L'HUMANITÉ ROUGE n° 492 -mardi 18 mai 1976
Quotidien des communistes marxistes-léninistes de france

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Les nationalisations: une solution miracle ? (2)

EDF-GDF UNE LUTTE ACHARNÉE
ENTRE DEUX VOIES 
     

        Hier nous avons commencé la publication d'une série d'articles sur le mot d'ordre des nationalisations avancé par le PCF et ses alliés de l'Union de la gauche et repris par les directions syndicales de la CGT et de la CFDT (sous des formes qui se veulent différentes) . Pourquoi cette bataille idéologique et politique que les marxistes-léninistes, dans la tradition de tout le mouvement communiste international depuis Marx et Engels, mènent avec acharnement contre ce mot d'ordre ? Essentiellement pour trois raisons :
        1) Ce mot d'ordre est une charnière, un trait d'union, que les révisionnistes et opportunistes de toujours utilisent pour dévoyer les luttes revendicatives de la classe ouvrière sur un terrain politique bourgeois, vers des solutions de rechange dans le cadre du système capitaliste.
        2) Mais ce mot d'ordre n'a pas seulement pour caractéristique d'escamoter la nature de classe de l'État capitaliste et d'oublier la lutte des classes, il est aussi aujourd'hui la pièce maîtresse des mots d'ordre politiques de la bourgeoisie de gauche pour qui les nationalisations sont les moyens de parvenir au contrôle économique du pays pour consolider une éventuelle prise du pouvoir politique. Le modèle du capitalisme monopoliste bureaucratique d'État tel qu'il existe en URSS est partout présent derrière ce mot d'ordre de "nationalisations" et dans tous les projets gestionnaires qui l'accompagnent.
        3) Autour de ce mot d'ordre et d'autres qui le complètent se mène à l'heure actuelle une intense lutte politique et idéologique dans les masses ou les organisations syndicales (telle la CFDT par exemple). Alors que bien souvent la volonté de se démarquer du projet politique des révisionnistes et de l'Union de la gauche existe, la confusion ou la contradiction subsistent à propos des mots d'ordre et annulent les efforts de construction d'un mouvement de masse résolument anticapitaliste et antirévisionniste.
        Nous publions dans cette série aujourd'hui et demain l'article que nous ont fait parvenir des camarades de l'EDF. Cet article illustre l'intense lutte de classe qui se déroule au sein de la plus importante entreprise nationalisée de France et dont les révisionnistes voudraient faire oublier le caractère d'authentique monopole capitaliste d'État.

      Les différentes actions engagées en avril et mai 1976 par les travailleurs d'EDF et de GDF (grève CGT-CFDT du 7 avril, grève tournante CGT du 27 au 29 avril, actions pour la levée de sanctions prises par les directions, etc.) sont l'objet d'une lutte acharnée entre les deux voies que les travailleurs ont aujourd'hui devant eux: la voie bourgeoise représentée principalement par les dirigeants révisionnistes et la voie prolétarienne que montrent les communistes marxistes-léninistes et leur parti. Ces deux articles visent à faire le point de cette lutte de classe aiguë.

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I - UNE IMPORTANTE COMBATIVITÉ
DES TRAVAILLEURS
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      La violente crise économique qui secoue le capitalisme a eu des répercussions sensibles à EGF. Ainsi la consommation d'électricité en France a été équivalente, en 1975, à celle de 1974, alors qu'en moyenne depuis 25 ans elle augmentait de plus de 7 % par an. Depuis le début de 1976 la croissance de la consommation a repris mais à un rythme assez lent. Les directions générales se servent de cet argument pour freiner les augmentations de salaires, menant en cela la même politique que l'ensemble du patronat et du pouvoir. Elles veulent limiter la hausse des salaires à ce qui est prévu par la "convention salariale" signée par les 5 fédérations syndicales (CGT -CFDT -FO-Cadres et CFTC) et qui se base sur l'indice INSEE plus 2,5 %.

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LA BAISSE
DU SALAIRE RÉEL
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      Mais pour les travailleurs cette "convention salariale" est bien loin d'être suffisante. Compte tenu du caractère truqué de l'indice INSEE qui sous-estime gravement l'augmentation réelle des prix surtout pour les plus bas salaires, l'application du texte salarial conduit à une baisse du pouvoir d'achat, du salaire réel. C'est d'ailleurs ce qui s'est produit en 1974 et 1975, ce qui explique une importante combativité du personnel depuis l'automne 1975, d'autant que les conditions de travail s'aggravent, que les effectifs sont comprimés, etc.
      Par rapport à cette situation, la position des fédérations FO-Cadres et CFTC est claire: elles jugent le texte salarial tout à fait satisfaisant et continuent à pratiquer systématiquement la collaboration de classe.
Mais les fédérations CGT et CFDT déclarent vouloir lutter pour la satisfaction des revendications des travailleurs.

