI !
        Avec un têtard de plus de 5 semaines, il convoque le 29 Juin les syndicats pour annoncer les décisions sur Senelle et Rehon. Mais déjà il met en cause la marche des installations d'Usinor en favorisant au maximum de débit de fuite, qu'il avait fixé lui-même au départ à 186 personnes !
        Et il poursuit le démantèlement de la Chiers par la mise en 2 équipes au train feuillard et la programmation de l'arrêt total de l'usine.
LA CFDT LONGWY RESTE FIDELE AUX ENGAGEMENTS PRIS DEVANT LES TRAVAILLEURS ET LA POPULATION.
        La CFDT Longwy a exprimé à sa fédération son désaccord sur des propositions industrielles qui condamneraient Longwy à terme et sur une discussion sociale engagée sans que le dossier industriel soit revu.
        - la CFDT Longwy refuse donc de participer à la discussion sociale tant que cette condition ne sera pas remplie.
        - la CFDT se prononce résolument pour le maintien de 2 usines intégrées et cohérentes d'Usinor-Longwy et de Cockerill-Rehon.
ELLE EXIGE: le maintien de la phase liquide dans chacune de ces 2 unités avec la construction d'une cornue de 125 tonnes à L'usine de Senelle. 
CETTE SOLUTION EST LA SEULE QUI ASSURE :
        - l'avenir du bassin de Longwy autour d'une sidérurgie puissante, indispensable à la réussite d'une diversification industrielle.
        - la garantie de pouvoir faire face à un redressement de la conjoncture
que la CFDT considère comme inéluctable. Le plan d'Usnor, sans ambition condamne en effet toute perspective d'avenir des produits longs sur la base de prévisions pessimistes et fausses.
LA CFDT PENSE QU'IL FAUT FAIRE LE BILAN DE 6 MOIS DE LUTTE.
                En particulier, il faut en dégager les points négatifs.
        - Malgré notre insistance nous n'avons pas une intersyndicale structurée et au service des travailleurs et de la population.
                Au contraire, les positions syndicales se sont éloignées.
        - Nous n'avons pas su créer une véritable unité populaire active et large, en particulier parce que des actions collectives n'ont pas été organisées (la grève des impôts par exemple), mis à part les manifestations et le blocage des feuilles d'impôts mal préparé.
        - Le problème de La lutte dans les entreprises n'a pas été assez débattu avec les travailleurs pour être véritablement pris en charge par eux. C'est la raison de l'échec de la grève à Usinor.
        - Des couches entières de la population n'ont pas été vraiment intégrées, les chômeurs, les lycéens, les retraités, les immigrés, les femmes à qui on a fait surtout appel en tant que mère ou épouse de sidérurgistes.
        - Nous avons trop concentré notre lutte sur la seule sidérurgie (avec des accents nationalistes voulus par certains), et nous sommes restés sur : l'aciérie à Usinor Longwy, isolant de fait les travailleurs de la Chiers et de Rehon.
        - Nous avons été piégés par les organisations nationales et en particulier politiques qui nous ont utilisé pour leurs perspectives électorales.
D'AUTRES PROBLEMES SE POSENT A NOUS :
- la période des congés payés, propice aux mauvais coups arrive.
- le gouvernement prépare des lois racistes contre les travailleurs immigrés.
- les résidents Sonacotra sont menacés d'expulsion.
- le pouvoir ne se satisfera pas longtemps du seul brouillage des radios, il va tenter autre chose.
- le patronat va vouloir mettre en place son plan de démantèlement.
- 700 jeunes sortant de l'école vont se trouver chômeurs sans avoir travaillé.
- Comment mettre dans le coup, tous les secteurs d'activité de Longwy autres que la sidérurgie. Ils ont des revendications à défendre.
- Comment mettre dans le coup, ceux qui ont pris leur compte, écoeurés et ceux qui aspirent à une préretraite ?
        Toutes ces questions, ils faut les résoudre si nous voulons aller plus loin.
        Maintenant que le tintamarre des querelles politiciennes est terminé pour un moment,
AVANT LE 29 JUIN, IL J-AUT RECRÉER LES CONDITIONS DE L'UNITÉ A LA BASE !
La CFDT est pour une rencontre rapide de les organisations du Bassin de Longwy.
La CFDT est pour une proposition d'action qui rassemble tous les travailleurs et toutes les couches de la population.
POUR GAGNER LA BATAILLE DE L'EMPLOI, NOUS DEVONS
        RETROUVER L'UNITÉ DU 19 DECEMBRE
Longwy 18 Juin 79
CFDT.


POUR TOUS CONTACTS . écrire à l'adresse suivante :

LE MARXISTE - LENINISTE BP 278 - 75 827 Paris Cedex 17

 

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