USINOR : riposte aux
provocations de la direction
(reportage Yvon
Chevet)
Lundi 26, 11
h. Aujourd'hui à Usinor Dunkerque, la production
reste paralysée, la direction n'a pu couler que 1800
tonnes de fonte, alors que cela se chiffrait à 20.000
T. avant le conflit.
Les
travaux des entreprises extérieures restent au point
mort, et la plupart des non grévistes sont
payés à ne rien faire. Autant de milliards
perdus pour la direction d'Usinor. Briser la
combativité des travailleurs lui coûte cher.
Des négociations ont lieu ce lundi, la direction les
a annoncées " comme une réunion exploratoire
pour préparer la réunion paritaire ". Mais les
grévistes n'en attendent pas grand chose, si ce n'est
quelques miettes.
Certains
ouvriers du piquet de grève ont proposé
d'imposer la présence des 23 licenciés,
à la reprise et de les faire défendre par
leurs camarades d'atelier. De nombreuses discussions
commencent à tirer les leçons de cette lutte,
posant le problème de la ligne suivie par les
directions syndicales ; ce qui en ressort, c'est qu'il faut
une autre vie syndicale, que ce soit l'ensemble des
travailleurs qui décide et pas une poignée,
que l'intérêt des travailleurs passe avant
celui de chaque " boutique " syndicale. Pourquoi les non
grévistes ont débrayé en masse contre
les CRS et ont repris ensuite les uns après les
autres ? Est-ce qu'on doit choisir le moment où on
fait grève ? Quelle est la nature de la crise
actuelle ? Face à la crise de la bourgeoisie, que
vaut le programme commun ? La révolution est-elle
possible ? Telles sont les questions que la présence
permanente du Parti dans le piquet et dans la lutte pose aux
travailleurs. Malgré les difficultés, les
travailleurs d'Usinor montrent que la lutte contre le
chômage partiel est possible, que le
prolétariat peut se battre même en situation
défavorable. Et c'est ce qui a marqué.
Tirer un
bilan syndical et politique avec le maximum des ouvriers,
tel est le meilleur moyen pour briser les illusions, pour
poursuivre le combat.
Reportage Yvon CHEVET
25/5 11 h.
Toute la semaine
dernière, les affrontements entre la direction et les
grévistes se sont poursuivis. Avec un grand courage,
les travailleurs du piquet de grève conscients de la
justesse de leur mouvement, ont
persévéré pour maintenir les piquets
tout au long de la semaine, ils ont mis en échec les
provocations de la direction et poursuivi leur politique de
discussion avec les non grévistes.
Echec aux provocations de la direction.
+ mardi
matin, des patrons d'entreprises extérieures
attaquent le piquet de grève à la porte de la
BP. C'est la direction d'Usinor qui, pendant le
week-end, les avait convoqués, une trentaine ; par
voie de presse, elle avait également appelé
à venir les ouvriers des usines extérieures...
1er échec : les ouvriers ne sont pas venus, à
part quelques petits chefs des forges de Strasbourg. Au
piquet, les patrons et cadres (chefs de chantier de Trendel,
ingénieurs de Sofresid...) ne purent rien contre la
détermination des grévistes. L'un de ces
chefs, intercepté ensuite à l'intérieur
de l'usine en compagnie de RG, par une brigade volante du
piquet, dû tourner son chemin après une courte
discussion.
+ Attaques
contre les piquets, lettres de licenciements,
séquestration des grévistes isolés
remis ensuite à la police, patrouilles de CRS la
nuit autour de l'usine... rien n'est négligé
par la bourgeoisie pour tenter de briser la lutte. Mais
à chaque fois, les piquets sont rétablis, les
grévistes demandent des comptes aux CRS sur leur
présence (on leur répond une fois, " on s'est
trompé de route " !).
Discuter avec
les non-grévistes pour isoler les jaunes.
Depuis le début de la grève, les
ouvriers mènent de larges discussions avec les non
grévistes, brisant ainsi la tentative de la direction
de les utiliser comme masse de manœuvre.
Ainsi, mardi, la
direction a regroupé maîtrise et non
grévistes pour faire redémarrer le haut
fourneau N°1. Comme l'avait proposé la veille le
Parti dans un tract, une centaine de grévistes se
massent près du Haut Fourneau (certains
étaient venus avec leur femme) et engagent la
discussion avec les hauts fournistes, soumis depuis le
début à la propagande fasciste de la
maîtrise et avec les fondeurs. Ils obligent ainsi la
direction à arrêter la coulée de laitier
en cours et à reboucher le trou de
coulée.
