.....Le bilan de "l'Humanité-nouvelle", dont le premier numéro (alors mensuel) parut en février 1965, et de l'"Humanité rouge", dont le premier numéro (alors hebdomadaire) parut le 20 février 1969 est positif. Comme tout bilan, il résulte de la comparaison entre résultats négatifs et résultats positifs. Affirmer que ces derniers remportent sur les premiers n'implique en aucun cas, bien au contraire, que nous devions ignorer les insuffisances et les erreurs. En vérité, depuis 1965, nous n'avons réussi à progresser qu'en portant sans cesse la plus grande attention à toutes les difficultés rencontrées. Nous n'avons amélioré l'efficacité de la presse marxiste-léniniste et de la pensée-maotsétoung qu'en nous acharnant à discerner correctement les échecs en vue d'agir concrètement pour les surmonter.

..... Du mensuel 16 pages édité au début, nous sommes parvenus aujourd'hui au quotidien de 8 pages paraissant cinq fois par semaine. De 1 500 à 2000 exemplaires vendus chaque mois en 1965 nous sommes passés à une vente quotidienne actuelle variant de 3 000 à 4 000 exemplaires, soit à un total de 60 à 80000 exemplaires vendus en un mois.

..... Pourtant nous allons devoir réduire, provisoirement, le nombre de pages de "l'Humanité rouge", qui ne paraîtra plus que sur 4 pages au lieu de 8.
..... Comme nous allons l'exposer un peu plus loin, cette mesure, assortie d'autres initiatives correspondant à des propositions venues de militants de base et de lecteurs, consiste à "reculer pour mieux avancer" par la suite. Mais, parlons d'abord de notre journal, pour bien fixer sa place, sa signification et sa portée actuelles.

..... Notre quotidien constitue le support indispensable de la ligne idéologique et politique des communistes marxistes-léninistes de France. Selon la formule employée par différents journaux qui défendent les intérêts de classe de la bourgeoisie, "l'Humanité rouge" est "proche du Parti communiste marxiste-léniniste de France". Sur ce point, en effet, "Le Monde" et d'autres organes expriment une réalité. Et cela mérite quelques précisions.

..... L'illégalité du PCMLF ne résulte que d'une grave illégalité de la bourgeoisie au pouvoir, qui a décrété son interdiction en invoquant des arguments dénués de tout fondement et en utilisant un décret-loi du gouvernement de Front populaire de 1936 destiné à détruire, fort légitimement, les ligues fascistes de l'époque. L'appel au Conseil d'Etat interjeté par nos soins contre l'application à notre Parti de ce décret datant de la 3e République a été rejeté "en la forme" et "sur le fond". Nos avocats de l'époque, qui sont d'ardents défenseurs des "libertés" dans la cadre de l'active propagande électoraliste de "l'Union de la gauche" , notamment Maître Badinter, nous ont informés en 1969 que, sur demande du ministre de l'Intérieur Marcellin ( un élève de Jules Moch), le PCMLF avait été considéré comme une "ligue armée". Et, de surcroît, par quel mystère, que notre recours était "hors délai" ! (A qui la faute ? Pas à nous en tout cas !). Des preuves établissant que le PCMLF était "armé" ? Aucune naturellement, en dehors de la réaffirmation fondamentale et publique de la théorie élaborée par Marx, Lénine, Mao Tsé-toung, d'après laquelle l'Etat constitue l'instrument de la domination d'une classe sur une ou plusieurs autres classes sociales, ce fait impliquant que "le pouvoir est au bout du fusil" et que "la Révolution prolétarienne détruit l'Etat bourgeois".

..... Faut-il que la simple perspective de voir la classe ouvrière disposer de nouveau d'un parti indépendant de ceux de la bourgeoisie, d'un parti bien à elle, dirigé par elle, défendant ses intérêts de classe, hante la bourgeoisie (de droite, du centre ou de gauche) pour que tout ce beau monde politicien n'élève pas la moindre protestation contre une aussi évidente violation de la liberté d'opinion pourtant inscrite dans la légalité démocratique bourgeoise ! Maître Badinter, adhérent du Parti socialiste sauf erreur, a consacré un ouvrage aux "libertés" , mais vous pourrez y chercher la moindre référence ou allusion à la cause dont nous l'avions pourtant chargé naguère devant le Conseil d'Etat par l'entremise de Maître Henri Leclerc. Le PCMLF ? Maître Badinter connaît pas !

