Le Parti du Travail d'Albanie
réécrit son histoire
A lire les documents officiels
albanais d'aujourd'hui comme les écrits encenseurs
français du PTA, le Parti du Travail d'Albanie serait
le premier et le seul à avoir véritablement
combattu le révisionnisme khrouchtchévien au
cours de la bataille des années 60 au sein du
Mouvement communiste international. Quiconque met en doute
cette affirmation tombe sous le coup du qualificatif de "
serpent venimeux " d'Enver Hoxha.
Encore faut-il la prouver !
Assurément, le Parti du Travail d'Albanie a
joué un rôle dans la lutte contre le
révisionnisme moderne à cette époque.
Personne ne le nie. Mais pourquoi cet acharnement à
prouver qu'il est le premier ?
Nous sommes retournés aux
sources, aux textes et avons étudié le texte
intégral et original du Rapport d'Enver Hoxha au IIIe
Congrès du PTA.
Ce Congrès se tient en mai
1956, trois mois après le XX" Congrès du Parti
communiste d'Union soviétique. Ce fameux XXe
Congrès fut le premier pas caractérisé
de la direction soviétique dans la voie du
révisionnisme. Khrouchtchev y répudia Staline
sous couvert de " lutte contre le culte de la
personnalité" et y avança une série de
thèses révisionnistes : la thèse du
passage pacifique au socialisme, la conception
révisionniste de la coexistence pacifique et de la
"compétition pacifique". la thèse selon
laquelle les guerres impérialistes ne sont plus
à l'ordre du jour, etc.
Comment le PTA
réagit-il à ces reniements lors de son IIIe
Congrès ?
Voilà ce qu'en dit L'Histoire du Parti du travail
d'Albanie éditée en 1971 (pages 427
à 443 de l'édition en français) :
" Dans tous les secteurs, le IIIe
Congrès décida à l'unanimité et
sans la moindre hésitation de poursuivre la ligne
marxiste-léniniste suivie par le parti depuis sa
fondation.
" Toutes les conclusions et les
décisions du IIIe Congrès du Parti du travail
d'Albanie étaient pénétrées d'un
esprit révolutionnaire marxiste-léniniste qui
était, en son essence , à l'opposé de
l'esprit révisionniste dont étaient empreintes
les conclusions et les décisions du XXe
Congrès du PCUS.
" Néanmoins, le IIIe Congrès ne
dénonça pas ouvertement les thèses
antimarxistes du XXè Congrès.
" L'essentiel était que le Parti du
travail d'Albanie, à la différence de ce qui
se produit dans plusieurs autres partis communistes et
ouvriers, ne fit aucune concession de principe face à
la pression du groupe de Khrouchtchev et n'adoptât pas
comme base de sa propre ligne la ligne révisionniste
du XXe Congrès du PCUS. Il garda intacte sa ligne
générale marxiste-léniniste
".
Ce texte laisse entendre que la
dénonciation ouverte ne fut pas faite par
opportunité car il n'aurait pas été
encore temps de mener la bataille à visage
découvert. Et ce point de vue tactique serait tout
à fait acceptable.
La vérité oblige
à dire néanmoins que cette présentation
des faits de 1971 n'est pas conforme au texte original de
1956 et que les historiens de l'Institut des Etudes
marxistes-léninistes de Tirana ont
procédé à une manipulation
malhonnête de la réalité historique.
C'est ce que nous voulons prouver ci-dessous par un examen
attentif de l'original du IIIe Congrès de 1956 et par
une étude comparée de ce texte avec une
réédition de 1975 dans les Oeuvres
choisies d'Enver Hoxha (Tome II, page 508).
Il existe en effet deux versions du Rapport
d'Enver Hoxha au IIIe Congrès :
- le texte
intégral publié après le
Congrès, en 1956. dont nous possédons
l'original, texte difficile à se procurer aujourd'hui
;
- une
réédition en "extraits" de 1975 (Tome
II).
