..... Des
camarades de la base ou cadres intermédiaires de
notre Parti s'adressent à moi depuis quelques mois,
en ma qualité de membre du Comité central, du
Bureau politique et du Secrétariat politique, pour me
demander de prendre position plus ouvertement et plus
activement sur l'idéologie, la ligne politique et le
style de travail de nos organismes
dirigeants.
..... J'ai déjà montré sans
aucune ambiguité lors du Vème Congrès
ainsi qu'à l'occasion d'autres instances
(conférences nationales ou sessions du Comité
central) que je suis en désaccord et donc en
opposition avec certains points fondamentaux de la ligne
mise en oeuvre par une partie de nos dirigeants depuis la
3ème session du Comité central issu du
IVème Congrès. A vrai dire il ne s'agit pas
d'une ligne continue, mais au contraire d'une ligne qui a
varié à plusieurs reprises en fonction de la
pression des événements politiques survenus
dans notre pays. Des interprétations plus que
discutables ont été avancées par
exemple à propos de la Résolution
générale issue des travaux du Vème
Congrès, et j'y reviendrai de manière
approfondie dans une contribution ultérieure.
Toutefois je dois indiquer que je suis en
général pleinement d'accord avec la ligne
exprimée sur les problèmes internationaux
ainsi, quoique avec d'avantage de réserves dans
certaines circonstances, avec la ligne exprimée sur
les problèmes de l'immigration et de la lutte contre
le racisme.
..... En tout état de cause je rapelle que
j'ai voté contre le rapport d'activité
présenté devant le Vème Congrès
pour de multiples raisons qu'il ne m'était pas
possible d'exposer dans leur détail, si j'entendais
que ce Congrès aborde en temps voulu le débat
de fond à l'occasion de la Résolution
générale.
..... Actuellement, notre direction réduit, de
manière dogmatique, l'interprétation de la
cible fixée par notre dernier Congrès, en
refusant d'y inclure le Parti socialiste, dont les
activités politiques globales sont indissociables de
la politique que nous prétendons condamner. A cet
égard, tout en déplorant sa démission,
j'exprime mon entière solidarité avec le fond
de la position exprimée par le camarade Robert
Kissous, militant ouvrier d'Alsthom Saint-Ouen,
profondément lié à la classe
ouvrière.
..... Quand j'apprend ensuite, dans une
réunion de CPR, d'un membre du Comité central
que lors de la dernière session à laquelle je
n'ai pas pu assister, on est allé jusqu'à
qualifier de "gauchistes" les positions actuelles du PCF, je
reste stupéfait. Je discerne dans cette
appréciation que notre direction situe notre Parti
à la droite du PCF !
Or les
responsabilités historiques des dirigeants du PCF
dans la situation politique présente découlent
de la ligne électoraliste et opportuniste de droite
qu'il a mise en oeuvre depuis la fin de l'année 1952,
de suite après la manifestation puissante contre le
général américain Ridgway, bourreau du
peuple coréen.
Le PCF a impulsé
l'Union de la gauche et mis sur orbite François
Mitterrand, et nous avons justement dénoncé
ces positions en leur temps de manière tout à
fait juste. Le PCF a renfloué le PS, puis il a
participé au gouvernement Mauroy, ce que nous avons
refusé de dénoncer au niveau de nos organismes
dirigeants, en dépit de la demande que j'ai
réitérée ainsi que d'autres camarades
sur ce point.
Actuellement le PCF
affiche des positions parfois correctes, du moins dans sa
presse, dans ses discours et autres déclarations et
dans les intentions proclamées par les dirigeants PCF
de la CGT. Mais dans la pratique son attitude est
différente. Les cadres intermédiaires du PCF
demeurent toujours aussi sectaires et obtus. Nous pensions
trouver des forces dans ses rangs. Il faudrait faire le
bilan des résultats acquis depuis le IVème
Congrès à ce sujet. Il est quasiment
nul.
Ce n'est pas avec le PCF,
en tant que tel, encore moins avec le PS évidemment,
que pourra apparaitre ce que nous entendons par "renouveau
du communisme". Sur cette expression d'ailleurs, il y a
entre membres du Comité central des points de vue
très différents, et une clarification
fondamentale s'impose.
Allons nous enfin une
bonne fois pour toutes condamner sans équivoque la
politique contraire aux intérêts des
travailleurs, du gouvernement (nous le faisons), mais aussi
du Parti socialiste et du Parti communiste français
(ce que nous ne faisons pas de manière claire et
dénuée d'ambiguité).
Je condamne l'attitude aux
graves conséquences du PS et du PCF vis-à-vis
des agissements classiquement fascistes de Le Pen et de la
droite fascisante.
..... En ce qui concerne le style de direction de
notre Parti vis-à-vis des camarades qui militant dans
des organisations de masse (AFC, MRAP et même
SYNDICATS) je la tiens pour inopérante, inexistante
et contraire à toutes les pratiques,
consacrées avec les succès historiques que
l'on sait, des partis communistes
authentiques.
Chacun est
abandonné à sa seule réflexion
individuelle et à ses propres initiatives, souvent
contradictoires avec celles du camarade militant dans la
même organisation !
..... Enfin j'ai refusé de prendre part au
vote engageant le Parti dans la voie d'un changement de ses
références fondamentales, sous le
prétexte plus que léger d'un changement de
sigle. Quelles que soient les intentions des camarades qui
l'ont adoptée, cette initiative ne peut qu'aboutir
à la liquidation du Parti tel que nous l'avons
fondé et développé depuis 1963,
à travers des luttes parfois très dures contre
les reniements et trahisons des travailleurs tant par la
social-démocratie que par les dirigeants du Parti
communiste français, et, naturellement, contre les
forces réactionnaires qui nous ont rejetés
dans l'illégalité en juin 1968.
Pour moi, il ne sera
absolument pas concevable ni acceptable de parler de
changement de sigle, sans qu'auparavant ait eu lieu un vaste
débat d'orientation, portant sur les
références fondamentales de notre Parti, et ce
sur la base des principes préservés par la
dernière instance statutaire de notre Parti, la
Résolution générale du Vème
Congrès.
12 janvier 1985
..... (
Note manuscrite de JJ
: Notre Parti ne survivra que s'il fonde
sa ligne sur les acquis du marxisme, du léninisme, de
la pensée maotsétoung en les appliquant aux
conditions spécifiques de notre pays. )
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