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- La
Révolution d'Octobre et les falsifications du
PCF
- (Par Jean-Paul Gay) -page 2-
- l Le recours
à la violence, dans la Révolution d'octobre
17 en Russie, pour mettre fin à la dictature des
classes exploiteuses, fut inséparable d'une
mobilisation, d'une tension sans précédent
des énergies de la classe ouvrière et des
masses populaires. "L'insurrection, écrit
Lénine en septembre 1917, doit s'appuyer non
pas sur un complot, non pas sur un parti, mais sur la
classe d'avant-garde. Elle doit, ajoute-t-il,
s'appuyer sur l'élan révolutionnaire du
peuple" ("Le marxisme et
l'insurrection"). L'insurrection éclate
en effet lorsque "l'exaspération" des
masses est à son comble, lorsque celles-ci vouant
une haine implacable pour leurs exploiteurs, ne voient
plus d'autre issue que l'affrontement direct avec eux,
dans la perspective de mettre fin définitivement
à leurs prérogatives dans la
société.
- Ainsi, la Révolution
d'octobre est-elle tout le contraire d'une prise de
pouvoir par " le haut ", tout le contraire d'une
simple installation dans les rouages de l'État, de
gens qui, se présentant comme les
délégués des masses,
prétendraient régler les affaires de la
société à leur place. L'insurrection
d'octobre 1917, c'est le soulèvement du
prolétariat et de ses alliés, la
paysannerie, principalement déterminés
à prendre eux-mêmes leur sort en mains.
- Pour autant, l'éclairage que
donne aujourd'hui le PCF sur la Révolution
d'octobre est significatif de son projet, rigoureusement
contraire à la voie que traçait cette
révolution. S'il peut s'accommoder et même
tenter d'impulser, à l'avenir, certaines actions
des masses, voire certains affrontements plus ou moins
violents avec la bourgeoisie en place, c'est
exclusivement dans la perspective de s'appuyer sur ces
actions, ces affrontements, de les manipuler, afin
d'occuper pour lui-même des positions dans
l'appareil d'État, en vue d'y installer, ses
représentants, participant de la constitution
d'une nouvelle bourgeoisie. Mais, le PCF ne peut que
rejeter la notion d'insurrection prolétarienne
dans la mesure où celle-ci signifie, un acte
violent des masses pour prendre elles-mêmes le
pouvoir, pour elles-mêmes, comme cela se
manifestait dés février 17, en Russie avec
l'instauration des Soviets, au sujet desquels
Lénine indiquait : "La source du pouvoir n'est
pas la loi, préalablement discutée et
votée par un Parlement, mais l'initiative des
massas populaires, initiative directe, locale, venant
d'en bas, un "coup de force" direct, pour employer
une expression courante". (Sur
la dualité du pouvoir - avril 1917).
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- Parce qu'il est hostile à une
telle initiative, contradictoire avec son projet, le PCF
n'évoque la Révolution d'Octobre que comme
s'il ne s'agissait que d'un morceau d'anthologie
historique, aujourd'hui complètement
dépassé. En fait, pour tirer un trait sur
les enseignements d'Octobre 17, enseignements
fondamentaux pour la révolution
prolétarienne, le PCF adopte une double
démarche : d'une part, il réduit la
Révolution d'Octobre exclusivement à son
contexte historique, dont le déroulement ne
s'expliquerait que par les conditions de l'époque,
mais il ne se contente pas de cela : il falsifie les
faits eux-mêmes, et en particulier la ligne de
conduite adoptée par le Parti bolchevik, tout au
long du processus révolutionnaire qui conduisit
à la victoire de l'insurrection. Cette besogne de
falsification a été confiée
notamment aux trois membres du Comité central du
PCF qui ont écrit "Les communistes et
l'Etat", un an après le 22e congrès de
leur parti : il s'agissait alors de justifier l'abandon
de toute référence à la notion de
dictature du prolétariat.
LES "ARGUMENTS"
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- Tout en insistant sur les circonstances
de l'époque. Fabre, Hincker et Sève, en
sont venus à donner de la Révolution
d'Octobre l'image d'un processus essentiellement
pacifique. Ils baptisent même cette
révolution de "stratégie du passage
pacifique au socialisme". C'est une telle
stratégie, selon eux qu'aurait défendue
Lénine jusqu'à la limite du possible,
jusqu'à la veille, pour ainsi dire, de la prise du
Palais d'Hiver, et des organes vitaux de la capitale, le
7 novembre. Pour justifier leur interprétation,
les trois membres du CC du PCF mettent en avant le fait
que les affrontements pour renverser le gouvernement
bourgeois provisoire de Kerenski, furent effectivement
très courts et assez peu sanglants et qu'entre
février 17 -qui marque la victoire de la
révolution démocratique bourgeoise- et
octobre 17, qui correspond au début de la
révolution prolétarienne, le
développement du processus fut en effet
essentiellement pacifique ; de fait, au lendemain de
février, Lénine envisageait comme possible
un développement pacifique jusqu'au bout, de la
révolution.