L'étude comparée des
deux textes est édifiante, les coupures et les
modifications de la réédition de 1975 donnent
une appréciation du XXe Congrès du PCUS
contradictoire avec celle du texte de 1956. Qu'on en juge
rapidement par la comparaison des deux conclusions
différentes selon les deux versions :
1975
" Notre parti marxiste-léniniste n'a
pas commis d'erreurs parce qu'il a été
dirigé d'une manière juste par le CC, parce
qu'il a toujours été compact, parce qu'en
toute chose et à chaque pas, il s'est guidé
sur les intérêts supérieurs de notre
peuple et a construit sa ligne générale sur
les fondements du marxisme-léninisme...
"
(Tome II.)
1956 : le Parti
n'avait pas commis d'erreurs car il a construit sa ligne
générale sur :
"
l'expérience du glorieux Parti communiste de l'Union
soviétique, dont la politique léniniste a
été et sera toujours juste,
indépendamment des graves erreurs qui se sont
vérifiées dans le travail de Joseph
Vissarionovitch Staline ".
(texte original)
Voilà un remaniement de
textes qui en dit long... mais ce n'est pas le seul. De
fait, les coupures, escamotages et remaniements concernent
des points fondamentaux de la lutte contre le
révisionnisme moderne :
la ligne générale du Mouvement
communiste international, la question de la Yougoslavie, la
question de Staline.
la ligne générale du mouvement
communiste international
Dans les vingt premières
pages de l'original, il est traité de l'Union
soviétique et de son XXe Congrès. Ces pages
n'ont pas été rééditées
dans le Tome II. Surtout " en (leur) essence ", les
thèses énoncées dans ces pages ne sont
pas du tout " à l'opposé de l'esprit
révisionniste ". En voici les preuves :
n A
propos de la coexistence pacifique :
Sans aller jusqu'à
dénoncer ouvertement la thèse de Khrouchtchev,
était-il nécessaire de la louer avec tant
d'enthousiasme ?
" Les questions de principe qui furent
posées au XXe Congrès du Parti communiste de
l'Union soviétique en ce qui concerne le
développement de la situation internationale actuelle
ont une grande importance historique pour l'humanité
et constituent un trésor précieux qui vient
s'ajouter au marxisme-léninisme dans les
circonstances concrètes de la situation
internationale actuelle. Le principe léniniste de la
coexistence pacifique des deux systèmes, du
système socialiste et du système capitaliste,
a toujours guidé la politique pacifique de l'Union
soviétique. " (...)
" Les communistes affirment que le
système socialiste triomphera du système
capitaliste dans la compétition pacifique et le
triomphe du communisme est inévitable en raison de la
supériorité du système socialiste sur
le système capitaliste. Cette grande
vérité a été confirmée
par la vie et elle gagne des centaines de millions
d'hommes. "
(texte original)
n Les
guerres impérialistes sont-elles inévitables
?
Citons un passage de l'original non
réédité :
" Une autre thèse d'une grande
importance de principe, que le XXe Congrès du Parti
communiste de l'Union soviétique vient d'ajouter au
marxisme-léninisme, c'est la question de la
possibilité de conjurer les guerres à
l'époque actuelle . Cette question qui préoccupe
continuellement l'humanité, a reçu une
réponse juste et scientifique de la part du
Comité central du Parti communiste de l'Union
soviétique. Les guerres à notre époque
ne peuvent pas être fatales et inévitables;
"dans la question de savoir si la guerre aura lieu ou non,
une grande importance s'attache au rapport des forces de
classe, des forces politiques, au niveau d'organisation et
à la volonté consciente des hommes". Les
thèses marxistes-léninistes selon lesquelles
les guerres sont inévitables tant qu'existe
l'impérialisme, ont été
formulées à l'époque où
l'impérialisme était un système mondial
unique et où les forces sociales et politiques
opposées à la guerre étaient encore
assez faibles. Tandis que, à notre époque, les
forces du socialisme et de la paix dans le monde sont
très puissantes. Le camp du socialisme est une force
colossale et le socialisme est aujourd'hui un système
mondial. La politique pacifique du camp du socialisme jouit
de l'appui de centaines de millions d'hommes dans le monde
et de beaucoup d'Etats pacifiques, C'est ainsi que,
actuellement, existent des forces ayant des moyens moraux et
matériels puissants pouvant empêcher les
aventuriers impérialistes de déclencher une
troisième guerre mondiale. Cependant, la thèse
léniniste selon laquelle, aussi longtemps qu'existe
l'impérialisme, reste aussi la base économique
pour le déclenchement des guerres, garde toute sa
valeur; c'est pourquoi les forces du socialisme et de la
paix doivent être toujours vigilantes.
