REVOLUTION PROLETARIENNE

 

REVOLUTION PROLETARIENNE n°1. dec 1974 -mensuel-

revue politique mensuelle du Parti Communiste Révolutionnaire (m-l)

 

* Révolution Prolétarienne . . . p.2

* Intervention centrale, prononcée par Max Cluzot, secrétaire politique du PCR (ml) ...p.3

* Intervention : à bas l'hégémonie des 2 super-puissances. A bas l'impérialisme et le social impérialisme .p.10

* 20éme anniversaire de la lutte de libération nationale du peuple algérien (intervention de J.p. Gay) .p.12

* Lip, Saviem, Moulinex, Faulquemont, PTT..., les nouvelles aspirations de la classe ouvrière .....p.15

* politique de crise et crise politique .....p.17

* la lutte contre le réformisme et le révisionnisme:

 le 21ème Congrès du P"C"F . . . . .p.21

les assises du Parti socialiste........p.23

* pour la constitution d'une autenthique organisation communiste de la jeunesse ..p.24

* Résistance : introduction du camarade André Rourtan ancien FTP ancien déporté, président du PCR (ml)........p.26

* La justice. Non, LEUR justice . .. . . . . . . .p.28

* de la circulaire Fontanet aux mesures Dijoud. une seule volonté de la bourgeoisie : diviser le prolétariat ...p.29

* message de Marie-Claude Al Hamchari, euve de Mahmoud Al Hamchari, représentant de l'OLP. assassiné par les agents des services secrets israéliens le 9 janvier 1973 ...p.31

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"Révolution Prolétarienne" est le mensuel politique du Parti Communiste Révolutionnaire (marxiste-léniniste). Chaque mois, à partir de janvier, il développera les positions du Parti. des points de ligne, des bilans d'expérience, de manière plus complète, plus vendue et plus développée que cela peut être fait dans Front Rouge, l'organe central du Parti.

Ce premier numéro constitue une sorte de numéro zéro. Il rassemble d'une part un certain nombre des interventions qui ont été faites lors du rassemblement communiste du 3 novembre, d'autre part, la plupart des textes qui avaient introduit les forums-débats de ce rassemblement. Ces textes constituent ainsi un abrégé des positions du Parti sur toute une série de questions ayant trait à notre révolution. Les prochains numéros de "Révolution Prolétarienne" reviendront plus en détails sur ces différentes questions. Nous rappelons d'autre part, que notre Parti compte dans le cadre des "cercles Que faire" organiser régulièrement une série de débats publics sur ces questions à Paris et dans un certain nombre de villes de Province. Le lieu et la date des réunions des cercles seront publiés régulièrement dans Front Rouge.

 

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INTERVENTION CENTRALE, PRONONCEE PAR MAX CLUZOT,

SECRETAIRE POLITIQUE DU P.C.R.(ml)

La manifestation du 3 novembre à l'appel du PCR (m-l) de la Bastille au Père Lachaise

 

CAMARADES,

Si on en croit la bourgeoisie, l'avenir n'est guère rassurant. Son représentant à l'Elysée vient de le dire: après les années de vaches grasses, voici les années de vaches maigres qui commencent. Partout s'étale dans les journaux bourgeois, comme dans les déclarations gouvernementales, le même leitmotiv: la France est entrée dans la crise. Une crise économique sérieuse, une sorte d'affection maligne qui frappe en pleine prospérité un des meilleurs espoirs de l'impérialisme mondial. Souvenons-nous: voila un peu plus d'un an, les experts américains étaient formels: d'ici peu, l'impérialisme français allait dépasser tous

ses concurrents et son expansion ferait pâlir d'envie l'Amérique. Une ère de richesse sans précédent s'ouvrait, à condition bien sûr que la classe ouvrière comprenne son intérêt et fasse preuve de responsabilité en s'associant pleinement à l'effort national. Telle était du moins la propagande de la bourgeoisie à l'époque.

Aujourd'hui, les choses ont bien changé. La courbe de l'expansion économique de l'impérialisme français fait place, nous dit Giscard, à des courbes qui mènent à la catastrophe.

Catastrophe. c'est bien le mot clef, qui revient notamment dans la déclaration de presse du président de la bourgeoisie.

 

UNE POLITIQUE DE CRISE. OUI, MAIS DE CRISE POLITIQUE

Comment en est-on arrivé là ? Un changement aussi brutal est-il imputable à une politique sociale trop irréfléchie, trop hardie, la bourgeoisie a-t-elle été trop généreuse envers la classe ouvrière? Non. Nous sommes suffisamment mal payés pour le savoir, nulle impudence coûteuse' n'a été commise. Bien au contraire. Alors? Alors la bourgeoisie recourt à deux explications complémentaires: la hausse du prix du pétrole et l'inflation.

L'inflation? La bourgeoisie la présente comme une maladie nouvelle, apparue brusquement et risquant de mener à la catastrophe l'économie capitaliste.

Pourtant la hausse constante des prix est un phénomène ancien, qui, depuis des années, depuis l'avènement de l'impérialisme n'a pas cessé de se manifester.

Il est vrai que depuis deux ans le rythme de l'inflation s'est accéléré de façon sensible, et cela dans tous les grands pays capitalistes.

 

Mais à Qui profite l'inflation ? Grâce à l'inflation, las capitalistes abaissent constamment le niveau réel des salaires ouvriers, restreignant, par là, la consommation des masses, Grâce à l'inflation, ils prélèvent des sommes considérables sur l'épargne individuelle ou même simplement sur les salaires déposés en banque, ou aux chèques postaux. Grâce à l'inflation, l'impôt frappe des couches de plus en plus larges de la classe ouvrière; le volume des impôts indirects, la TVA en premier lieu, enfle sans cesse. Autant de moyens, pour la classe capitaliste, de prélever constamment et comme en douceur, sur les masses populaires une quantité considérable de capitaux qui servent à accroître les investissements des principaux trusts.

Si la bourgeoisie s'inquiète de l'accélération de l'inflation c'est uniquement parce qu'elle craint d'atteindre à un niveau tel que ses produits ne soient plus compétitifs sur le marche mondial.

La bourgeoisie cherche seulement à maintenir un taux d'inflation qui, tout en contribuant à pressurer les masses en France, reste toutefois inférieur ou au moins égal à celui de ses concurrents.

Du même coup, en dramatisant l'accélération de l'inflation, la bourgeoisie entend faire accepter un blocage plus ou moins déguisé des salaires. En vertu de la vieille rengaine: si les prix montent, c'est la faute aux augmentations de salaires. Et la taxe conjoncturelle de Fourcade, sous prétexte de lutte contre l'inflation, vise, en fait à mettre en place un système de blocage des salaires.

 

La hausse du prix du pétrole. Depuis un an, on n'entend parler que de cela. Comme si toute l'économie impérialiste dépendait du pétrole.

Qu'en est-il exactement? En fait, la hausse légitime du prix du pétrole n'a servi que de révélateur aux difficultés économiques de l'impérialisme. Elle n'en est pas la cause. On chiffre à 25% la part de la hausse des produits pétroliers dans la hausse des prix. Les secteurs industriels en récession, par exemple l'automobile, l'étaient bien avant l'augmentation du prix du pétrole, et ce n'est tout de même pas là qu'il faut chercher les raisons de l'effondrement de la livre-sterling un an plus tôt.

Expliquer les difficultés économiques actuelles par le prix du pétrole tient de la grossière mystification.

Si la bourgeoisie fait planer le spectre de la crise économique, si elle parle de catastrophe, d'effondrement, c'est bien pour masquer la réalité des transformations qui s'opèrent à l'échelle mondiale. En fait, toute la politique économique de l'impérialisme français a consisté depuis 1968 à constituer des monopoles de taille internationale capables, dans leur domaine, de s'imposer au plan mondial, tout en liquidant les secteurs incapables d'affronter la concurrence étrangère. Après l'échec relatif de la période gaulliste, dans laquelle s'était affirmé le projet de constituer une économie nationale solide dans son ensemble, le temps est venu des choix. Ainsi, l'armement, l'électronique, la chimie, la sidérurgie ont connu un développement considérable, marqué par de grandes concentrations.

Dans le même temps, l'impérialisme français a spéculé sur un maintien à très bas prix des matières premières et de l'énergie provenant des pays du Tiers-monde. Par exemple, l'installation à Fos d'un vaste complexe sidérurgique et la fermeture correspondante des entreprises de Lorraine s'expliquent par le très bas prix du minerai mauritanien, c'est à dire par l'exploitation éhontée des mineurs mauritaniens, par l'accentuation de la vieille politique de brigandage impérialiste. Mais ce que n'avait pas prévu, dans l'ajustement de ses plans, l'impérialisme, c'est le mouvement historique des pays du Tiers monde pour vendre à de meilleurs prix leurs ressources naturelles. Mouvement historique qui ne fait que s'engager mais qui affole déjà les puissances coloniales et néo-coloniales, mouvement qui gagne en ampleur et en décision et dont la première victoire, celle du pétrole, est riche de développements. Le Tiers monde contient l'essentiel du potentiel humain et des ressources naturelles de la planète, il représente une force considérable, dont l'impérialisme a commencé à mesurer la vigueur dans les guerres coloniales qu'il a menées autant de guerres, autant de défaites !

 

Prolétaires, peuples et nations opprimés du monde, unissons-nous pour vaincre

 

Vietnam, Algérie, Indochine, Guinée Bisseau, Angola. Mais battu sur le terrain, l'impérialisme a tenté de conserver ses positions sur le plan économique, prévenant même le développement historique, il a mis en place des régimes à sa solde, il est passé du colonialisme au néo-colonialisme. Et voilà qu'aujourd'hui, il lui faut encore reculer. Voilà qu'aujourd'hui les pays qui ont conquis leur indépendance par les armes entraînent ceux qui jusque là avaient fait bon ménage avec l'impérialisme à vendre à meilleurs prix leurs ressources naturelles. Voilà que s'organise à l'échelle du monde entier une vaste contre-offensive contre le brigandage impérialiste.

Aussi, de toutes parts dans le monde impérialiste, on crie au scandale, on parle de chantage, on appelle au meurtre. Il y a, dit-on, dans les tiroirs des grandes compagnies pétrolières un plan d'agression contre les pays producteurs de pétrole, un plan tout prêt, avec entraînement déjà effectué des marines dans le désert. Le plan vise les pays arabes, mais aujourd'hui c'est le Mexique et bien d'autres pays qui s'associent à l'OPEP et le risque d'une telle opération fait reculer jusque là les aventuriers impérialistes.

D'autant plus que la question du pétrole est loin d'être une question isolée. Certes, le prix des matières premières a baissé depuis un an de 2,5% environ, et c'est surtout le produit du vol supplémentaire que constitue l'inflation dans les pays impérialistes. Mais, la session de l'ONU sur les matières premières, dominée par les pays du Tiers monde, est bien la preuve qu'un mouvement d'ensemble s'engage et va connaître de nouveaux développements.

Aussi, la bourgeoisie impérialiste s'engage-t-elle en toute hâte dans une restructuration globale de toute son économie.

Sentant la menace venir, elle se lance dans une fuite éperdue en avant. Comme tous ses rivaux, l'impérialisme français cherche à parer au plus pressé, c'est à dire, à consolider les secteurs de production qui peuvent s'affirmer sur le marché mondial, au détriment des secteurs de production arriérés.

Mais une telle politique ne résoud rien, elle ne fait qu'aiguiser les contradictions inter-impérialistes à l'échelle mondiale, elle signifie en retour, de larges concessions aux sociétés multinationales d'origine étrangère. De plus, et c'est ce qui nous intéresse, la restructuration de l'économie impérialiste française entraîne de désastreuses conséquences pour les travailleurs. Elle signifie chômage, licenciements pour les travailleurs des secteurs sacrifiés, ou des secteurs dans lesquels s'effectuent les concentrations monopolistes, elle signifie pour tous les travailleurs, restriction de la consommation, hausse galopante du coût de la vie.

Pour réaliser ses objectifs de restructuration, la bourgeoisie française ne veut pas être prise à revers par sa classe ouvrière: pour justifier la restriction considérable de la consommation des masses, elle développe une campagne sans précédent sur la catastrophe imminente, sur la répétition de la crise de 29, bref elle dramatise.

 

France-Soir, titre, "L'heure n'est plus au profit, mais à la survie". Et l'on pressait de toutes parts Giscard de dire la vérité aux Français, c'est à dire de bien signifier à la classe ouvrière que l'heure de l'abstinence avait sonnée. Mais trop dramatiser n'est pas forcément un bon calcul. On pourrait voir se généraliser les luttes et les mouvements de protestation; à force de crier trop vite et trop souvent "au loup", il ne ferait plus peur. Aussi la bourgeoisie souffle-t-elle tour à tour le froid et le chaud, la menace et le réconfort, l'inquiétude et la sécurité. Si la tendance dans les grands moyens d'information manipulés est plutôt à la dramatisation, une faible lueur d'espoir apparaît quand même dans les déclarations officielles.

Mais ne nous y trompons pas. A travers ces apparentes contradictions, une politique consciente, bien orchestrée se dessine: une politique de crise.

 

Le fondement de cette politique de crise, c'est le fondement de toute politique de la bourgeoisie impérialiste, c'est la volonté de résoudre au profit de la bourgeoisie les contradictions de classe de la société. Pendant près de vingt ans, le moyen employé par la bourgeoisie pour y parvenir a été le modèle de la consommation. Tout a été entrepris pour faire croire aux ouvriers qu'un large développement de la production entraînerait nécessairement un accroissement de leur consommation, une amélioration de leurs conditions de vie.

On entrait dans la civilisation de la voiture, de la machine à laver et des loisirs. Sous son poids, le vieux mythe centenaire de la lutte de classes devrait être écrasé. Seuls quelques idéalistes coupés de la vie pourraient oser en parler encore!

Mais voilà que ce modèle de la consommation ne colle plus avec les exigences de la course au profit maximum de la bourgeoisie. La crise de surproduction qui gagne le secteur de l'automobile dans le monde entier, le besoin de concentrer les investissements dans les secteurs capitalistes les plus aptes à s'imposer sur le plan mondial, contraignent la bourgeoisie à modifier les bases de la collaboration de classes. Elle passe de la sorte du modèle de la consommation au modèle de la crise, c'est à dire, à la tentative d'associer la classe ouvrière à la gestion de ses difficultés économiques. Aujourd'hui, la bourgeoisie ne se contente pas de restreindre la consommation des masses, elle veut de plus leur consentement, elle veut éviter leurs luttes. C'est pour cela qu'elle dramatise, c'est pour cela qu'elle parle de catastrophe, c'est pour cela qu'elle rappelle la crise de 29. Mais la crise actuelle n'a rien à voir avec la crise de 1929, mais la crise actuelle n'est pas dans son fond une crise économique, c'est une crise politique.

LA BOURGEOISIE IMPERIALISTE NE PEUT PLUS GOUVERNER COMME AVANT

Au point actuel de développement de la crise générale de l'impérialisme, deux faits d'une portée historique considérable se conjuguent: l'émergence du Tiers monde comme force économique et politique décisive à l'échelle de la planète, le rejet par la classe ouvrière et les masses populaires des métropoles impérialistes de la société capitaliste. Le premier fait entraîne un reclassement continuel dans la position de chaque pays dans le monde. Voilà que des pays, mis il y a encore peu de temps en coupe réglée par l'impérialisme, en viennent à dire aux commissionnaires des grands monopoles: vos produits ne sont pas compétitifs; voilà que des pays qu'on engageait il n'y a pas si longtemps dans toutes les guerres inter-impérialistes, voilà que ces pays disent aujourd'hui, par exemple, aux bourgeoisies impérialistes: si vous continuez à soutenir l'état sioniste d'Israël nous ne pourrons plus traiter avec vous. Un tel renversement a des répercussions immenses sur la situation à l'intérieur même des métropoles impérialistes comme la France. La bourgeoisie doit renoncer à l'image glorieuse de sa toute puissance dans les affaires du monde, ses gouvernements apparaissent de plus en plus comme de simples voyageurs de commerce du grand capital. Seuls les deux impérialismes les plus importants, le russe et l'américain peuvent encore prétendre, de plus en plus difficilement, à gouverner le monde.

Ils rivalisent entre eux pour assurer leur hégémonie sur de vastes régions du monde. Ils tentent de pénétrer dans tous les pays en utilisant tous les moyens pour arriver à leurs fins: pillage économique, subversion.

Les peuples du monde commencent à connaître la politique de l'impérialisme américain, ils découvrent aujourd'hui que la politique du social-impérialisme n'est pas différente. Arborant l'enseigne du socialisme, le social-impérialisme soviétique foule aux pieds la souveraineté nationale d'un grand nombre de pays, envoie ses flottes de guerre sillonner les océans, n'hésite pas à démanteler des pays ou à changer leur gouvernement. Il participe au pillage du Tiers monde achetant à bas prix les matières premières, pratiquant des taux d'intérêt usuraires assortis de conditions économiques ou politiques draconiennes.

De plus les deux super-puissances exercent de fortes pressions sur les impérialismes les plus faibles, sur les impérialismes devenus secondaires comme l'impérialisme français et menacent même leur indépendance nationale. Il résulte de tout cela un affaiblissement continuel de la position de la bourgeoisie face à son propre prolétariat.

Or dans le même temps, la classe ouvrière a fait l'expérience de l'organisation capitaliste de la société. Elle n'en veut plus. A travers le modèle de la consommation diffusé par la bourgeoisie, la classe ouvrière a vécu une paupérisation croissante. La hausse des cadences, la vie de plus en plus chère, la dégradation accélérée de la qualité de la vie. L'organisation de la société par le capitalisme monopoliste d'Etat a pour conséquence de rendre indispensable toute une variété d'objets qui accroissent l'assujettissement de la classe ouvrière aux conditions de vie imposées par la bourgeoisie. Ainsi la déportation des ouvriers vers les banlieues entraîne souvent l'acquisition nécessaire d'une voiture, de ce fait, les banlieues sont de plus en plus éloignées, puisqu'on peut les rejoindre en voiture, l'allongement clandestin de la journée de travail par le temps de transport contraint les travailleurs à faire leurs courses une fois par semaine, ils ont donc besoin d'un réfrigérateur , et ainsi de suite. La consommation n'est que l'apparence, la réalité c'est la paupérisation, c'est la fatigue accrue, la journée la plus longue, le travail plus épuisant.