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- Après les journées de
février, la milice ouvrière défile
à Pétrograd
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- LES "OUBLIS"
Ce faisant, nos plumitifs
révisionnistes passent soigneusement sous silence
deux traits particulièrement importants de cette
période. Lorsque Lénine de retour à
Pétrograd, le 3 avril, évoque la
possibilité du développement pacifique, ce
sont des ouvriers en armes et des soldats, souvent
déserteurs avec armes et bagages, du front de la
guerre impérialiste, qui sont rassemblés
dans les soviets, fermés en février dans la
capitale et dans de nombreuses autres localités.
En effet, les affrontements de février qui ont
conduit à l'abdication du tsar avaient souvent
pris le caractère d'affrontements armés ;
les ouvriers s'étaient emparés de
nombreuses armes des unités de la police ou de
l'armée, et une fois les affrontements
terminés, ils les avaient conservées en
s'opposant par la suite, avec fermeté a tout
désarmement ; dans les grandes concentrations
ouvrières, était née ainsi, la garde
rouge. Quant à l'armée, une grande partie
de ses unités envoyées contre les
soulèvements ouvriers avec des dizaines de
milliers d'hommes avaient mis la crosse en l'air et
étaient passés du côté du
prolétariat. Les Soviets ainsi constitués,
alors que subsiste parallèlement le gouvernement
provisoire de la bourgeoisie et des grands
propriétaires fonciers, Lénine va les
définir par cette formule : "la dictature
révolutionnaire du prolétariat et de la
paysannerie". Lorsque les révisionnistes
citent Lénine, parlant dans leur ouvrage du
"maximum de possibilités légales"
existant pour la lutte des prolétaires au
lendemain de février ils "oublient"
seulement de signaler que ces "possibilités
légales" peuvent permettre de mener à terme
pacifiquement, le processus révolutionnaire, ne
sont pas de simples droits octroyés par le
gouvernement provisoire, ils sont avant tout une
réalité imposée par les Soviets,
véritable gouvernement exercé par la classe
ouvrière et ses alliés et c'est bien dans
ce contexte précis et dans aucun autre qu'est
envisagé par les bolcheviks, le passage pacifique.
Lorsque les auteurs du livre "Les communistes et
l'Etat", citent encore cette affirmation de
Lénine : "Le passage de tout le pouvoir aux
mains de la majorité véritable du peuple,
c'est-à-dire des ouvriers et des paysans pauvres,
ne peut nulle part s'effectuer aussi facilement et aussi
pacifiquement qu'en Russie" (La conférence de
Pétrograd ville du P.O.S.D (b)R). Ils se gardent
bien de signaler que pour Lénine cet état
de chose n'est que la conséquence de l'existence,
sous la forme des Soviets d'un "pouvoir direct
exercé par les ouvriers organisés et
armés, dictature des ouvriers et des paysans. Il
ne faut pas oublier, rappelle Lénine, que
le pouvoir réel, à Pétrograd,
appartient aux ouvriers et aux soldats ". ("Lettres
sur la tactique" 26 avril 1917).
Une constatation faite par Lénine
le 3 mai 1917 éclaire assez sur la situation de
cette période : à Kanavine, dans la
province de Nijni-Novgorod, les 30 000 ouvriers de 16
usines viennent d'imposer ni plus ni moins que
l'administration des entreprises finance leur milice :
"une mesure, dit Lénine, d'une
portée immense, formidable, décisive, tant
en pratique qu'en principe".
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- L'AMALGAME
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- Le "développement pacifique
de la révolution" dont il est question ici,
est donc à l'opposé de l'activité
électoraliste d'un parti révisionniste
comme le PCF bien que les auteurs de Les communistes et
l'état prétendent en faire plus ou moins
l'amalgame.
- Ceux-ci d'ailleurs ne
caractérisent les Soviets que comme " un autre
gouvernement ", sans un mot sur le fait que ces
Soviets sont le pouvoir direct exercé par les
prolétaires en armes et qu'ils constituent donc un
pouvoir radicalement différent de toute
République parlementaire bourgeoise. Pour les
révisionnistes, en ramenant le
développement pacifique envisagé par
Lénine à leur propre pratique politique,
l'originalité des bolcheviques dans le processus
de 1917 ne réside plus guère pour eux que
dans les coups de fusils tirés contre le Palais
d'Hiver.
