QU'EST-CE QUE LA DICTATURE DU PROLÉTARIAT ? (7)

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L'HUMANITÉ ROUGE n° 419 -vendredi 30 janvier 1976
Quotidien des communistes marxistes-léninistes de france

   

QU'EST-CE QUE LA DICTATURE DU PROLÉTARIAT ? (7) 

 

Quelles formes prendra-t-elle en France ?

        Devant les partis de la social-démocratie de l'Europe du Sud, Mitterrand a, dimanche dernier, félicité Marchais pour son abandon ouvert de "la dictature du prolétariat". Il devait ajouter qu'une des raisons de la scission de Tours de 1920 était ainsi annulée. Le piquant de la chose aura échappé à beaucoup de gens: en effet Blum, celui qui devait passer, à l'histoire comme "un gérant loyal du capitalisme", n'osa même pas à ce congrès désavouer ouvertement le principe de la dictature du prolétariat et il devait déclarer : "Nous en sommes si bien partisans que la notion et la théorie de la dictature du prolétariat ont été insérées par nous dans un programme qui était un programme électoral. Nous n'avons donc peur ni du mot ni de la chose." (1)
        On peut donc dire en toute logique que Marchais est allé plus loin que Blum dans la trahison des intérêts fondamentaux de la classe ouvrière !
        Il est vrai que Georges Marchais et la clique dirigeante du PCF ont réussi à "enrichir" l'arsenal des fadaises destinées à combattre le principe de la dictature du prolétariat. En particulier leur mot d'ordre le plus en vogue c'est: "un socialisme aux couleurs de la France".
        Qu'est que ça veut dire ? Les couleurs de la France étant le bleu-blanc-rouge du drapeau de la bourgeoisie, la première idée qui vient à l'esprit c'est que Marchais ne veut pas du drapeau rouge qui dans tous les pays du monde est celui de la classe ouvrière. Il y a bien de ça effectivement : on sait que le PCF brandit tant qu'il peut ce drapeau qui flotte encore sur "nos" colonies de la Réunion, de la Guadeloupe, de la Martinique et d'ailleurs.
        Mais l'idée de Marchais est encore plus "profonde", si l'on peut dire. Quand on lui demande de s'expliquer sur la question il répond qu'en France les traditions démocratiques et la présence (proche) d'un "puissant camp socialiste" permettrait l'instauration d'une "démocratie pure".

    Or l'expérience quotidienne des ouvriers, des paysans, de tous les exploités et opprimés de notre pays démontre qu'il ne s'agit là que de balivernes !
    "Traditions démocratiques" l'assassinat régulier de travailleurs immigrés, "traditions démocratiques" l'application de la "loi anticasseurs" contre les paysans, les ouvriers, les étudiants qui manifestent ? "Traditions démocratiques" la liberté pour les patrons responsables de la mort d'ouvriers ? et cette jeune ouvrière de Fougères l'oeil arraché à 17 ans par une grenade de garde-mobile, "traditions démocratiques" ?
    En fait, les affirmations de Marchais sont complètement rejetées par des millions non seulement d'ouvriers mais aussi par d'autres catégories de la population touchées par la crise du capital monopoliste. Et cette prise de conscience a commencé à s'effectuer massivement au cours du mouvement révolutionnaire de Mai-Juin 68, et surtout depuis lors. De tous les cahiers de revendications, des exigences pressantes des ouvriers, des étudiants, des paysans rien n'a pu être réalisé. Ce qui fut lâché sous l'effet de la grande peur des bourgeois, fut repris quelques mois plus tard. Ainsi la classe ouvrière et tout le peuple travailleur ont depuis réfléchi et compris cette profonde vérité : c'est seulement par la force, par l'action de masse, c'est seulement en osant affronter les forces de répression du capital qu'on parviendra à imposer de justes aspirations et au-delà qu'il sera possible de changer radicalement l'ordre social actuel.


" Le socialisme aux couleurs de la France "

    Quelles meilleures preuves de cette prise de conscience que les mouvements de masses qui ont touché tous les secteurs de la société capitaliste sans se soucier de la légalité bourgeoise : même dans les prisons, même dans les casernes, même chez les "cols blancs" d'autrefois, les employés de banques, même chez les "petits commerçants" ! Et à la pointe du combat, de plus en plus, les ouvriers et les petits paysans! Voilà qui sans nul doute indique à quel point, oui, en France, la révolution est possible! Et si une guerre impérialiste éclatait déclenchée par les deux superpuissances, celle-ci ne ferait que pousser à un point extrême toutes les contradictions de classe et donc précipiterait la prise du pouvoir par la classe ouvrière.