"Ces thèses importantes du Parti
communiste de l'Union soviétique ont ouvert devant
l'humanité des perspectives radieuses, ont
suscité l'enthousiasme, éveillé les
espoirs des peuples et renforcé leur lutte pour la
défense de la paix. Les peuples du monde se rendent
mieux compte à présent que la guerre ne plane
pas sur leur tête comme l'épée de
Damoclès et qu'ils sont en état de briser pour
toujours cette épée qui a causé
à l'humanité tant de catastrophes
périodiques. Le monde va connaître
désormais un mouvement encore plus puissant et plus
vaste des partisans de la paix ; de nombreux autre Etats
dans le monde vont conquérir encore leur
indépendance nationale et adopteront une attitude
pacifique, loin de la guerre, loin des pactes agressifs
tramés par les impérialistes
américains ".
(texte original)
II y a d'autres endroits dans le
rapport du IIIe Congrès où le problème
de la guerre est traité. Nous retrouverons ces
passages sans coupures dans la réédition, en
particulier: Oeuvres choisies, page 513.
Le Parti du travail
d'Albanie a adopté cette thèse
révisionniste de Khrouchtchev à son IIIe
Congrès et l'a conservée jusqu'à ce
jour, à la différence des autres thèses
khrouchtchéviennes qu'il dénonça
ultérieurement. Le passage ci-dessus présente
un intérêt particulier : il revendique
clairement la paternité de cette thèse du XXe
Congrès du PCUS. C'est sans nul doute la raison de
son escamotage lors de la réédition de 1975.
n Sur
le passage pacifique au socialisme :
Là, Enver Hoxha fait
carrément le pas :
" La thèse sur les formes du passage
des divers pays au socialisme, basée sur les
célèbres thèses du grand Lénine,
ouvre devant les peuples et la classe ouvrière de
tous les pays des perspectives éclatantes pour le
passage au socialisme par des voies diverses. La question du
passage au socialisme, par la guerre civile ou sans la
guerre civile, est également une grande
lumière et une aide très précieuse pour
les partis de la classe ouvrière et pour les peuples
travailleurs, pour prendre le pouvoir en main, pour
réaliser les transformations sociales,
pour transformer le
parlement bourgeois, là où la bourgeoisie
n'est pas en mesure de recourir à la
violence et
d'opposer la force, en un moyen de la véritable
volonté populaire, pour assurer le passage des
principaux moyens de production entre les mains du
peuple ".
(texte original)
Pour camoufler le soutien objectif
du IIIe Congrès aux thèses du XXe
Congrès du PCUS, la réédition est
obligée de supprimer les deux paragraphes
publiés ci-dessous :
" Pour passer au socialisme, le recours ou non
à la violence et à la guerre civile ne
dépend pas tant du prolétariat que de la
bourgeoisie, Pour le passage au socialisme, les partis
communistes et ouvriers auront toujours en vue les
enseignements de Lénine, qui souligne que "pour
toutes les formes de transition au socialisme, la direction
politique de la classe ouvrière, avec en tête
son avant-garde, est une condition indispensable, la
condition majeure. Sinon, il est impossible de passer au
socialisme ".
" Ces thèses qui enrichissent le
marxisme-léninisme ouvrent devant la classe
ouvrière et les masses travailleuses des pays
capitalistes: coloniaux et semi-coloniaux,
des perspectives
éclatantes
pour réaliser l'unité de la classe
ouvrière, à laquelle incombe la tâche de
rassembler sous sa direction la paysannerie travailleuse,
les intellectuels et tous les homme honnêtes,
pour opérer
les transformations radicales dans la voie vers le
socialisme, vers la
conquête du pouvoir et l'effondrement des forces
réactionnaires capitalistes qui dominent à
l'heure actuelle les peuples de ces pays. C'est
précisément pour tout cela que le XXe
Congrès du Parti communiste de l'Union
soviétique a suscité un enthousiasme
indescriptible dans le monde entier
précisément pour cette raison que les
documents du XXe Congrès sont étudiés
avec le plus grand soin et sont devenus le phare
éclairant tous les hommes d'action et de bonne
volonté qui luttent pour la paix et pour une vie
meilleure ".
