l'Humanité Rouge n°654 -26 et 27 mars 1977- page 2

le monde en marche

 

L'insurrection malgache
de 1947

UNE CONTRIBUTION A
LA REVOLUTION MONDIALE

 

La revendication d'indépendance nationale émergea au grand jour lors des manifestations du 19 mai
1929 et devint une force matérielle formidable cimentant l'unité et la combativité des masses populaires.
La 2e guerre mondiale accroît la misère des masses populaires et développe leur combativité révo-
lutionnaire.
Le courant favorable à l'indépendance nationale se développe irrésistiblement ; dès 1946, il rassemble
l'immense majorité des masses populaires. Il utilise les moyens légaux et illégaux : le MDRM (Mouvement démocratique de rénovation malgache) parti légal fondé en 1946, et des organisations secrètes dont la plus connue est le JINY (dont Monja Jaona fut co-fondateur en 1943).

 L'INSURRECTION DE 1947

Face à ce développement, l'attitude pseudo-libérale du gouvernement colonial se transforme en une
frénésie de provocations et de répression. En 1946, le ministre des colonies est le "socialiste" Marius Moutet ; quant au gouverneur général de Madagascar , il s'agit du "socialiste" De Coppet.
Au déchaînement de l'hystérie colonialiste, les masses populaires répondent par la grande insurrection
de 1947, déclenchée dans la nuit du 29 au 30 mars.
L'insurrection se déclenche dans la région sud-est. Au centre et au nord du pays, les actions prévues
avortent pour des raisons diverses. Malgré cela, au bout de quelques jours, l'insurrection a gagné l'ensemble de la côte Est (zone forestière de l'île).
Elle s'étend rapidement et ne cesse de progresser jusqu'en juillet 1947 (elle va, entre autres, jusque
dans la banlieue de Tananarive, la capitale) sur un territoire de 800 km, du nord au sud, peuplé d'un million six cent mille personnes.

LE RECUL DES FORCES PATRlOTIQUES

A partir d'août 47, les forces coloniales qui étaient jusqu'alors débordées, reçoivent des renforts leur
permettant de contenir l'avance des forces patriotiques. Celles-ci, jusqu'en avril 1948, tentent de garder l'initiative et de rester à l'offensive. Mais, si l'organisation interne se renforce, les pertes sont lourdes et l'armement, la puissance de feu ne se développent pas ; le lien avec les masses populaires des zones de culture vivrière est coupé.
A la sortie de la saison des pluies, à partir d'avril 1948, c'est l'épreuve décisive. Les engagements se
font au détriment des forces insurgées, qui doivent abandonner les opérations militaires d'envergure pour revenir au stade de la guérilla. En décembre 1948, l'essentiel des forces populaires se dispersent après la capture ou la mort de ses chefs les plus influents. 

LES LEÇONS

Sur le plan militaire, ce fut un échec partiel et provisoire. Un échec du fait que les objectifs de
l'insurrection ne furent pas atteints, les pertes furent lourdes (environ 90 000 morts, dont une bonne part due à la répression féroce qui s'ensuivit) et la majorité des cadres capturés ou tués...
 
*Échec partiel, car les forces populaires n'ont pas été anéanties; c'est faute de direction qu'elles se sont dispersées après avoir fait l'expérience de la guérilla qui demeura efficace jusqu'au bout.
*Échec provisoire, car la volonté de combattre n'a nullement été anéantie et que des leçons sont à en
tirer.
Sur le plan politique, ce fut une victoire pour deux raisons :
Cela a renforcé les masses dans leur conviction de la justesse de leur cause ; par leur sacrifice, elles
ont gagné la sympathie et le soutien des forces progressistes dans le monde entier, et acquis le sentiment de faire partie du mouvement révolutionnaire mondial en marche. D'autre part, cela n'a fait qu'isoler davantage les colonialistes les plus invétérés.
 
A plus long terme, cette lutte contribua de façon importante à la restauration de l'indépendance poli-
tique (même formelle) en 1960.
 
Le caractère définitif de cette victoire se concrétise notamment par le fait que l'insurrection de 1947-
48 reste immortelle dans le coeur des patriotes malgaches et résonne comme un appel pour abattre l'impérialisme et la réaction et mener jusqu'au bout la révolution nationale démocratique et populaire.
 
Malgré l'impréparation sur le plan politique, organisationnel et militaire, ils se sont lancés à "l'assaut du
ciel".
 
Cette insurrection de 47 fut la contribution du peuple malgache à la lutte conjointe des peuples main-
tenus sous le joug de l'impérialisme français: résistance armée en Indochine, en Algérie, au Cameroun ; mouvements de masse en Afrique noire, aux Antilles, etc. et dans la métropole elle-même. 

 

 

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