LA BATAILLE
PROLONGÉE
CONTRE LA
MAINMISE DU PS
DANS LA
CFDT
Le 25 Mai, une semaine après son échec
à l'élection présidentielle, F.
Mitterrand lançait au nom du P.S., un appel à
la tenue pour l'automne "d'assises du socialisme". Il
s'agissait alors pour le P.S., au lendemain de la campagne
électorale, de profiter et récupérer au
maximum les résultats du score électoral pour
se renforcer au détriment de son allié
"communiste".
Une semaine après, le bureau national de la
C.F.D.T. décidait à son tour d'associer la
confédération à ces assises sur le
socialisme :
"le Bureau National apprécie
comme un élément positif l'appel lancé
par F. Mitterrand. Nombre de ces militants, dans le respect
de l'autonomie syndicale à tous les niveaux,
tiendront à apporter leur contribution
spécifique et à favoriser autour d'un
véritable projet de société socialiste,
démocratique et autogestionnaire, la naissance de la
grande force socialiste dont le mouvement ouvrier a
besoin".
Voilà un appel clair. Depuis des années, la
direction C.F.D.T. se proclamait et se proclame toujours
indépendante de tout parti politique et
dénonce la direction du P"C"F dans la CGT. En fait,
le thème du socialisme autogestionnaire, sert de
justificatif aux dirigeants "apolitiques" de la C.F.D.T.
pour élargir ses liens avec le réformisme,
pour renforcer la main mise du P.S.,sur ce syndicat.
Les tentatives pour faire croire que le syndicat
n'était pas engagé dans cette
opération, qu'il ne s'agissait que de militants s'y
engageant individuellement, ont été
constamment démenties ! Le B.N. lui-même
invitait les militants à répondre aux
propositions de Mitterrand ; 10 membres du B.N. et des
responsables régionaux et fédéraux,
lançaient un appel public signé à
"titre individuel" et le syndicat ne serait pas
engagé ! L'utilisation des structures syndicales pour
faire signer cet appel, alors que le débat
n'était pas engagé dans les sections, montre
bien qu'il s'agissait d'une opération
orchestrée par l'équipe dirigeante.
Donc, les 12 et 13 Octobre 74, se sont tenues ces
"assises" dites du socialisme convoquées par le PS; y
étaient présentes la minorité du P.S.U.
qui avait suivi Rocard et la troisième composante,
composée essentiellement des responsables C.F.D.T.
avec à leur tête : Chérèque,
responsable de la F.G.M. Y étaient exclus tous ceux
qui voulaient débattre du socialisme, des liens
partis-syndicats, mais qui refusaient d'accepter
l'adhésion au P.S. Le document "Pour le socialisme"
qui aurait dû être au centre du débat,
n'a pratiquement pas fait l'objet de discussion.
Mais tout au long de cette campagne, de
nombreuses protestations se sont faites jour. Ce fut d'abord
des sections d'entreprises, certaines
fédérations ou Union Régionales
(Section Schlumberger, Fédé Hacuitex, UR Basse
Normandie, etc...). Puis ce fut l'initiative prise par un
groupe de syndiqués de faire circuler une
pétition contre les assises et appelant à
développer les acquis des luttes et la
démocratie syndicale.
Cet appel a récolté plusieurs milliers de
signatures et a permis de susciter un large débat
dans le syndicat. Le Parti a soutenu à fond cette
initiative. Aujourd'hui, l'opposition à la main-mise
réformiste du P.S. sur la C.F.D.T. continue à
se développer comme en témoigne l'opposition
qui est apparue à l'occasion des différents
congrès qui se sont tenus récemment, F.G.M.,
UR Basse Normandie, UD 13, etc...
(Voir compte-rendu ci-dessous).
Toutes ces actions ont contraint Maire et son
équipe à des reculades verbales :
A réaffirmer que le syndicat
n'était pas engagé sans pour cela
désavouer ceux qui, à la C.F.D.T.,avaient
été le plus en avant dans la campagne de
racolage du P.S.
Pour justifier l'absence de débat
dans toute organisation avant les décisions prises
par le B.N., celui-ci déclare dans le
préambule au rapport syndicat - parti :
"les positions
confédérales se sont peu à peu
enrichies, l'action de la C.F.D.T. à l'égard
des partis s'est affermie. Mais la succession des
événements n'a pas toujours permis de donner
une vue d'ensemble des positions confédérales,
de leur logique. Des positions ont dû être
prises rapidement sans toujours donner lieu à des
discussions préalables suffisantes".