Mais le capitalisme monopoliste d'état, c'est aussi l'investissement de tous les aspects de la vie des masses, depuis la chambre de HLM conçue pour aller de l'armoire au lit et c'est tout , jusqu'aux relations familiales sapées par le travail en équipes. Les grands ensembles dans lesquels les travailleurs sont superposés et isolés entre eux, les loisirs centrés sur la télévision; c'est la reproduction dans tous les aspects de la vie, de ce que la bourgeoisie impose à l'usine: un travail absurde et mécanique, des gestes prévus à l'avance et contrôlés, la suppression de toute initiative.

Aussi, à ces formes modernes d'oppression, la classe ouvrière répond elle par des formes nouvelles de lutte, des luttes à travers lesquelles monte, irrésistible, l'aspiration à une société nouvelle, l'aspiration au socialisme. Pan par pan, la société capitaliste est remise en question. Luttes des OS contre l'exploitation outrancière qui met en pleine lumière l'esclavagisme de la production à la chaîne, lutte des Lip qui montre à l'évidence que les ouvriers peuvent se passer des patrons, luttes des paysans qui remettent en cause l'alliance de classes entre la bourgeoisie et la paysannerie par laquelle se sont faites tant de contre-révolutions et qui tracent, en plein été, la voie de l'alliance entre ouvriers et paysans. Mais aussi la lutte des femmes pour affirmer leur place d'égale de l'homme dans la société, leur droit d'élever les enfants qu'elles veulent, leur droit à l'avortement et à la contraception libres et gratuits.

Lutte contre la justice de classe, contre l'armée impérialiste, l'armée de guerre civile, contre l'école de la bourgeoisie, le système pénitentiaire... Au juste, qu'est-ce qui tient encore debout dans cette société de profit, quel secteur est-il encore épargné par cette immense vague de fond qui ébranle le vieux monde capitaliste? Partout la même question: à qui sert la production, à qui profite le travail, au service de qui fonctionne cette société? c'est à dire partout la même accusation. Partout la même volonté d'affirmer dans la lutte le sens de l'initiative ouvrière, partout la même volonté d'assurer son combat sans s'en remettre à d'autres.

Toutes ces luttes vont au-delà des objectifs revendicatifs qu'elles se fixent, elles sont toujours le terrain de débats politiques plus généraux. Examinons seulement tout ce que la lutte de Lip a vu poser comme questions politiques. La grève est bien aujourd'hui plus que par le passe, le lieu où enfin les travailleurs réunis dans la lutte engagent la critique du système capitaliste. Il y a quelques jours, les mineurs de Faulquemont ont occupé les puits. La direction des houillères avait décidé de noyer la mine, jugée non rentable. Plus de cent millions de tonnes de charbon englouties alors qu'à quelques dizaines de kilomètres de là s'ouvre une centrale thermique, fonctionnant avec du charbon allemand! Ce n'est pas seulement une illustration saisissante de l'anarchie capitaliste, c'est aussi un siècle de vie ouvrière, de combats, de luttes contre la nature et contre l'exploitation capitaliste que la bourgeoisie faisait disparaître.

C'est en définitive cette question: quelle est la place de la classe ouvrière dans la société que pose aussi la lutte de Faulquemont. Mais toutes ces luttes, menées sur tous les fronts, par les masses populaires ne se rassemblent pas encore en un puissant mouvement d'ensemble, soudé et sûr de sa perspective. C'est bien pour cela que la bourgeoisie dispose encore d'une certaine marge de manoeuvre, mais d'ores et déjà, elle ne peut plus gouverner comme avant.

 

Le faux libéralisme de Giscard d'Estaing d'une part, la solution réformiste révisionniste d'autre part, misent sur cette marge de manoeuvre, mais il dépend de nous qu'elle se rétrécisse davantage.

A l'intérieur du modèle de la crise, le gouvernement en place introduit en toute hâte une série de réformes. Il tente de traiter un par un les problèmes posés par les mouvements de lutte des masses populaires: réforme pénitentiaire, majorité à 18 ans, loi sur l'avortement, réforme de l'entreprise. Mais, dans le meilleur des cas, les lois qui en résultent ne font que rattraper en partie le décalage entre le droit et le fait; en vérité la plupart de ces réformes apparaissent pour ce qu'elles sont: de la poudre aux yeux, un escamotage grossier.

Lecanuet engage une soi-disant réforme pénitentiaire sur les cadavres des révoltés des prisons. Françoise Giroud prétend transformer la condition féminine par la double signature de la feuille d'impôt du ménage. Durafour conclut des accords "révolutionnaires" sur le chômage, en fait c'est pour prévenir de nouveaux Lip que la réforme des indemnités de chômage a été décidée, c'est un coupe-feu assez habile au moment où l'INSEE prévoit 10 000 chômeurs nouveaux chaque mois, mais insuffisant pour mettre un terme à la ferme volonté des travailleurs de voir leur emploi garanti. Que de licenciements en perspective quand la bourgeoisie se montre à ce point prévoyante !

En fait, rien ne peut être réglé, rien ne peut se résoudre sans la remise en question fondamentale du type d'organisation de la société par le capitalisme monopoliste d'état, sans la destruction de ce système d'exploitation, d'oppression et de misère.

REVISIONNISTES ET REFORMISTES N'ONT RIEN DE MIEUX A

PROPOSER QUE LES GERANTS ACTUELS DU CAPITALISME

Les partis révisionnistes et réformistes se montrent de plus en plus incapables de répondre aux aspirations nouvelles qui s'affirment dans les masses.

Car les Mitterrand, les Marchais, loin de remettre en cause la campagne alarmiste de la bourgeoisie, y participent activement et contribuent à la renforcer.

C'est Mitterrand qui parle de "l'approche de la crise", qui envisage la possibilité "d'une succession de faillite rappelant le mécanisme du krach de 1929". C'est Marchais qui dans son discours-programme d'Albertville répète que: "la politique réactionnaire a plongé le pays dans la crise..." " qu'il est exact de constater le sérieux de la crise..."

Et chacun à sa manière, au nom de la crise économique qui menacerait le pays, appelle, tout comme Giscard, les travailleurs à s'engager, au prix de nouveaux sacrifices, dans un plan de sauvetage de l'économie capitaliste en péril.

Le plan de Mitterrand a reçu les compliments de l'actuel ministre des finances Fourcade. Rien d'étonnant: il est entièrement axé sur la nécessité de restructurer et de reconvertir l'industrie française, de constituer une industrie exportatrice, de redéployer les exportations françaises, etc. Et pour cela, Mitterrand prévoit de drainer massivement les capitaux. Il ne s'agit plus de lancer un emprunt de 10, mais de 20 millions dès maintenant. Il s'agit de créer une banque du développement industriel, qui injecterait dans les trusts nationalisés ou privés des capitaux énormes pour leur permettre de se réorienter.

Mais que signifierait pour les travailleurs l'application de cette vaste stratégie capitaliste, mise au point avec l'aide de Rocard ?

Pour les salaires, Mitterrand promet l'échelle mobile! Mais le SMIC est soumis, depuis longtemps, à une sorte d'échelle mobile et le résultat, les travailleurs payés au SMIC le connaissent bien : le SMIC ne cesse d'accumuler du retard par rapport à l'accélération de la hausse des prix.

La hausse des prix? Mitterrand nous promet une réduction de la TVA sur certains produits. Giscard l'avait déjà réalisé pour les biftecks. Résultat: les prix n'ont pas baissé mais ont monté en flèche, dès que la TVA a été rétablie.

Le chômage que multiplie nécessairement une telle politique de restructuration et de reconversion à grande échelle?

Mitterrand n'en dit pas un mot.

Voilà donc les seules promesses de Mitterrand: hausse camouflée des prix, et blocage déguisé des salaires par l'échelle mobile.

 

Par contre, un certain nombre de choses sont claires:"1e rationnement du fuel domestique est une nécessité". Avis aux travailleurs qui, dès maintenant, dans les usines, dans les cités HLM, ont engagé la lutte contre les restrictions du chauffage.

Conclusions de Mitterrand: il faut"une répartition légitime de l'effort demandé à chacun". C'est à dire aux capitalistes, de crédits généreux pour restructurer leurs entreprises; aux ouvriers, le rationnement, la restriction de leur consommation le blocage des salaires, le chômage.

Et cette phrase qui en dit long: "le retour à l'abondance par l'avènement d'un nouveau modèle de civilisation reste un objectif possible à distance." Autrement dit, nous vivions paraît-il, dans l'abondance... Mais c'est bien fini maintenant et, avec un gouvernement de gauche, il n'en sera plus question avant longtemps...

Quant au programme économique de Marchais -son discours d'Albertville- il part du même point de vue:"le pays est plongé dans la crise" il propose, à peu de choses près, le même type de solution que Mitterrand. Ce faisant, Marchais, avec quelques mois de retard, en arrive, comme Mitterrand, lors de sa campagne présidentielle, à jeter par-dessus bord les quelques revendications précises du Programme Commun auxquelles les travailleurs pouvaient être attachés : plus question de la retraite à 60 ans, plus question du retour à la semaine de 40 h, plus question d'un relèvement chiffré du SMIC.

Non:"résorber le déficit de la balance des paiements" voilà l'objectif n°1 de Marchais à présent. Et, en système capitaliste, comment y parvenir autrement qu'en pressurant davantage principalement la classe ouvrière?

Ainsi la politique actuelle de la bourgeoisie et les solutions proposées par le P"C"F et le parti socialiste coïncident. Rien de fondamental ne les sépare. Il s'agit toujours, en brandissant l'épouvantail de la crise économique, d'amener la masse des travailleurs à accepter de nouveaux sacrifices, à payer, par une exploitation renforcée, le prix de la restructuration de l'économie impérialiste française.

Mais les leaders de la "gauche" peuvent avoir, par rapport à Giscard et aux partis de droite au pouvoir, un atout majeur, pour mieux appliquer cette même politique, pour mieux inciter les travailleurs à la collaboration de classes: Il comptent sur leur capacité à duper les masses. Mitterrand l'a dit assez clairement:"il n'y a pas de politique économique crédible sans un consensus social" Consensus social, c'est à dire collaboration de classes.

Au fur et à mesure que prend corps dans les luttes l'aspiration à une autre société, le P"C"F et le PS, chacun à sa façon, s'emploient à obscurcir, à avilir toujours davantage l'idée du socialisme.

Marchais a expliqué, en toute franchise, à deux journalistes bourgeois, l'orientation fondamentale du 21 ° Congrès du P"C"F: "J'ai dit au Comité Central et je le redis dans le Parti partout où je vais: que cela nous plaise ou non, il n'y a pas aujourd'hui en France de majorité qui souhaite passer à la construction d'une société socialiste." Conclusion: "on ne changera pas de société, puisque de société il n'y en a que deux: capitaliste ou socialiste. Mais on changera des choses..." C'est clair et net, pas question de socialisme. Aménageons le capitalisme. Il y a une dizaine d'années, le P"C"F cultivait l'illusion qu'une démocratie avancée, c'est à dire un gouvernement de gauche établi après un succès électoral, constituait une étape transitoire indispensable pour passer ensuite au socialisme.

Puis, quand il s'est agi de signer le contrat d'association avec la vieille social·démocratie rénovée, et donc de donner un peu de

consistance à cette sorte de purgatoire imaginaire, à mi-chemin du capitalisme et du socialisme, on a commencé par en rabattre de moitié: sur l'ampleur des nationalisations et sur toute une série d'autres promesses. C'est ce qui s'est appelé Programme Commun.

À présent, le P"C"F, c'est vrai, se montre à coeur ouvert : le programme commun? oui, mais il faudra le réactualiser, au gré des circonstances électorales. La transition au socialisme ? Mais non, pas du tout! Il n'y a aucun engrenage qui mène de l'application du programme commun au socialisme. Au contraire comme le souligne un lecteur zélé de l'Humanité, le peuple pourra choisir démocratiquement un gouvernement: après un gouvernement de gauche, un gouvernement de droite!

Aux travailleurs de plus en plus nombreux qui se posent la question du socialisme, il est répondu nettement: pas question de socialisme en France et avant longtemps, très longtemps. Pour adhérer au P"C"F, il n'est plus besoin du tout c'est désormais officiel de se déclarer, fut-ce du bout des lèvres , partisan du socialisme. Non. Il suffit de se déclarer partisan de "changements démocratiques limités". C'est à dire essentiellement de quelques nationalisations qui n'ont jamais fait de mal, bien au contraire, à la classe capitaliste.

Avec un tel programme, le P"C"F compte rallier des gaullistes, et ils sont nombreux aujourd'hui qui cherchent à se recaser. Et ainsi, des responsables de la jeunesse révisionniste sont allés prendre contact avec l'UJP, ce rassemblement de jeunes bourgeois, d'apprentis politiciens ratés, qui servaient à l'occasion de force d'appoint aux nervis gaullistes des SAC.

Avec un tel programme, le P"C"F compte rallier les petits et moyens patrons. Il leur promet de leur multiplier généreusement crédits et subventions quand il sera au gouvernement.

Rallier des gaullistes et des patrons à un tel programme, ce n'est, sans aucun doute, pas impossible.

Mais comment les travailleurs, eux, pourraient-ils trouver dans un tel programme une réponse à leurs aspirations profondes?

Symbole particulièrement criant de la dégénérescence du P"'C"F, son principal dirigeant, Georges Marchais, sur qui la bourgeoisie braque les caméras complaisantes de la télévision.

Marchais qui, en 36, alors que des jeunes de 16 ans, comme le camarade André Roustan, président de notre Parti, s'engageait avec enthousiasme dans les Brigades Internationales ; Marchais, qui lui, ne songeait qu'à sa promotion personnelle, à devenir aristocrate ouvrier

Marchais qui, fin 42, avant même le STO, part en Allemagne fabriquer les avions qui bombardaient l'Armée Rouge ! Marchais qui, aujourd'hui, à l'instar de tous les complices des crimes nazis, prétend qu'il était possible de les ignorer.

Marchais qui calomnie notre peuple tout entier en spéculant sur les résultats de référendums qui auraient pu être organisés sous la botte de l'occupant, en prétendant qu'ils lui auraient été à 90% favorables. Quel triste fin pour le parti qui, voici 30 ans, était reconnu de tous comme le Parti des Fusillés !

Marchais, c'est l'homme qui, adhérant au PCF en 1947 n'accepte d'y devenir permanent qu'à partir du moment où il y trouve une meilleure place que chez son bon ami, son patron, le père Voisin qu'il voyait souvent et chez qui, nous dit-il, il était une sorte d'intouchable. C'est lui qui, aujourd'hui, déclare ouvertement que pour notre pays, il exclut toute solution révolutionnaire. Regardez le, Marchais, étaler sa satisfaction d'être parvenu, parvenu par la politique, la politique de collaboration de classe, la politique bourgeoise.

Regardez le bien et posez-vous la question: qu'est ce qu'un homme comme ça a de commun avec la classe ouvrière? La réponse viendra d'elle-même: Strictement rien !

 

CE QU'IL FAUT, C'EST UN AUTHENTIQUE PARTI COMMUNISTE

 

Camarades,

De tels partis et de tels hommes, la classe ouvrière ne peut attendre que le renforcement de son exploitation. Mais la domination révisionniste sur la classe ouvrière commence à être sérieusement ébranlée. En effet, si le révisionnisme a pour fonction de ramener à son projet de sauvegarde de la société capitaliste toutes les aspirations diffuses des masses au socialisme, il se trouve parcouru par de terribles contradictions.

Comment concilier en effet la politique d'entente avec les forces réactionnaires, gaullistes, centristes, la défense des PME et la radicalisation des aspirations révolutionnaires des masses?

A l'aise dans le modèle bourgeois de la consommation, le révisionnisme se trouve de plus en plus en porte à faux quand la bourgeoisie engage le modèle de la crise et quand la classe ouvrière, les masses populaires lui ripostent . Plus son programme devient semblable aux programmes des autres partis bourgeois, et plus la concurrence de la vieille social-démocratie rénovée est dangereuse. C'est ce qu'ont bien montré les dernières législatives partielles. Aussi, le faux constat d'unité établi au XXle Congrès du P"C"F est bien révélateur en vérité des graves contradictions internes qui le parcourent. Ces contradictions reflètent les contradictions entre le révisionnisme et les masses. La force apparente du parti révisionniste: ses 400 000 membres, ses milliers de permanents, son passé, bien qu'il le renie, ne sont que des avantages provisoires. Le parti passoire qui a perdu la moitié de ses membres depuis 1968 pour en gagner autant ou un peu plus, ce parti où les cadres font la loi dans les cellules d'entreprise est un parti dans lequel l'unité est fragile. Il y a trop d'ouvriers sincères, de militants dévoués et honnêtes mais abusés par la force apparente dans ce parti pour que nous ne poussions à fond le développement des contradictions qui le parcourent. Car Marchais a raison quand il affirme, au début de 1968, "il n'y a de place en France que pour un seul Parti Communiste". Seulement ce parti, en aucune façon ce n'est le sien! Le Parti Communiste, c'est le Parti qui conduit les masses à l'insurrection victorieuse, c'est le Parti qui rassemble vers l'objectif central de la destruction de l'appareil d'Etat bourgeois, de la construction de la société nouvelle, toute l'énergie révolutionnaire des masses. Ce n'est pas le parti de la collaboration de classe, et du réformisme, ce n'est pas le parti de Marchais. Construire un tel Parti, telle est bien la tâche historique sans laquelle la classe ouvrière et les masses populaires ne peuvent vaincre.

Il faut un Parti de type nouveau. Un Parti qui saisisse le mouvement historique dans son ensemble, un Parti qui s'appuie sur l'expérience du mouvement ouvrier international, mais surtout un Parti qui construise la précision de sa ligne politique et le développement de son organisation sur les aspirations révolutionnaires des masses.

Il ne peut y avoir d'un côté l'analyse politique d'ensemble abstraite, élaborée sur la base des grands développements des contradictions internes du monde impérialiste et de l'autre côté les aspirations diffuses, mais concrètes, riches de l'imagination créatrice, riches de la force de la vie que portent en elles les masses.

Le seul Parti qui puisse résoudre la crise politique au profit du prolétariat et des masses populaires, c'est un Parti qui unisse en un tout ces deux mouvements. Il faut un Parti qui s'assimile les leçons universelles des expériences les plus avancées du mouvement communiste international et qui trouve sa force dans la grande vague de fond qui secoue la société impérialiste.

Le Parti que nous voulons se construit dans toutes les grandes luttes, en réalisant la fusion des aspirations révolutionnaires les plus vives et du point de vue d'ensemble sur le processus historique. A Lip, à Saviem, à Moulinex et dans bien d'autres usines, c'est ainsi que commence à se construire le Parti.

 

Un tel Parti pense toujours les contradictions qu'il rencontre en étroite liaison avec les contradictions présentes dans les masses. Il n'est pas au-dessus d'elles, il n'est pas infaillible, il n'est pas à l'écart, mais au coeur même de leurs contradictions.