De
nombreux travailleurs des autres secteurs purent voir les
conditions pénibles dans lesquelles travaillent les
hauts fournistes. En équilibre sur une plaque
au-dessus de la rigole du laitier en fusion. avec une lance
à oxygène, les fondeurs empêchent la
croûte de se refroidir, dans un nuage de fumée
et d'étincelles. Comme par hasard, les fondeurs se
virent gratifier de capotes ou de manteaux ignifugés
et de guêtres alors que d'habitude c'est la croix et
la bannière pour en avoir.
Le
lendemain (mercredi), la direction impose à nouveau
quelques coulées avec la concentration de la
maîtrise du haut-fourneau mais le piquet renouvelle
son intervention auprès des non grévistes. Les
hésitations des aciéristes ne font que se
renforcer, plusieurs équipes débrayent.
Un large
soutien des travailleurs.
Cette détermination des ouvriers du piquet de
grève, leur attitude fraternelle envers les
non-grévistes ont contribué au succès
de la manifestation de jeudi à Dunkerque : 4000
travailleurs étaient venus manifester leur soutien
aux grévistes. Tous les dockers étaient
présents, les ouvriers des chantiers navals, de
l'usine des Mines, et près de 500 ouvriers
grévistes d'Usinor, déterminés, qui ont
manifesté aux cris de : " Usinor doit payer ! ", " Ce
n'est qu'un début, le combat continue ! ", " lutte
des travailleurs d'Usinor, lutte des travailleurs de France
", " Non au chômage " !
Hoymille : les
grévistes font pression sur
le maire giscardien pour
le
paiement d'une
allocation.
A Hoymille,
près de Bergues, petit village flamand à 20 km
de Dunkerque, Usinor a fait construire des lotissements de
petites maisons individuelles à loyer très
élevé pour la région (près de
75.000 anciens francs), ou sont logés les
travailleurs d'Usinor. La plupart viennent de la cité
dortoir de Grande Synthe, saturés de la vie des HLM
bruyants où on ne peut récupérer.
L'ardoise est lourde pour le chauffage et le loyer, mais
pour la direction, cela a l'avantage d'isoler les ouvriers
les uns des autres. En fait ce calcul est mauvais, car les
ouvriers de cette cité se sont spontanément
regroupés pour assurer leur transport en voiture
à tour de rôle quand ils ne vont pas en bus,
tandis que des liens d'entraide se sont tissés pour
aménager des bouts de jardin... Cela a joué
dans le conflit. Invités par des travailleurs, nous
avons participé à une intervention qu'ils ont
faite auprès du maire de Hoymille, gros paysan
giscardien, pour le contraindre à verser une
allocation de soutien aux grévistes. Celui-ci nous
reçoit dans la salle du conseil où les
travailleurs, une quinzaine de grévistes, CGT, CFDT
et non syndiqués, s'installent autour de la table du
conseil. Le maire essaie de s'en tirer en disant que
contrairement à Grande Synthe, il n'a pas beaucoup de
patentes, n'ayant pas d'entreprises sur sa commune. Les
grévistes lui rétorquent qu'ils donnent la
côte mobilière et qu'étant giscardien,
il doit avoir plus facilement des crédits... que
finalement, tout est question de point de vue par rapport
à la classe ouvrière. Le maire défend
encore un peu, essayant d'orienter sur le recul du paiement
des loyers. Les travailleurs refusent disant que de toute
façon cela ne les intéresse pas puisqu'il
faudra payer. Ce n'est pas un recul des
échéances qu'ils veulent, c'est le paiement
d'une allocation. Finalement il cède, promet d'en
parler au Conseil municipal et de verser une allocation. En
sortant, les travailleurs se donnent rendez vous pour ce
lundi afin d'aller chercher tous ensemble la réponse
du maire.
Dans la
sidérurgie
lorraine
A Sacilor (Gandrange), et à
Sollac-Fensch, la grève de l'aciérie
et des transports intérieurs se poursuit
depuis 4 semaines pour l'indemnisation des Jours
chômés, la création d'une
5° équipe pour les feux continus...
Pour empêcher la mobilisation
générale dans la sidérurgie,
les directions des 2 trusts ont suspendu le
chômage partiel, ce qui permet
d'approvisionner Usinor-Dunkerque et ses sous
traitants.
Face à ces manœuvres de la direction,
que proposent les directions syndicales ? Le 21/5,
les directions syndicales organisent une
journée d'action dans le trust
Sacilor-Sollac, 2 jours plus tard une autre pour le
trust Usinor... et 4 jours après une
journée commune.