(texte original)
Et ce ne sont pas les seuls
passages qui glorifient le XXe Congrès. Il y en a
d'autres.
Mais ceux-ci ont une
signification politique nullement ambiguë.
le parti du travail d'albanie et la yougoslavie
Dans la préface au Tome II,
il est écrit :
" En un temps où sous l'influence du
PCUS la plupart des partis communistes et ouvriers avaient
cessé leur lutte contre le révisionnisme
yougoslave, le PTA continuait sa lutte sans répit et
avec la plus grande âpreté, non seulement parce
que ce courant était l'ennemi du
marxisme-léninisme et constituait un danger pour
l'ensemble du Mouvement communiste et ouvrier international,
mais aussi parce que son propre combat contre ce courant
contribuait puissamment à la lutte contre toute forme
de révisionnisme, surtout contre les thèses
antimarxistes du XXe Congrès du PCUS
".
Or, là encore, il
faut un escamotage malhonnête dans la
réédition de 1975 pour pouvoir établir
le caractère " sans répit " et la "
plus grande âpreté " de la lutte
antititiste du PTA.
Qu'indique le Tome II
quant aux relations albano-yougoslaves à cette
période ?
" Nos relations amicales avec les peuples
frères de Yougoslavie sont entrées dans la
voie normale et elles se renforcent de jour en jour... Nous
avons conclu et mis en oeuvre avec la RPFY plusieurs accords
dans l'intérêts commun et établi avec
elle des relations commerciales et culturelles.
"
(texte du Tome Il)
Autrement dit, l'édition de
1975 laisse entendre qu'il s'agit là uniquement de
relations d'Etat à Etat, alors que la lutte
antititiste se développe avec
âpreté et sans répit.
Telle n'est pas la
vérité cependant. Les pages 35, 36 et 37 de
l'édition originale de 1956, pudiquement
remplacées en 1975 par des points de suspension,
méritent d'être lues avec attention. Les voici
:
" Le peuple albanais et le Parti du travail
d'Albanie ont salué avec enthousiasme et ont
pleinement approuvé la déclaration de Belgrade
signée entre les dirigeants de l'Etat
soviétique et de l'Etat yougoslave au mois de juin
1955 et se sont beaucoup réjouis de la normalisation
des relations entre l'Union soviétique et la
Yougoslavie. La même voie de normalisation et
d'amélioration ont suivie aussi les relations de
notre peuple et des peuples des autres pays de
démocratie populaire avec les peuples de Yougoslavie.
C'était là un grand succès pour nos
pays et un échec pour les plans de
l'impérialisme et de son agent Béria qui avait
monté la grande provocation diabolique, laquelle a
causé le désaccord amer entre nos pays et la
Yougoslavie.
(...)
Ces points de suspension
correspondent à des passages publiés dans le
Tome II des OEuvres choisies, page 523.
" La déclaration de Belgrade a
été également un tournant radical pour
les relations de notre Etat avec la Yougoslavie. Les
relations entre le Parti communiste albanais et le Parti
communiste yougoslave, comme on sait, ont été
cordiales dès avant la libération.
Après la libération se sont établies
entre nos Etats des relations plus larges. Durant cette
période dans ces relations se sont
vérifiées des erreurs et des
déformations de principe qui devaient être
corrigée par la voie normale ; mais, malheureusement,
elles n'ont pas été corrigées. Il faut
souligner que, malgré tout cela, notre Parti, non
seulement n'a pas mis en doute l'amitié avec la
Yougoslavie, mais il a fait tous les efforts jusqu'au
dernier moment pour que l'amitié et les relations
établies ne fussent atteintes.