Aujourd'hui, il n'est pas de tâche plus urgente que de construire un tel parti. Au moment où, dans les luttes, l'avant-garde des masses trouve suffisamment de force et de décision pour balayer les obstacles mis en travers de son chemin par les révisionnistes et les réformistes, il est non moins inévitable qu'elle refuse l'occupation du terrain politique par les partis bourgeois déguisés en partis ouvriers.

Le prolétariat, en France, est riche d'expérience, de succès et d'échecs, de plus d'échecs que de succès; mais aussi de plus de vigilance. Son nouvel élan révolutionnaire s'enrichit encore, par sa composante immigrée, de l'audace des luttes menées par le Tiers monde...

Toutes les conditions sont remplies pour construire un puissant parti communiste. Il est temps d'en finir avec les hésitations, de renverser tous les obstacles, de balayer le réformisme et le révisionnisme.

Il s'agit, camarades, de s'engager résolument, largement, dans la préparation consciente de cette révolution à laquelle aspirent, dans le fond, les masses prolétariennes et populaires de notre pays. De marcher à grands pas vers l'instauration en France d'un régime d'où sera bannie l'exploitation de l'homme par l'homme, d'un régime où les travailleurs auront enfin eux-mêmes leurs propres affaires en mains, du pouvoir des ouvriers et des paysans, du socialisme !

Construire l'instrument de cette grande lutte, construire le Parti de la classe ouvrière, c'est votre affaire à vous tous, travailleurs qui ne reconnaissez plus dans le parti de Marchais le parti du prolétariat révolutionnaire. Vous qui, ayant fait dans la lutte l'expérience concrète des méfaits du réformisme, pressentez déjà la nécessité d'autre chose, d'une perspective révolutionnaire claire, d'un Parti qui l'incarne et la mette en oeuvre.

 

Camarades

Les inconséquences gauchistes ont pu vous faire hésiter au bord de ce choix. Notre parti lui-même n'est pas exempt d'erreur. Mais qu'est-ce qui, en fin de compte, l'emporte forcément ? C'est le courant irrésistible des masses qui font l'histoire.

C'est la tempête de leurs luttes qui secoue le joug impérialiste en Asie, en Afrique et en Amérique Latine.

C'est la montée irrésistible des luttes et des aspirations révolutionnaires de la classe ouvrière et des larges masses populaires dans notre pays et dans les autres métropoles impérialistes.

C'est l'activité enthousiaste, consciente des masses populaires de la Chine et de l'Albanie socialistes qui bâtissent l'avenir dans une lutte acharnée contre toutes les résurgences de l'ancien monde pourri.

Quel exaltant exemple!

C'est sur ce mouvement des masses, dans notre pays, dans le monde, que notre Parti fonde sa ligne et son activité. Et sur cette base ferme, quel obstacle pourrait nous arrêter ?

Camarades, venez avec nous construire le Parti Communiste Révolutionnaire (marxiste-léniniste). C'est votre enthousiasme, votre expérience, qui l'aideront à devenir ce qu'il doit être.

En avant vers le pouvoir des ouvriers et des paysans !

En avant vers le socialisme !

Nous vaincrons !

 

 

P.10

A BAS

L' HEGEMONISME DES 2 SUPERPUISSANCES

A BAS

L'IMPERIALISME ET LE SOCIAL - IMPERIALISME


Le système impérialiste mondial est aujourd'hui dominé par deux grandes puissances qui rivalisent entre elles pour assurer leur hégémonie sur de vastes régions du monde et qui s'entendent pour tenter de contenir l'essor de la révolution mondiale ; il n'est pas aujourd'hui de régions du monde où l'une ou l'autre des super-puissances n'essaie de pénétrer en utilisant tous les moyens pour assujettir les peuples ou les pays à leur domination. Mais aujourd'hui, si nous devons être vigilants face au danger d'une nouvelle guerre mondiale, nous savons que la tendance principale c'est la révolution. En effet, nous nous trouvons dans une période de grands bouleversements révolutionnaires.

Dans cette période de déclin de l'impérialisme mondial, ce sont les peuples révolutionnaires, les nations opprimées, les pays dominés qui ont l'initiative. Les trois grandes composantes de la révolution mondiale : la lutte révolutionnaire du prolétariat dans les pays capitalistes et révisionnistes, la lutte de libération nationale des peuples opprimés, le mouvement de consolidation de la dictature du prolétariat dans les pays socialistes, convergent dans une lutte sans merci au bout de laquelle se situe l'avenir nouveau de l'humanité qui sera construit sur les ruines de l'impérialisme.


L'impérialisme US, puissance montante dans l'entre deux guerres, a tiré un bénéfice considérable de la seconde guerre mondiale.

Il est devenu à partir de 1945 la première puissance impérialiste, qui est venu remplacer dans de nombreuses régions du monde d'autres impérialismes affaiblis, comme l'impérialisme anglais ou l'impérialisme français.

Il est devenu le gendarme des peuples, la tête de pont de la lutte contre le camp socialiste. Il a étentu sa présence à de très nombreux pays du tiers monde et il a également tenté de placer l'Europe capitaliste sous sa domination (...)

 

Jusqu'en 1953, du vivant de Staline, l'Union Soviétique fut le principal rempart contre cette grande puissance agressive. Le pacte de Varsovie, la constitution de la RDA, l'établissement du camp socialiste furent autant de réponses et de défis lancés à la face des impérialistes américains.

L'Union Soviétique est restée debout face aux menaces extérieures. Mais le pouvoir prolétarien qui avait résisté à tant d'assauts extérieurs, a succombé après la mort de Staline aux assauts intérieurs de la nouvelle bourgeoisie soviétique. Incapable de détruire par la violence le socialisme, la bourgeoisie l'a détruit pacifiquement.

Et sous l'impulsion de Kroutchev et de ses successeurs, Brejnev, Kossiguine, l'Union Soviétique, la patrie de Lénine et de Staline, s'est engagée rapidement dans la voie de restauration du capitalisme et de l'établissement d'un nouveau système impérialiste.

Les faits sont là qui montrent, sans aucune contestation possible que l'Union Soviétique est une puissance capitaliste.

Les faits sont là, irréfutables qui démontrent que l'Union Soviétique est en même temps un pays impérialiste, l'asservissement économique et militaire des pays du Comecon, dont les matières premières sont extorquées à bas prix par l'URSS et qui sont contraints d'acheter les produits de l'industrie soviétique, la présence de travailleurs immigrés en URSS (notamment 20.000 Bulgares qui travaillent en Sibérie). La pratique des prêts sous condition et à des taux usuraires, les tentatives d'étranglement de l'Albanie, l'agression en tchécoslovaquie, l'agression contre la Chine, le dépeçage du Pakistan, le soutien apporté à Lon Nol au Cambodge, l'appui aux réactionnaires indiens, le sabotage de la grève des mineurs des Asturies par l'intermédiaire du charbon polonais, les tractations avec l'impérialisme US, l'établissement de bases navales dans l'océan Indien, en Méditerranée, les atteintes à la souveraineté des pays dans leurs eaux territoriales, la reconnaissance dé l'état sioniste et l'appui incomparable qui lui est apporté par l'émigration annuelle de 70.000 juifs d'URSS.

***

Puissances dominantes, les USA et l'URSS tentent sans cesse de remettre en cause, chacune à son profit, l'équilibre fragile basé sur l'actuel partage du monde (...) Mais face à l'hégémonisme pratiqué par les superpuissances, les pays du Tiers monde s'organisent et luttent (...) Aujourd'hui, la plupart des pays du tiers monde ont conquis l'indépendance politique et les pays qui sont encore dans un état de dépendance néo-coloniale sont amenés à s'opposer de plus en plus à la domination impérialiste. Par exemple dans leur lutte contre le sionisme et l'impérialisme, les pays arabes ont pris l'initiative de se servir du pétrole comme d'une arme. Ceci est très important. C'est un encouragement pour les pays du tiers-monde détenteurs de matières premières à se regrouper et s'organiser contre le pillage impérialiste pour vendre à un prix plus juste leurs richesses naturelles (...)

***

Mais si les super-puissances se disputent partout dans le monde, l'enjeu stratégique de leur rivalité c'est l'Europe, elles concentrent dans le continent une énorme quantité d'armement : 45.000 blindé pour l'URSS, les 3/4 de missiles de moyenne portée braqués sur l'Europe, 300.000 soldats pour les USA, des milliers de chars, d'avions, de navires de guerre.

Du fait de son passé colonial, de son potentiel économique et humain, on conçoit que l'Europe soit un enjeu de taille pour les super-puissances ( ...)

Les pays d'Europe capitaliste et le Japon constituent le second monde, c'est-à-dire une zone intermédiaire qui entretient des rapports d'unité et de lutte avec le premier monde (les super-puissances) et le tiers-monde. Leur nature impérialiste tend à rapprocher ces pays des super-puissances et particulièrement en ce qui concerne l'impérialisme français de l'impérialisme US.

La volonté d'hégémonie des super-puissances sur le second monde peut conduire ces pays à prendre sur des points précis des positions convergentes avec les positions des pays du tiers-monde, par exemple sur la question de la Méditerranée, des pays comme la France et l'Algérie peuvent trouver un intérêt commun à s'allier contre la présence des flottes des super-puissances, facteur permanent d'insécurité de cette région du monde.

***

Mais s'il n'est pas possible de définir pour notre révolution une ligne stratégique qui ne tienne pas compte de l'insertion de la France dans le monde, avec ses contradictions, avec les rapports de force existants, il n'est guère possible non plus, sous prétexte de lutte contre les superpuissances, de mettre au second plan la lutte contre l'impérialisme français qui est la cible de notre révolution, l'ennemi que nous devons abattre pour instaurer le pouvoir des ouvriers et des paysans. Tenir compte, certes, des contradictions, secondaires, qui opposent l'impérialisme français aux superpuissances, mais s'en servir comme d'une arme supplémentaire pour abattre notre ennemi, telle doit être la ligne de conduite des marxistes-léninistes authentiques. Certains dans le passé proposaient au prolétariat de s'allier avec la bourgeoisie française contre l'impérialisme US, d'autres aujourd'hui proposent au prolétariat d'atténuer sa lutte contre l'impérialisme français sous prétexte d'opposition au social-impérialisme ; la logique de telles positions conduit à saluer la rencontre de Giscard d'Estaing et du Shah d'Iran comme un fait positif, à attaquer les mouvements de la jeunesse contre l'armée bourgeoise sous prétexte qu'ils affaibliraient la défense de la France.

Voudrait-on nous faire oublier que l'impérialisme français est aujourd'hui le second marchand d'armes mondial ?

Voudrait-on nous faire oublier qu'en plus des colonies qu'il maintient aux Antilles, à Djibouti, à la Réunion, il garde un vaste empire néo-colonial en Afrique ?

Voudrait-on nous faire oublier que l'impérialisme français reconnaît le régime de Saïgon, qu'il s'est récemment opposé à l'exclusion de l'Afrique du Sud de l'ONU, le vote de la France à l'ONU en faveur de 1'OLP ne doit pas faire illusion : Sauvagnargues est allé renouveler en Israël les contrats commerciaux qui lient la France à l'état sioniste et qui, même à l'époque de l'embargo, ont toujours permis à Israël d'avoir des armes d'origine française. Ce qui a changé aujourd'hui, c'est que l'impérialisme français ne peut plus prétendre jouer les tous premiers rôles sur la scène mondiale. Des rapaces aux dents plus longues le précèdent sur de nombreux marchés. Nous ne pouvons que nous réjouir de cette situation qui est un facteur de faiblesse supplémentaire pour l'impérialisme français. Nous devons en tirer parti pour renforcer notre lutte contre notre propre impérialisme. Aux côtés des peuples du monde en lutte, contre l'impérialisme et le social-impérialisme, abattons l'impérialisme français, continuons la lutte pour l'instauration dans notre pays du pouvoir des ouvriers et des paysans, pour l'indépendance immédiate des colonies, pour une indépendance réelle des néo-colonies.

A BAS L 'IMPERIALISME US

A BAS LE SOCIAL IMPERIALISME SOVIETIQUE

A BAS L' HEGEMONISME

VIVE LA LUTTE DES PEUPLES DU TIERS MONDE

A BAS L'IMPERIALISME FRANÇAIS

VIVE LE POUVOIR DES OUVRIERS ET DES PAYSANS

PROLETAIRES DE TOUS LES PAYS, PEUPLES ET NATIONS

OPPRIMES, UNISSONS-NOUS

 

p.12

20ème ANNIVERSAIRE DE LA LUTTE DE LIBERATION NATIONALE DU PEUPLE ALGERIEN

intervention de Jean-Paul Gay, de retour d'Agérie (les sous-titres sont de la rédaction)

 

p.13

Voici 20 ans, le peuple algérien déclenchait la guerre de libération contre la domination coloniale de l'impérialisme français. Le 1er Novembre 54, à une heure du matin, des attaques armées étaient déclenchées en plus de 30 points du territoire algérien. Des casernes, des édifices coloniaux, des voies ferrées, des dépôts d'armes sautaient. 20 ans après, le peuple algérien a célébré cette date historique avec un éclat particulier. Des défilés, des réunions, des projections de films sur la guerre ont eu lieu dans toutes les localités, toutes largement pavoisées, avec de nombreuses banderoles évoquant le martyr des 7 années de guerre et la volonté du peuple pour une vie meilleure.

A Alger, un accueil enthousiaste a été réservé à la dernière pièce de Kateb Yacine:« La guerre de 2000 ans» qui dénonce la bourgeoisie et toutes les forces réactionnaires qui, en Algérie même, s'opposent à l'émancipation des ouvriers et des paysans. Partout ce sont les anciens vétérans de , la guerre, les anciens moudjahidines, qui ont ouvert les défilés. En plusieurs endroits des veillées avec les jeunes ont eu lieu. Ainsi à Dellys, petite ville proche de Tizi-Ouzou, où je me trouvais la veille du 1er novembre, les lycéens ont participé à une réunion dans la forêt de Mizrana, de vieux combattants de la villaya 3, qui exaltent l'héroïsme du peuple, ont raconté l'une des batailles les plus importantes de la région , celle du 18 décembre 56, où quelques dizaines de moudjahidines retranchés dans la forêt qu'ils connaissent parfaitement, et informés par la population, tinrent tête durant 48 heures, avec des fusils de fortune, à des centaines de soldats français lancés dans une opération de ratissage.

UNE CUISANTE DEFAITE DE L'IMPERIALISME FRANCAIS...

Ces jours-ci, sur la grande place de Tizi-Ouzou, une banderole proclamait «novembre 1954 sonna le glas de l'empire colonial». Oui, malgré les innombrables massacres de la barbarie colonialiste, malgré les tromperies politiques des serviteurs les plus zélés de la bourgeoisie française, comme de Gaulle, le peuple algérien, en ne déposant jamais le fusil jusqu'à la victoire de l'indépendance, a porté un coup écrasant au système colonial français, un coup qui a contraint l'impérialisme français à reculer, qui lui a imposé en Afrique une marge de manoeuvre plus étroite, l'obligeant à faire face à une compétition accrue avec les autres impérialismes.

En Kabylie, et dans toute l'Algérie. ce sont les paysans, les fellahs, qui ont constitué le gros des forces de la Révolution algérienne.

Représentant la grande majorité de la population. ils étaient aussi les plus férocement exploités par le colonialisme. Des anciens combattants expliquent ce qu'était leur vie de fellahs, le plus souvent réduits à être ouvriers agricoles, travaillant du lever du jour au coucher du soleil sur les terres des colons dont on voit les vestiges des châteaux pré de Tizi-Ouzou, et qui occupaient des milliers d'hectares de la meilleure terre, tandis que les petits paysans étaient repoussés vers les montagnes, sur des lopins de terre minuscules. Seuls les caïds collaborant avec t'administration française avaient quelques faveurs.

Les ouvriers agricoles devaient faire 10, 15 kms pour remonter dans leur village le soir, car le colon ne les logeait pas, pas plus qu'il ne les nourrissait. Pas le droit de toucher Même à une orange ou une tomate dans le domaine, sinon le travailleur algérien se voyait prélever une partie d'un salaire qui ne lui laissait aucune chance de survie en cas de maladie ou d'accident grave. C'est ce système qu'imposait l'impérialisme. C'est ce système dont novembre 54 a sonné le glas.

Ce système qui imposait la misère et bafouait la dignité du peuple, le peuple algérien l'a refusé dès les premiers jours de la colonisation. En 1945 au lendemain des massacres de Sétif où plus de 45000 Algériens, qui réclamaient justice et démocratie,furent assassinés par l'armée coloniale et les milices armées des colons français, des militants algériens commencèrent l'organisation clandestine du peuple, pour arracher l'indépendance.

En Kabylie, par exemple, parmi la poignée d'hommes qui ont déclenché les attaques du 1er novembre, il y avait des Algériens. recherchés depuis 45 et qui préparaient la lutte armée, organisant déjà quelques actions de représailles contre des tortionnaires du peuple, contre des traîtres et des indicateurs.

Le 1er novembre en attaquant les habitations des administrateurs français, Ies gendarmeries, les commissariats de police, les casernes, il s'agissait de desserrer l'étau pesant sur la population, pour favoriser la mobilisation de masse. Dans le même but, l'exécution des indicateurs, des mouchards a été une des toutes premières tâches remplies par les maquisards.

La poignée d'hommes du début, qui avait une petite formation militaire et pour armes des fusils de chasse, cette poignée d'hommes, parce qu'elle représentait les aspirations du peuple algérien, a rapidement entraîné l'adhésion des larges masses dans une guerre populaire. Comment expliquer la victoire de l'indépendance sans les liens étroits entre les combattants et la masse du peuple, sans la participation active de tout le peuple, tant était impitoyable la répression de l'impérialisme français qui a assassiné en 7 ans 1 million et demi de patriotes.

Dans les campagnes, pour la population, c'était le tabassage, l'assassinat, la déportation pour tout suspect d'aider le FLN. Pour tenter d'isoler les combattants, le colonialisme parquait la population dans les camps de regroupement. En dehors de ces camps, le territoire était déclaré zone interdite: l'artillerie, l'aviation avaient carte blanche pour déverser les obus, le napalm. On reconnaît ici la parenté des méthodes avec l'impérialisme américain en Indochine.

En Kabylie, après l'arrivée de de Gaulle au pouvoir, avec le plan du général Challe, il était très rare de trouver des villages encore libres, pratiquement toute la Kabylie était déclarée zone interdite.