Les ouvriers des différentes usines
des 2 trusts, qui ont massivement
débrayé, dénoncent vivement
cette attitude qui vise uniquement à
empêcher la liaison des travailleurs : sur
les 3 usines Usinor-Thionville, aucune explication
des organisations syndicales sur la lutte de
Dunkerque, alors que les travailleurs sont
prêts à se mobiliser. Au sein
même du trust Sacilor-Sollac, aucune
popularisation de la grève de Gandrange. Et
pour la journée nationale de la
sidérurgie du 27/5, c'est l'apothéose
: ils proposent une manifestation à Metz (30
km de Thionville) sans aucune propagande
auprès des travailleurs de Metz.
La popularisation de Dunkerque par le Parti
a un grand écho parmi les travailleurs de
Usinor-Thionville, car c'est la preuve qu'on peut
lutter contre le chômage partiel.
Des collectes de soutien sont accueillies
favorablement. Aux travailleurs d'Usinor, le Parti
a proposé de donner une heure de travail en
soutien à Dunkerque.
Corr. 26/5
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NOUVELLES BREVES ... de nos
correspondants
Houillères du Bassin Lorrain :
la grève des boute-feu se poursuit
Après
trois semaines de grèves tournantes menées par
les travailleurs de plusieurs secteurs, les boute-feu ont
démarré une grève totale le 20 mai.
Actuellement ce sont 670 boute-feu du Bassin Lorrain qui
sont en grève, ainsi que les piqueurs instructeurs de
Merlebach et de Wendel. Pour tenter de briser la lutte, la
direction des Houillères a lockouté le tiers
des travailleurs de Merlebach, Simon Wendel et la Houve,
dans l'espoir de les dresser contre leurs camarades en
grève.
Malgré le lockout, la lutte continue pour
:
-
promotion automatique au bout de 5 ans d'ancienneté
sans probation.
-
application avec effet rétroactif pour tous les
ouvriers.
Dijon : Société
Bourguignonne d'Applications Plastiques
Grève
avec occupation depuis le 21/5 pour
- 150 F
d'augmentation pour tous,
- 3
ponts payés par an et non
récupérés...
Filiale
de Solvay, l'usine emploie 1000 travailleurs, presque tous
en équipes, ramassés par des cars
jusqu'à 25 km à la ronde.
Corr. 23/5
PARIS 13e : Foyer Daniel
Au foyer
Daniel dans le 13ème, les jeunes travailleurs ont
engagé la grève des foyers.
Leur
plateforme :
- Non
aux augmentations
-
Arrêt des expulsions
-
Gratuité pour les chômeurs
Carte de
membre de l'association pour le contrôle de la
gestion.
-
Liberté d'expression dans tous les foyers.
- Droit
de visite 24 h sur 24.
-
Suppression des forfaits alimentaires.
Les
jeunes travailleurs veulent étendre leur grève
aux autres foyers du 13éme. Ils vont aussi coordonner
leur lutte avec celle des travailleurs de 2 usines du
13ème en grève : Pikly et Imago.
Correspondant
NANCY : Rogers Color
Depuis le 24
avril, grève contre les contrats de travail à
durée limitée. Les manœuvres d'intimidation du
patron, secondé par le délégué
FO, continuent : photos des grévistes, intervention
de la police contre les occupants, plainte
déposée contre le délégué
CFDT pour " atteinte à la liberté du travail
", agression contre 2 militants CFDT.
Corr. 19/5
REIMS : Marelli
Les ouvriers
de l'entreprise Marelli à Wittry les Reims, occupent
leurs ateliers depuis le 13 mai pour s'opposer aux 263
licenciements projetés par le patron. Cette mesure
signifierait à brève échéance la
fermeture du secteur " moteurs et pompes ".
La
direction n'a jusqu'ici répondu que par la
répression : 3 délégués
poursuivis devant les tribunaux pour " occupation
illégale " et menace de faire intervenir les
CRS.
Notre
Parti est intervenu pour populariser la lutte et organiser
le soutien financier : 1.000 F. ont déjà
été collectés et remis à
l'assemblée générale des
travailleurs.
Corr. 24/5
CIP (ex Bailleul) Nœux
Les-Mines
L'occupation,
commencée le 4 avril, en riposte aux licenciements
annoncés, continue. Après avoir, par 2 fois,
séquestré le patron qui refusait de payer les
jours travaillés en avril, les ouvrières
obtiennent satisfaction le 20 mai. A l'intervention
policière (5 cars de CRS et 20 policiers en civil
contre 25 ouvrières), ont répondu l'extension
de la grève à Haismes et une manifestation
avec les ouvriers de BSN, qui occupent leur usine contre 157
licenciements.
Contre
les licenciements, la lutte continue !
Corr. 23/5
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