HISTOIRE POLITIQUE DU MOUVEMENT DES FOYERS SONACOTRA

Groupe pour la fondation de l'Union des Communistes de France Marxiste-Léniniste
UC.F.M.L.
EDITIONS POTEMKINE -1981-

Suite è

INTRODUCTION

..... LA GREVE DES FOYERS SONACOTRA.

..... Pendant 5 ans, du début 75 à la fin 79, l'affrontement entre plusieurs milliers (jusqu'à 35 000) d'ouvriers immigrés des foyers et de ceux qui les soutiennent face à la Sonacotra, l'État avec ses flics et ses juges, le P.C.F., la C.G.T...
..... Affrontement prolongé avec de nombreuses victoires face à un ennemi qui ne réussira pas pendant très longtemps
à briser ce mouvement.

..... Une véritable lutte des classes, forgeant son unité autour d'une plate-forme commune et se dotant d'une direction authentique, indépendante des partis politiques bourgeois et des syndicats, le Comité de Coordination, mais aussi traversée de courants contradictoires.
..... Une formidable détermination des grévistes avec des dizaines et dizaines de manifestations nationales ou locales, des sacrifices importants (saisie-arrêts sur salaires, journées de travail perdues pour aller à un procès...), des refus de céder face aux flics (campement de Garges sous des tentes, pendant plus de 2 mois après l'expulsion du foyer...).
..... Quelle est l'importance dans la situation d'aujourd'hui de ce mouvement ? Quelles leçons, quel bilan en tirer ?
A-t-il été une défaite qu'il faut vite oublier, une victoire qu'il faudrait "recopier" ?

---

C'est vrai, la situation actuelle est différente de celle des années passées. La situation a changé.

 A) LA QUESTION DE L'UNITÉ FRANÇAIS-IMMIGRÉS EST DEVENUE UNE QUESTION POLITIQUE CENTRALE
..... ** POUR LES DIFFÉRENTES FORCES BOURGEOISES qui font toutes de la division entre français et immigrés un point essentiel de leur politique de répression, de division et d'embrigadement du peuple en France.
..... -l'ÉTAT de Giscard-Barre-Stoléru avait justement commencé, pour encercler et détruire le mouvement des foyers, à développer une politique d'ensemble raciste. Elle continue aujourd'hui avec les lois racistes comme celle votée de Bonnet ou celles en projet de Stoléru, d'Ornano, les décrets comme le décret Imbert.
..... .avec la protection des pratiques et attentats racistes de la police (de Marseille à Valenton...), avec les contrôles incessants et les rafles d'immigrés (Lyon...), avec les expulsions de sans-papiers ou de jeunes immigrés...
..... .avec sa tolérance des pires attentats fascistes et racistes, de Copernic à Bondy, en passant par Vitry, aucun agresseur fasciste organisé n'a été jamais arrêté, aucune agression d'un raciste isolé mais meurtrier réellement condamnée...
..... -Le P.C.F. par ses odieuses campagnes pour exclure les immigrés de "ses" municipalités, par ses actions de commandos racistes (Vitry), par ses pratiques de délation (Montigny...), par sa volonté de limiter et exclure les enfants d'immigrés des écoles et des colonies de vacances, par ses appels à une répression plus forte des jeunes immigrés assimilés à des "délinquants"... a fait du racisme, de l'exclusion des immigrés SON AXE POLITIQUE PRINCIPAL AUJOURD'HUI. Il tente aujourd'hui d'être le meilleur organisateur d'un camp raciste en France.
..... Tous ces bourgeois font du racisme un élément central de leur politique. Parce qu'il y a la crise et qu'ils essayent de diviser le peuple, de le mettre lui-même en crise. Mais aussi parce qu'ils ont senti la force du mouvement des foyers, et ils tentent par tous les moyens d'empêcher que se développe une force unie français et immigrés.
..... **POUR TOUS CEUX QUI SONT DÉTERMINÉS A S'OPPOSER A TOUTES SES POLITIQUES BOURGEOISES DE TEMPS DE CRISE ET A CONSTRUIRE UNE FORCE FACE A ELLES. Cette question de l'unité français-immigrés est aussi une question décisive, centrale. Et cela est vrai:
..... . Pour la CLASSE OUVRIERE. Dans les usines pour organiser la résistance aux attaques patronales actuelles qui ont pour objectif de morceler la classe ouvrière, chacun défendant son "privilège" particulier, afin d'imposer les plans de restructuration. Dans la situation politique d'ensemble, pour être une classe ouvrière qui puisse jouer un rôle politique, l'unité entre ouvriers français et immigrés est une condition indispensable pour que la classe ouvrière EXISTE.
..... . Pour le PEUPLE, dans les cités, dans les quartiers. Face aux attaques contre les jeunes immigrés, les tentatives du P.C.F. d'exclure des familles immigrées entières, face aux divisions dans les écoles et le logement... le début de constitution d'une unité politique du peuple passe par l'unité entre familles françaises et immigrées, jeunes immigrés et le reste du peuple...
..... . Pour la JEUNESSE, dans les lycées et les facultés. S'engager dans le combat antiraciste est aujourd'hui le principal combat qui marque l'engagement de ces forces dans la révolte contre cette société qui ne leur offre aucun avenir, qui permette le lien entre la jeunesse, les démocrates et l' ensemble du peuple...