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LES GRÈVES
DE NOVEMBRE 1975
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      Les fédérations CGT et CFDT, sous la direction de la première, largement majoritaire à EGF, avaient défini en 1975 une revendication dépassant quelque peu l'accord salarial et engagé les travailleurs dans 3 grèves de 24 heures courant novembre 1975. Compte tenu de l'objectif limité et de la forme d'action retenue, ces actions n'ont débouché sur AUCUN résultat, les directions s'étant contentées d'appliquer le texte salarial.     


Paru dans la Vie ouvrière

C'est donc sur une démobilisation et un écoeurement fréquents qu'ont débouché ces actions, et ceci était tout à fait conforme aux voeux des dirigeants révisionnistes. Pour ceux-ci en effet, il s'agit aujourd'hui à la fois de canaliser la combativité réelle du personnel sous leur contrôle, d'éviter un affrontement réel avec les directions et le pouvoir et de ne déboucher sur aucun résultat, de façon à rabâcher: "On ne peut vraiment rien obtenir avec le gouvernement, mais si vous votez bien en 1978, tout ira pour le mieux."
      Cette pratique fondamentale des dirigeants révisionnistes de la fédération CGT n'a pas changé au début de 1976.

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LES ÉLECTIONS DU 20 MAI
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      Mais pour bien situer leur tactique actuelle, il faut tenir compte d'un élément supplémentaire: le 20 mai ont lieu à EGF les élections dites de "représentativité" qui servent à désigner les représentants syndicaux dans les différents organismes créés par le statut de 1946 et où siègent à la fois les directions et les syndicats à tous les niveaux (du service local au plan national). Ces élections ont d'autant plus d'importances qu'elles n'ont pas eu lieu depuis mai 1972 (à la différence des élections de délégués du personnel qui ont lieu tous les ans) et que les dirigeants de la fédération CGT craignent de voir remise en cause leur majorité absolue : leur ligne, leurs manoeuvres sont de plus en plus perçues par les travailleurs, leurs pratiques à la CCAS mieux connues (1), et la CFDT, même si elle reste encore souvent suiviste par rapport aux révisionnistes tend à développer une pratique autonome sur des bases de classe.

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15% HIÉRARCHISÉS...
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       C'est donc pour essayer d'apparaître comme les "meilleurs défenseurs" des travailleurs à l'approche des élections, que, depuis le début de l'année les dirigeants révisionnistes ont fait une découverte: les salaires à EGF sont iriférieurs de 15 % à ce qu'ils devraient être, à ce qu'ils sont dans d'autres entreprises comme la Lyonnaise des eaux: "Et donc de fixer comme objectif revendicatif l'augmentation de 15% des salaires, comme rattrapage, en plus du texte salarial, soit plus de 25% pour l'année 1976. Les révisionnistes fixent haut la barre dans l'espoir de redorer leur blason et il n'est pas douteux que le personnel y a vu, au départ, un objectif enfin à même de permettre un développement des luttes, une amélioration réelle des salaires.
      Mais il est vite apparu que ces 15 %, comme le reste ou presque des augmentations prévues par les directions, seraient entièrement hiérarchisés, c'est-à-dire revenaient à augmenter de 250 F un ouvrier ou employé débutant et de 1 800 F un cadre supérieur (or il y en a 690 à EDF- GDF), soit en augmentation plus que le salaire d'un ouvrier débutant. Les dirigeants révisionnistes l'ont d'ailleurs bien expliqué: ils veulent augmenter de 15 % " le salaire de base" , c'est-à-dire de 15% tous les salaires puisque ceux-ci sont déterminés en multipliant le salaire de base par des coefficients.

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...OU 300 F POUR TOUS
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      Dans le même temps, la fédération CFDT qui avait comme mot d'ordre général depuis 3 ans des "augmentations égales pour tous" mais qui ne les avait jamais chiffrées, le suivisme par rapport à la fédération CGT étant sa ligne de conduite principale, décidait, par souci électoral en partie aussi (2), de mettre en avant le mot d'ordre de "300 F pour tous en plus du texte salarial" et d'engager une campagne pour populariser sa position.
      Le débat sur l'objectif revendicatif fut ainsi porté devant les travailleurs et il tourna rapidement autour de questions importantes: quels travailleurs défendre prioritairement, sur quelles bases ? Qu'est-ce que la hiérarchie dans le système capitaliste et voulons-nous la sauvegarder aujourd'hui et demain ? etc...

 (A suivre). 

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