Même avec les camps de regroupement, ces réunions de villageois ont continué: tandis que les troupes d'occupation n'osaient pas sortir la nuit de leurs camps, des réunions de villageois organisées par le FLN se tenaient à quelques mètres du camp.

Même le jour, du ravitaillement sortait des villages sous la botte de l'occupant français, et parvenait aux maquisards en des rendez-vous prévus à l'avance.

Dans chaque village, l'ALN organisait des groupes de volontaires: fellahs le jour, travaillant les champs, la nuit, ils devenaient saboteurs, détruisaient les récoltes des colons, détruisaient les routes, faisaient sauter les ponts.

Dans sa guerre,l'impérialisme français n'a cessé de recourir à la double tactique du massacre et de la démagogie. La démagogie, notamment avec les SAS, ces «services administratifs spécialisés» de l'armée coloniale, chargés, surtout à partir de 59, de faire la «charité», de passer des visites médicales à la population, en lançant des appels aux familles du genre: «dites à vos enfants dans les maquis de nous rejoindre, ils seront en sécurité ».

Des anciens combattants et cadres de l'ALN à Tizi-Ouzou nous expliquent comment ils ont vécu dans leur chair cette politique impérialiste. Faits prisonniers en 59, et transférés au camp de Tiezirt, ils ont eu affaire aux officiers du SAS qui prétendaient les «rééduquer», disaient-ils. On voulait obliger les prisonniers à assister

à des cours sur les réalisations futures de la France en Algérie, sur le plan de Constantine de de Gaulle.

S'opposant à ces cours par 13 jours de grève de la faim, les prisonniers furent transférés alors au centre disciplinaire de Koubari, centre de la légion étrangère.

Là, c'était les tortures les plus bestiales. Tous ces crimes n'ont pas eu raison de la détermination du peuple algérien, elles n'ont fait que le souder dans une même haine de l'impérialisme français.

La population des villes est elle aussi entrée massivement dans le combat, comme à la casbah d'Alger. Malgré les tortures organisées par Massu qui se vantait par exemple d'avoir torturé lui-même ou fait torturer des centaines d'ouvriers maçons algériens (parce que disait-il : «un ouvrier maçon par définition, c'est quelqu'un, qui peut avoir construit un cache pour le FLN»), malgré le couvre feu, malgré les exactions de l'OAS, la population des villes a manifesté massivement pour l'indépendance.

En France même, les travailleurs immigrés ont versé leur sang pour l'indépendance de leur patrie. Nous gardons dans notre mémoire les martyrs de la manifestation du 17

octobre 61, où des centaines de frères algériens furent assassinés. beaucoup noyés dans la Seine.

UN PEUPLE DECIDE A ABATTRE LA DOMINATION IMPERIALISTE

Le peuple algérien, en imposant l'indépendance a obtenu une victoire, une victoire pour lui-même, mais aussi une victoire pour le prolétariat de France, quotidiennement exploité et opprimé par l'impérialisme français, une victoire pour tous les peuples du monde.

Pourtant, malgré sa lutte, le peuple algérien a vu ses efforts en partie confisqués par la bourgeoisie algérienne.

La situation faite aux 800.000 Algériens honteusement exploités en France, encore 12 ans après l'indépendance, dans le cadre d'accords passés entre la bourgeoisie française et la bourgeoisie algérienne, en est un signe évident.

La direction même de la lutte de libération contribue à expliquer cela. Dans la lutte de libération, la classe ouvrière algérienne n'a pu exercer sa direction, car elle n'avait pas de parti communiste. Il faut souligner dans ce domaine la responsabilité écrasante du révisionnisme.

Le seul parti qui s'affublait du titre de parti marxiste-léniniste, c'était le P"C"A. officine locale du P"C"F qui avait pris ouvertement fait et cause pour l'impérialisme français, défendant depuis le début toutes les solutions de type néo-colonial, qui avait ouvertement condamné l'insurrection du 1er novembre 1954 et les "nationalistes". Ce parti a servi de repoussoir au communisme, il n'a fait que dégoûter de nombreux militants, du marxisme-léninisme.

En France, les travailleurs algériens immigrés voyaient chaque jour la trahison du P"C"F, le sabotage du soutien qu'il organisait consciemment.

Le chauvinisme du P"C"F et la ligne de collaboration du P"C"A sont grandement responsables de l'absence d'un parti véritablement marxiste-léniniste qui aurait empêché les couches non prolétariennes d'usurper la direction du Front. Les militants du P"C"A qui voudront mener réellement la lutte seront amenés à quitter le P"C"A comme Fernand Yveton, fusillé plus tard sur l'ordre du "socialiste" Mitterrand. Non content de collaborer, le P"C"A fournira un contingent important de membres de l'OAS. Les travailleurs algériens tourneront aussi le dos à la CGT qui n'organisera plus que des pieds noirs, et s'organiseront massivement dans l'UGTA, syndicat clandestin.

C'est l'UGTA qui mènera les luttes des mineurs et des dockers.

En France, rejetant les "mises en garde" des révisionnistes, les ouvriers algériens s'organiseront dans le F.L.N., organiseront des manifestations contre la terreur policière et pour l'indépendance, s'acquitteront régulièrement de leurs cotisations, entreront dans les rangs de l'Armée de Libération Nationale. Ils organiseront au coeur même de la métropole impérialiste des opérations de sabotage comme à Mourepiane, où des réserves de pétrole seront incendiées.

La classe ouvrière algérienne qui n'a pu exercer sa direction dans la lutte de libération, n'a pu l'exercer non plus depuis l'indépendance. Dans ces conditions, le secteur capitaliste, y compris le secteur capitaliste d'Etat s'est développé.

Nous sommes sûrs que la classe ouvrière et le peuple algérien sauront se donner l'organisation nécessaire pour repousser toute domination impérialiste par le biais technologique, le biais des capitaux et d'autres moyens, et instaurer leur pouvoir. Nous soutenons aujourd'hui les coups portés contre l'impérialisme par le peuple et le gouvernement algérien, depuis l'indépendance. Lorsqu'à l'heure actuelle, 80 à 90% des enfants algériens savent lire et écrire, alors, que sous le colonialisme, seuls les fils de colons et les enfants de la poignée d'Algériens liés à l'administration coloniale étaient scolarisés, nous disons que c'est une victoire du peuple algérien contre l'impérialisme, contre l'ignorance et l'obscurantisme qu'il a voulu imposer aux peuples opprimés.

Nous saluons la lutte menée par le peuple algérien pour la récupération de ses richesses nationales, pour la nationalisation du pétrole et des autres sources de matières premières dont l'impérialisme français conservait le contrôle plusieurs années après l'indépendance de l'Algérie.

Nous saluons les justes positions internationales de l'Algérie, son rôle positif dans la conférence des pays non alignés, son soutien politique et matériel aux luttes des peuples opprimés, notamment le soutien à la Révolution Palestinienne et à son objectif de création d'un Etat palestinien démocratique et laïc.

Nous saluons la juste position de l'Algérie pour refuser la domination de la Méditerranée par les deux super-puissances: l'impérialisme US et le social-impérialisme soviétique.

Rappelons aussi le rôle positif de l'Algérie dans l'admission de la République Populaire de Chine à l'ONU.

En ce 20ème anniversaire du déclenchement de la guerre de libération, nous adressons notre fraternel salut, notre salut de combat au peuple algérien, qu'il se trouve dans son pays ou en France.

Vive la solidarité des peuples algérien et français!

Vive l'unité des ouvriers algériens avec tous les ouvriers de France!.

A bas l'impérialisme!

 

 

p.15

LIP, SAVIEM, MOULINEX, FAULQUEMONT, P et T...

LES NOUVELLES ASPIRATIONS DE LA CLASSE OUVRIERE

(forum luttes ouvrières)

 

Camarades, ces dernières années, la lutte de classe a connu dans notre pays un grand renouveau. Au fil des mois, des millions de travailleurs ont lutté contre l'exploitation capitaliste, contre les conditions de vie et de travail que la bourgeoisie veut imposer à la classe ouvrière.

Ce développement des luttes ouvrières depuis quelques années et particulièrement dans la période récente reflète la crise générale qui secoue notre bourgeoisie impérialiste et reflète les aspirations de la classe ouvrière au socialisme.

Déjà, après l'échec de l'Union de la gauche en 73, il devint particulièrement clair que la satisfaction des revendications passait par la lutte: "seule la lutte paie" affirmaient avec force les travailleurs. Ainsi, à Renault, les O.S. maintiendront fermement leur mot d'ordre (augmentation uniforme des salaires, à travail égal, salaire égal) contre la politique hypocrite de la bourgeoisie sur l'amélioration des conditions de travail. Ils rejetteront la grille unique des salaires des dirigeants révisionnistes de la CGT et démentiront les reprises du travail annoncées par " L'Huma".

De même, à Peugeot St-Etienne, c'est sur 1 500 F/mois pour 40 h que les travailleurs entrent en lutte à cette époque, contre la bourgeoisie qui n'hésite pas à envoyer ses milices privées et les CRS ; les partisans de l'Union de la Gauche, eux, proposent Ces contradictions fondamentales entre les aspirations des travailleurs et les perspectives réformistes et révisionnistes seront illustrées de façon particulièrement nette lors du vote du 12 octobre à Lip.

Contre la hausse des prix, les cadences et le salaire au rendement, contre le chômage et les crimes du capital, les grèves se sont multipliées.

Dans ce combat sur le terrain des revendications économiques, la classe ouvrière s'est mobilisée massivement en renouant avec les traditions de lutte du mouvement ouvrier.

Mais les luttes ont dépassé largement ce cadre et si nous en restions là, nous ne comprendrions pas en quoi ces luttes ouvrent une période nouvelle.

En élaborant leurs revendications, en déterminant les formes de lutte et d'organisation permettant de mener à la victoire, les travailleurs se heurtent à différents rouages de l'appareil d'Etat (police, justice, propagande...), ils font, dans la lutte l'expérience des propositions des directions réformistes, ils voient dans la pratique ce que valent leurs perspectives d'avenir.

Ce qui apparaît, c'est la progression de la conscience politique de nombreux travailleurs, leur aspiration au socialisme.

Ainsi, à Lip, les travailleurs ne font pas que se révolter contre un aspect de l'exploitation; tout au long de la lutte, ils posent la question: au service de qui fonctionne la société aujourd'hui, ils posent la question du socialisme à construire (en relançant la production,...). Ainsi à Usinor, quand les hauts fournistes entrent en grève contre les crimes du capital revendiquant une machine pour changer les tuyères, ils mettent en cause l'organisation capitaliste de la production, ils montrent qu'un autre type de société est possible. La lutte pour la machine est la préfiguration qu'en société socialiste, les travailleurs mettront fin à ces crimes.

L'enjeu de Lip, de Saviem, de Moulinex, d'Usinor dépasse largement le cadre de la satisfaction de revendications immédiates: en prenant en main la conduite de la lutte, les travailleurs posent la question du débouché de toutes les luttes .

L'enjeu de ces luttes, ce n'est pas simplement le fait que les travailleurs se heurtent au réformisme et à la politique de collaboration de classe du P"C"F, c'est de montrer dans la vie qu'une autre société, le socialisme est nécessaire, possible et qu'on peut déjà en avoir des preuves, des garanties dans les luttes menées et que par là, le socialisme n'a rien à voir avec le programme commun.

Ces leçons ne sont pas seulement le produit de quelques luttes circonstancielles et limitées, mais se retrouvent à des degrés divers dans toutes les luttes.

Ainsi aujourd'hui, faisant un pas de plus dans sa politique d'exploitation, la bourgeoisie a mis sur pied un plan de restriction de la consommation des masses. En Même temps, elle cherche à faire cautionner ce plan par la classe ouvrière elle-rmême.

 

Tel est le sens de cette campagne alarmiste du gouvernement sur la crise économique.

Travailleurs, acceptez les sacrifices, les restrictions, n'engagez pas la lutte car vous risquez de plonger le pays dans une grave crise.

La manoeuvre est claire: faire accepter aux travailleurs le renforcement de leur exploitation au nom du redressement économique, de la solidarité nationale.

A Schlumberger, à Faulquemont, dans les PTT, les travailleurs montrent clairement le sort que la classe ouvrière réserve à cet appel à la solidarité des exploiteurs et des exploités, à la politique de collaboration de classe.

Refuser de noyer les mines à Faulquemont, c'est bien sûr se battre contre les licenciements, mais c'est aussi contester radicalement cette campagne alarmiste de la bourgeoisie en montrant qu'il y a là plus de 100 millions de tonnes de charbon qui peuvent avoir leur utilisation. 1700 F c'est possible aux PTT et partout; c'est le refus de cette société de restriction et c'est la preuve de l'incapacité de la bourgeoisie à gouverner.

Dans toutes ces luttes, quel est et quel doit être le travail communiste ? 

Bien sûr, les communistes doivent mener l'enquête, évaluer le rapport des forces, saisir le poids des illusions, Bien sûr, la propagande communiste doit s'articuler aux questions que se posent les travailleurs dans le cours de la lutte en fonction de l'expérience qu'ils font des propositions de la bourgeoisie et des perspectives de collaboration de classe des confédérations réformistes et révisionnistes, Le rôle des communistes n'est pas de prédire que le réformisme ne mène à rien et que seuls le socialisme et la révolution nous débarrasseront de tous les fléaux du capitalisme, mais d'accompagner les travailleurs dans leur expérience en montrant à chaque instant la liaison entre la pratique des directions réformistes et révisionnistes et leur débouché politique. Impulser les luttes, le bilan de leurs acquis, l'échange des expériences et animer un syndicalisme de type nouveau sur la base des expériences les plus avancées, un syndicalisme révolutionnaire.

Mais aujourd'hui la tâche centrale du Parti pour édifier largement les cellules d'entreprises, c'est mettre l'accent dans les luttes sur les aspirations au socialisme, développer largement l'initiative des travailleurs et sur cette base, offrir une alternative positive possible: le socialisme.

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POLITIQUE DE CRISE ET CRISE POLITIQUE

UNE CAMPAGNE ALARMISTE

(forum crise)

 Le discours de la bourgeoisie sur la crise tient une place de plus en plus importante, surtout depuis la rentrée de septembre.

Deux sons de cloches différents sont donnés suivant qu'on se tourne vers les organes de presse spécialisés ; ou vers les radios ou la presse à grand tirage en direction des masses.

Dans cas derniers, ce qui domine, c'est une vision catastrophique de l'avenir économique de l'industrie française, se sont de fréquents parallèles avec la crise économique de 1 929 ; l'avenir dessiné ainsi pour les travailleurs, c'est un avenir sombre que l'on ne pourrait conjurer que par un effort national, toutes

classes sociales unies, que par des sacrifices importants qu'il faut consentir dès aujourd'hui. Au contraire, quand on consulte la presse spécialisée, celle destinée pour l'essentiel à la consommation interne de la bourgeoisie, le spectre de 1929 est la plupart du temps écarté, les perspectives de développement de l'économie sont jugées bonnes dans bon nombre de secteurs, on ne retrouve pas l'alarmisme et la dramatisation qui sont de mise en direction des masses. Qui faut-il croire ?

Et d'abord quels sont les arguments avancés par ceux qui développent une campagne alarmiste.

Les points d'appui de cette campagne sur la crise sont connus, ils n'ont guère été renouvelés depuis plusieurs mois ; il s'agit des conséquences des hausses du pétrole, de la crise de surproduction, des faillites des P.M.E., du développement du chômage et de l'inflation. Examinons rapidement ces points un à un.

 

* Sur les conséquences des hausses du pétrole, l'INSEE a mené auprès des patrons d'entreprise, une enquête sur les répercussions de la crise de l'énergie sur leur production. Il en ressort :

1 ) que ces chefs d'entreprises déclarent n'avoir jamais été gênés pour s'approvisionner en pétrole, ce qui remet à sa place toute la campagne sur la soi-disant pénurie qui sévissait il y a quelques mois.

2) que les hausses du pétrole ont entraîné globalement une hausse de 3,5% sur les coûts de production ; on est loin du taux d'inflation de 15% avoué par l'INSEE ! Autrement dit, en clair, la hausse du pétrole n'entre que pour un quart dans la hausse générale des prix .

 

 * Sur la crise de surproduction qui se dessinerait. Qu'est-ce qui annonce aujourd'hui une crise de surproduction générale ?

Certes, dans l'automobile, une crise de surproduction existe aujourd'hui, elle avait été prévue bien avant la crise du pétrole, Cette crise de surproduction touche d'ailleurs de manière inégale des grands trusts automobile en France, puisqu'une entreprise comme Renault est arrivée à progresser au détriment de ses rivaux par ses exportations pour le premier semestre 74. A côté de ce secteur ou de quelques autres qui sont aussi en difficulté, comme le bâtiment, un certain nombre de secteurs sont en expansion très nette depuis le début de l'année, c'est le cas de la sidérurgie, des constructions électriques... Plus généralement, la production des biens d'équipement (ainsi que leur exportation) se développent actuellement. Au niveau global, la CEE prévoit pour la France un taux d'expansion en 1974 d'environ 5%. Même si les prévisions pour 1975 sont inférieures, on est bien loin de la récession générale annoncée.

 

* Sur les faillites des P.M.E. Elles sont effectivement en hausse par rapport à l'année dernière ; mais d'où viennent-elles ?

Sont-elles dues avant tout à un rétrécissement des marchés, ou proviennent-elles de la volonté du gouvernement bourgeois de hâter les restructurations dans certains secteurs?

Les plaintes des petits patrons qui se multiplient ne portent pas pour l'essentiel sur les difficultés de trouver des clients, mais surtout dans le fait qu'ils consentent à ceux-ci des traites à 90 ou 120 jours alors que leurs banques ne leur accordent depuis les restrictions de crédit que des traites à 60 ou même 30 jours. En décidant en juin dernier cet encadrement du crédit, le gouvernement entendait clairement intervenir pour hâter les restructurations, et rendre ces secteurs plus compétitifs. Répétant en cela la voie suivie lors du plan de stabilisation de 1963 .

 

* Sur le développement du chômage et de l'inflation, la bourgeoisie semble aujourd'hui découvrir ces deux, maux qui frappent les travailleurs depuis de nombreuses années, et qu'ils combattent avec vigueur. Chômage et inflation ont en fait été depuis longtemps utilisés pour faire pression sur les salaires.

Aujourd'hui l'inquiétude hypocrite de la bourgeoisie cache mal qu'elle s'accommode fort bien de l'aggravation des difficultés pour les travailleurs. Tout au plus entend-elle maintenir l'inflation à des taux comparables à ceux de ses rivaux (Allemagne entre autres) pour que les termes de l'échange ne soient pas détériorés ; quant à l'accroissement du chômage, avec toutes les formes qu'a la bourgeoisie pour le camoufler, le canaliser... (circulaire Fontanet, contrat de travail, prime de mobilité de l'emploi, intérim...) au taux actuel il n'est pas incompatible avec la poursuite de l'expansion capitaliste, les experts économistes bourgeois l'affirment eux·mêmes !