 

B) LA SITUATION ACTUELLE A AUSSI CHANGÉ, PARCE QUE DE NOUVELLES FORCES SE SONT ENGAGÉES dans le combat anti-raciste, pour l'égalité des droits français-immigrés:
..... -les jeunes immigrés, ripostant à tel ou tel moment à des attentats fascistes ou policiers, soutenus dans certains cas par tous les gens de cités entières (Créteil, Lyon…).
..... -les étudiants se levant en masse contre le décret Imbert, décret voulant interdire pratiquement l'accès à la faculté de nombreux étudiants étrangers.
..... -les lycéens, se mobilisant au moment d'attentats, particulièrement après Copernic.
En même temps, ces révoltes ont encore du mal à avoir un souffle prolongé. Il est de plus en plus clair qu'aujourd'hui, face à des politiques racistes, on ne peut se contenter de la révolte seule ou de l'indignation. Il faut faire une politique prolongée, remporter des batailles.
..... Nous, maoïstes, y travaillons parce que cette question de l'unité français-immigrés est une des caractéristiques essentielles d'édification d'un Parti communiste de type nouveau, révolutionnaire dans la société impérialiste où nous sommes en France. Cette unité est au coeur de la nature de classe, c'est-à-dire antagonique à toutes les politiques bourgeoises, d'un processus d'édification d'un Parti Communiste: il y a un lien étroit entre l'avancée vers la construction de ce Parti et celle de l'unité politique organisée français-immigrés. Le Parti Communiste de type nouveau sera un parti de la classe ouvrière internationale de France où il n'existera pas.
Nous y travaillons:
..... -dans la classe ouvrière, en édifiant des noyaux communistes ouvriers, organisations des ouvriers français et immigrés s'emparant des tâches pour constituer la classe ouvrière en classe politique et dirigeant la résistance ouvrière dans les usines.
..... -dans le peuple, en développant les C.P.A.C., organisations de l'unité politique du peuple contre toutes les politiques de divisions et d'embrigadement de l'État et du P.C.F.
Nous soutenons par ailleurs le développement des Permanences Anti-Expulsion, authentique organisation anti-raciste sur des positions de classe et travaillant à l'unité français-immigrés. Issues d'un premier bilan du mouvement Sonacotra, crées dès 1977, les P.A.E. sont elles aussi une organisation indépendante de tous partis bourgeois et syndicats, et se fixent pour tâches d'organiser tous ceux qui veulent édifier un camp et un courant d'unité français-immigrés anti-racistes: par la riposte à tous les actes racistes (attentats, expulsions, contrôles, décrets et lois racistes, politique de répartition du P.C.F.), par une propagande pour l' unité français-immigrés contre toutes les campagnes racistes (de l'État, du P.C.F… et des racistes isolés)

-------------

..... Dans cette situation nouvelle, pourquoi connaître et discuter l'histoire du mouvement des foyers Sonacotra ?
..... Il est vrai tout d'abord qu'à l'époque de ce grand mouvement, la situation n'était pas exactement la même. Mais c'est justement dans cette période et en grande partie grâce à ce mouvement que cette question de l'unité français-immigrés, de l'égalité des droits est devenue une question centrale en France. C'est dans cette période que les politiques bourgeoises ont commencé à se développer, que le P.C.F. a montré clairement son visage raciste (faut-il rappeler que ses premières affiches sur le " seuil de tolérance " date déjà de ce moment). C'est dans ce mouvement des foyers que se sont développées les grandes questions qui sont débattues aujourd'hui:
..... . " Est-il juste de se battre pour l'égalité complète des droits, y compris politiques, entre français et immigrés. Et quel est le contenu réel de ce mot d'ordre ? "
..... . " Les ouvriers immigrés peuvent-ils et doivent-ils faire de la politique, au même titre que les français ? ".
..... . " L'unité français-immigrés est-elle une nécessité, qui doit se traduire par une organisation en commun ? Ou peut-on se suffire d'une simple solidarité ? "
..... ...autant de questions et bien d'autres débattues et auxquelles le déroulement du mouvement apporte des premières réponses décisives.
..... C'est pourquoi il est essentiel pour tous:
..... / DE CONNAITRE L'HISTOIRE RÉELLE DE CE GRAND MOUVEMENT de masse, porteur du combat pour l'égalité des droits. Il doit faire partie de la mémoire de toute la classe ouvrière et du peuple en France. Face à tous ceux qui veulent faire oublier le rôle historique des ouvriers immigrés dans la lutte de classe ces dernières années en France dans ces dernières années, face à tous ceux qui veulent masquer leur rôle d'ennemis farouches, racistes, de cette fraction de la classe ouvrière, de ce combat et de l'unité français-immigrés, comme le P.C.F.
..... Connaître l'histoire réelle de ce mouvement, c'est en connaître les différents courants qui l'ont traversé, dans sa direction le C.C., chez les résidents, chez ceux qui le soutenaient. Et comprendre que l'affrontement entre ces courants venaient de l'existence d'idées ou de politiques bourgeoises à l'intérieur même du mouvement, mais aussi de l'opposition entre points de vue anciens (comme ceux hérités par exemple de l'organisation des immigrés pendant la guerre d'Algérie) et points de vue nouveaux sur les formes d'organisation, sur l'unité entre grévistes et soutien, entre ouvriers immigrés et français. Connaître l'histoire réelle, ses victoires comme ses échecs, c'est comprendre le rôle des différentes politiques dans un mouvement.
..... Tous ces points sont largement repris dans la première partie, I'HISTOIRE DU MOUVEMENT .
..... / de tirer, à travers la question du soutien à ce mouvement les leçons sur QUELLE EST LA VOIE JUSTE POUR ÉDIFIER UNE UNITÉ FRANÇAIS-IMMIGRÉS SOLIDE .
Et en quoi certaines conceptions présentes dans le mouvement d'organisations séparées, immigrés d'un côté, français de l'autre ont affaibli le mouvement. Et comment les maoïstes sont intervenus dans cette question, les leçons pour aujourd'hui. Points développés dans la partie du texte SUR LA QUESTION DU SOUTIEN.
..... / DE DÉBATTRE ENFIN, et cela est particulièrement important pour les camarades des foyers qui se posent aujourd'hui la question de leur rôle et place politique en France, comme pour tous ceux travaillant à organiser avec nous l'unité politique français-immigrés dans un Parti de type nouveau, DU BILAN POLITIQUE D'ENSEMBLE DE CE MOUVEMENT. En quoi peut-on réduire le bilan de ce mouvement aux seuls résultats des négociations qui furent en retrait par rapport aux objectifs initiaux, ce qui alimente aujourd'hui le courant des " défaitistes ", de ceux partisans du repli sur soi, par nationalités, ou au contraire comme un mouvement portant la question du rôle politique des ouvriers immigrés aujourd'hui en France. Quel fut le rôle politique de ce point de vue du C.C. Quelles a été le travail des maoïstes de l'U.C.F.M.L., ses forces et ses insuffisances. Points traités dans les deux premières parties et re-développés dans la troisième de conclusion.