..... Donc en vertu de l'illégalité de la bourgeoisie décrétée par la "droite" avec la bénédiction et la complicité de la"gauche", "l'Humanité Rouge" reste et restera seulement" proche du Parti communiste marxiste-léniniste de France", auquel, soit dit en passant, toute légalité aurait été accordée s'il avait accepté, changeant de sigle, de se soumettre délibérément au constant et perpétuel contrôle des différents organes policiers de l'Etat bourgeois.

..... N'est-ce pas là souligner toute l'importance historique, idéologique et politique de notre quotidien ?

..... Or, "l'Humanité rouge" rencontre des difficultés nombreuses, souvent indissociables, qui découlent de circonstances objectives, mais aussi des réactions subjectives de certains camarades ( qui ne sont pas forcément étrangères à des erreurs passagères dans les méthodes de direction). Les conditions objectives ? Elles résultent d'une formule journalistique qui ne peut s'adapter efficacement à la diffusion militante, mais qui doit être réservée essentiellement à la diffusion dite "commerciale", c'est-à-dire passant par les canaux du monopole de la distribution de la presse en France, les NMPP.

..... Quand autrefois "l'Humanité" (aujourd'hui "blanche" ) défendait encore les intérêts de classe de la classe ouvrière, elle se trouvait soumise aux mêmes tourments. Elle ne disposait d'aucun mpyen utile pour exiger la distribution susceptible de satisfaire les besoins des travailleurs. C'est là le lot actuel de "l'Humanité rouge" : nous ne pouvons même pas fixer nous-mêmes la provision d'exemplaires que nous désirons voir, dans chaque kiosque de province, le dépositaire ou sous-dépositaire régional fait un peu ce qu'il veut: quand il ne s'agit pas d'un révisionniste, qui n'hésite pas à saboter ( ou faire saboter, mine de rien, par les manutentionnaires affiliés à la CGT), s'il s'agit d'une personne "apolitique", notre faible impact commercial ne l'intéresse pas. Et cette situation se répercute jusqu'au niveau des kiosques. N'avez-vous jamais entendu une voix rébarbative vous répondre que son kiosque "ne vend pas ce journal" ? ou n'avez-vous jamais vu un honnête kiosquier chercher et rechercher pendant un bon moment l'exemplaire que vous lui avez demandé, mais qui ne figure pas à l'étalage... parce que "Le Figaro" ou "l'Humanité", ou "le porno" ça se vend mieux ?

..... Mais il y a aussi les réactions subjectives de certains camarades, pourquoi le cacherions-nous ? Lassés de cette bataille trop souvent perdue, ils abandonnent et insensiblement, glissent sur des positions sous-estimant l'importance idéologique, politique, organisationnelle et propagandiste du quotidien. Certains déclarent qu'on pourrait se satisfaire d'un simple hebdomadaire, d'autres affirment qu'HR ne leur apporte rien, ne contribue pas à les aider dans leurs luttes, etc.

..... Nous voulons tenir compte de toutes ces réalités : les circonstances objectives, les points de vue des camarades, que nous, dirigeants, n'avons pas suffisamment aidés ni informés. Voilà pourquoi "l'Humanité rouge" tiendra bientôt une large assemblée avec tous les militants intéressés à son développement, de la région parisienne comme de province.

..... Précédant cette réunion où chacun pourra et devra s'exprimer démocratiquement, une expérience, déjà voulue par nombre de camarades, sera mise en oeuvre ; en voici les principales dispositions :

..... A partir du mois de mars, une édition spéciale- bi-mensuelle, sera publiée et exclusivement destinée à la diffusion militante. Comportant au minimum 16 pages d'un format plus petit que le quotidien, cette édition comportera un contenu différent plus approprié aux larges masses populaires. Son prix, qui n'est pas encore fixé, sera réduit au minimum possible.

..... Pourquoi "un bi-mensuel" et non pas un hebdomadaire ? Parce que notre expérience nous a largement prouvé que cette formule remporte des résultats de diffusion bien meilleurs d'une part, facilite la tâche des diffuseurs, y compris pour leurs règlements financiers à notre administration d'autre part. Révélons aussi qu'en l'état actuel de nos forces rédactionnelles, d'impression et d'administration nous ne pourrions pas assumer le lancement d'un hebdomadaire, tout en maintenant le quotidien.