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- LE CONTENU
- DE LA PROPAGANDE
- DES BOLCHEVIKS
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- Voyons comment les
révisionnistes caractérisent
l'activité des bolcheviks durant cette
période : "Arrivé à
Pétrograd quelques semaines plus tard après
la révolution de mars, Lénine
découvre une situation profondément
originale, caractérisée par la
dualité du pouvoir... Et on le voit mettre au
premier plan de ses préoccupations, tout au long
de mai et de juin 1917 la lutte contre la violence, tenue
pour une faute capitale, mieux, dénoncée
comme le piège par excellence tendu aux masses par
l'adversaire de classe". Les révisionnistes
développent ici, avec l'arme de l'omission, tout
leur savoir-faire en matière de falsification. La
réalité, en effet, est que Lénine,
dans cette période, combat les points de vue de
ceux qui songent à une attaque armée
immédiate contre le gouvernement provisoire. Il
les combat sur la base d'une analyse de la situation qui
indique par exemple, lors des manifestations
armées en juillet dans le quartier de Vyborg,
à Pétrograd, que l'armée et la
province ne sont pas encore prêtes à
soutenir l'insurrection de la capitale et qu'il y a donc
un danger d'isolement et d'écrasement des
détachements les plus avancés de la classe
ouvrière. Mais la propagande faite dans toute
cette période par Lénine et le parti
bolchevik et qui effectivement s'oppose au recours
immédiat à la violence armée
est-elle pour autant pacifiste ?
- C'est tout le contraire. Même
dans la période où est envisagée
l'éviction sans heurts sanglants du gouvernement
bourgeois, entre février et juillet 1917, avant la
répression des manifestations ouvrières par
les junkers (élèves-officiers) le cœur de
toute la propagande des bolcheviks, c'est l'appel au
développement de l'armement du prolétariat,
à la constitution partout des milices
ouvrières et populaires. Le " patient travail
d'explication et d'organisation" des bolcheviks
"pour conquérir la majorité au sein des
Soviets" qu'évoquent les auteurs du livre, ils
se gardent bien d'en indiquer le contenu : pour les
bolcheviks, la lutte contre l'influence des mencheviks et
des "socialistes révolutionnaires" qui, au
sein des Soviets, prônaient le soutien au
gouvernement bourgeois encore en place, était
liée étroitement à l'affirmation du
pouvoir exclusif des Soviets, et à la
nécessité mise en avant de
développer l'armement du prolétariat ; et
ceci, souligne constamment Lénine, est la
condition de possibilité d'un éventuel "
passage pacifique au socialisme".
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- LA MILICE ET LE POUVOIR A.LA BASE
Dans une lettre de mars 17, au lendemain
de la révolution de février, à la
veille de son retour à Pétrograd,
Lénine déclarait : "La seule garantie de
la liberté et de la destruction complète du
tsarisme réside dans l'armement du
prolétariat, dans la consolidation, l'extension,
le développement du rôle, de l'importance,
et de la force du Soviet des députés
ouvriers." Quelques jours après, Lénine
répondait à la question : "De quelle
milice avons-nous besoin, nous, le prolétariat et
tous les travailleurs ?"
- A cent lieues de la conception des
"délégations du pouvoir", conception
chère aux révisionnistes et qui
réduit les masses au silence, Lénine, liant
indissolublement la question de l'armement et celle du
pouvoir direct exercé par la base, écrivait
au sujet de la milice des Soviets à organiser :
"Une telle milice serait formée à 95 %
d'ouvriers et de paysans ; elle exprimerait
réellement l'intelligence et la volonté, la
force et le pouvoir de l'immense majorité de la
population. Cette milice armerait réellement le
peuple tout entier et lui apprendrait le maniement des
armes, nous garantissant ainsi... contre toutes les
tentatives de rétablir la réaction. . .
Cette milice serait l'organe exécutif des
"Soviets des députés ouvriers et soldats"
: elle jouirait de l'estime, et de la confiance
absolues de la population, puisqu'elle même serait
une organisation du peuple tout entier. Cette milice
transformerait la démocratie, de belle enseigne
destinée à masquer l'asservissement du
peuple aux capitalistes qui s'en moquent, et une
véritable éducation des masses en vue de
les initier à toute: les affaires publiques…".
Jean-Paul GAY
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