FRONT ROUGE n°156 -15 mai 1975- hebdomadaire
organe central du
Parti Communiste Révolutionnaire (m.l.)
---

PAGE 5

ç

è

DANS LA MARINE: LE RÉVISIONNISME CONTRE L'INTERNATIONALISME

      Au moment où les travailleurs de tous les pays impérialistes subissent la crise, les bourgeoisies recourent au racisme, au chauvinisme, pour les diviser. Les révisionnistes font exactement la même chose.

      Il y a six mois, les révisionnistes du P"C"F et de la C.G.T. s'étaient saisis de la lutte des marins du " France " pour lui coller des mots d'ordre ultra-chauvins. Au bout d'un certain temps ils ont abandonné les marins, car ils furent satisfaits de l'annonce du plan de développement de la marine marchande, demandé aussi par Vieljeux, PDG de Delmas-Vieljeux. Ce qu'ils voulaient, comme le demandait " l'Humanité " (13/9/74), c'était " la consolidation de notre monnaie, le redressement de notre balance des paiements, l'expansion de notre commerce extérieur ".

      Aujourd'hui on comprend mieux encore l'unité qui existe entre cette défense des PDG de la marine marchande française et le développement du venin du racisme et du chauvinisme. Gruenais. du syndicat C.G.T. des marins déclare "les équipages doivent rester français " (Humanité, 5/5/75), ce qui équivaut à désigner comme responsables des difficultés dans la marine, les marins étrangers !

      Opposant ainsi les intérêts des marins de différentes nationalités, les révisionnistes se démasquent pour ce qu'ils sont, des diviseurs au service de la bourgeoisie.

 

L'enjeu de la
lutte
à Unimel
( Besancon )

      Mardi 6, à la tête d'un commando de cadres et d'anti-grévistes, le patron a attaqué le piquet de grève et a pénétré dans l'usine, frappant femmes et enfants. Il croyait, parce que la veille une dispute avait éclaté entre les travailleurs et les permanents FO et CFDT qui présentaient les maigres résultats des négociations comme un pas en avant, que la masse des travailleurs voulait reprendre le travail ! L'usine, délaissée par les assaillants, a été réoccupée peu après par les travailleurs.

      Mener le combat contre le défaitisme répandu et entretenu par les révisionnistes et les réformistes, montrer que la lutte est possible si les travailleurs la prennent en mains, cette double tâche ne peut être remplie que si, dans le cours de la lutte, se construit et se renforce la cellule communiste de l'entreprise, celle d'un parti qui, à travers toutes les luttes (Lip, PTT, Liévin...) offre une autre perspective, celle du socialisme. Un premier pas dans cette voie s'est manifesté par l'organisation d'une vente de pain d'épice en ville et dans un quartier populaire, après une représentation théâtrale sur la lutte des mineurs, par des étudiants qui ont ainsi concrètement illustré le principe " servir le peuple ".

Cellule UNIMEL du PCR (ml) le 11/5/75

 

10.000
licenciements
prévus à la
Thomson

      Dans la concurrence toujours âpre qui l'oppose aux trusts américains de l'informatique, la direction de la Thomson prévoit la liquidation du secteur " composants ", technique devancée par celle des " circuits intégrés ", et le licenciement de 10.000 travailleurs. La riposte s'organise dans les différentes usines du groupe :
      - à Dijon (Bourgogne-Electronique), les ouvrières ont décidé de ne plus remplir leurs feuilles journalières de production tant que la direction ne paierait pas intégralement les heures et jours chômés.
      - sous l'impulsion de la section CFDT de Grenoble, un journal destiné à mobiliser les travailleurs de l'ensemble du groupe, à populariser les actions qui s'engagent, est diffusé.

 

A Catlin (Angers) : 120
travailleurs licenciés
occupent leur usine

      Après avoir vainement attendu la suite des promesses du préfet qui cherche un acheteur disposant de 600 millions (!) les travailleurs de cette fabrique de menuiserie de laboratoire, professionnels pour la plupart, ont décidé l'occupation contre la fermeture et les licenciements.