---------

Les 3 périodes du mouvement

INTRODUCTION

..... Les grands mouvements de grève d'O.S. principalement immigrés qui s'étaient développées dans les usines de 1971 à 1975 à Renault, à Pennaroya, à Girosteel... contre I l'organisation capitaliste du travail, les cadences, les conditions de travail et de sécurité, le mouvement ouvrier et populaire contre la circulaire Marcellin-Fontanet et les attentats racistes, avec pour centre de gravité les grèves de la faim pour obtenir " les papiers ", ont marqué historiquement en France l'apparition des immigrés comme force sociale et politique.
..... Cette participation massive des ouvriers immigrés à la lutte de classes est vite entrée en contradiction avec les projets et les pratiques d'embrigadement et d'isolement de ces camarades immigrés dans des foyers-prisons. En effet, depuis quelques années déjà, l'État avec l'appui des révisionnistes du P.C.F., avait fait construire par l'intermédiaire de sociétés gestionnaires (Sonacotra, ADEF, AFRP...) de très nombreux foyers. Ils comptaient ainsi résorber les bidon-villes, qui échappaient à leur contrôle, et étendre en pleine période d'expansion l'espace capitaliste d'exploitation des ouvriers en matière de logement.
..... 71-75 est une période qui correspond aux premières tentatives de grèves des loyers, d'organisation des résidents pour briser l'encerclement politique et social qui imposait le système des foyers-prisons. C'est la période des premières révoltes contre les gérants racistes, souvent d'anciens colons ou sous-officiers de l'armée coloniale, cherchant contre les résidents une revanche de leur défaite historique en Indochine et en Algérie.
..... C'est la période où se forgeait la volonté des résidents de briser les règlements intérieurs, véritablement despotiques qui permettaient au gérant d'expulser qui il voulait, de pénétrer dans les chambres à l'aide d'un passe-partout à n'importe quelle heure de la journée et de la nuit. Règlement qui interdisait aux résidents de recevoir librement, de se réunir, d'afficher, d'utiliser les pièces collectives pour les animations culturelles et politiques de leur choix.
..... Les deux faits les plus marquants de cette période dans les foyers de la région parisienne furent d'un côté l' épisode tragique de Villejuif, ultime aboutissement de la politique de la Sonacotra, et d'autre part la grève d'avant-garde qu'ont mené les résidents du foyer des Grésillons en 1974.
..... Après une grève en 72, le gérant du foyer de Villejuif amené une politique systématique de division entre ouvrier algériens et maliens; division par étages et escaliers, division par des ragots, par des privilèges accordés à certains et pas à d'autres... Cette politique, dans une situation où les conditions de logement étaient difficiles (foyer très bruyant aux murs " épais comme du papier à cigarettes ", hausse constante des loyers) a abouti à une violente bagarre entre résidents: un mort et deux blessés.
..... A l'opposé, les résidents du foyer des Grésillons à Gennevilliers, organisés avec les maoistes de l'U.C.F.M.L., déclenchent la première grève de foyer qui sera porteuse du futur programme du mouvement, la future plate-forme du Comité de Coordination. 4 mois de grève et de combats parfois violents contre la Sonacotra, son gérant (certainement l'un des plus racistes et fascistes), des descentes de flics, des expulsions de logements, mais aussi des succès comme les journées "portes-ouvertes ", de grandes assemblées générales, une grande unité entre résidents de plusieurs nationalités. Le tout accompagné d'épisodes épiques, comme les "planques " des "français " dans certaines chambres pour échapper au gérant et aux flics, l'alimentation électrique lors de portes ouvertes venant des cités d'à côté (le gérant avait coupé l'électricité...).
..... Grande période de lutte de classes où la plupart des questions politiques qui vont apparaître dans le mouvement lui-même, se posent dès ce moment-là: comment organiser l'unité des résidents de plusieurs nationalités ? Comment faire face au gérant et à ses manoeuvres ? Les flics et les expulsions de foyer ? L'isolement du foyer par rapport au reste de la ville ? Comment diriger les négociations contre la Sonacotra ? Quelle politique contre le P.C.F., la C.G.T. et les amicales ? Quels rapports politiques d'unité et de différence avec les maoïstes de l'U.C.F.M.L. ?
..... C'est aussi la période où l'U.C.F.M.L. se lie aux révoltes et combats politiques de classes, en particulier à ceux menés par la fraction immigrée de la classe ouvrière. Ce travail politique prolongé se concrétise en outre par le soutien au mouvement de masse qui s'affronte tant à l'État qu'au P.C.F., par l'élaboration du mot d'ordre: " Français- immigrés, égalité des droits ", la grande directive de l'unité du prolétariat international de France et de la construction de son Parti communiste de type nouveau, dont l'étape est celle des noyaux ouvriers.
..... Travail de systématisation du contenu de classe des révoltes populaires et ouvrières, travail d'organisation des résidents face aux deux bourgeoisies, travail de propagande, travail d'édification du Parti, ont permis d'être des arrières politiques essentiels pour que prennent corps, au-delà de la simple révolte, un puissant mouvement de masse contre les foyers-prisons, pour l'égalité des droits, et l'unité de la classe ouvrière.