LA DICTATURE DU PROLÉTARIAT EST NÉCESSAIRE

    Mais la révolution prolétarienne ayant éclaté, et s'appuyant nécessairement sur les armes, pourrait-on se passer de la "dictature du prolétariat" ? et quelle forme celle-ci pourrait-elle prendre ?
    Il faut poser la question nettement aux individus du type Marchais qui se prétendent communistes.
    Est-ce que la classe ouvrière et la paysannerie laborieuse pourraient maintenir leur pouvoir bien longtemps sans dissoudre immédiatement la police, la gendarmerie, les CRS, l'armée permanente où dominent les éléments rétrogrades, sans conscience de classe, dont la bourgeoisie se sert pour réprimer le peuple dont ils sont issus ? Est-ce que la classe ouvrière et la paysannerie laborieuse pourrait faire confiance à ces magistrats issus de la bourgeoisie et imbus de leurs privilèges pour rendre la justice ? Est-ce que la classe ouvrière et la paysannerie laborieuse pourrait confier aux technocrates et autres "grands commis de l'État" payés aujourd'hui dix fois plus que des ouvriers l'organisation de la production et la gestion conforme aux intérêts ouvriers de la société ? Nous disons nous que non.
    Il faudra enlever tout pouvoir à ces hommes liés par l'argent et mille autres liens à la grande bourgeoisie, et cela ne saurait être fait que par la force.
    C'est en s'appuyant sur la force des masses elles-mêmes que devra être supprimé le monopole de l'information de la bourgeoisie, que seront chassés les patrons des usines, qu'ils seront mis au travail, que seront supprimées immédiatement toutes les dettes fiscales ou sociales (loyer, remboursement de crédits, etc.) qui pèsent sur le peuple, que seront réquisitionnés en cas de guerre civile provoquée par la réaction ou en cas de guerre impérialiste les stocks alimentaires que font les riches, etc.
    Tout cela c'est la dictature du prolétariat sur les exploiteurs: elle nécessite la plus grande fermeté car la bourgeoisie de son côté ne fait jamais de cadeaux !


    "En fin de compte, le régime socialiste se substituera au régime capitaliste; c'est là une loi objective indépendante de la volonté humaine. Quels que soient les efforts des réactionnaires pour freiner la roue de l'histoire dans son mouvement en avant, la révolution éclatera tôt ou tard et sera nécessairement victorieuse."

Mao Tsé-toung.

LES FORMES DU NOUVEAU POUVOIR

    Mais quelles formes pourrait prendre la dictature du prolétariat dans notre pays ? Ce sont les masses populaires elles-mêmes qui en décident.
    Cependant d'ores et déjà ne peut-on voir dans le mouvement révolutionnaire de Mai-Juin 68 des prémices de ce nouveau pouvoir ? Ces assemblées générales dans les entreprises, les quartiers, les établissements d'enseignements, ces assemblées populaires et ouvrières désignant leurs représentants révocables à tout moment à des assemblées régionales ou de secteurs désignant également leurs "comités d'action" pour appliquer leurs décisions, rappelaient par bien des points la "Commune de Paris". Que de telles assemblées armées désignent demain leurs représentants et cela jusqu'au niveau d'une assemblée populaire nationale, chargée de décréter immédiatement toutes les mesures désirées par les ouvriers et les paysans, ainsi que d'organiser la destruction des bandes armées réactionnaires et l'organisation de la défense nationale, voilà la révolution prolétarienne et la dictature du prolétariat. Elles balaieront les agents de la bourgeoisie dans les rangs ouvriers ainsi que les agents du social-impérialisme russe et de tout impérialisme, c'est certain, c'est inévitable.
    Répondant à Giscard d'Estaing qui lui demandait: "Croyez-vous qu'il y aura la révolution en France d'ici 20 ans ?" le camarade Teng Siao-ping, vice-premier ministre chinois en visite officielle, n'hésita pas à répondre: "C'est inévitable puisque vous êtes une société de classes !"

1) Blum n'était pas pour la "dictature du prolétariat", mais il était obligé de cacher derrière une phraséologie son opposition à la conception bolchevique, c'est-à-dire léniniste de la dictature du prolétariat.

FIN

Henri JOUR 

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