Correspondant Angers

 

Grève au foyer Sonacotra (St Denis)

      " Depuis le 27 janvier, nous sommes en grève pour :
      - le contrôle de la gestion par les locataires, la liberté d'expression, de réunion...
      - Le retour à l'ancien loyer (on veut nous imposer 250 F. pour une petite chambre de 6 m2)
      - la démission immédiate du gérant raciste et provocateur. Le tract diffusé par le Comité de Locataires poursuit :
      " Les patrons disent toujours : " vous, les immigrés, vous êtes venus ici pour travailler pas pour faire la grève ou faire de la politique ". Nous, nous répondons : ... si les patrons n'avaient pas besoin de nous, nous ne serions pas ici à être exploités comme des esclaves. Mais aujourd'hui, nous sommes devenus des ouvriers comme les ouvriers français ; alors, nous demandons (...) les mêmes droits pour tous les ouvriers... La Sonacotra nous attaque, le gérant monte des provocations contre nous... Mais nous sommes décidés à continuer la lutte jusqu'à la victoire totale. "

 

Occifeux (Aubervilliers) grève contre les licenciements

      Les travailleurs, surtout immigrés sont en grève :
      - contre les licenciements
      - pour une augmentation de salaire
      - pour la réduction des horaires à 40 H (payées 43)

 

Rogers Color (Nancy)
12e jour de grève
contre les contrats
de travail
à durée limitée

      Mercredi 7 mai, après une semaine de grève, les grévistes et leur section CFDT décident d'occuper la salle de développement des photocopies pour empêcher la production, jusque là assurée par les cadres. Le soir, la direction fait chasser les grévistes par la police. Dès le vendredi, après une intervention du PCR devant l'usine, avec des syndicalistes, l'occupation reprend et la direction est obligée de faire quelques concessions : (1.420 F à l'embauche) mais rien n'est cédé sur les contrats. Au contraire des grévistes sous contrat sont menacés de licenciement. La popularisation continue : 3 H durant, les grévistes sont intervenus avec tracts et collecte en plein centre de Nancy devant un commerce de photos, propriété du patron, malgré l'intervention de la police appelée par le patron.
      La création d'un comité de soutien est envisagée. Les justes revendications mises en avant par les travailleurs de Rogers Color, les formes d'action offensives qu'ils ont choisies font de leur lutte un exemple pour tous les travailleurs. C'est pourquoi la section du Parti de Nancy participe activement au soutien de la lutte.

Corres. Nancy - 11/5/75 

A PROPOS DU DERNIER LIVRE DE SÉGUY "LUTTER"