 

Ainsi on le voit, les points d'appui de la campagne de dramatisation sont des points d'appui bien peu assurés. Si la bourgeoisie souffre actuellement d'un certain nombre de difficultés économiques, rien dans ce qui est fourni par les experts bourgeois eux-mêmes permet d'affirmer que le tableau des difficultés constitue une crise économique. Malgré les parallèles faits avec 29, on n'assiste pas aujourd'hui à un arrêt brusque et général de la production comme cela a été le cas.

Qu'une telle crise puisse se développer à l'avenir est une chose, mais s'en est une autre que de dire qu'on assiste aujourd'hui à cette crise ; ceux qui dans les rangs de la bourgeoisie l'affirment trompent le monde et le font dans un but précis.

C'est en ce sens que nous pouvons parler, pour qualifier la campagne de la bourgeoisie, de "politique de crise" ! L'alarmisme et la dramatisation actuels, loin d'être une image de la réalité constituent une manoeuvre politique du gouvernement.

Les premières raisons qui poussent la bourgeoisie à mener cette "politique de crise" apparaissent clairement : obtenir des travailleurs qu'ils renoncent à lutter pour combattre leur paupérisation, qu'ils se solidarisent avec leurs exploiteurs, qu'ils reportent leurs revendications. Bref, qu'ils acceptent de payer le prix des difficultés économiques de la bourgeoisie. La solidarité nationale à laquelle on appelle est ainsi présentée comme la seule issue possible pour conjurer les catastrophes économiques que l'on annonce.

 

UNE CRISE ESSENTIELLEMEMENT POLITIQUE

Mais ce serait restreindre la portée de cette "politique de crise" que d'y voir seulement un moyen pour la bourgeoisie de faire payer ses difficultés économiques par les travailleurs. Les difficultés économiques ne sont pas les seules difficultés de la bourgeoisie : ses difficultés politiques constituent même aujourd'hui

l'essentiel. Pour stabiliser les rapports de classe, ou du moins pour tenter de les stabiliser, la bourgeoisie ne peut

plus gouverner comme avant. C'est ce faisceau de difficultés qu'elle affronte qui conduit notre Parti à analyser qu'il s'agit aujourd'hui avant tout d'une crise politique. Donnons les aspects les plus saillants de ces difficultés de la bourgeoisie pour gouverner comme avant.

 

* Le premier aspect c'est d'abord incontestablement l'essor révolutionnaire des luttes de la classe ouvrière. Les luttes qui se sont déroulées depuis les élections législatives de mars 73, sont apparues comme porteuses d'une série de caractéristiques nouvelles : dans le choix des revendications qui se sont démarquées clairement des classiques mots d'ordre des révisionnistes et réformistes sur l'emploi ou les salaires ; dans la conduite de la lutte, le choix des formes de lutte, l'association la plus large des travailleurs aux initiatives syndicales... ; dans leur capacité à secouer la tutelle des états-major révisionnistes et réformistes, de déjouer leurs manoeuvres ; enfin, dans la manifestation au sein même de ces luttes des aspirations de la classe ouvrière à une société nouvelle qui ne soit pas la variété capitaliste que constitue le programme commun, à une société organisée de manière radicalement différente. Ces caractéristiques nouvelles sont apparues le plus clairement dans la longue lutte des travailleurs de Lip. Puis elles se sont aussi manifestées de manière inégale dans toutes les autres luttes, de celle de Saviem à celle de Titan-Coder, de Faulquemont aujourd'hui en passant par celles d'Usinor et Moulinex. Or le développement de ces aspirations au socialisme dans la classe ouvrière, le fait que de plus en plus fréquemment les travailleurs remettent en cause l'organisation de la société. ce qui est produit, comment c'est produit, au profit de qui... tout cela met en difficulté la bourgeoisie qui ne voit pas quel projet de société opposer à ces aspirations pour les dévoyer, au moment ou le programme commun a de plus en plus de mal à remplir son rôle de voie de garage.

 

* En liaison avec cela, un deuxième aspect de la crise politique c'est a faillite du modèle de "société de consommation". Ce modèle de la "société de consommation" est le thème majeur autour duquel depuis la fin de la guerre la bourgeoisie a tenté d'organiser la collaboration de classe. Au lendemain de la seconde guerre mondiale les aspirations des travailleurs au socialisme étaient importantes : ils refusaient de participer à la reconstruction d'une société de type de celle qui existait avant la guerre avec une bourgeoisie qui avait sombré massivement dans la collaboration ; la volonté de construire le socialisme était renforcée par les victoires enregistrées dans les pays de l'Est et par l'Union Soviétique de Staline. Aidée puissamment par le P"C"F qui avait déjà à l'époque une ligne révisionniste, la bourgeoisie fera reconstruire par les travailleurs son économie en substituant à la vision classique du capitalisme que rejettent les travailleurs, ce modèle de la "société de consommation". En orientant à cette époque la production vers un certain nombre de produits de consommation (voitures, réfrigérateurs...) la bourgeoisie espère en les faisant acquérir dans une certaine mesure par les travailleurs créer chez eux l'illusion qu'"ils participent aux fruits de l'expansion", que "plus on produit, plus il y en a pour l'ouvrier" ! Là où réside la duperie, c'est que s'il est vrai que les travailleurs ont pu acquérir progressivement une certaine quantité de produits dont ils ne disposaient pas auparavant, ces acquisitions loin de sanctionner un enrichissement du travailleur sanctionnaient au contraire une détérioration qualitative importante de la vie de l'ouvrier. Le travailleur a pu acquérir plus facilement une mobylette ou une automobile, mais son lieu de travail est de plus en plus éloigné de son logement, le temps de transport interminable, les transports en commun mal adaptés... Le travailleur a pu acquérir un réfrigérateur, mais le travail en poste, le travail de la femme, l'éloignement des centres d'alimentation, oblige à stocker pour une semaine la nourriture. En fait, la société de consommation, c'est ce qui sert à masquer la paupérisation absolue de la classe ouvrière, c'est à dire l'effet conjugué de la baisse du salaire réel, du chômage, de l'intensification du travail. du travail posté et tout ce qui touche la vie hors de l'usine les transports, le logement, la santé, la vie de famille... qui se détériorent sans cesse Or, aujourd'hui, particulièrement depuis Mai 68, ce mythe de la ("société de consommation" est de plus en plus remis en cause, rejeté par les travailleurs : c'est un thème qui a fait fiasco ! La bourgeoisie est progressivement amenée à y renoncer, à tenter d'y substituer un nouveau modèle.

Le modèle de la crise. On reconnaît ouvertement un certain nombre de tares et d'échecs du "modèle de consommation" et , en même temps qu'on parle de "qualité de la vie", on appelle les couches de la société à s'unir pour sauvegarder l'essentiel. La bourgeoisie y est d'autant plus poussée, qu'à la faillite de ce thème dans les masses, s'ajoute le fait que les secteurs des biens de consommation comme l'automobile n'apparaissent plus aujourd'hui comme des secteurs assurant le profit maximum et que la course aux profits maximums modifie l'équilibre qui s'était établi entre production de biens de consommation et production de biens d'équipement, en faveur de ces derniers, rendent plus précaires encore la possibilité d'imposer l'illusion du développement permanent des biens de consommation.

 

* Un troisième aspect de la crise politique, c'est la disparition des éléments qui fondaient la stabilité du système politique depuis de Gaulle. La constitution de 58 en ôtant au Parlement la possibilité de remettre en cause à tout instant, l'orientation politique définie par le président de la république, contribuait à éliminer des aspects d'instabilité des gouvernements de la IVe république et de leurs orientations. Mais à elle seule, elle

aurait été inopérante si de Gaulle pour promouvoir sa politique impérialiste n'avait pu s'appuyer :

- d'abord sur un certain personnel politique issu des rangs de la bourgeoisie qui n'avait pas collaboré pendant la guerre et qui à cause de cela a pu se prévaloir d'un certain prestige auprès des masses ;

- ensuite, sur un parti politique dominant et docile qui à la fois le mettait à l'abri des censures possibles du Parlement et constituait un relais efficace auprès des corps de notables locaux et dans une autre mesure auprès des masses ;

- enfin, sur un projet politique impérialiste capable de duper les masses et Même de les mobiliser, projet politique qui s'articulait autour de 3 points : la transformation de la politique coloniale en politique néo-coloniale qui masquait mieux la domination impérialiste ; la volonté d'indépendance nationale et d'équilibre entre les deux super-puissances URSS et USA, la "participation", variante du modèle de consommation.

Mais aujourd'hui pour définir une politique à moyen ou long terme susceptible de duper les masses et de ne pas être censurée par le Parlement, Giscard ne dispose pas, loin s'en faut, d'atouts semblables à ceux dont disposait de Gaulle. Le personnel politique sur lequel il s'appuie soit apparaît assez largement aux yeux des masses comme le représentant avoué des trusts et des banques, comme des "aristocrates de l'argent" pour reprendre la formule des révisionnistes, c'est le cas de Giscard lui-même, Poniatowski, d'Ornano... soit apparaît pour

de nombreux autres comme des personnages falots et peu capables, c'est le cas d'un Jarrot, que les travailleurs de Montceau-les-Mines dont il est le maire n'ont jamais pu prendre au sérieux.

De parti politique dominant et fidèle défenseur de ses positions, Giscard aujourd'hui n'en dispose pas et ne semble pas pouvoir en disposer d'ici longtemps; cela soumet sa politique à toutes sortes de marchandages entre l'UDR et lui, une partie de l'UDR ayant montré depuis la rentrée parlementaire qu'elle n'hésiterait pas à voter contre le gouvernement s'il "transigeait" avec les thèmes classiques du gaullisme.

Enfin, en ce qui concerne la mise sur pied d'un projet politique à moyen terme cohérent et susceptible de tromper les masses et de faire illusion, Giscard est aujourd'hui loin de pouvoir le définir et de le faire progresser : c'est la conséquence directe du peu d'homogénéité de sa majorité parlementaire.

En fait de projet politique le seul qu'ait manifesté Giscard, c'est celui qu'il a regroupé sous le vocable de "changement" ou de "réforme", derrière ces mots se cache la volonté de donner aux masses l'illusion qu'elles sont gouvernées autrement. Une série de mesures bidon ont été mises en place (refus du protocole, conseil des ministres en province...). A côté de cela une série de reculs sur les jeunes (majorité à 18 ans, réforme du service

militaire), sur les femmes (remise en cause de la législation répressive de 1920 sur l'avortement)... ont lieu avec une grande publicité ; reculs très limités mais reculs tout de même qui

cherchent à faire illusion. Giscard conjugue ces mesures avec l'utilisation de "personnalités" bourgeoises parfois de "gauche" comme Françoise Giroud, ou la création de ministères

nouveaux comme la qualité de la vie, l'immigration qui cherchent à faire croire que le capitalisme va résoudre ces problèmes. Ce néo-libéralisme résiste mal à l'examen détaillé, il est démenti par l'envoi de la brigade anti-gang contre les mineurs de Faulquemont ou des gardes mobiles contre les

postiers du tri. Le néolibéralisme de Giscard récupéré pour une part du "programme de la gauche" ne fait guère recette dans les masses aujourd' hui !

 

* Enfin, et c'est un quatrième aspect de la crise politique aujourd'hui, le recours à l'union de la gauche permettrait-il à la bourgeoisie de résoudre ses difficultés pour gouverner ? Les treize millions de voix de Mitterrand montrent que la "gauche" constitue effectivement un recours pour la bourgeoisie mais ce qu'il faut apprécier, c'est la solidité de ce recours, son caractère durable... Il faut rappeler comment bon nombre de travailleurs ont voté à reculons pour Mitterrand parce qu'ils ne voyaient pas se dégager d'autre perspective.

Une des caractéristiques nouvelles que nous avons notées dans les luttes ouvrières de la dernière période, c'est justement comment elles avaient su s'opposer à la manipulation de leurs revendications par les états-majors révisionnistes et réformistes, s'opposer à la main-mise du P"C"F sur la direction de leurs luttes, s'opposer aux propositions politiques qu'ils faisaient et qui bouchaient les aspirations à une société nouvelle. Un gouvernement de "gauche" s'il réussissait provisoirement à tempérer ces luttes, à empêcher les travailleurs de poser leurs revendications, ne pourra constamment répondre avec succès aux travailleurs "vos luttes font le jeu de la droite", l'incapacité de la gauche à satisfaire les revendications et les aspirations des masses éclaterait rapidement et cela d'autant plus que les propositions du programme commun sont pour bon nombre d'entre elles usées avant l'heure par le gouvernement actuel qui pour alimenter son néo-libéralisme recopie comme on vient de le voir les réformettes du programme commun, affaiblissant d'un seul coup l'impact que pourra avoir l'application de ce programme ! Ce qui renforce le caractère fragile et limité du recours à la "gauche", c'est aussi la manière dont PS et P"C"F se situent par rapport à la campagne de dramatisation de la bourgeoisie. Pour Mitterrand les choses sont claires : effectivement la crise est grave, et pour la conjurer "seule la gauche pourra réaliser un consensus national pour y faire face" ; c'est-à-dire qu'il ne dément en rien la campagne alarmiste mais affirme que seule la gauche peut imposer aux travailleurs la collaboration de classe nécessaire. Pour Marchais les choses, si elles sont un peu différentes, reviennent au même : il s'offre en fait à sauvegarder "le modèle de la consommation" aujourd'hui défaillant ; la crise n'est pas fatale dit le P"C"F, la société de consommation peut se développer encore, il suffit d'éliminer... "les gaspillages capitalistes"; comme le P"C"F nie depuis de longues années qu'il y ait paupérisation absolue,on voit par là ce qu'il propose de faire : restaurer le modèle de la société de consommation et maintenir en même temps la paupérisation absolue.

 

TOUS LES ASPECTS DE LA CRISE CONVERGENT SUR LE PLAN POLITIQUE

Ce qui confirme que cette crise est une crise politique, c'est le fait que tous les aspects de la crise, idéologiques ou économiques, convergent effectivement sur le plan politique.

* Prenons par exemple la question des jeunes, le phénomène du ras-le-bol qui se manifeste à l'école, le rejet de l'éducation de la bourgeoisie et des perspectives qu'elle offre aux jeunes. Ce refus a débouché sur le plan politiqué avec les manifestations des jeunes contre la loi DEBRE, ou contre la loi ROYER... Et cela, le capitalisme n'a pas pu l'ignorer et tenter simplement d'y faire face par de simples mesures idéologiques de renforcement de sa propagande en direction des jeunes, Il a dû se situer par rapport à ces mouvements en concédant certains reculs limités comme les droits civils et politiques à 18 ans, la réforme du service militaire... Ces réformes, si limitées qu'elles soient, sont une preuve de la faiblesse de la bourgeoisie.

 

* De même, en ce qui concerne la question des femmes et le rôle que la bourgeoisie leur réserve dans la société capitaliste. Depuis longtemps, les campagnes idéologiques de la bourgeoisie en direction des femmes suscitent chez elles une importante révolte.

Aujourd'hui, cette révolte débouche sur le plan politique : les nombreuses actions pour obtenir l'avortement et la

contraception libres et gratuits, ont amené le gouvernement à un recul et à remettre en cause la législation répressive de 1920.

 

* En ce qui concerne les luttes revendicatives, comme celle de Faulquemont, faut-il y voir seulement la lutte des travailleurs pour le maintien de leur emploi, ou faut-il y voir aussi le fait que les travailleurs, en refusant de noyer leur puits, refusent le modèle de crise que leur propose la bourgeoisie ?

Ils voient bien, eux. qu'on leur parle de crise de l'énergie et qu'en même temps, on noie plus de 100 millions de tonnes de charbon. On pourrait dire la même chose concernant les luttes pour le chauffage, menées dans des entreprises comme Schlumberger à Besançon, et Merlin Gérin à Grenoble.

Ou encore concernant les Accords sur le chômage qui viennent d'être conclus, accords révolutionnaires raconte Giscard : faut-il voir seulement la volonté économique de la bourgeoisie de mieux organiser son volant de chômage, de prévenir des révoltes importantes en cas de développement massif du chômage, ou faut-il voir aussi la volonté politique de la bourgeoisie d'empêcher et de prévenir, par de tels accords, le développement de luttes comme Lip, avec les conséquences qu'une telle lutte a sur toute la classe ouvrière ?

 

* Aujourd'hui, confrontée à l'essor révolutionnaire des luttes de la classe ouvrière, confrontée au grand mouvement dans le monde comme la lutte des pays du tiers monde pour la disposition de leurs richesses, les luttes inter-impérialistes, et particulièrement les luttes entre les 2 super-puissances, la bourgeoisie ne peut plus gouverner comme avant. Les positions qu'elle prend sur la scène mondiale rejaillissent directement sur ses contradictions avec les masses. Quand, à Bruxelles, les ministres de l'agriculture passent sous la table les revendications des paysans, ceux-ci se dressent massivement, mettant en accusation le gouvernement, affirmant dans leur mouvement leur volonté de se lier à la classe ouvrière. Quand le ministre des Affaires Etrangères va dans les pays arabes négocier des accords pour l'exportation des biens d'équipement, il apparaît clairement aux yeux des masses pour ce qu'il est, un représentant de commerce, et le visage de la France capitaliste, grande puissance indépendante amie des peuples arabes s'effrite un peu plus, révélant ses faiblesses.

 

L'ENJEU DU DEBAT

Crise économique ou crise politique, l'enjeu du débat n'est pas formel. Derrière cette question, se glissent 2 conceptions du développement du processus révolutionnaire dans notre pays.

La première n'attend un essor révolutionnaire que d'une crise économique, que de l'aggravation dans une proportion catastrophique du chômage et la baisse des salaires des travailleurs.

On attend une crise du type de celle de 29 qui déclencherait des affrontements révolutionnaires. Cette conception est en fait directement héritée du révisionnisme qui, depuis des dizaines d'années, traitant de la situation économique, ne sait que répéter : la crise s'aggrave, la crise s'aggrave, une autre société est nécessaire. Mais la situation constatée par les masses c'est que l'aggravation de leurs conditions de vie et de travail, qui, elle, est bien réelle, n'a pas pour corollaire immédiat, l'aggravation dans des proportions insurmontables des difficultés de la bourgeoisie.