LES TROIS GRANDES ÉTAPES DU MOUVEMENT DES FOYERS SONACOTRA

..... Le mouvement des foyers dirigé par les premiers comités de résidents qui vont former par la suite le Comité de Coordination (C.C.) va commencer, le 27 Janvier 75 au foyer Romain Rolland à Saint-Denis (93).
..... Le mouvement va connaître trois grandes étapes:
- LA PREMIERE, DE JANVIER 75 AU MOIS D'AOUT 76 est caractérisée par une très grande offensivité de classe tant contre la Sonacotra, l'Etat, que contre la C.G.T. et le P.C.F. Elle butera sur l'épineux problème des négociations avec la Sonacotra, de la force pour imposer la plate-forme.
- LA SECONDE D'AOUT 76 A DECEMBRE 78 sera caractérisée par une relative stabilisation de la grève, par un repli sur soi, sur les foyers, par une certaine volonté de s'isoler du reste de la lutte de classes. Cette période sera centrée sur les difficultés de s'opposer aux saisies-arrêts sur salaires.
- LA TROISIEME ÉTAPE DE JANVIER 79 A DECEMBRE 79 sera caractérisée par la difficulté de résister à une offensive sans précédent de l'Etat: les expulsions de foyer. Cette offensive sera préparée par un vaste projet d'encerclement et d'isolement politique du mouvement: les mesures Stoléru, puis les projets de lois Barre-Bonnet, ce qui permettra à l' Etat d'attaquer brutalement les résidents: les expulsions massives des foyers.