Cet extrait est un aveu de l'absence de
débat démocratique, que la
confédération avait déjà
reconnue au congrès F.G.M. Quant à "l'action
de la C.F.D.T. à l'égard des partis",
traduisons qu'elle s'est affermie par la tentative de
subordination plus grande. Aujourd'hui, pour les communistes
militant dans la C.F.D.T., pour les syndicalistes
révolutionnaires, pour les
délégués et syndiqués, pour tous
ceux qui ont été conscients de l'importance de
la lutte contre la main-mise du P.S. sur la C.F.D.T.,
plusieurs tâches s'imposent :
- - Engager une campagne contre la crise du
capitalisme et le chômage.
Nous devons préparer les luttes de la classe
ouvrière qui ne vont pas manquer de se
développer. Dans les usines, ne plus se contenter des
journées d'action bidon comme celle du 12
Décembre, mais plutôt à l'exemple de
Saviem ou de Brandt, tenir des meetings dans les ateliers,
expliquer qu'il est possible de lutter contre la crise, de
refuser le chantage de la bourgeoisie, se porter à la
tête des luttes contre les licenciements. En effet,
notre travail ne peut être seulement de lutter contre
le P.S., cette lutte doit être étroitement
liée aux luttes de la classe ouvrière contre
la bourgeoisie.
- - Faire un bilan de masse de la grande lutte des
postiers
Nous devons demander des comptes aux dirigeants C.F.D.T.
de la fédération P.T.T. : pourquoi,
derrière un langage parfois violent, la
fédération P.T.T. s'est-elle constamment
abritée derrière l'unité CGT-CFDT ?
Elle a tenté de dévaloriser les revendications
des postiers, souvent même elle les a totalement
oubliées dans la période d'extension du
mouvement. Elle n'a pas mieux appelé à
l'extension du mouvement le 19 et a laissé le
mouvement sans aucune perspective après le
19.
Quelle a été l'action du
P.S. pendant cette grève, si ce n'est de rappeler
constamment qu'un gouvernement de gauche saurait faire
accepter par les travailleurs les mesures nécessaires
à l'économie capitaliste. Le soutien à
la grève par le P.S. a été
complètement nul.
- - Participer et impulser largement le débat
parti-syndicat
Nous devons enfin nous emparer du débat
parti-syndicat que le BN est obligé de lancer pour
justifier l'absence de débat auparavant.
Ce débat doit être
mené dans toutes les sections syndicales où
nous sommes présents et avec le maximum de
travailleurs: y compris des syndiqués CGT peuvent y
être invités. Les travailleurs doivent
participer à l'élaboration des orientations
syndicales.
Ce débat doit prendre en compte
tous les acquis des grandes luttes de ces dernières
années, Lip, Usinor Dunkerque, P.T.T. etc...,
contradictoires avec les propositions des partis bourgeois
de gauche P.S., P.C.

Les
syndiqués et les militants C.F.D.T.
particulièrement actifs dans les dernières
luttes, empêchent les agents recruteurs du PS de
transformer leur syndicat en courroie de transmission de la
social-démocratie
|
2 CONGRÈS
RÉVÉLATEURS DES DIFFICULTÉS DES
RÉFORMISTES A IMPOSER LE RALLIEMENT AU PS
Nous publions ici des extraits des
comptes-rendus des congrès CFDT de la
Fédération Générale de la
Métallurgie (FGM) et de l'Union Régionale
(U.R.) Basse-Normandie, élaborés par des
syndicalistes-révolutionnaires .
Congrès de
la Fédération Générale des
Métaux
Un congrès anti-démocratique : la
métallurgie est un pilier de l'industrie moderne; se
sont retrouvées à ce Congrès de
nombreuses boites où les luttes ont été
riches d'enseignement ces dernières années :
Lip, Usiner, Saviem, Renault, Titan-Coder, Peugeot,
St-Nazaire, etc...
