SECOND ENJEU DE LA
PREMIERE GRANDE LUTTE DE LIGNES DANS LE MOUVEMENT
MARXISTE-LENINISTE LA QUESTION DE LA CREATION D'UN NOUVEAU
PARTI MARXISTE-LENINISTE
..... Ici, nous parvenons
à l'énonciation sans ambiguïté du
second enjeu de la première grande lutte de
lignes apparue dans le courant marxiste-léniniste
:
..... " Nous
posions d'entrée la grande question historique de
l'existence en France d'un parti réellement
communiste, c'est-à-dire organisé pour
conduire le prolétariat et le Peuple français
à la Révolution socialiste. Voici ce que nous
écrivions dans le premier éditorial :
.....
S'agit-il de créer un nouveau parti
communiste ? S'agit-il de renverser la direction actuelle du
Parti communiste français ? S'agit-il d'une lutte
développée à l'intérieur ou
à l'extérieur du Parti existant, ou les deux
à la fois ?
..... A
l'étape actuelle, l'essentiel est d'affirmer notre
objectif tactique ; l'existence en France d'un parti
communiste fondant authentiquement son action sur les
principes du marxisme-léninisme.
..... Ce sont
les militants sincères et honnêtes, ce sont les
travailleurs eux-mêmes qui aideront les
véritables communistes à trouver la meilleure
voie.
.....
L'impatience ne servirait pas la cause
sacrée que nous entendons défendre. Et
l'exemple de Lénine a prouvé que ce fut
seulement après des années de lutte contre les
opportunistes du vieux Parti qu'il put construire de
façon décisive le nouveau Parti, le Parti
communiste bolchévik
(10).
..... Et dans
nôtre conclusion nous fixions toute une série
d'objectifs, nous définissions les grandes
orientations d'un plan de travail :
.....
Analyser la situation des classes sociales en
France, définir la nature exacte de chaque Parti, la
classe dont il défend les intérêts,
dénoncer avec clarté la formidable agression
économique de l'impérialisme américain
contre notre pays et contre l'Europe, montrer la
stratégie de cet impérialisme à son
stade suprême sous sa forme de pacifisme hypocrite
à l'usage de l'Occident et de guerre criminelle sans
merci contre les peuples d'Asie, d'Afrique et
d'Amérique latine, aider patiemment à la
reprise - de conscience de la classe ouvrière de
notre pays empoisonnée par les mensonges du
khouchtchévisme et du révisionnisme moderne,
tels sont nos objectifs immédiats dans le but de
créer les conditions nécessaires pour aller en
France comme ailleurs vers l'objectif final,
stratégique, de tous les vrais communistes du monde :
le Socialisme.
..... Dès
lors ce fut un nouveau grand succès, compte tenu de
nos forces d'alors, que la publication en mai 1965, à
peine trois mois plus tard, du " Projet de plate-forme
marxiste-léniniste française soumis à
la discussion de la classe ouvrière et des couches
laborieuses françaises par la
Fédération des Cercles
marxistes-léninistes "...
..... Ce projet
s'ouvrait justement sur un paragraphe intitulé " De
la nécessité historique d'un P.C.F.
authentiquement révolutionnaire fondant son action
sur les principes du marxisme-léninisme ".
..... Le Rapport
s'appliquait alors à une analyse de la situation
politique en FRANCE, puis sur le plan international,
débouchait sur une condamnation catégorique de
la liquidation de tout contenu de classe prolétarien
du Parti " communiste " français par ses dirigeants
révisionnistes, avant de fixer la tâche
centrale des Marxistes-léninistes : créer
un nouveau Parti marxiste-léniniste.
..... Dans le
passage suivant apparaît manifestement qu'il y avait
eu et que persistait la lutte entre deux lignes sur la
question fondamentale de la rupture organisationnelle avec
le Parti révisionniste ou de la poursuite d'une
prétendue lutte interne dans ses rangs:
..... " ...
Est-ce à dire que tous les membres du P.C.F. sont
perdus, pervertis irrémédiablement ? Certes
non.