..... Naturellement, cette expérience permettra de faire apparaître des mesures permettant d'améliorer la formule initiale. Déjà quelques camarades informés disent "qu'il faudrait combiner le bi-mensuel avec le quotidien, c'est-à-dire confondre le premier avec l'édition du quotidien un jour par semaine...". Nous verrons à partir de la pratique. Simultanément, le quotidien passera de 8 à 4 pages. Cette formule est demandée par des lecteurs ouvriers et petits-paysans qui préfèrent un plus petit quotidien, qu'ils pourront lire en entier, et qu'ils paieront moins cher. Il se trouve que cette mesure est aussi de nature à nous aider à sur- monter nos difficultés dans le triple domaine de la rédaction, de l'impression et de l'administration déjà signalé. Le prix d'HR quotidien sera ramené de 1,50 F à 1 F. Cette modification sera 1'occasion d'une sensible augmentation de la présence en kiosque, évidemment dans les conditions difficiles déjà exposées.

..... Le tirage sera pour le moins triplé: un effort plus important sera soutenu dans la région parisienne, d'office, et, suivant les demandes des militants et lecteurs, en province, notamment dans les grandes villes.

..... Mesures nouvelles dont nous attendons beaucoup. HR quotidien sortira non plus cinq mais six jours par semaine (donc aussi le samedi matin) et il deviendra un quotidien du matin (actuellement il est en kiosque à Paris vers 15 heures; il sera en kiosque à Paris comme en province dès le matin c'est-à-dire pour la capitale vers les 6 heures et pour la province vers les 9 heures au plus tard).

..... Des affiches publicitaires, et d'autres moyens d'agitation-propagande, seront éditées dans le but de soutenir cette nouvelle bataille de "l'Humanité rouge".

..... Un mot encore sur nos difficultés: nous avons déjà exposé que nous ne saurions tenir le coup si 500 000 à 600 000 francs lourds ( 50 à 60 millions d'anciens francs) ne venaient renforcer chaque année nos rentrées d'abonnements et de ventes. Or, cette année, la souscription est fort mal partie: les objectifs fixés n'ont pas été atteints aux dates prévues, ni dans des délais relativement favorables. Nous recherchons en ce moment les explications concrètes de ce phénomène, qui ne correspond pas aux progrès de l'influence de notre ligne politique, notamment parmi les ouvriers et les petits-paysans. Nous n'inventerons pas les raisons de ce recul, mais nous comptons sur nos militants et nos lecteurs pour nous aider à les discerner de manière juste et efficace.

..... Si nous ne voulons pas recourir a un véritable appel de détresse, comme nous le fîmes par le passé dans des conditions similaires, pour remporter une nouvelle victoire grâce à la mobilisation immédiate de tous, cela ne doit pas nous interdire de placer chacun de nos camarades, chacun de nos lecteurs devant la réalité de cette situation.

..... Il y a quelques amis qui se consolent de ces circonstances considérant qu'elles traduisent le sort actuel de l'ensemble de la presse, condamnée à d'importantes régressions sinon à disparaître complètement, par la télévision. Nous ne pouvons partager ce point de vue, car nous devons partir d'une position de classe, d'une position politique. Or, qui contrôle les chaînes de télévision ? Qui contribue à distiller chaque jour son poison idéologique et politique auprès de 15 à 20 millions de téléspectateurs ? La bourgeoisie. Qui voit-on chaque soir, aux informations, ou lors d'émissions spéciales, sur le petit écran ? Giscard d'Estaing, Raymond Barre, Chirac, d'Ornano, Mitterrand, et, largement favorisé par certaine chaîne qui croit préparer l'avenir, Georges Marchais ! Une brochette de politiciens bourgeois que n'opposent que leurs rivalités pour la détention du pouvoir et de ses énormes avantages multiples en régime capitaliste.

..... Aussi considérons-nous "l'Humanité rouge" comme une arme indispensable pour combattre les effets idéologiques et politiques de la télévision, particulièrement dans les rangs de la classe ouvrière. Il va sans dire que nous envisageons de revenir dans le plus court délai possible à 8 pages, voire à 12 pages, mais nous ne pouvons pas échapper à la nécessité immédiate de "reculer" si nous voulons assurer les possibilités ultérieures d'avancer.

..... Camarades et amis, c'est à vous d'agir pour que vive, progresse et triomphe votre journal de classe, votre journal révolutionnaire prolétarien, "l'Humanité rouge" ! Sans vous, nous qui signons cet article au nom des organismes de direction de notre journal, nous ne pourrions rien, absolument rien. Aussi plaçons-nous en vous notre inflexible confiance ; encore une fois, tous ensemble, nous gagnerons ces nouvelles batailles qui préparent les plus grandes batailles pour ouvrir dans notre pays la voie de la Révolution prolétarienne, et contribuer à l'inéluctable victoire de la Révolution mondiale !

Jacques Jurquet,
Directeur politique

Suzanne Marty
Directrice de publication