PREMIERE PERIODE: UNE GRANDE OFFENSIVITE DE CLASSE

(Janvier 75 - Août 76)
 - I -

Le développement de la grève et la formation du Comité de Coordination

..... * Après de très nombreux épisodes de luttes contre un gérant particulièrement raciste, et après une nouvelle augmentation des loyers, la grève est organisée le 27 Janvier 1975 au foyer Romain Rolland. Immédiatement, les résidents donnent un sens politique à leur mouvement en inscrivant leur combat dans celui pour " les mêmes droits pour tous les ouvriers" , en refusant le système des foyers- prisons.
..... Une première série de revendications est formulée sur les droits (liberté dans le foyer, droit de visite, de réunion..) le retour à l'ancien loyer, des améliorations dans le foyer, le renvoi du gérant raciste (voir le tract du Comité des locataires du foyer de St-Denis, d'Avril, reprenant ces revendications -document No 1 ).
..... * A vrai dire au même moment se déroulaient d'autres grèves de loyer, en particulier au foyer Sonacotra Allende à St-Denis. Cette grève s'était déclenchée avant R. Rolland, en Septembre 1974, mais sur une toute autre base politique: " Nos revendications sont simples et faciles à accorder: mais la direction ne veut rien accorder. Pourquoi ? Les rideaux, les frigidaires, les draps, la télévision coûtent cher. C'est pourquoi la Sonacotra ne veut rien faire " (tract du Comité de Résidents d'Allende appelant à l' A.G. de dimanche 9 février 1975).
La direction de la grève était en fait au main de la C.G.T. et du P.C.F. Le Comité de Résidents était élu à bulletin secret en liaison avec la Sonacotra et la CNL (Confédération Nationale du Logement).
..... Ainsi, dès ce moment, deux voies politiques s'offrent aux résidents: une orientation soutenue par l'U.C.F.M.L. qui s'affronte au système même des foyers-prisons, qui le refuse comme système d'exploitation et d'oppression et qui organise les résidents sur leurs propres forces en s'appuyant sur leur détermination; une autre voie organisée par la C.G.T. qui cherche à négocier des aménagements des foyers, une simple limitation des augmentations des loyers, par l'intermédiaire de la CNL.
..... Cette première lutte entre deux voies ne faisait que commencer. Elle ira en s'amplifiant et sera tranchée une première fois aux yeux des masses et de l'opinion publique au meeting du 21 Février 1976 à la Mutualité.
..... * La grève va s'étendre d'abord relativement lentement à d'autres foyers pour connaître un large développement en Septembre 75. En effet, la nouvelle augmentation de loyer décidée par la Sonacotra au mois de Septembre 75 qui se cumule avec celle de Janvier et de Mars 75, va être le détonateur. On pourra compter jusqu'à 23 foyers en grève. Mais un problème se posait. Sur quelle base était organisée le mouvement ? Qui représentait les milliers de résidents et pourrait négocier avec la Sonacotra ? Des premières formes de coordination se formaient comme celle des foyers nord de la région parisienne avec Bezons, Colombes, Nanterre-maisons, Argenteuil rue Montigny, Butte blanche, avenue du Parc, Quai St-Denis, Sannois, Franconville, basée sur UNE revendication principale: la baisse des loyers de 100 F. D'autres se regroupaient autour du foyer Allende et de la CGT, mais fort peu déjà. D'autres encore rédigeaient des tracts en commun et établissaient des contacts. Romain Rolland, Montreuil et Bagnolet (13 Sept 75 ), puis Clichy, Nanterre-ville et Paris 13ème. C'était une grand période de débat, d'assemblée générale, d'"effervescence".
..... Le C.P.A.C. et l'U.C.F.M.L. de Gennevilliers ont au mois de Juillet 75 rédigé un " projet de programme des foyers" pour unifier les résidents sur une base politique radicalement opposée au système des foyers-prisons et empêcher les manoeuvres de la Sonacotra, des gérants ou de la C.G.T. de diviser le mouvement naissant. Ce programme comportait une analyse de conjoncture et 8 points particuliers:
....-1) Le prix du loyer doit être fixe
....-2) Suppression du règlement intérieur
....-3) Reconnaissance du statut de locataire
....-4) Liberté totale de réunion, d'affichage
....-5) Droit de visite intégral pour chacun
....-6) Renvoi des gérants provocateurs et racistes, remplacement par des concierges
....-7) Amélioration des conditions d'hygiène et de sécurité
....-8) Enfin, beaucoup de camarades immigrés habitent dans des foyers parce qu'on les y oblige. Nous voulons des logements FI, F2, studio... pour tous ceux qui veulent faire venir leur famille...
..... Ce programme sera très largement discuté en particulier avec les camarades de Saint-Denis (Romain Rolland). Il constituera en fait la base à partir de laquelle la plate-forme du C.C. sera rédigée.
..... Le Dimanche 5 Octobre 1975 à 19 heures se déroulera la première réunion du C.C. regroupant Bagnolet, Clichy, Nanterre-ville, Paris 13eme et St-Denis R. Rolland. C'est cette réunion qui formulera la plate-forme du C.C. en tant que telle (Voir annexe).
..... C'est à partir de cette date que la grande question des négociations avec la Sonacotra est devenue un des problèmes politiques centraux. C'est à partir de cette date que les affrontements politiques avec la C.G.T. et le P.C.F. vont être très violents.
..... Le Vendredi 12 Décembre 75, la Sonacotra convoque le C.C. à une réunion. 70 camarades sont venus, bien décidés à entrer en masse et à forcer la Sonacotra à reconnaître leur volonté. Mais la Sonacotra a refusé de les reconnaître comme une organisation. Elle leur a demandé d'accepter un prétendu "accord" signé avec "d'autres instances" (en fait signé avec la CGT).
..... La proposition fut rejetée et la manoeuvre de la CGT et de la Sonacotra dénoncée dans tous les foyers.
..... * La CGT et le P.C.F. avaient, en fait, créé un Comité de Coordination pour le département de la Seine-St-Denis, un comité bidon regroupant seulement 2 foyers - celui de la Courneuve et le foyer Allende de St-Denis où la grève avait été cassée en Novembre 75 après ces fameuses "négociations". A vrai dire les révisionnistes cherchaient à utiliser le mouvement, non pour se battre contre le système des foyers-prisons, mais pour avancer leur propre projet politique en matière de logement des immigrés: des foyers qui garderaient leur règlement intérieur, où les loyers augmenteraient toujours, mais où le gérant serait remplacé par un comité de résident à leur solde. En fait, la C.G.T. voulait faire du comité de résident une forme de comité d'entreprise élu au scrutin secret avec le concours de la Sonacotra qui lui permettrait de pénétrer dans les problèmes de la gestion des foyers, de pénétrer dans les sociétés gestionnaires elles-mêmes.
..... Tous différents étaient les projets de la masse des résidents en colère et en révolte. C'est pour cela que CGT et P.C.F. furent rejetés et dénoncés comme ennemis.
..... En Novembre, le comité des résidents de R. Rolland sortait un tract en disant: "maintenant tout est clair, on voit bien qui est avec nous, qui est contre nous"..."nous, il nous faut une conscience politique ouvrière; il faut qu'on discute tous ensemble, qu'on se mette d'accord. On a besoin que tous les camarades concernés prennent leurs responsabilités et s'organisent.
..... * L'U.C.F.M.L. va dans cette période déployer son travail dans trois directions:
.....,. Expliquer partout la politique du P.C.F , et de la C.G.T. Expliquer pourquoi ils agissent ainsi, dans quel cadre politique d'ensemble cela s'inscrit, en quoi ce sont des ennemis politiques de la classe ouvrière qu'il faut combattre avec vigilance et détermination.
.....,.Soutenir le développement de la grève, la mise en place du C.C., sa sécurité, … soutenir les premières initiatives publiques des résidents comme le meeting du 29 Novembre 75 à la cité Floréal derrière R. Rolland.
.....,. Engager une grande campagne politique dans l'ensemble des couches du peuple pour l'égalité des droits politiques entre français et immigrés. Un moment fort de cette campagne sera la manifestation contre l'expulsion d'Arfaoui Béchir le 5 décembre 75 de la Bastille à Gambetta. 1ère manifestation contre les expulsions, regroupant 500 personnes. Elle lancera une campagne d'explication des objectifs politique du mouvement, par la diffusion du numéro spécial du "Marxiste-Léniniste" sur la grève des foyers (Voir document No 4).
..... * Cette première phase du mouvement, de luttes politiques contre la C.G.T. et le P.C.F., de constitution et de représentativité du C.C. sera tranchée le 21 février 76 lors du 1er grand meeting des foyers.
..... Il sera salué par un tract de l'U.C.F.M.L. Intitulé "un grand évènement historique" ( document No 5 ). Cela en fut un effectivement. 47 foyers en grève, des milliers d'ouvriers de toutes les nationalités acclamant leur organisation, le Comité de Coordination, indépendant des syndicats et du P.C.F., acclamant les mots d'ordre d'égalité des droits, y compris celui de droit de vote, grand moment de combativité ouvrière, d'unité politique contre la Sonacotra et la CGT.
..... Dans une période où se développait l'opération "programme commun " d'embrigadement du peuple, les résidents des foyers faisaient la preuve par ce meeting de leur volonté d'organiser et de diriger eux-mêmes leur combat contre les foyers-prisons, l'égalité des droits dans le logement. La présence de plus de 3000 ouvriers immigrés au coeur de Paris, à la Mutualité, unis politiquement autour du C.C. était un "évènement historique"; car, pour la première fois s'affirmait l'importance de la fraction immigrée de la classe ouvrière ET sa volonté de s'inscrire dans l'ensemble du combat du peuple en France contre la société impérialiste.