..... Nous
sommes en contact avec plus de 200 camarades qui croient
encore à la lutte interne. Des secrétaires de
sections, de cellules, plus rarement des responsables
fédéraux nous écrivent, nous assurent
de leur soutien, nous félicitant. Mais peut-on
réellement croire encore à la lutte interne ?
..... De deux choses l'une,
ou le militant marxiste-léniniste engage le combat
contre le révisionnisme, et très rapidement
l'appareil agit en sorte de l'isoler ou de l'exclure s'il ne
parvient pas à l'isoler, ou le militant qui se
prétend marxiste-léniniste organise sa petite
vie interne dans le parti de telle manière qu'il ne
risque point la répression de l'appareil et alors
à quoi donc servent ses bonnes idées, son
comportement entrant d'ailleurs aussitôt en
contradiction avec sa pensée ?
..... Nous appelons tous ces
camarades à prendre leurs responsabilités,
à sortir du parti et rejoindre ouvertement nos rangs.
..... II est historiquement
prouvé maintenant que la
dégénérescence idéologique,
politique et organique du parti révisionniste ne
permettra plus le redressement interne. C'est le même
phénomène qu'à l'époque des
Kautsky et Bernstein lorsque Lénine combattit le
révisionnisme de la vieille
social-démocratie.
..... Pour aller
de l'ayant, regrouper les militants décidés et
sincères, il faut un nouveau parti. Aucune autre
possibilité n'est offerte au prolétariat
français, même si cette réalité
lui procure quelque désillusion.
..... Le Parti communiste
français est devenu un parti social-démocrate.
Le Parti communiste français n'est plus un parti
ouvrier de type léniniste.
..... Aussi,
l'impérieuse exigence de notre lutte est-elle de
reconstruire un tel parti.
..... Mais le lancement du
nouveau Parti communiste français
(marxiste-léniniste) est une entreprise
sérieuse d'une portée historique et
universelle qui exige de ses promoteurs qu'ils ne
cèdent à aucune impatience.
..... Beaucoup
d'entre nous ont été soldats. Certains se
souviennent de l'attente indispensable dans le nid de la
mitrailleuse ou l'embuscade au fusil. Si la rafale ou le
coup partent trop tôt, adieu la victoire.
..... II faut
savoir attendre le moment le plus opportun pour porter le
coup le plus décisif.
..... Aussi
pensons-nous que la création du parti doit avant tout
s'appuyer sur une situation politique favorable, prendre son
élan dans une situation montante du combat de la
classe ouvrière.
..... N'oublions
jamais que c'est un Parti léniniste que nous voulons
construire, c'est-à-dire un parti d'acier, fondant
son action sur l'unité la Plus inébranlable de
ses rangs, avec une direction homogène et
capable.
..... Nous ne
sommes pas encore parvenus au stade de notre
développement où sont remplies les conditions
internes minimales nécessaires. Mais, certes, les
conditions extérieures sont de plus en plus
favorables. II faut accélérer le processus,
c'est pourquoi nous devons créer l'outil,
l'instrument qui permettra le bond en avant encore
indispensable.
..... Le
Mouvement communiste français (m.-l.) peut et doit
être cet instrument. Nous devons le forger pour mieux
parvenir dans le plus bref délai à la
réalisation conjointe de ces deux objectifs :
- L'ANALYSE CONCRETE DE LA SITUATION DES CLASSES
SOCIALES FRANÇAISES;
- LA CREATION DU PARTI COMMUNISTE FRANÇAIS
(M.-L.).
..... Le but du Mouvement
communiste français (M.-L.) est de convoquer dans le
meilleur délai le congrès constitutif du Parti
communiste français (M.-L.).
..... Cela n'est
possible qu'après une intense campagne d'explications
par affiches, par tracts, par meetings, par la voix de notre
" Humanité Nouvelle ". II faut que notre appel
à créer le nouveau parti soit entendu partout
dans tous les départements, dans les plus petites
bourgades, non seulement par tous les travailleurs des
usines mais aussi par ceux des campagnes.
..... C'est
seulement sur le tremplin de cette intense
préparation, en créant l'enthousiasme dans le
combat, que nos progrès quantitatifs permettront le
bond qualitatif que nous recherchons.