" Notre Parti s'est solidarisé avec les
résolutions du Bureau d'information. Nous avons
reconnu et nous reconnaissons que nous avons
été trompés, comme ont
été trompés les autres partis
communistes et ouvriers, par la provocation ourdie contre la
Yougoslavie par le vil agent de l'impérialisme,
Béria. Dans les circonstances difficiles ainsi
créées, nous avons, de notre part, lié
toutes les questions ensemble : les fautes et les
différends qui existaient entre le Parti communiste
albanais et le Parti communiste yougoslave, ainsi qu'entre
nos deux Etats, les délits et les crimes de Kotchi
Dzodzé commis contre le Parti et l'Etat, pour
lesquels il a été condamné comme il le
méritait, ainsi que la grande provocation
montée par l'agent Béria.
" Dans ces circonstances-là, il
était difficile pour nous de ne pas lier ensemble ces
trois questions, au lieu de les apprécier, comme il
fallait, séparément. C'est là une
erreur de notre part. Plus tard, la logique de la lutte qui
nous opposait l'un contre l'autre nous a amenés
à des erreurs consistant à nous servir
d'accusations infondées, montées par l'agent
Béria contre le Parti communiste yougoslave et l'Etat
yougoslave, à accuser la Yougoslavie comme un pays
ennemi et comme un instrument de l'impérialisme, le
Parti communiste yougoslave comme un parti fasciste et les
dirigeants yougoslaves comme des antimarxistes, etc. Ces
accusations étaient injustes; nous avons de notre
part eu tort dans ces questions. Maintenant, tout est clair,
notre Parti a reconnu les erreurs qui le concernent parce
qu'il les a analysées objectivement et il est
résolu à ce que le passé amer soit
enterré et il n'existe plus aucun obstacle pour le
renforcement de l'amitié sincère entre nos
deux Etats et nos deux partis. Nous sommes sûrs qu'une
telle amitié dans l'esprit du
marxisme-léninisme et sur la base de la
déclaration de Belgrade s'élargira et se
renforcera continuellement. Nous sommes unis par la lutte
héroïque de libération que nous avons
faite ensemble, nous sommes unis par les idées
immortelles du marxisme-léninisme qui inspirent nos
partis, nous sommes unis par la lutte commune contre les
convoitises de l'impérialistes et des ennemis de nos
peuples qui tentent de semer la discorde entre nous et de
nous diviser. Avec la
République populaire fédérale de
Yougoslavie, nous avons conclu et mis en oeuvre plusieurs
accords dans l'intérêt
commun
(souligné par nous -NDLR). Nous avons établi des relations
commerciales et nous ferons tout notre possible pour les
élargir chaque année. De concert avec les
Yougoslaves, nous avons décidé
d'étudier les possibilités de la construction
de certaines oeuvres de grande importance économique
pour nos deux pays. Dans notre pays sont venus des artistes
yougoslaves. Nous enverrons en Yougoslavie les nôtres.
Nous attendons avec plaisir que les frères
yougoslaves viennent visiter notre patrie, que des troupes
de théâtre, des groupes de sportifs, des
touristes viennent chez nous. Nous aussi, nous enverrons en
Yougoslavie les nôtres.
Nous voudrions
et demandons de projeter sur les écrans de notre pays
des films yougoslaves, d'échanger de la
littérature, etc. Tout sera fait de notre part, dans
ce sens et nous sommes persuadés que la même
volonté existe aussi chez les camarades yougoslaves
pour renforcer notre amitié dans l'esprit nouveau de
l'intérêt commun et de la non-ingérence
dans les affaires intérieures ".
(texte original)
Ce long passage escamoté
contredit l'affirmation de la préface de 1975
concernant la lutte " sans répit ", " avec
la plus grande âpreté " : des relations de
parti à parti fraternelles ont été
établies quelques mois. En novembre de la même
année, le PTA reprend l'attaque contre Tito en raison
de son attitude à propos des événements
de Hongrie et de Pologne.
Mais pourquoi cacher la vérité ?
Pourquoi escamoter l'attitude réellement
adoptée au IIIe Congrès ?
le pta et la question de staline
Dans le Tome II, la publication du
Rapport du IIIe Congrès remanie à
volonté tous les passages traitant de cette question.