- II -

Contre-offensive de l'État et du P.C.F .: expulsion de France de 18 délégués,
négociations foyer par foyer.

 

La contre-attaque du P.C.F. et de l'État.

..... ** Le jour même du meeting du 21 Février, l'Humanité devait durcir le ton de ses attaques contre le C.C. et le mouvement: "La Sonacotra et le gouvernement viennent de trouver un renfort imprévu dans un 'comité de coordination' qui décrète représenter 47 foyers en lutte et qui par ses revendications démagogiques et son intransigeance a contribué à faire échouer les négociations avec la direction de la Sonacotra. Ce comité dirige l'essentiel de ses coups contre la C.G.T. et le Parti Communiste. M. Dijoud a une fois de plus trouvé dans les gauchistes un facile moyen de diversion" .
..... Ces déclarations vont être suivies d'effets. Descentes de commandos P.C.F. dans les foyers pour intimider les résidents, les forcer à négocier foyer par foyer. Pressions, en collaboration avec l'amicale des algériens en France, pour "inviter" les camarades immigrés à ne pas faire de politique, mais à faire confiance aux municipalités P.C.F. pour négocier à leur place.
..... ** Cette attaque des révisionnistes va s'articuler à une violente attaque de l'Etat. Le 10 Avril 76 à Champigny, le vendredi 16 avril à Pierrefitte, St-Denis, Sevran, Nanterre, Bagnolet, Bobigny, Gennevilliers, les flics vont pénétrer à 6 heures du matin en force dans les foyers. Armés d'une cinquantaine de noms sur une liste, mais sans mandats d'amener et d'arrêtés d'expulsion, ils vont chercher à expulser l'ensemble de la direction du C.C. 18 délégués seront expulsés de France. Mais l'objectif ne sera pas atteint. La majeure partie du C.C. ne sera pas trouvée dans les foyers. Loin d'être découragés, les résidents réagiront avec force et organiseront la grande manifestation du 24 Avril 76 de Barbès à Ménilmontant. 15 000 personnes répondront à l'appel du C.C., autant de français que d'immigrés, criant des mots d' ordre sur le soutien au mouvement, sur l'égalité des droits... 

Les répercussions politiques de ces attaques sur
l'unité du mouvement:

..... De 52 foyers en grève en Mars 76, le mouvement va passer à douze foyers à la fin de l'été. Deux difficultés politiques majeures: -Comment ne pas s'isoler, comment développer un véritable camp populaire autour des foyers dans une situation objective de repli; -Comment mener une politique sur les négociations.
..... /1/ Les attaques du P.C.F. et de l'État vont poser de nouvelles questions politiques aux résidents. Les immigrés ont-ils le droit de faire de la politique en France ou non ? Ce très important débat idéologique a profondément divisé l' ensemble des résidents. Finalement, trois types de comportements devant ce nouveau problème ont constituées la base de l'existence de trois courants dans le mouvement.
..... -UN PREMIER refusait aux immigrés la possibilité de faire de la politique. Ce courant désarmait complètement les résidents face aux attaques de l'Etat et du P.C.F. Objectivement, il servait les négociations foyer par foyer, brisant toute capacité d'organiser des répliques politiques, de mobiliser politiquement résidents et soutien populaire.
..... -A L'OPPOSÉ, un courant important de résidents pensait nécessaire de faire l'unité des français et des immigrés, d'être armé idéologiquement pour comprendre ce qu'était le P.C.F. et l'État, approuvait l'importance de la participation des immigrés à la lutte de classes en France.
..... -UN TROISIEME entre les deux hésitait, cherchait à trouver un "espace propre" aux immigrés, n'osait pas affronter de face la question du P.C.F. et de l'État. Il affirmait " nous ne faisons pas de politique, nous réclamons nos droits".
..... /2/ Ces trois courants vont choisir des comportements également différents vis à vis des négociations. D'un côté le P.C.F. organisait des négociations foyer par foyer, mais de l'autre, du côté du C.C., il y avait une réelle difficulté à fixer une stratégie politique quant aux négociations.
..... Le premier courant acceptait souvent le 1er protocole venu de la Sonacotra et ne tenait absolument pas compte du point de vue d'ensemble du mouvement. Il rejoignait objectivement le camp du P.C.F. Ce fut le cas de délégués de Colombes, de Bagnolet...
..... Un deuxième courant cherchait à imposer les points de la plate-forme qui lui semblaient les plus importants, en particulier tout ce qui touchait au règlement intérieur, aux gérants; mais il proposait de négocier la baisse de 100 f et les formes de reconnaissance explicite ou non du C.C. Pour lui, le fait que les négociations se passent avec le C.C. était une reconnaissance de fait de la direction de la grève.
..... Le troisième courant, hésitant quant à la politique à mener, préférera rejeter en bloc tout projet de négociation. Il s'en remettra au mot d'ordre: "la lutte, la lutte, jusqu'à la victoire finale" sans analyse des rapports de force réels.