..... Certes,
depuis 1963, nous avons dû combattre nombre de
provocations, certes nous avons dû freiner l'ardeur et
l'impatience qui se manifestaient localement à chaque
succès nouveau. Rien n'est plus illusoire qu'une
victoire, si l'on oublie la voix tortueuse de notre marche
en avant. Victoires, défaites, défaites,
victoires se succéderont encore longtemps avant de
déboucher sur la victoire décisive.
..... A quoi bon
le verbiage pseudo-révolutionnaire, la
phraséologie que Lénine fustigeait avec tant
de pertinence dans " La maladie infantile du communisme "
?
..... Nous avons
dit en 1964 que les travailleurs aideraient les
véritables communistes à trouver la voix
juste.
.....
C'était exact. Nous y sommes. Enfin, nous
avons débouché sur le contact avec la classe
ouvrière. Du contenu hétérogène
de nos rangs à nos débuts, nous marchons
maintenant vers une plus grande
homogénéité. "
.....
Après un développement portant encore
sur la nécessité d'éliminer
défauts et insuffisances par un effort
conséquent sur le plan idéologique, le Rapport
concluait :
..... " Au
travail donc, pour que la classe ouvrière sache qui
nous sommes, ce que nous voulons !
..... Au
travail pour nous lier aux masses dans l'action
quotidienne.
..... Au
travail pour que nos rangs se renforcent par l'apport
d'éléments nouveaux venus des usines et des
campagnes, pour que notre mouvement se
prolétarise.
..... Au
travail pour une juste analyse concrète de la
situation des classes sociales en France.
..... Au
travail pour le développement impétueux de
notre solidarité avec les peuples du monde
entier.
..... Au
travail pour un soutien toujours plus efficace à la
juste guerre révolutionnaire du peuple
vietnamien.
..... Au
travail pour la création la plus rapide et la plus
décisive du nouveau parti léniniste, le Parti
communiste français (M.-L.).
..... .....
Vive la Fédération des Cercles
marxistes-léninistes !
..... .....
Vive le Mouvement communiste français
(M.-L.) instrument de la création du Parti communiste
français (M.-L.) !
..... ..... A
bas l'impérialisme américain, ennemi des
peuples du monde entier !
..... .....
Démasquons la trahison révisionniste
!
..... .....
Non au pouvoir des monopoles !
..... .....
Vive le Mouvement communiste international !
..... .....
Vive le marxisme-léninisme ! Vive le
socialisme !
..... .....
Vive le communisme ! "
..... Après une large
discussion qui dura deux jours, ce Rapport politique fut
approuvé à l'unanimité. Au surplus, un
" Manifeste en 10 points " fut voté par une
majorité frisant l'unanimité des congressistes
(11). Le dernier
point, le point 10 portait pour titre : " Forgeons
l'outil de la reconstruction d'un Parti communiste
marxiste-léniniste en France ".
..... Son
contenu consacrait la RUPTURE ORGANISATIONNELLE avec
le Parti communiste français et marquait ainsi la
victoire de la ligne idéologique prolétarienne
sur la ligne opportuniste petite-bourgeoise
préconisant la " lutte interne ".
..... Cette
victoire était explicitement contenue dans le
document également adopté par le
Congrès sous le titre " Organisation et Statuts du
Mouvement communiste français
(marxiste-léniniste) " qui comportait le
préambule suivant :
..... " La
Fédération des Cercles
Marxistes-Léninistes de FRANCE réunie en
Congrès à PARIS les 25 et 26 Juin 1966
décide de se transformer en Mouvement communiste
français (marxiste-léniniste), étape
préparatoire pour la reconstruction du Parti
communiste sur la base de la vérité
universelle du marxisme-léninisme, des leçons
tirées de la dégénérescence
révisionniste et des particularités
concrètes de la lutte des classes en FRANCE.