Dans l'original, cette question est traitée dans le
Chapitre III, sous-chapitres 6 et 7. Dans la
réédition, il n'y a plus que le sous-chapitre
6, habile compilation des 6-7 originaux. Nous ne publions
ici que les passages omis concernant la question de Staline.
Nos points de suspension signalent des passages cités
dans le Tome II, pages 627 et suivantes.
Au début de
l'année 1957, dans un texte intitulé Sur la
situation internationale, Enver Hoxha refait ensuite
volte-face sur la question de Staline, affirmant que:
" Sur les questions
essentielles, dans la défense des
intérêts de la classe ouvrière et dans
le combat pour la théorie marxiste-léniniste,
dans la bataille contre l'impérialisme et les autres
ennemis du socialisme, il ne s'est jamais trompé. Il
était et demeure un exemple ".
Ce n'est pas du tout le
point de vue développé en mai 1956. Qu'on en
juge:
7 - Le culte de la
personnalité et ses conséquences nuisibles et
autres questions.
"
Le XXe Congrès du Parti communiste de l'Union
soviétique a fait une profonde analyse
marxiste-léniniste du rôle décisif
joué dans l'édification du socialisme et du
communisme par les masses populaires, dirigées par le
Parti communiste, et du grand dommage causé par le
culte de la personnalité, étranger au
marxisme-léninisme. La Résolution du XXe
Congrès , dit:
" Le
Congrès estime que le Comité central a eu
parfaitement raison de se lever contre le culte de la
personnalité dont l'extension amoindrissait le
rôle du Parti et des masses populaires, rabaissait le
rôle de la direction collective dans le Parti et
entraînait souvent de graves défauts dans le
travail ".
(...)
" Le culte de la personnalité signifie
l'exaltation exagérée des individus,
l'attribution de caractéristiques et de
qualités surnaturelles à ceux-ci, leur
transformation en êtres qui font des merveilles et,
enfin, l'agenouillement devant eux. Ces conceptions non
justes et non marxistes sur l'individu,
étrangères et nuisibles à l'esprit du
marxisme-léninisme, ont été
développées et cultivées pendant une
très longue période à l'égard du
camarade Staline.
" Il n'y a pas de doute que le camarade
Staline a de grands mérites devant le Parti
communiste de l'Union soviétique, devant la classe
ouvrière de l'Union soviétique et le mouvement
ouvrier international. Il est évident qu'il a
joué un rôle connu dans la préparation
et le développement de la révolution
socialiste. dans la Guerre civile et dans la lutte pour
l'édification du socialisme. En commun avec les
autres membres du Comité central, il a lutté
contre les déformateurs et les ennemis du
léninisme. Dans les conditions où le peuple
soviétique, guidé par le parti communiste,
remportait avec succès de grandes victoires dans la
lutte pour l'industrialisation socialiste du pays, pour la
collectivisation de l'agriculture, pour l'accomplissement de
la révolution culturelle, victoires qui ont
été remportées dans une lutte sans
relâche contre les ennemis du léninisme, les
trotskystes, les boukharinistes, les opportunistes de
droite, les nationalistes bourgeois, a été
rendue possible la propagation, parmi les larges masses du
peuple, du nom et de la valeur de J.V. Staline qui tenait
l'important poste de secrétaire général
du Comité central du Parti communiste de l'Union
soviétique.
" Pendant ce temps, lorsque J.V. Staline a
acquis de la popularité, de la sympathie et de
l'appui dans le parti et chez le peuple, dans sa personne,
dons la pratique de son travail se sont manifestées
graduellement de telles caractéristiques et
dispositions qui se sont développées d'une
manière difforme, en devenant le culte de la
personnalité.
" Les grands succès historiques de
portée mondiale remportés par le peuple
soviétique dans l'édification du socialisme,
dans la victorieuse guerre patriotique, dans le
raffermissement du système social et étatique
soviétique et dans l'accroissement du prestige
international de l'Union soviétique, toutes ces
éclatantes victoires du peuple soviétique,
sous la direction du parti communiste n'ont pas
été soumis à une juste
interprétation marxiste-léniniste mais ont
été injustement attribués aux
mérites d'une seule personne, à Staline, et
ont été tous expliqués par ses
mérites à lui. La grande erreur de J.V.