 

* L'autre conception, et c'est celle que développe notre Parti, ne lie pas mécaniquement l'essor révolutionnaire du mouvement des travailleurs au développement d'une crise économique.

Une telle crise n'existe pas aujourd'hui, et nous ne nous risquerons pas à infirmer ou affirmer qu'elle va se développer dans les prochains mois. Mais d'ores et déjà, existe et se manifeste chez les travailleurs la volonté de ne plus être gouvernés comme avant, la volonté d'une société nouvelle radicalement différente de la société qu'ils vivent.

D'ores et déjà, apparaissent, au plan politique, les difficultés qu'a la bourgeoisie à mobiliser les masses sur cette société, à offrir une alternative qui camoufle ses tares de plus en plus criantes. Cette crise politique est grosse d'affrontements nombreux, répétés, massifs entre la classe ouvrière et la bourgeoisie, et cela dans un avenir proche. C'est cela que le PCR(ml) doit préparer non pas en allant annoncer partout l'imminence d'une catastrophe économique, mais en offrant, aujourd'hui, aux masses, la véritable perspective du socialisme,

en mettant à nu l'état de crise politique de la bourgeoisie, en développant, en faisant émerger des luttes des travailleurs leur volonté du socialisme.

 

* Ces affrontements auront des caractéristiques autres que celles de 1968. Aujourd'hui, la tutelle des révisionnistes et des réformistes, malgré les 13 millions de voix sur Mitterrand, s'exerce avec difficulté sur les luttes ouvrières. La voie du Programme Commun ou même du socialisme sauce Mitterrand (développée lors des Assises), suscite de nombreuses oppositions dans les syndicats chez tous les travailleurs. Voilà pourquoi le contenu des affrontements de classe qui se préparent dès aujourd'hui aura un niveau bien plus élevé que celui des précédents.

 

* Dans de tels mouvements, les masses peuvent faire largement l'expérience du révisionnisme et du réformisme. La condition, c'est le développement du véritable Parti Communiste, c'est sa capacité à offrir aux masses, dans ces mouvements, une réelle alternative à la société capitaliste qu'elles contestent. Répondre dès aujourd'hui à ces questions, c'est commencer par ne pas se tromper et tromper les travailleurs sur la nature de la crise actuelle, d'où l' importance aujourd'hui du débat crise politique et politique de crise.

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LA LUTTE CONTRE LE REFORMISME

ET LE REVISIONNISME

LE 21 ème congrès du P"C"F

/FORUM ASSISES DU PS, CONGRES DU P"C"F

 

L'existence du P«C»F, d'un parti révisionniste, c'est-à-dire d'un parti marxiste en paroles et bourgeois, réformiste dans les faits, qui influence encore largement la classe ouvrière, qui s'est accaparé la direction de la plus grande centrale syndicale pose un problème crucial aux révolutionnaires conséquents en France.

C'est à partir de Mai 68 que d'assez larges franges de la classe ouvrière ont commencé à mettre en question le P«C»F. ses prétentions à représenter les intérêts de la classe ouvrière, à tracer la voie du socialisme pour notre pays. Mais c'est aussi depuis Mai 68 que sont apparus divers groupes petit-bourgeois, qui tout en se réclamant de la révolution , ont contribué à entretenir la confusion, à colmater, de fait, les brèches ouvertes dans l'influence du révisionnisme.

Le trotskisme est la forme la plus achevée de soutien zélé au révisionnisme: les trotskistes, sous leurs différentes variétés s'efforcent, en effet, de ramener dans le sillage du révisionnisme ceux qui commencent à s'en détacher. Avec toute une série d'arguments. Pour simplifier, cela revient à voter pour un trotskiste au premier tour et pour Mitterrand au second.

Nous ne citerons que pour mémoire une variété originale, récente du trotskisme: tout en se parant du soutien à la Chine, tout en parlant de Staline, etc.. ces gens-là prétendent que le P«C»F est social-fasciste, agent de Moscou, que la CGT est pire que la CFT et autres stupidités provocatrices. Le résultat est le même: les éléments écoeurés par le P«C»F, préfèrent revenir vers lui, plutôt que de s'aventurer dans une secte aux relents doriotistes.

Mais, 6 ans après Mai 68, la vie, c'est à dire la lutte de classes, a commencé à opérer un tri, à montrer l'impuissance totale de ces mouches du coche, simples appendices du révisionnisme.

Dès avant Mai 68, les premières forces marxistes-léninistes, dont nous nous réclamons, avaient été les seules à placer au coeur de leur projet politique, la nécessité d'arracher la classe ouvrière à l'emprise du révisionnisme, donc de détruire son influence, de désagréger ses organisations.

 

Après Mai 68, la lutte contre l'opportunisme nous a permis de définir la nature du révisionnisme et, à partir de là, de déterminer une tactique et une stratégie pour le détruire.

Définir la nature du révisionnisme, c'est la saisir comme la forme dominante de l'idéologie bourgeoise au sein du mouvement ouvrier,c'est la saisir comme le produit de notre société impérialiste, capable de corrompre et de détacher parmi les couches supérieures de la classe ouvrière, une aristocratie ouvrière qui lui serve de relai dans le mouvement ouvrier.

A partir de là, il est possible de déterminer une tactique offensive contre le révisionnisme: s'appuyer sur les points faibles de la domination révisionniste, c'est à dire développer le travail révolutionnaire parmi les couches les plus exploitées de la classe ouvrière, les moins sensibles à l'influence révisionniste. Tel est le levier principal qui nous permet de saper le révisionnisme, selon un plan d'ensemble, dans le cours même de la mobilisation révolutionnaire des masses.

Faute de cette perspective d'ensemble, les révolutionnaires, si sincères soient-ils. sont voués à l'impuissance face aux révisionnisme:

- ou ils le surestiment et pensent qu'il suffit pour le moment de prêcher dogmatiquement la vérité marxiste-léniniste, pour que de proche en poche, petit à petit, la doctrine illumine la classe ouvrière trompée;

- ou bien ils sous-estiment le révisionnisme. font comme s'il n'existait plus. était déjà balayé, lui lancent quelques égratignures et n'obtiennent. à la manière des spontanéistes que des succès éphémères.

Non, la lutte contre le révisionnisme est inséparable du processus d'édification du Parti Communiste, c'est à dire, du rassemblement autour d'une stratégie de toutes les énergies révolutionnaires de la classe ouvrière, au fur et à mesure qu'elles se manifestent. La vie a prouvé la justesse de notre ligne: à partir de 1971, ce sont les couches les plus exploitées de la classe ouvrière, les O.S., puis parmi eux, les immigrés, les femmes, les jeunes qui se sont portés à la pointe de la lutte de classe et ont mis en difficulté le révisionnisme.

Aujourd'hui, des possibilités nouvelles, sur cette base, s'offrent à nous de lutter contre le révisionnisme. Depuis 1973, c'est dans les luttes que la classe ouvrière est arrivée, même s'il s'agit d'un cadre revendicatif limité. à se démarquer du révisionnisme, à s'opposer momentanément à lui.

En ce sens, le vote des Lip refusant, contre l'avis de la CGT et du P«C»F, à la quasi-unanimité, le plan Giraud, prend une valeur historique.

Dans le même temps, le P«C»F est contraint de poursuivre la logique de sa dégénérescence en un parti de plus en plus ouvertement bourgeois, réformiste. Le 21° Congrès de Vitry, qui vient de se tenir marque un nouveau pas dans cette fuite en avant. Au moment où se développent les aspirations révolutionnaires, où se posent, dans les masses, la question du socialisme, Marchais proclame: il n'est pas question de socialisme; le Programme Commun, c'est du capitalisme, après le Programme Commun il pourra très bien y avoir un gouvernement de droite.

Au moment où la politique de restructuration de la bourgeoisie amène les petits et moyens patrons à se reconvertir et à fermer brutalement leurs entreprises, à jeter à la rue des milliers d'ouvriers, Marchais prétend que la classe ouvrière n'a pas d'autre solution que de s'allier à ces petits et moyens patrons pour obtenir des changements démocratiques.

Au moment où la politique et les mythes gaullistes ont fait faillite, 6 ans après le mouvement de Mai, quand les politiciens gaullistes sont largement discrédités, voilà que Marchais considère l'alliance avec les gaullistes et les jeunes bourgeois de l'UJP comme une alliance essentielle pour son union du peuple de France.

Cette fuite en avant aiguise les contradictions entre le P«C»F et les aspirations révolutionnaires des masses. Elle aiguise les contradictions au sein même du P«C»F et les masses qu'il influence directement.

Cela veut dire qu'il est possible aujourd'hui de commencer à désagréger les forces organisées du révisionnisme. De plus en plus les travailleurs, militants ou sympathisants du P«C»F, se posent des questions et engagent la discussion avec nos camarades. Un peu partout, de nombreux éléments rejoignent le Parti. sur la base de leur expérience de lutte. où en est le révisionnisme aujourd'hui. par quels moyens le combattre: voilà l'un des enjeux de notre débat. Mais aujourd'hui, la pourriture avancée du révisionnisme a permis une remise en selle de la social-démocratie. Et il n'est pas possible d'envisager la lutte contre le révisionnisme, qui reste la cible principale, sans envisager la riposte à la social-démocratie rénovée de Mitterrand.

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LES ASSISES DU PS

Le PS vient de réunir les 12 et 13 octobre ses assises dites du «socialisme». Y étaient conviés le PSU, ou du moins la minorité qui, derrière Rocard est d'ores et déjà prête à rejoindre le PS et une troisième imposante comprenant surtout des responsables CFDT.

Avec cette opération, le PS de Mitterrand voudrait s'élargir. Il n'a pu se regonfler, reconquérir l'audience électorale qu'il a actuellement. qu'en profitant de l'appui que lui a donné le P«C»F sur la base du programme commun.

Toutefois, le PS tient à affirmer que ses projets ne se réduisent pas au «programme commun», car il se réserve toujours la possibilité de rompre avec le P«C»F. si l'occasion se présente, de gouverner avec d'autres alliances, jouer ainsi le rôle de parti charnière.

L'absorption d'une partie du PSU qui a toujours désavoué le programme commun, et l'adhésion active des dirigeants de la CFDT qui ont au moins fait des réserves à l'égard de ce programme, permettent au PS d'affirmer son autonomie face au P«C»F.

La plus grosse carte que le PS veut jouer avec ces assises, c'est évidemment celle de la CFDT. Il veut se servir de la CFDT pour renforcer, comme l'affirme le document préparatoire, sa base «ouvrière et populaire». A son audience électorale dans diverses couches bourgeoises et petite-bourgeoises (comme l'indiquent les dernières législatives), il veut ajouter une audience importante qu'il n'a pas dans la classe ouvrière, il veut aussi se servir de la CFDT comme intermédiaire pour freiner les luttes ouvrières s'il arrive au gouvernement.

Maire et les autres dirigeants de la CFDT doivent jouer ce rôle irremplaçable de pourvoyeurs.

Mais les travailleurs ne laisseront pas faire de telles manoeuvres de la social-démocratie qui n'ont rien à voir avec leurs intérêts et leurs aspirations. Déjà, une forte opposition à cette opération se manifeste. Les méthodes utilisées pour la préparation ont contribué à rebuter de nombreux militants et travailleurs. Le moins que l'on puisse dire, c'est que cette préparation ne brille pas par sa démocratie, démocratie dont les préparateurs des assises se réclament tant.

La parution, à 15 jours seulement de la réunion. du texte préparatoire en est un exemple flagrant.

Au sein du PSU, de nombreux militants, bien que défendant des idées erronées du «socialisme autogestionnaire», refusent de renforcer un parti qu'ils jugent à juste titre comme un parti bourgeois, encadré par des notables.

C'est surtout au sein de la CFDT que l'opposition est forte et importante. Nombreux sont les travailleurs, syndiqués, militants, délégués et même responsables plus élevés qui s'opposent à l'opération. A tel point qu'Edmond Maire, sur la défensive, a éprouvé le besoin de rappeler que la CFDT ne participe pas aux assises et de réaffirmer au sujet de l'appel pour le développement d'une grande force socialiste, «la CFDT ne s'est pas exprimée sur cet appel.. Ce n'est pas son rôle».

Comme si les signatures, en bas de cet appel, d'une dizaine de membre du Bureau National et de nombreux responsables fédéraux et régionaux n'avaient été que pure coïncidence. Ces réflexions pour le moins hypocrites ne sauraient tromper les travailleurs qui refusent de voir leur syndicat CFDT passer sous le contrôle étroit du PS, parti bourgeois.

A ces assises il s'agissait paraît-il de débattre en commun. En réalité, les jeux étaient faits d'avance. Etaient exclus tous ceux qui, telle la majorité du PSU, n'envisageaient pas le rattachement rapide au PS.

Preuves supplémentaires que les jeux étaient faits d'avance, le document «pour le socialisme» fourni par le PS, qui aurait dû être au centre du débat n'a pratiquement pas été discuté.

Mais regardons de près ce document. On nous dit: «les socialistes ne peuvent conserver l'Etat Capitaliste tel quel» et plus loin «... maintenir les structures de l'Etat capitaliste, ce serait perpétuer la domination de la bourgeoisie».

Belles phrases «révolutionnaires», mais cet Etat capitaliste, s'agit-il de le conserver et donc de perpétuer la domination de la bourgeoisie, ou de le détruire pour instaurer le nouvel Etat socialiste, le pouvoir des ouvriers et des paysans ?

A cela, nos «révolutionnaires» répondent: «Aujourd'hui, la prise du pouvoir à la suite de victoires électorales paraît être l'hypothèse plausible», Et on nous précise que le gouvernement de «gauche» récupérera d'abord intact l'appareil bureaucratique et militaire de l'Etat capitaliste pour ENSUITE y apporter progressivement des modifications, en s'appuyant sur une «mobilisation forte et consciente» des travailleurs; c'est la recette qui, selon Mitterrand et Marchais, avait si bien réussi au Chili.

Tout en n'hésitant pas à manier la phrase révolutionnaire, les «stratèges» qui ont convoqué les «assises du socialisme» n'ont finalement que le programme commun à proposer aux travailleurs. Le parti que veulent créer les chefs du PS, avec l'espoir d'y associer des travailleurs n'est qu'un parti pour la gestion des affaires de la bourgeoisie.

C'est pourquoi, nous, Communistes, nous soutenons toutes les initiatives qui s'opposent à l'opération du PS dans la CFDT.

Seule la Révolution Prolétarienne qui liquidera l'Etat capitaliste, permettra aux travailleurs de construire la société socialiste, le pouvoir des ouvriers et des paysans, la dictature du Prolétariat.

 

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POUR LA CONSTITUTION D'UNE AUTHENTIQUE

ORGANISATION COMMUNISTE DE LA JEUNESSE

(forum jeunesse)

 

CAMARADES,

En mars 74, le congrès de fondation de notre Parti a lancé le mot d'ordre de constitution d'une authentique organisation communiste de la jeunesse.

Le sort que réserve aux jeunes des couches populaires. Le capitalisme, est bien connu. Bas salaires, chômage, déqualification, déportation hors de la région d'origine, tel est le lot de dizaines de milliers de jeunes travailleurs. Ils ont d'ailleurs, dans les derniers mois, occupé une place remarquable dans les combats des ouvriers ou des employés 'pour leurs revendications et pour faire payer la crise à la bourgeoisie.

Plus largement, nous savons tous que même pour les jeunes dont on dit «qu'ils ne sont pas politisés», cette société apparaît pour ce qu'elle est, c'est à dire une société d'exploitation et d'injustice. Les formes spontanées de révolte qui varient selon les couches de la jeunesse, sont là pour prouver que la crise idéologique du système impérialiste est ici particulièrement forte. La lutte organisée contre l'école capitaliste, contre l'armée impérialiste ou sur d'autres questions (avortement, contraception par exemple) prouve que les valeurs traditionnelles de la bourgeoisie sont de plus en plus massivement rejetées. La multitude des questions posées, leur nature, l'enjeu qui existe à y répondre, appellent une réponse marxiste-léniniste. Elles fondent notre projet de constitution de l'union communiste révolutionnaire de la jeunesse.

 

1) L'avancée des marxistes-léninistes permet d'avoir une vue plus clair des tâches à entreprendre.

Par le passé, deux types d'erreurs, en apparence contradictoires, ont dominé: elles aboutissaient toutes deux à isoler le mouvement de la jeunesse du processus révolutionnaire d'ensemble.

La première de ces erreurs consiste à applaudir à toutes les formes de la révolte spontanée, sans être capable d'aller plus loin: elle conduit à une assimilation abusive de cette révolte à la conscience révolutionnaire, à des juxtapositions sans fondement politique sérieux entre le mouvement de la jeunesse et celui du prolétariat. La ligne de la «révolte anti-autoritaire», qui a été jadis partie intégrante de cette confusion a conduit nombre de groupes à la dégénérescence.

La seconde, reposant sur une vue aussi unilatérale des choses, a été de regarder avec suffisance les luttes de la jeunesse. Cette forme primaire de sectarisme s'appuie sur les ambiguïtés du mouvement, sur la domination que des idéologies non-prolétariennes y ont exercée, sur la capacité de «récupération» de la bourgeoisie et de son idéologie, sur le fait réel enfin que la classe ouvrière, (pour toutes ces raisons sans doute) même si elle les a regardées avec sympathie, n'a pas apporté un appui massif à des luttes dont elle ne voyait pas clairement les aboutissants.

Notre Parti examine dorénavant la réalité avec plus d'attention. Comment ?

Tout d'abord en luttant contre cette idée dangereuse selon laquelle la jeunesse constituerait, de par sa situation, une classe à part. Cette thèse, chère aux sociologues réactionnaires, présente évidemment l'avantage pour la bourgeoisie de réduire le problème à la simple dimension du conflit des générations. Elle institue une solidarité qui n'existe pas ou ne se forge pas comme par miracle, entre des jeunes de classes et d'origines différentes. Quand ils examinent les luttes de la jeunesse, les marxistes-léninistes doivent être d'autant plus clairvoyants que les institutions de la bourgeoisie (notamment l'école) peuvent donner l'illusion d'une telle solidarité. La pénétration dans le mouvement révolutionnaire de la jeunesse du point de vue de la petite bourgeoisie, trouve ainsi son origine dans la réalité elle-même. Si nous voulons par exemple, afin d'éviter des généralisations abusives et simplistes, avoir une vue correcte de la crise idéologique, il nous faudra donc étudier sérieusement dans quelles mesures elle touche les différentes couches de la jeunesse, selon leur situation par rapport à la production, à la lutte de classe...