Le mouvement de masse d'Avril 76 à Août 76:

..... "" Après la manifestation du 24 Avril, le mouvement va connaître une période d'instabilité et d'à-coups. Certes, cette initiative centrale avait marqué un coup d'arrêt contre les offensives de l'Etat - il n'y aura plus d'expulsion de délégués hors de France. Mais face aux nouveaux problèmes politiques apparus, les différents courants qui traversent le C.C. prendront des initiatives dispersées et parfois contradictoires.
..... - Une réplique sur le plan juridique. Le C.C. va tout d'abord faire un recours en Conseil d'Etat pour obtenir l'annulation des décisions d'expulsion des 18 camarades. Par ailleurs trois de ses membre vont déposer une plainte contre la Sonacotra pour pratique de prix illicites. Mais il y a aura des divisions entre résidents pour savoir si l'argent des loyers doit être rassemblé et être versé à un huissier, ou s'il fallait faire la grève sans versements particuliers.
..... - Des initiatives de "portes ouvertes., seront prises dans de nombreux foyers, Romain Rolland, Nanterre-deux- tours, Argenteuil Av. du Parc, Bagnolet, ...mais elles n'arriveront pas à constituer un véritable courant de soutien. Les problèmes politiques qui se posaient étaient la plupart du temps évacués au nom de "les résidents ne font pas de politique". Il y eut bien entendu certains endroits où les débats s'engageaient mais ils n'en restèrent qu'au niveau des discussions, sans effets pratiques.
..... Le tract d'appel à la porte ouverte de R. Rolland le 22 Mai 75 indiquait bien: "Aujourd'hui, face au développement des luttes ouvrières et populaires, la bourgeoisie ne peut plus répondre que par la répression: elle tue les viticulteurs, envoie ses flics contre les ouvriers en lutte, comme à l'usine Cisatol, matraque les étudiants et expulse les travailleurs immigrés ", mais l'intonation n'est qu'anti-répressive et sera sans suite.
 ..... -Certaines initiatives sont prises pour briser le coup de force P.C.F.. En particulier le rassemblement du 7 Juillet à 15 heures à la préfecture de Bobigny. Le tract d'appel du C.C. explique: " Or le faux parti communiste, en s'avançant à faire le recours en Conseil d'Etat pour faire revenir un des délégués expulsés, Moussa Konaté, prétend être le champion de la "victoire", ce qui est effectivement la seule vraie victoire des résidents, par leur courageuse lutte. La manifestation du 24 Avril où ces traîtres à la classe ouvrière ont brillé par leur absence, n'a pas eu le moindre écho dans leurs journaux"... Mais ce tract du C.C. suscita quelques réprobations parmi certains délégués liés aux syndicats. L'appel fut limité aux membres du C.C. et non à la masse des résidents.
..... -Après les échecs des négociations du C.C. avec la Sonacotra les 12/12/75, 14/1/76, 31/1/76 et 14/2/76, le C.C. décide d'organiser une 5ème négociation le 11 Juin.
Mais la convocation est lancée de telle manière que la Sonacotra choisit de se rétracter. Dans un communiqué elle prend le prétexte du "caractère de manifestation que la coordination entend donner aux négociation..." pour les repousser.
..... En fait, le C.C. n'était pas unifié sur cette rencontre; certains voulaient lui donner un caractère de délégation massive où la Sonacotra acceptait ou bien refusait la plate-forme telle quelle; d'autres désiraient lui donner un caractère de véritable négociation. Cette division va se reproduire en Juillet aux négociations de Colombes.
Par une initiative scissionniste, l'ex-coordination des foyers Nord-Ouest de Paris (Colombes, Nanterre-maisons, Bezons...) avait convoqué la Sonacotra à une négociation le samedi 24 Juillet à Colombes. Le C.C. a pu reprendre au dernier moment cette négociation en son nom propre; mais ce fut un nouvel échec. Il suscita de violentes discussions; certains arrêtèrent la grève, d'autres voulaient poursuivre, mais avec un plan de relance du mouvement et une prise de contact avec la Sonacotra; d'autres enfin rejetèrent toute forme de négociation, refusèrent de verser les loyers à un huissier et restèrent en grève sans perspectives particulières autres qu'attendre la fin de l'été pour relancer un meeting. C'est finalement le troisième courant qui s'imposa et prit la direction du C.C.

La politique de l'U.C.F.M.L.