Staline réside en ce que, non seulement il a admis
les louanges et les flatteries à son adresse, mais il
a, de sa part, soutenu et encouragé ces points de vue
antimarxistes.
" Le culte de la personnalité et la
pratique de direction créés par J.V. Staline
ont marqué la violation ouverte et difforme des
principes léninistes de la direction collective dans
le Parti, ont marqué la violation des normes
léninistes du parti. Le mépris de J.V. Staline
pour les normes de la vie du parti, la solution des
problèmes d'une manière individuelle de sa
part, le mépris envers l'opinion du parti, en prenant
même des mesures sévères contre ceux qui
exprimaient des opinions contraires aux siennes, ne
pouvaient pas manquer de causer et ont causé de
grands préjudices, en donnant lieu à de graves
altérations des règles léninistes dans
la vie du parti et à la violation de la
légalité
révolutionnaire.
" Le culte de la personnalité et le
mépris, à l'égard des critiques et des
conseils, formulés à juste litre par les
membres du Bureau politique du Comité central du
Parti communiste de l'Union soviétique, ainsi
qu'à l'égard des normes du parti, ont conduit
le camarade Staline à des erreurs ; il n'a pas
montré la vigilance nécessaire à la
veille de la guerre patriotique contre le nazisme allemand ;
il n'a pas consacré l'attention voulue au
développement ultérieur de l'agriculture
socialiste et au bien-être matériel des
kolkhoziens; il a soutenu et incité dans une ligne
erronée l'affaire yougoslave, etc. Dans de pareilles
circonstances, le camarade Staline s'est montré
unilatéral dans ses idées et s'est
détaché des masses.
" Le culte de la personnalité et la
violation des normes de la vie du parti ont servi comme le
terrain le plus favorable dont ont tiré avantage les
ennemis du parti et de l'Etat soviétique, tel que
l'agent de l'impérialisme, Béria, qui pendant
longtemps a agi, sous masque, au détriment du parti
et de l'Etat socialiste.
" Le Parti communiste de l'Union
soviétique et son Comité central
léniniste ont pris des mesures décisives pour
le rétablissement des normes léninistes dans
le parti, pour le rétablissement du principe de la
direction collective dans tous les maillons du parti, de
haut en bas, pour le développement de l'autocritique
et de la critique, pour la discussion et la solution
collectives des questions les plus importantes. Les mesures
prises par le Comité central du Parti communiste de
l'Union soviétique et le XXe Congrès pour
rétablir et développer davantage les principes
démocratiques de la vie et de l'activité du
parti, les mesures prises contre la gestion par les
méthodes bureaucratiques, contre la dissimulation des
défauts, le maquillage de la réalité,
la satisfaction béate, l'indifférentisme,
ainsi que les mesures prises pour développer la
critique et l'autocritique concrètes, de principe,
sont en train d'assurer une activité plus grande de
la part des travailleurs et des communistes en
développant l'immense énergie créatrice
des hommes soviétiques.
"
Les succès historiques du peuple soviétique
sont une preuve éclatante et convaincante du
caractère juste de la politique du Parti communiste
de l'Union soviétique. Le fait que le Parti
communiste de l'Union soviétique a mené une
politique résolue contre les défauts dans le
travail du parti et du gouvernement, dans
l'édification économique, pour éliminer
les conséquences du culte de la personnalité
est une autre preuve de la grande puissance du parti et de
sa grande fidélité à l'égard du
léninisme. (Applaudissements). C'est seulement sur le
libre développement de ces survivances
petites-bourgeoises au sein de nos partis communistes et
ouvriers que les impérialistes peuvent trouver appui
pour affaiblir les partis communistes et les Etats
socialistes.
"Le Parti du travail d'Albanie et le peuple
albanais tout entier ont pleinement approuvé les
décisions historiques et justes du XXe Congrès
du Parti communiste de l'Union soviétique et
considèrent ces décisions non seulement comme
une victoire éclatante du parti communiste et du
peuple soviétique, mais aussi comme une grande
victoire du Parti du travail et du peuple
albanais. (Applaudissements).