En positif, ce dont il est question, c'est de faire converger le mouvement révolutionnaire de la jeunesse avec le mouvement de la classe ouvrière. Pour cela, outre le fait qu'il est nécessaire de s'appuyer sur la partie de la jeunesse qui est la mieux à même de forger cette liaison, c'est à dire sur les jeunes ouvriers ou les élèves de CET, on ne saurait se satisfaire des appréciations unilatérales dont il était question tout à l'heure. Il est même nécessaire, pour bien voir ce qui va dans le sens de cette union, de posséder un point de vue d'ensemble de la lutte de classes, d'avoir engagé avec succès au sein du prolétariat une série d'expériences révolutionnaires permettant de la forger.

L'avant garde marxiste-léniniste, par l'élaboration d'un véritable programme communiste, par la définition d'axes tactiques mobilisateurs, a déjà remporté des succès appréciables dans sa liaison avec la classe ouvrière. Nous pouvons donc avoir un point de vue d'ensemble plus juste sur l'évolution du mouvement révolutionnaire de la jeunesse.

2) Le mouvement révolutionnaire de la jeunesse a progressé.

D'une part, il a engagé, année après année, sa démarcation d'avec les idéologies non prolétariennes.

Les révisionnistes qui, à de leur propre aveu (voir , Harris et Sédouy) ont été souvent surpris ou débordés par les luttes dans les CET, lycées ou FJT, n'ont pas été capables de construire l'organisation de jeunes qu'ils appelaient de leurs voeux. Gageons pue leurs récentes prises de positions et contais avec l'UJP, ne sont pas de nature à les renforcer, alors que déjà leurs adhérents se plaignent de n'avoir aucune initiative et de ne servir qu'à distribuer des tracts !

Quant aux trotskistes, leur sectarisme, leur bureaucratisme, leur faculté de manipuler les jeunes pour les ramener à la traîne de l'union de la gauche, sont très largement connus.

Ces gens là ont causé un grand tort à l'ensemble du mouvement, en servant de repoussoir à ses aspirations révolutionnaires. Mais, comme elle l'a déjà entrepris, plus la classe ouvrière affirmera son opposition à la ligne révisionniste, plus leur tâche dans la jeunesse de rabatteurs du P«C»F connaîtra d'échecs.

D'autre part, année après année, le mouvement révolutionnaire de la jeunesse a affirmé son désir de se lier à la classe ouvrière qui incarne ses aspirations à un autre type de société. Depuis Mai 68, il est peu de grèves ouvrières ou de mouvements populaires qui n'aient reçu .un appui massif de la jeunesse.

La volonté de faire pénétrer dans ses propres luttes, le point de vue du prolétariat révolutionnaire est de plus en plus claire. Ainsi, la critique de l'école, teintée en 1968 du mythe réformiste de la démocratisation, voire de la participation , est aujourd'hui centrée sur la question de la fonction économique et idéologique de cette institution en système capitaliste. la lutte contre l'armée bourgeoise a de même clairement mis en évidence,

au-delà du juste combat pour les revendications des appelés, la fonction impérialiste que lui assigne la bourgeoisie.

La perspective de l'unité du mouvement révolutionnaire de la jeunesse avec celui de la classe ouvrière n'est pas abstraite: la lutte des jeunes prolétaires et des élèves de CET, constitue la charnière, le lien vivant par lequel cette unité peut se construire. Elle permettra, dans le cadre du mouvement d'ensemble, que s'affirme avec force, dans la pratique, la capacité de la jeunesse révolutionnaire à être une des composantes les plus actives du processus de transformation de toute la société. Dans tous les domaines, la question que posent en effet les jeunes est claire: «au service de qui fonctionne cette société ? »

Que proposons-nous ?

L'organisation que nous voulons construire doit être unie politiquement, efficace, capable de répondre à tous les problèmes que rencontre la jeunesse: travail, armée, famille, école... Son existence répond à l'exigence d'unir, sur les bases du prolétariat, les jeunes des couches populaires. Elle est l'affirmation vivante de la nécessité pour eux de prendre en mains leurs propres luttes, et de contribuer par la mise en pratique du mot d'ordre «servir le peuple», au combat pour le pouvoir des ouvriers et des paysans.

Des discussions se mènent en ce moment dans les cercles jeunesse pour l'élaboration du programme de l'organisation révolutionnaire de la jeunesse; elles doivent être élargies à tous ceux qui ont, dans les années passées,engagé la bataille sur ce front, et qui veulent montrer, au moment où de grands affrontements se préparent entre la bourgeoisie et le prolétariat, que la jeunesse révolutionnaire est prête à tenir sa place dans ces luttes, à affirmer l'idéal communiste de destruction du vieux monde capitaliste.

En avant pour la construction d'une authentique organisation communiste de la jeunesse !

 

p.26

 

INTRODUCTION DU CAMARADE ANDRE ROUSTAN,

ANCIEN FTP, PRESIDENT DU PCR (m-l).

 

(FORUM RESISTANCE)

 

Camarades,

Pour introduire la discussion et en fixer le cadre, je vais vous présenter mon propre témoignage et des éléments sur la résistance à partir desquels nous pourrons ensuite discuter.

En 1941, je travaille dans les concentrations ouvrières, notamment sur les barrages en construction à ce moment sur la Dordogne. Je prends en mains la mise sur pied d'organisations clandestines du PCF sur l'ensemble des barrages. Nous mettons en place le premier maquis FTP du Cantal: les ouvriers de barrage poursuivis par la police de Pétain sont les premiers organisés dans ce maquis.

Le 12 août 1942, je suis arrêté par la police française sous prétexte de reconstruction du PCF. Je suis alors incarcéré dans un camp en France. Des milliers de militants étaient alors arrêtés et emprisonnés dans des camps en France ou déportés en Allemagne. Il s'agissait donc de s'organiser clandestinement pour continuer la lutte politique, et engager la lutte contre les reniements. J'étais personnellement responsable politique d'un groupe de détachement. Dès l'arrivée des prisonniers au camp, des pressions grossières avaient lieu pour tenter de saper leur moral, de leur arracher des signatures de soutien à Pétain. Le but des gardes était alors de tenter de connaître ceux qui seraient sensibles aux pressions physiques et morales, pour les utiliser ensuite afin de démoraliser les autres. Il a fallu alors engager tout de suite la riposte et lutter contre l'attitude qui consistait à minimiser le fait de donner une signature. Nous avons alors mené le combat sur le principe même de la signature, en expliquant aux camarades l'utilisation que les nazis feraient de la signature auprès des masses, en montrant que face aux intimidations et menaces, il fallait plus que jamais faire preuve de la plus grande fermeté. Grâce à ce travail politique de masse dans le camp, le moral des camarades s'est élevé et la très grande majorité a su résister aux pressions.

En octobre 1942, je suis déporté en Allemagne, à Buchenwald. Le but de l'ennemi était clair: travail forcé et extermination systématique. Mais ces atrocités des nazis ne faisaient que renforcer la détermination, la volonté de lutte des résistants. Nous avions sous les yeux l'attitude exemplaire des soldats de l'armée rouge qui, par exemple, allaient chercher eux-mêmes la soupe sans attendre qu'on la leur porte, au pas cadencé, avec chants révolutionnaires, et que les SS eux-mêmes, impressionnés, n'osaient plus frapper.

Le travail forcé (extraction et transport de pierres par exemple) était un moyen quotidien d'extermination: ainsi pour le transport, si on hésitait devant le tas de cailloux à soulever, avec l'air de choisir, on était abattu, si on en prenait un trop gros pour ses forces, on était abattu. Mais nous apprenions à déjouer ces pièges. Et les camarades qui étaient employés aux travaux déchargement des camions de ravitaillement ramenaient tout ce qu'ils pouvaient pour alimenter les camarades au risque d'être pendus le soir même. Ceux qui travaillaient à la fabrication des V1 ou à l'entretien des armes stockées pratiquaient le sabotage, malgré la liquidation systématique lorsqu'ils se faisaient prendre. La propagande pour la résistance circulait dans le camp, diffusée oralement à tout le camp, et jamais les SS n'ont pu l'empêcher: ils se heurtaient à la volonté de lutte des résistants, à leur foi inébranlable dans la lutte armée du peuple.

La question principale pour les résistants, c'était la préparation de l'insurrection: nous devions, prisonniers des camps nazis, aider par nos propres moyens à notre libération. Quand eut lieu le bombardement américain de Buchenwald en 1944, bombardement gigantesque qui dura 2 h et fit 11 000 morts, plus d'un millier d'armes furent prises aux SS. Ces armes furent planquées dans des trous de 30/40 cm faits, la nuit, sous les baraques et les bâtiments administratifs. La discipline et l'organisation du camp étaient telles que jamais les SS ne se doutèrent de ces caches. Dans le plan d'insurrection mis en place, nous étions organisés en détachements, et chaque détachement avait des consignes très précises sur ce qu'il devait faire et où il devait aller. La veille de l'insurrection, l'armée rouge était à 11 km, on la voyait de Buchenwald. Les SS pris de panique allaient exterminer tout le camp. L'insurrection fut déclenchée le soir même. Au matin, avec l'arrivée conjointe des américains et de l'armée rouge, le camp était libéré, la vie de milliers de déportés sauvegardée. Ainsi, même dans les pires conditions de répression, jamais nous n'avons perdu confiance dans le succès de notre juste combat, lutter à mort contre le nazisme.

Aujourd'hui, la bourgeoisie poursuit une vaste campagne de calomnies contre la résistance. On a vu projeter dans la dernière période des films comme «Lacombe Lucien» ou «Portier de nuit» et « Les chinois à Paris» qui tentent de salir la résistance.

On voit aussi refleurir des journaux, des revues telles que « La voix du Maréchal» ou «Signal» qui exaltent la force de l'armée nazie.

 

Les anciens résistants et déportés rencontrent mille difficultés pour recevoir pensions et retraites. On leur oppose toute une série d'obstacles administratifs. Mais dans cette dernière période, le comble de l'infamie a été atteint avec le feuilleton «L'orchestre Rouge» à la télévision.

L'orchestre Rouge, c'était le réseau de renseignements soviétique qui coûta 200 000 morts à l'armée nazie. Le feuilleton fait le silence total sur les raisons de la lutte de l'Orchestre Rouge, sur ses objectifs, sur ce qui anime les résistants qui travaillent dans ce réseau. On lance contre ce réseau et son chef l'accusation de collaboration avec les Allemands, et on épargne totalement le nazisme allemand. On essaie de mettre sur le même plan, résistants et nazis, en masquant totalement leurs motivations politiques propres. On présente les nazis comme des fonctionnaires corrects, quant aux résistants, on les présente comme une bande d'individus sans principe, plus ou moins corrompus et lâches. Nous savons exactement ce qu'était la Gestapo: tortionnaires nazis qui pratiquaient systématiquement l'extermination et la torture. Nous savons aussi ce qu'était la résistance: l'effort héroïque de milliers d'hommes et de femmes du peuple pour arracher leur pays aux ténèbres nazies. C'était l'héroïsme porté au plus haut point: le silence sous les tortures, la mort sous les coups des bouchers fascistes sans avoir rien céder.

Si la bourgeoisie fait tant d'efforts aujourd'hui pour calomnier la résistance, c'est qu'elle craint les leçons que peuvent tirer les masses. En effet, la résistance c'était le peuple en armes pour chasser l'occupant nazi. La résistance, c'était la classe ouvrière et les paysans pauvres et moyens pauvres en armes à la tête de la lutte des masses pour libérer le pays. La résistance, c'était la démonstration que la lutte armée du peuple est invincible.

Aujourd'hui, la bourgeoisie craint pour sa domination, elle redoute que les masses, tirant les leçons de la résistance, ne prennent conscience de la nécessité de la lutte armée pour détruire l'Etat bourgeois, que les masses prennent conscience qu'avec les armes sous la direction du parti de la classe ouvrière, de notre parti, elles sont invincibles et peuvent prendre le pouvoir.

Aujourd'hui, les révisionnistes, avec à leur tète le collabo Marchais, qui, alors qu'une partie de la jeunesse de notre pays commençait à s'organiser dans la résistance, partait comme volontaire travailler en Allemagne, ont progressivement éliminé du PCF les anciens FTP et résistants. Ils tentent d'utiliser ceux qui restent pour se donner une image de marque.

Quand je rentre en France, à la suite de la libération du camp de Buchenwald, j'apprends moi même qu'on a rendu les armes à la bourgeoisie. C'est Thorez, qui, à son retour en France demande aux anciens FTP et FFI de rendre les armes. Certes l'occupant nazi était chassé mais on se retrouvait face à notre bourgeoisie. Le PCF renonce alors à organiser les masses en armes pour engager la lutte contre la bourgeoisie et prendre le pouvoir. Tout au contraire, il appelle ouvertement à la collaboration de classes pour aider l'impérialisme français à se reconstruire. C'est devant cette trahison ouverte qu'un certain nombre de communistes quittent le PCF. Certains membres du PCF qui s'opposèrent à la décision de Thorez subirent alors des pressions physiques et morales et furent menacés.

En Mai 45, je retrouve les camarades anciens FTP du premier maquis du Cantal que j'avais créé. Pendant de longs mois, ils avaient mené une lutte implacable contre les miliciens, contre l'appareil de répression de Pétain. En 44, ils prirent une part très active au combat du Mont Mouchet: c'est plus de 10 000 FFI qui participèrent à cette lutte contre l'occupant nazi.

Cette bataille s'inscrivait dans la lutte de milliers et de milliers d'hommes et de femmes de notre peuple pour libérer le pays de l'occupant. Nous devons aujourd'hui rétablir la vérité des faits sur cette période particulièrement riche de la lutte révolutionnaire des masses en France. Des camarades anciens résistants ici présents, par leur témoignage, montreront comment la résistance organisait les masses dans la lutte de libération. Et cette histoire de la résistance ? Seuls ceux qui y ont réellement participé pourront l'écrire. C'est en ce sens que je fais appel ici aux anciens FTP et FFI présents pour collaborer à ce travail. Il nous faut aujourd'hui tirer les leçons de cette période. Notre lutte contre l'occupant nazi nous a montré que la lutte armée du peuple est possible et nécessairement victorieuse. Nul doute que le prolétariat de notre pays à la tète des masses populaires saura s'inspirer de l'expérience des anciens résistants pour abattre, les armes à la main, la bourgeoisie impérialiste.

 

p.28

 

LA JUSTICE:

NON, LEUR JUSTICE

 

(FORUM JUSTICE)

 

Nous ne parlerons pas de la Justice ! Car la vie dément quotidiennement l'idée que la bourgeoisie veut inculper depuis qu'elle a le pouvoir, idée selon laquelle la loi est la même pour tous les citoyens, qu'elle est juste, et que la Justice est rendue en toute impartialité.

Et si, par hasard, il peut exister de «regrettables erreurs judiciaires», elles ne peuvent avoir qu'une place très restreinte dans une institution ayant pour but de défendre l'ensemble de la société, l'ensemble des citoyens contre quelques éléments qui nuisent à la collectivité. 

Mais la réalité montre qu'une foule de gens qui passent devant les tribunaux sont accusés de petits larcins (voiture «empruntée», vol de mobylette, vol de petites sommes...). Il s'en suit des peines assez lourdes. Le temps où l'on allait aux galères pour avoir volé un pain n'est pas complètement du passé.

 Aujourd'hui, certains peuvent aller en prison pour très peu de choses: un mois de prison pour une bouteille de lait, quatre ans de prison pour 10 bouteilles vides.

La presse a évoqué l'affaire de cette mère de 15 enfants, Mme Garraud, qui a été déportée de 1942 à 1944 pour avoir participé à la Résistance et qui à été condamnée il y a quelques années à 10 mois de prison ferme pour escroquerie portant sur une somme de 900 F. Les pétitions d'anciens résistants et déportés adressées à M. Pompidou n'ont reçu aucune réponse. Or, à la même époque, Pompidou a gracié Touvier qui n'a pas fait un seul jour de prison bien qu'il n'y ait absolument aucun doute sur la culpabilité de ce chef de la milice à Lyon pendant l'occupation, responsable de l'exécution d'un grand nombre de résistants. Cet individu, deux fois condamné à mort par contumace n'a même pas fait un jour de prison.

Deux poids, deux mesures, la balance qui penche toujours du même côté, voilà la réalité de ce qu'ils osent appeler la Justice.

Cette Justice n'est rien d'autre que leur justice. 

Il y a une disproportion scandaleuse entre les peines que subissent les gens du peuple et celles attribuées à ceux de la bourgeoisie. Les «délits» des gens du peuple ne peuvent pas porter sur des sommes faramineuses. Le vol de quelques provisions dans les supermarchés, les dettes aux sociétés de crédit pour l'achat de meubles donnent lieu à des peines plus lourdes que les détournements, les fraudes fiscales, les banqueroutes de PDG qui portent sur des milliards.

Ainsi:

La mère de 15 enfants, qui fait des ménages pour nourrir sa famille, accusée pour 900 F: 10 mois fermes.

Par contre:

- un notaire lyonnais coupable d'une fraude fiscale de 40 millions d'anciens francs: une simple amende.

- des industriels de Besançon coupables d'une fraude de 58 millions d'anciens francs: 6 mois avec sursis.

- un ancien bâtonnier des avocats de Perpignan coupable d'une escroquerie de 3 millions d'anciens francs: 18 mois avec sursis.

- l'ancien président du tribunal de Rouen, coupable d'une banqueroute de 800 millions d'anciens francs, jugé 8 ans après les faits: 2 ans avec sursis.

La liste pourrait être longue, mais encore plus longue celle des innombrables délits de ce genre qui se perpétuent en toute tranquilité et qui ne seront jamais jugés, jamais jugés par la justice bourgeoise.

 La justice bourgeoise est rapide, expéditive et sévère pour les gens du peuple. Mais quand les bourgeois sont impliqués dans une affaire, alors l'instruction devient interminable, les relations jouent, la sentence est sans cesse reportée d'un procès à l'autre et les affaires durent des années. Il est particulièrement facile pour la bourgeoisie d'étouffer un scandale, de faire le secret autour d'une affaire où est impliqué l'un des siens.

Mais que quelqu'un du peuple essaie d'exiger la vérité, essaie de savoir comment il peut se défendre, quels sont ses droits (même le peu qu'il en ait) il se heurte à un mur, à un tissu de combines, à un dédale d'organismes qui se rejettent les responsabilités les uns sur les autres.

Dans la justice bourgeoise, il y a toujours le même accusé, à la fois victime et coupable, c'est le peuple. Car cette justice a pour but de défendre les principes et le pouvoir de la bourgeoisie.

Des dizaines d'ouvriers sont morts d'accidents du travail à Usinor-Dunkerque, Il ne faut pas compter sur la justice bourgeoisie pour condamner l'assassin. Il est plus facile d'accuser la fatalité ou les ouvriers qui ne font pas attention.