..... * Dans cette phase difficile du mouvement, la politique de l'U.C.F.M.L. se déploya suivant 3 axes:
....-poursuivre les campagnes d'explication de la grève, de sa portée politique et des enseignements qui s'y rattachent. Contribuer à l'organisation du camp du peuple autour du mouvement.
....-soutenir les initiatives du .C.C., sa sécurité... l'aider à mettre sur pied des Comités de Soutien.
....-intervenir sur les grands débats politiques internes au mouvement, tout en respectant les décisions du C.C., et le C.C. lui-même comme direction de la grève.
..... -1) Tant dans la suite du meeting du 21 février que pour l'appel à la manifestation du 24 Avril, l'U.C.F.M.L. et les C.P.A.C. vont développer une intense campagne de propagande autour des thèmes de l'égalité des droits politiques entre français et immigrés, de l'importance de l'autonomie du mouvement face à l'Etat et au P.C.F. L'U.C.F.M.L. cherchera à lier la lutte des foyers à d'autres combats politiques du peuple. En particulier dans les quartiers populaires, l'U.C.F.M.L. va articuler le mouvement des foyers aux autres problèmes de logement dans les cité, au problème de lutte contre la vie chère. Dans les facultés, elle animera dans les grèves étudiantes de 76 des débats sur l'importance au sein de la classe ouvrière du combat de classe pour l'égalité des droits. Elle organisera des comités d'étudiants pour l'égalité des droits qui seront à leur mesure, des forces importantes pour le soutien au mouvement. Ces étudiants affirmeront: " nous ne déserterons pas les facs, nous serons ceux qui dans les facs se battent contre l'idéologie bourgeoise au nom d'une autre force et d'une autre idéologie qui se construit, celle du peuple révolutionnaire" (Tract sur Jussieu le 20 Avril 76).
..... Contre les expulsions, l'U.C.F.M.L. prendra l'initiative de regrouper un certain nombre d'intellectuels dans un comité de vigilance contre les expulsions. Ce comité de vigilance lancera un appel pour organiser pendant tout l'été une "permanence de défense et de soutien au C.C. et aux grévistes des foyers Sonacotra". Ce texte sera signé par le Syndicat de la Magistrature, le mouvement des juristes démocrates, le Syndicat National de Psychiatries en formation, le groupe Information Santé, les architectes de "Places" et des personnalités comme Sartre, de Beauvoir...
..... Le comité de vigilance prit de nombreuses positions publiques reproduites dans la presse, et maintiendra des réseaux pendant tout l'été.
..... L'ensemble de ce travail se matérialisait par des appels à manifester, à répondre aux mobilisations du C.C. (24 avril à Barbès, mais aussi 7 Juillet à Bobigny et permanence d'été); mais il y eut également des échéances propres de l'U.C.F.M.L.: = meeting de mobilisation dans les facultés (Nanterre, Jussieu, Vincennes principalement) = rassemblement de riposte immédiate aux expulsions sur le marché de St-Denis la dimanche 18 Avril, deux jours après l'intervention des flics. Ce rassemblement se joindra aux résidents venus en cortège du foyer, ce qui permit de former une manifestation de 1000 personnes qui parcourera le marché et les rues de St-Denis = meeting sur le thème de l'égalité des droits à Paris le 12 Juin 76 où un ouvrier maoïste expliqua l'importance du combat pour l'égalité des droits dans l'usine, une femme d'un C.P.A.C. celle du travail du comité de Reims au sein des quartiers populaires...
..... -2) Soutien au C.C.; soutien matériel, financier; prise en charge de planques, etc... prise en charge d'une partie de la sécurité des membres du C.C., participation massive au service d'ordre le 24 Avril.
..... .3) Mais l'U.C.F.M.L. est intervenue également du point de vue des grandes questions internes au mouvement en donnant un point de vue, en argumentant par rapport aux différents courants de pensée qui traversaient le mouvement. L'U.C.F. est principalement intervenue contre ceux qui voulaient interdire la politique aux immigrés, qui affirmaient " les immigrés doivent travailler en France et non se mêler de politique". Au contraire nous affirmions et expliquions l'importance du mot d'ordre "Qui travaille a des droits ! Français-immigrés, mêmes droits politiques ! " Nous sommes intervenus pour expliquer le plan politique de la C.G.T., du P.C.F. et de l'amicale des algériens en France, sur l'importance de les combattre. Nous sommes intervenus contre les négociations foyer par foyer et pour que se développe une force capable d'imposer la plateforme dans une négociation entre la Sonacotra et le C.C.

Un épisode où s'exprimera une contradiction ouverte entre le C.C. et l'U.C.F.M.L.: le début du mois d' Août 1976.

..... Après l'échec des négociations de Colombes du 24 Juillet, l'U.C.F.M.L. pensa (et l'exprima) que le C.C. avait intérêt à re-convoquer en son nom propre de nouvelles négociations. Que, correctement préparées, et unis à l'avance, le C.C. pouvait obtenir certains reculs de la part de la Sonacotra, ou tout au moins garder le contact, ce qui lui permettrait de passer l'été sans trop de difficultés ni de pertes. Mais la question des négociations n'avait pas en elle-même de réalité politique de masse; dans les faits s'affrontaient seulement deux positions: poursuivre la grève ou reprendre le paiement.
..... Au contraire, dans la situation de fin Juillet 76, après les nombreux échecs des négociations, essayer une nouvelle fois de négocier représentait en fait pour les résidents une voie qui renforçait ceux qui voulaient l'arrêt de la grève. C' était une voie qui risquait d'être liquidatrice.
..... Les faits de masse et l'interpellation du C.C. le 9 Août 76, nous ont montré alors que nous nous trompions.
..... Nous avons à partir de là vigoureusement rectifié notre analyse et notre travail de masse. Nous avons très rapidement rétabli la situation. Ces évènements ont cependant nécessité un bilan critique et autocritique minutieux dont nous avons rendu publique les principales lignes dans une lettre ouverte envoyée au C.C. et à tous les membres des comités de résidents (voir document).
..... Ils furent par la suite l'occasion de campagnes mensongères, de contre-vérités flagrantes déployées pour tenter d'isoler l'U.C.F.M.L de la masse des résidents, de la discréditer. Mais, sans atteindre ces objectifs, ces évènements ont permis en fait à un courant du mouvement, le troisième décrit plus haut, d'asseoir sa direction en partie opposée à celui de l'unité français-immigrés.
..... Ceci dit, dès le mardi 10 Août, dans une réunion du Comité de Soutien central, le C.C. accepte des premiers éléments de notre autocritique et nous demande de trouver un lieu pour le rassemblement prévu à la rentrée, pour les aider dans leur déplacement. Dès cette date ainsi, le C.C. considère de son côté que même s'il est apparu des divergences entre nous, ces contradictions doivent être considérées comme secondaires.

Suite è

-photos extraites de la brochure- pour les visionner il suffit de cliquer dessus

LES MAOISTES AUX COTES DES RESIDENTS EN LUTTE (Manifestations centrales, soutien au campement de Garges, campagne pour la libération de Bouaziz, etc...)


Quelques nervis syndicalistes essaient d'interdire à l'UCFML la manifestation du 1er décembre 79, appelée dès octobre, par... l'UCFML.

 

Les maoïstes de l'U.C.F.M.L., hier et aujourd'hui, dans le combat pour l'égalité des droits français et immigrés, contre l'Etat, les fascistes et le P.C.F. (ci-dessous à gauche manifestation contre les lois racistes du 16 juin 79, et à droite celle du 15 décembre 80 contre tous les racismes).

Suite de la brochure è

-Retour page des mises à jour-

 -Retour Liste Brochures-

-Retour page "Quelques points sur l'histoire..."-