"
Notre parti et notre peuple approuvent la lutte hardie et de
principe menée contre le culte de la
personnalité. Le culte de la personnalité
à l'égard du camarade Staline a eu aussi des
manifestations très accentuées dans notre
parti et notre pays. Notre peuple et notre parti ont
souligné et souligneront, à juste titre, que
l'Union soviétique et le glorieux parti communiste,
fondés par le grand Lénine, sont les facteurs
décisifs de la libération, à jamais, de
notre peuple, et c'est pour cette raison que l'amour de
notre parti et de notre peuple à leur égard
sera indestructible et éternel. (Applaudissements prolongés.
Ovations. Les délégués se lèvent
debout). Mais maintenant
nous comprenons bien le rôle et la place qui doivent
revenir au camarade Staline dans l'édification du
socialisme et du communisme en Union soviétique et
dans l'aide et le rôle qu'il a joué pour la
libération de notre pays. La juste
compréhension marxiste-léniniste de cet
important problème de principe nous a
été rendue claire par le XXe Congrès du
Parti communiste de l'Union soviétique
"
(texte original)
--
Cette étude comparée
des deux versions du rapport au IIe Congrès du PTA
appelle plusieurs remarques :
n
D'abord, elle permet d'établir les faits. Lors de son
IIIe Congrès, en mai 1956, le PTA a
épousé assez étroitement les
thèses khrouchtchéviennes. Il ne s'agit pas
d'une simple tactique destinée à mener la
bataille dans de meilleures conditions
ultérieurement. Il s'agit bien d'une adhésion
politique claire, voire d'une glorification des
thèses du XXe Congrès du PCUS. Le Rapport du
IIIe Congrès du PTA exprime une appréciation
principalement négative de Staline ; il
déclare que les guerres sont évitables,
soutient les thèses du XXe Congrès quant au
passage pacifique et à la coexistence pacifique :
à cette époque, le PTA a interrompu sa
polémique contre la Yougoslavie.
En conséquence, les
thèses albanaises hautement claironnées selon
lesquelles le PTA a mené le premier la
bataille anti-khrouchtchévienne, leurs affirmations
d'une lutte sans répit contre Tito, tombent
d'elles-mêmes, à une simple lecture du texte
original de 1956 !
n Dans son
Histoire de 1971 et dans la réédition
de 1975, le PTA a falsifié la vérité.
Procédant par coupures, escamotages et remaniements,
il s'efforce de donner au IIIe Congrès un visage
contraire à la réalité des faits. Le
PTA veut accréditer le mensonge selon lequel le IIIe
congrès aurait participé à la bataille
contre le révisionnisme moderne. Cette pratique
révèle une attitude idéologique
contraire à la conception du monde des communistes
qui recherchent la vérité dans les faits et
pratiquent la critique et l'autocritique. Le mensonge et la
falsification sont étrangers au
marxisme-léninisme.
n
Reconnaître que la lutte du PTA contre le
khrouchtchévisme débuta après le
IIIe Congrès du PTA n'est nullement une infamie. La
prise de conscience du révisionnisme moderne fut pour
les partis et les militants communistes un processus long et
complexe qui aboutit à une bataille difficile. Le PTA
y a tenu une place, et cela est bien ainsi. Vouloir à
toute force se construire une image de marque de " parti
qui n'a jamais fait d'erreurs ", qui ne se trompe
jamais, qui est le premier partout... est également
étranger au marxisme. Le PTA pèche par orgueil
et par suffisance.
Assurément, de telles
pratiques idéologiques font perdre beaucoup de
crédibilité au PTA aujourd'hui. Comment le
croire sur n'importe quelle question s'il est prouvé
qu'il recourt sans vergogne à la falsification et au
mensonge pour étayer " ses thèses " ? Ces
manipulations malhonnêtes, ces prétentions
à la grandeur et à l'infaillibilité
jettent le discrédit sur la véracité de
tous ses écrits et déclarations actuels. Qu'il
ne s'en prenne qu'à lui-même d'un telle
situation.
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