"
..... En outre,
et c'était là un aspect d'une portée
définitive, l'article 7 stipulait :
..... ..... " Article 7. -
Toute appartenance à une autre organisation politique
est interdite, sauf autorisation du Comité central. "
..... Enfin l'article 9
établissait que :
..... ..... "
Les adhésions collectives ne peuvent être
décidées que par le Comité central, de
même que les adhésions de dirigeants d'un autre
Parti. "
..... Nous
verrons plus loin l'importance concrète de cette
dernière disposition. Mais pour l'instant montrons
que la victoire de la ligne de RUPTURE ORGANISATIONNELLE
avec le Parti révisionniste ne signifiait
nullement que la ligne de LUTTE INTERNE allait abandonner la
lutte. La victoire d'une ligne ne doit jamais être
tenue pour définitive.
.....
Après la tenue du Congrès de Lancry;
quelques adhérents de l'ancienne
Fédération des Cercles
marxistes-léninistes; hostiles aux décisions
adoptées refusèrent de rester dans les rangs
de la nouvelle organisation, le Mouvement communiste
français (marxiste-léniniste). II convient de
souligner ici que le Mouvement fondait son activité
(par l'article 14 da ses Statuts) sur le principe du
centralisme démocratique, ce qui n'était pas
le cas de la forme organisationnelle antérieure des
Cercles. Une dizaine de ces militants firent
connaître, dans la région parisienne, qu'ils
étaient démissionnaires parce qu'ils
entendaient poursuivre dans les rangs du parti communiste
français la " lutte interne ". Au passage, nous
pouvons indiquer qu'un seul d'entre eux fit une
sincère autocritique, après les
événements de Mai-Juin 1968, en reconnaissant
que son attitude d'alors avait été
complètement erronée. Mais nous n'avons
pratiquement plus jamais entendu parler des autres qui
continuent peut-être aujourd'hui leur fameuse... lutte
interne !
..... Cependant le cas le
plus significatif fut celui d'un des fondateurs de la
Fédération des Cercles
marxistes-léninistes. Ouvrier du bâtiment,
vieux communiste ayant largement payé de sa personne
au cours d'une activité militante d'au moins trente
années, arrêté en 1940 et
déporté dans un camp d'internement en ALGERIE,
ce militant ne parvint pas à s'arracher à une
vue subjectiviste, sentimentale et idéaliste de la
situation effective dans le Mouvement communiste
international. Tout en continuant à critiquer avec
vigueur la ligne révisionniste, il resta
accroché à cette idée "
réconfortante " mais totalement erronée que "
les choses finiraient bien par s'arranger entre camarades
chinois et soviétiques ". Au moment du limogeage de
KHROUCHTCHEV, il exultait de joie et croyait que le
révisionnisme en U.R.S.S. allait être battu !
II refusa d'approuver la ligne élaborée au
Congrès de Lancry, mais cela ne lui évita
pourtant pas de se voir bientôt refuser la carte
d'adhérent du P.C.F. à l'occasion d'une remise
des cartes annuelle.
..... Ce vieux camarade
avait subi une telle pression de l'idéologie
révisionniste qu'il n'avait pu s'en
débarrasser. Sa conception du monde n'était
pas fondée sur la philosophie matérialiste,
mais relevait seulement de l'idéalisme
métaphysique. II croyait pouvoir s'en remettre
à la " bonté du hasard " conduisant "
inéluctablement " à la réconciliation
de deux contraires. II partait de ce qu'il souhaitait, dans
sa tète à lui, individuellement; Il allait de
son subjectivisme à la pire des erreurs parce qu'il
se refusait en définitive à prendre en
considération d'abord ce qui était la
réalité, pour aller de l'objectif au
subjectif. II est mort voici quelques mois malheureux et
isolé, après avoir sombré dans le
pessimisme le plus tragique.
..... Si nous
évoquons son cas, c'est malheureusement parce qu'il
ne fut pas unique, et c'est aussi essentiellement pour
montrer l'intensité de la lutte entre deux lignes
reflétant deux idéologies antagoniques au sein
même du mouvement marxiste-léniniste. II
importe de remarque qu'en fait, même s'il condamnait
la politique révisionniste, les défauts
idéologiques que manifesta ce militant appartenaient
essentiellement au révisionnisme moderne,
ressortaient de la mentalité de résignation et
de capitulation de cette idéologie
contre-révolutionnaire, découla d'une
conception philosophique du monde propre à la
bourgeoisie.
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