Les tribunaux sont plus soucieux de décréter l'expulsion des travailleurs qui occupent leur usine, de poursuivre quelques uns des ouvriers de Besançon par exemple qui ont participé à une manifestation en juillet 73 alors que l'ensemble de la classe ouvrière de Besançon était mobilisée pour soutenir les Lip. L'inégalité flagrante de la justice bourgeoise soulève la haine des travailleurs. Nous sommes ici avec des amis, des camarades qui ont une riche expérience de la lutte menée pour combattre, pour dénoncer la justice des PDG, des hommes d'affaire, des promoteurs, des patrons et pour annoncer que la justice des travailleurs s'exercera contre les exploiteurs, contre la bourgeoisie pour libérer le peuple de l'oppression capitaliste.

 

p.29

de la circulaire Fontanet aux mesures Dijoud

UNE SEULE VOLONTE DE LA BOURGEOISIE,

DIVISER LE PROLETARIAT

 

(FORUM TRAVAILLEURS IMMIGRES)

 

Les années qui ont suivi 68 ont été marquées par l'apparition d'un facteur nouveau et important dans le développement de la lutte de classes: on assiste à l'entrée en lutte massive des OS Pennaroya, Girosteel... de nombreuses luttes font apparaître que les travailleurs immigrés prennent massivement et activement part au développement des combats revendicatifs de la classe ouvrière.

Il y a en France environ 4 millions de travailleurs immigrés soit le 1/4 de la classe ouvrière de notre pays. 4 millions de travailleurs immigrés qui se répartissent pour au moins 80'% d'entre eux dans les couches importantes de manoeuvres, d'OS.

Face à la participation de plus en plus massive des travailleurs immigrés à la lutte de classe, face à l'engagement de ce processus de mobilisation des travailleurs français et des travailleurs immigrés dans la lutte sur la base de leurs revendications , la bourgeoisie sent l'urgence de réagir. Quoi de plus périlleux en effet pour la bourgeoisie française que de laisser se développer l'unité entre travailleurs français et travailleurs immigrés dans un même combat contre elle ?

 

La circulaire Fontanet = tentative de division.

 

Aussi dès février 72, Fontanet, alors ministre, s'illustre en donnant son nom à la sinistre circulaire qui sera mise en vigueur le 15 septembre de cette même année !

La circulaire Fontanet constitue l'arme essentielle que se donne alors le gouvernement pour tenter de faire face au développement des luttes de la classe ouvrière. Cette circulaire fixe, en les précisant, les fondements de la politique de la bourgeoisie en matière d'immigration; en développant le système d'embauche avec contrat de travail à durée limitée pour les travailleurs immigrés, en faisant dorénavant coïncider la durée de la validité de la carte de séjour avec la carte de travail, le gouvernement s'en prend à la sécurité des travailleurs immigrés en tentant de les soumettre au chantage de la menace d'expulsion en cas de participation aux luttes, en cas de grève.

 

Cette atteinte au droit de grève constitue l'attaque la plus grave portée à la classe ouvrière de notre pays ces dernières années. Menacer d'expulsion 1 ouvrier sur 4 en cas de grève, autant dire que c'est à l'unité de combat de l'ensemble de la classe ouvrière que la bourgeoisie s'en prend. Cette mesure scélérate, anti-grève vise à l'affaiblissement du combat de la classe ouvrière, en tentant de créer la division: division entre français et immigrés d'une part. mais aussi entre immigrés d'autre part dont le statut varie suivant la nationalité.

 

73: Une année de lutte contre la circulaire Fontanet !

 

Mais l'histoire de la lutte des classes au cours de ces deux dernières années est faite de la mobilisation et de l'opposition des travailleurs à cette tentative de division.

1973 est une année d'intense mobilisation des travailleurs:

grèves de la faim, manifestations, lutte pour des logements décents, luttes d'usines (Renault, Margoline, Cables de Lyon...) lutte contre la campagne raciste organisée par la bourgeoisie... constituent les éléments d'une riposte massive des travailleurs aux différentes manifestations concrètes de la circulaire Fontanet. La bourgeoisie entendait diviser, elle n'obtient alors que le renforcement de l'unité de lutte des travailleurs des différentes nationalités.

 

La circulaire Fontanet fonde les bases de la mise en place d'un contrôle strict de l'immigration en France. A cause des difficultés économiques créés par le choix politique qu'a fait la bourgeoisie d'accélérer le processus de concentration de la production (impératifs de la concurrence inter-impérialistes) le gouvernement ne peut plus désormais faire face à des arrivées incontrôlées de main d'oeuvre étrangère. Pour camoufler l'augmentation du chômage, le gouvernement bourgeois envisage alors d'effectuer des expulsions massives. La campagne raciste sanglante qu'il organise fin 73 vise à préparer l'opinion à de telles expulsions.

 

Mais la mobilisation massive des travailleurs pendant l'année 73 fera reculer la bourgeoisie: les mesures Gorse qui repoussent jusqu'à fin octobre 73 la date limite pour la régularisation des travailleurs immigrés constituent un recul de la bourgeoisie et une première victoire des travailleurs. Dans un deuxième temps, la modification de la situation internationale (guerre au Moyen Orient) fera différer ce projet.

 

Les mesures Dijoud: de nouvelles attaques contre les travailleurs immigrés.

 

Le conseil des ministres du 3 juillet a décidé l'arrêt de l'immigration pour les 3 mois d'été, celui du 8 octobre a décidé la prolongation de l'arrêt de l'immigration jusqu'à une date non précisée. De cette manière, en interdisant l'entrée en France à plusieurs dizaines de milliers de travailleurs immigrés, et en interdisant le retour pour tous ceux qui sont partis au pays sans contrat de travail en poche, Giscard procède à des expulsions camouflées.

Les mesures de Dijoud, secrétaire d'Etat à l'immigration , constituent de nouvelles attaques graves contre les travailleurs immigrés. En plus d'un certain nombre de mesures démagogiques, les conséquences essentielles de la fermeture des frontières sont:

d'une part, l'interdiction d'entrer en France et de pouvoir y travailler pour des dizaines de milliers de travailleurs étrangers; le 10 septembre plus d'un millier de travailleurs ont été bloqués sur l'aéroport de Tunis et n'ont pas pu rejoindre la France.

D'autre part l'interdiction pour les familles des travailleurs résidant en France de venir les rejoindre et de s'installer ; les femmes de travailleurs turcs ont été arrêtées par la douane française et renvoyées à leurs frais en Turquie; à Marseille les travailleurs qui arrivaient avec leurs femmes ont dû immédiatement leur payer un billet de retour Enfin cela signifie pour tous les travailleurs immigrés de plus grandes difficultés pour se faire embaucher (les patrons devront payer une redevance supplémentaire de 1 000F pour l'embauche de tout nouveau travailleur immigré) et pour tous ceux actuellement en situation irrégulière, des difficultés supplémentaires pour obtenir des papiers.

Les mesures Dijoud c'est aussi le renforcement de l'ONI (office National de l'Immigration) auquel vont être attribués des crédits supplémentaires. L'ONI est l'instrument de mise en place du contrôle de l'immigration: les frontières ne seront désormais réouvertes que pour faire entrer, si besoin est, des contingents de travailleurs, recrutés et sélectionnés sur place par les bons soins de 1'ONI qui est aussi chargé du rapatriement des travailleurs quand la bourgeoisie française n'en a plus besoin ou bien simplement préfère le remplacement d'un certain nombre d'entre eux par de nouveaux arrivants non encore avertis de la réalité qui les attend en France.

Les mesures Dijoud c'est encore, sous prétexte de simplification, la réduction à trois types de titres de séjour et de travail au lieu de 4 jusqu'à ce jour et la suppression donc de la carte de résident privilégié.

Enfin les mesures Dijoud, c'est le signal donné pour que s'organise la chasse aux «faux-touristes» comme l'annonce Dijoud lui-même, pour que se multiplient les contrôles de police déjà nombreux aux bouches de métro à Paris, dans les quartiers populaires, aux portes des foyers et même directement sur les lieux de travail ou les chantiers... Beaucoup de travailleurs immigrés ont reçu ces dernières semaines des avis d'expulsion.

Les mesures Dijoud sont directement dans la lignée de la circulaire Fontanet. Elles sont la concrétisation de la politique actuelle de la bourgeoisie .française en ce qui concerne l'immigration.

 

A bas le racisme !

 

Au cours des derniers mois, la bourgeoisie française a laissé volontairement se développer un certain nombre de manifestations de racisme:

- agressions à Marseille, Nice, Toulon, en Corse, à Aix, à Paris...

- attentats à Marseille, Paris...

- des comités racistes: Marseille, Annecy...

Un trait frappant de ces manifestations de racisme c'est que soit des militaires, soit des policiers. soit encore des notables sont auteurs d'agressions ou de déclarations racistes. Le fait que diverses branches de l'appareil d'Etat bourgeois, telles que l'armée, la police, la justice... soient impliquées dans ces affaires à chaque fois ou presque montre à l'évidence que cette campagne «bien dosée» est orchestrée en sous-main par la bourgeoisie elle-même et vise à accréditer l'idée selon laquelle au-delà d'un certain taux de présence de travailleurs immigrés, le racisme serait inévitable !

A ce racisme qui a servi à préparer l'opinion aux attaques contre les travailleurs immigrés que sont les mesures Dijoud, est venue s'ajouter l'intensification du contrôle policier.

 

Non à la campagne anti-arabe!

 

Aujourd'hui, avec le développement de la campagne anti-arabe, visant à faire croire que les pays arabes seraient responsables de l'inflation quand ils réajustent le prix du pétrole afin de ne pas faire les frais de l'inflation qui se développe dans les pays impérialistes, le gouvernement ne cherche qu'à dévoyer la révolte des travailleurs et à isoler les travailleurs immigrés.

Le développement de ce climat d'insécurité que la bourgeoisie s'emploie à entretenir, répond à son souci d'empêcher par tous les moyens le développement des luttes.

La bourgeoisie entend ainsi dissuader les travailleurs immigrés de lutter. C'est en effet sa plus grande crainte aujourd'hui : si les travailleurs immigrés rentrent en lutte avec les travailleurs français, c'est toute sa campagne de chantage à la pénurie, toute sa campagne d'appel à la «solidarité nationale», à la collaboration de classes, qui s'écroule comme un château de cartes !

Et elle commence à s'écrouler. A Boulogne, les locataires d'un immeuble français et immigrés s'organisent contre les expulsions et exigent des logements corrects pour tous !

Aujourd'hui même, les travailleurs antillais prennent une part active à la lutte des postiers pour les 1 700 F tout de suite et 200 F pour tous, l'augmentation des effectifs et de meilleures conditions de travail. Dans la lutte; ils font entendre leurs propres revendications !

Demain les travailleurs immigrés prendront toute leur place dans les luttes d'ampleur qui vont se développer.

Démagogie, insécurité sont deux maîtres mots de la politique de la bourgeoisie en matière d'immigration. Cette politique s'inscrit dans une tactique d'ensemble de la bourgeoisie qui cherche aujourd'hui par tous les moyens à empêcher un développement d'ampleur des luttes de la classe ouvrière.

Une campagne d'explications en profondeur est aujourd'hui nécessaire pour dénoncer de manière approfondie, diversifiée et active l'impérialisme français. Cette dénonciation de l'impérialisme français doit constituer la base politique indispensable à la construction de l'unité du prolétariat de France.

Mais la lutte pour l'unité de la classe ouvrière passe par la lutte quotidienne sur la base des revendications spécifiques et communes. Il s'agit pour nous aujourd'hui d'aider à créer les conditions pour que les travailleurs immigrés entrent massivement en lutte aux côtés des travailleurs français: la lutte unie des travailleurs français et immigrés mettra effectivement en échec les mesures Dijoud, la circulaire Fontanet. Mais il s'agit aussi pour nous d'organiser les travailleurs immigrés contre les retombées concrètes des mesures Dijoud. La révolte des travailleurs face à l'interdiction d'entrée en France pour leur famille, face aux difficultés d'embauche et face au contrôle policier, ne tardera pas à s'exprimer massivement.

Enfin, il est particulièrement important aujourd'hui de ne laisser se développer aucune manifestation de racisme et d'organiser la riposte aussi massive que possible.

A bas le racisme !

Non aux expulsions !

Non au contrôle de l'immigration !

 

p.31

 

MESSAGE DE MARIE CLAUDE AL HAMCHARI

Veuve de mahmoud al hamchari, représentant de l'olp,

assassiné par les agents de services secrets israèliens,

le 9 janvier 1973.

 

(FORUM PALESTINE)

 

 Je m'adresse à vous, en tant que militante pour la justice et la liberté, veuve de Mahmoud et mère d'une enfant Palestinienne. Il s'agit pour moi de poser avec vous les questions qui nous viennent à l'esprit, nous Français, lorsqu'on parle de l'Etat démocratique, objectif de l'O.L.P.

Evidemment, je ne peux pas m'assimiler à une «française moyenne» dans la mesure où je suis très liée à mes amis Palestiniens, où la personnalité de Mahmoud m'a fortement marquée, où j'élève mon enfant qui est Palestinienne, mais je vis en France, dans le contexte français et je me pose des questions qui -je pense- sont communes à tous les militants, quel que soit leur terrain de lutte.

Que signifie donc la proposition révolutionnaire de l'Etat Palestinien ? Il s'agit pour l'O. L.P. d'un Etat démocratique et laïc où vivront les Palestiniens de toutes confessions...musulmans, chrétiens et juifs dans une société progressiste où ils pourront pratiquer librement leur culte et jouir de droits égaux.

 

Pour la Résistance Palestinienne:

1° l'Etat démocratique englobe toute la Palestine, c'est à dire les territoires occupés depuis 1948 et 1967. Géographiquement la Palestine démocratique ne soulève aucune équivoque.

2° la Palestine nouvelle est un Etat progressiste non raciste et non confessionnel, partie du mouvement révolutionnaire arabe.

3° la Palestine nouvelle sera le résultat d'une lutte de libération qui se poursuivra jusqu'à la destruction de l'Etat sioniste. Elle ne découlera pas d'un compromis avec l'Israël raciste. même sur un seul m2 de la terre Palestinienne.

4° la Palestine nouvelle sera un Etat laïc qui ne permettra aucune ségrégation selon la religion, la race ou la couleur.

5° la Palestine nouvelle comprendra tous les Palestiniens en exil et sous l'occupation et tous les colons juifs accepteront l'égalité en tant que Palestiniens sans droits spéciaux ou privilégies.

6° la phase actuelle, phase de libération nationale, ne prendra fin que lorsque les institutions politiques et les structures économiques et militantes qui consacrent la domination raciale sur les Palestiniens arabes auront éclaté.

 

Face à cette vision révolutionnaire de la Palestine de demain, les détracteurs de l'Etat démocratique rétorquent que l'Etat démocratique serait irréalisable, ni acceptable, ni souhaitable.

1-«L'Etat démocratique serait irréalisable» parce que fondé sur la libération. c'est à dire sur la défaite de l'impérialisme sioniste. Une telle défaite serait impossible parce qu'Israël est un pays industriel fort, soutenu par le plus puissant pays impérialiste et parce qu'il reçoit un soutien illimité du Judaïsme mondial. En même temps on affirme que les Etats arabes sont faibles et ne réussissent pas à s'unir. On dit que le mouvement de la Révolution Palestinienne est inefficace et même en cours de liquidation, que les gouvernements arabes sont prêts à coopérer entre eux pour supprimer les fedayin.

2-«L'Etat démocratique ne serait ni acceptable ni souhaitable» parce que la poursuite du combat durcirait les positions des Israéliens. renforcerait, la détermination d'Israël. Si l'Etat Palestinien se réalisait, il ne pourrait survivre car les deux communautés ne pourraient pas coexister après une si longue lutte entre elles. Derrière ces arguments se cache une logique raciale et statique.

La supposition selon laquelle les Arabes ne seront jamais capables de s'améliorer est une affirmation raciste. Les arguments se basant sur les rapports de force sont statiques car ils ne prennent en considération que les positions actuelles et les données apparentes.

Les révolutions se fondent sur le concept dynamique qui implique la possibilité de faire exploser d'énormes forces populaires au travers de la lutte, des forces que l'on peut mobiliser, organiser, encourager et armer et qui peuvent provoquer des changements continuels dans les rapports de force.

Dans ces conditions, où situer la vision de la Palestine de demain, de l'Etat démocratique sur tout le territoire de la Palestine ? Cette vision est-elle en avance ou en recul sur le temps ?

a) la Révolution Palestinienne a subi de graves coups en 1970. Elle a souffert d'un manque de cohésion interne.

L'impérialisme et le sionisme se sont adaptés politiquement et militairement à la nouvelle situation créée par la guerre du Ramadan.

b) mais, d'un autre côté, certains arguments forts parlent en faveur de l'idée d'Etat démocratique; la reconnaissance dans le monde entier, des Palestiniens, de leurs droits nationaux et de la représentativité de l'O.L.P.

 

Les Palestiniens se sont montrés et se montrent encore de courageux résistants. Les preuves s'accumulent sur le fascisme pratiqué par Israël en Palestine occupée, sur sa volonté de rester dans les territoires occupés. La situation économique se dégrade sur la rive occidentale du Jourdain. La Résistance Palestinienne trouve toujours plus d'audience auprès de la jeunesse arabe et mondiale car l'identité palestinienne de la Révolution ne peut être qu'une identité de lutte non régionaliste; la libération de la Palestine ne peut se réaliser sans l'union avec la Révolution arabe. De même la Palestine démocratique ne peut être une entité isolée fermée ou séparée du corps national arabe.

Dans ces conditions il ne fait pas de doute que l'unique alternative progressiste, l'unique modèle acceptable pour la Palestine de demain, pour les juifs, les arabes, est le modèle proposé par la Révolution Palestinienne: le projet de l'Etat démocratique progressiste uni.

Pour terminer, je voudrais dire qu'il ne nous appartient pas à nous, Français, de nous ériger en conseillers du peuple Palestinien. Nous devons rester à l'écoute de ce peuple qui combat avec les armes et soutenir sans réserve la Résistance qu'il s'est donné.

 

Enfin souvenons-nous toujours de leurs valeureux combattants qui ont donné leur vie pour la libération de la Palestine. Le combat de MAHMOUD, le combat du Peuple Palestinien, le combat de tous les mouvements de libération dans le monde, ce combat commun nous devons le poursuivre, pour que le sacrifice de Mahmoud serve d'exemple et qu'il ne soit pas oublié.

 

 

n°2 de Révolution Prolétarienne è

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