      Au moment où les révisionnistes du P"C"F " durcissent " leur ligne et font semblant d'être les meilleurs défenseurs des ouvriers pour se distinguer du PS. Séguy sort un livre au titre combatif : " Lutter ". On va voir ce qu'il en est de cette " combativité ".
LE PERSONNAGE SÉGUY : DU JEUNE RESISTANT AU BUREAUCRATE BOURGEOIS
      Bien qu'il s'en défende, Séguy consacre toute la première partie de son livre à des considérations complaisantes sur sa personne, à la manière de tous les hommes politiques bourgeois.
      Nous le voyons d'abord utiliser son passé de très jeune résistant et militant du P"C"F du temps où celui-ci était encore révolutionnaire. A la différence de Marchais, qui travaillait volontairement pour les nazis, Séguy, en déportation à Matthausen, sabote la production militaire à laquelle on le fait travailler et participe à l'organisation de la résistance.
      Mais que reste-t-il aujourd'hui de ce jeune courageux qui a parcouru toutes les étapes du renoncement ? Un bourgeois, un bureaucrate révisionniste à la solde de la bourgeoisie, comme Jouhau en d'autres temps.
      On le voit se livrer à des considérations bourgeoises telles que " la tolérance est l'une des qualités premières de l'homme ", on le voit se plaindre de ce que son fils ne peut devenir officier de l'armée bourgeoise pendant son service ; il plaint Pompidou en assurant qu'il n'a "jamais souhaité la mort d'un adversaire ". Quand le journaliste qui l'interroge lui demande s'il a bien déclaré " La nature du patronat est de mordre et il faudra un jour ou l'autre l'abattre ", il s'excuse, " c'est une image, dit-il, pas une thèse " et il faut selon lui " vivre les uns avec les autres ", et " rechercher les solutions les meilleures, conformes à l'intérêt collectif ", comme s'il y avait un intérêt " collectif " entre les patrons et les exploités !
UN DEFENSEUR ENTHOUSIASTE DU RÉVISIONNISME
      Pour faire plaisir à la bourgeoisie, Séguy fait mine de nier, comme toujours, que la direction de la C.G.T. est inféodée à la ligne révisionniste du P"C"F, mais en réalité, tout ce qu'il dit prouve le contraire. Il défend le Programme commun comme un " événement considérable " et dont le " contenu est malgré tout extrêmement avancé " et prétend que " l'intérêt des travailleurs est de rassembler toutes leurs forces pour que ce programme puisse triompher ". Il parle de la puissance " magique " des nationalisations sous le capitalisme : prenant Renault en exemple, il ne le montre pas comme trust à la pointe de l'exploitation mais comme une " entreprise qui répond aux besoins économiques contemporains à l'échelle internationale et aux intérêts du pays où elle se trouve ". Les travailleurs de la Régie, les 17 licenciés en particulier, apprécieront de quels intérêts il s'agit !
      Séguy s'étend d'ailleurs sur la future " démocratie avancée " que promet la " gauche ". Il avait déjà promis, pendant l'élection présidentielle, qu'il saurait " en syndicaliste responsable, tenir compte des réalités économiques ", c'est-à-dire faire payer la crise aux travailleurs. Il développe maintenant : alors que les patrons seront toujours au pouvoir, il promet qu'on n'aura plus " besoin de recourir à l'action syndicale telle qu'elle est conçue actuellement : les manifestations, les grèves, les arrêts de travail, la lutte " et qu'on " évitera sinon totalement, du moins dans de nombreux cas, les conflits ". Il promet que les syndicats, après la victoire de Mitterrand, " auront un rôle constructif dans la gestion et dans le contrôle de tous les aspects de la vie économique ", ce qui est exactement ce que Giscard et Mitterrand veulent instaurer pour la paix des classes.
UN SYNDICAT SOUMIS A LA BOURGEOISIE
      La conception du rôle du syndicat développée par Séguy va tout à fait dans le sens de celle des patrons " éclairés ". Il a beau faire semblant de critiquer Chaban-Delmas et dire que la C.G.T. n'a jamais signé de contrat de " progrès " avec son gouvernement, il ne peut faire oublier la signature des accords sur le chômage, sur la formation professionnelle, sur le travail intérimaire par exemple, qui sont tous des " contrats " signés contre les travailleurs.
      Comme Bidegain, du CNPF, il assure que le syndicalisme est " d'utilité publique et qu 'il est normal qu'une partie de ses besoins soient pris en charge par la collectivité nationale ", ce qui revient, sous couvert d'une " défense " du syndicalisme, à s'entendre avec les patrons pour faire des syndicats des administrations achetées, des organes de gestion " constructifs " de collaboration de classes.
      Séguy est d'ailleurs d'accord avec Delors, du PS, ancien collaborateur de Chaban, pour affirmer que " le rôle du syndicat n'est pas seulement revendicatif, mais aussi d'élaboration économique et sociale ". Tout en le niant et en couvrant Bergeron d'injures, Séguy est en fait, au fond, un chaud partisan de la politique " contractuelle " d'entente syndicats-patrons pour éliminer les " tensions sociales " au nom de " l'intérêt collectif " dont il se déclare si soucieux.
      Cette théorie générale du rôle du syndicat, Séguy la formule en disant que la C.G.T. est " l'organisation la plus réformatrice de France " puisque d'ailleurs, dit-il " la réforme, c'est toute la philosophie de base du Programme commun de la gauche ", il rejoint là parfaitement Caillavet, radical " de gauche " qui définit le Programme commun comme un programme de " collaboration de classes ".
      Dans cette logique, Séguy critique donc les comités de grève à cause des " éléments extérieurs ", il déclare que " la séquestration ne peut être une formule valable ". Pour ne pas s'opposer de front aux occupations d'usine, il louvoie : " Dans l'intérêt même des installations, il est préférable que les travailleurs demeurent dans l'usine, pas seulement pour l'occuper, mais pour veiller à la sécurité, à l'outil de travail ".
DES ATTAQUES ORDURIÈRES CONTRE LA CHINE SOCIALISTE
      Quand on en vient à l'internationalisme, Séguy montre aussi son visage d'adversaire du socialisme ; relatant son passage (involontaire) en Chine en 67, il décrit, dans le meilleur style réactionnaire, " l'atmosphère irrespirable des rues de Pékin " à cause des gardes rouges " circulant en bandes, faisant un tapage infernal, y compris pendant la nuit ". Exhalant sa haine de la Grande Révolution Culturelle, il dit : " Très vite nous avons senti de la part des animateurs de l'agitation entretenue en permanence, une vive hostilité qui ne pouvait s'expliquer que par la couleur de notre peau " ; il prétend qu'il s'agissait " d'une réaction de caractère raciste ", et il nous décrit " avec quel soupir de soulagement " il " s'est embarqué pour Moscou, au terme d'une assez longue attente ".
CONTRE LA LIGNE RÉVISIONNISTE DANS LES SYNDICATS
      Le livre de Séguy, c'est donc une opération publicitaire des révisionnistes pour faire passer leur idéologie de renoncement, de compromis dans les luttes sur le dos des ouvriers. Les travailleurs s'y opposent de plus en plus et se saisissent de toutes les formes de lutte exécrées par Séguy, comme à Lip, à Renault-Le Mans, à Everwear, etc... " Lutter " proclame le titre de Séguy, mais pour lutter, il faut rompre radicalement avec les dirigeants traîtres des syndicats !

Paul LEFORT 

ç

è

RETOUR