Dès le début du
Congrès les délégués avaient en
leur possession un document de réflexion
présentée par les syndicats de
Besançon, Belfort et Vesoul qui faisait
apparaître un pôle d'opposition aux
réformistes et qui demandait une modification de
l'ordre du jour. Ce texte n'a pas été
diffusé dans les syndicats avant le Congrès
sous prétexte qu'il n'avait pas été
proposé dans le délai de trois mois
conformément au statut. Toutefois, une modification
de l'ordre du jour a été mise au voix: 17,42%
l'ont votée, la tendance réformiste l'a donc
emporté en utilisant son autorité et l'absence
de discussion au préalable par les
délégués qui ne pouvaient donc pas
juger de son importance.
Ce texte demandait une réforme des
structures non adaptées au besoin des luttes des
travailleurs :
- il était proposé que
les sections syndicales d'entreprises (SSE) et union
interprofessionnelle de base deviennent plus autonomes,
qu'elles soient les structures principales de
l'activité syndicale au profit d'une plus grande
démocratie ouvrière et d'une activité
interprofessionnelle plus importante. Les unions
métallurgiques sont dénoncées comme
organismes bureaucratiques coupés des
travailleurs.
- Un délégué de
Lip à la tribune dénonce la
fédération qui n'a pas fait circuler le texte
depuis le 1/10/74: "le conseil général a
peur des idées nouvelles, il a
préféré à l'époque parler
des assises" (applaudissements). Un ponte
réformiste lui répond : "il faut savoir si
oui ou non nous sommes au service d'une structure".
Réponse du délégué : "Ce sont
les structures qui doivent être au service des
travailleurs". A noter qu'il y a un an, en octobre 73,
au plus fort de la lutte des Lip, le conseil
fédéral avait décidé
d'être "ferme" contre la section Lip même s'il
"fallait la désavouer" ; celle-ci ayant
dénoncé le plan Giraud, avait
été qualifiée de section anti-CGT
!
Au moment de l'élection du conseil
fédéral, une liste de noms à rayer
avait été communiquée à de
nombreux délégués, ce
procédé a permis d'exclure Vittot et Aussant
de Lip et Saviem, représentants du pôle
d'opposition aux réformistes. Avec les mêmes
méthodes anti-démocratiques 15 interventions
gênantes sur le rapport d'orientation ont
été refusées pour question de temps.
La main-mise du PS est dénoncée
Le premier rapport, dans son fond réformiste,
présenté par Chérèque : "Une
stratégie d'action pour tous les
métallurgistes" approuve la
nécessité de développer une "grande
force socialiste autogestionnaire" et porte un jugement
positif sur la tenue, des "Assises" ; il est accepté
avec 77% des suffrages exprimés. Mais en tirer la
conclusion que le réformisme l'a emporté
serait ne pas voir l'essentiel, en effet, malgré un
débat étouffé, refusé, où
les délégués n'avaient pas tous les
éléments pour se déterminer, de
profondes contradictions sont apparues.
En effet, les mêmes qui ont
voté le texte d'orientation par 77% des mandats,
rejetaient la main-mise du PS par 30% des
mandats.
Pendant les débats, un
délégué de SAVIEM déclare:
"La CFDT, paraît-il, se défend d'engager le
syndicat au PS, mais alors, pourquoi n'a-t-elle pas
envoyé des protestations aux journaux qui citaient
des responsables CFDT engagés dans ce processus.
Comment se fait-il que l'appel pour les Assises ait
été envoyé à tous les
secrétaires fédéraux pour qu'ils le
signent, comment se fait-il que des Membres du bureau
national aient tenu une réunion clandestine à
ce sujet, n'y invitant pas les responsables non d'accord
? "
Puis un délégué au
nom de 14 syndicats : "Le Bureau National regrette que
cette position sur les Assises ait été
rapide..., mais le regret ça ne suffit pas ! Nous
refusons la politique du fait accompli... nous refusons de
nous allier avec la social-démocratie qui veut se
faire une base ouvrière..." "Dans les luttes,
si le PS brille, c'est bien par son absence" !
(applaudissements de la majorité de la salle alors
que 30% seulement ont voté contre la main-mise du
PS). Ces apparentes incohérences montrent bien que
beaucoup de délégués ayant voté
pour le rapport d'orientation ont des divergences qui vont
se développer.
Pendant les interruptions de
séance, des centaines de
délégués discutent par groupes et
dénoncent le mode de préparation
antidémocratique de ce Congrès. Soyons
sûrs que dans les mois qui vont venir, les dirigeants
réformistes de la FGM seront de plus en plus
isolés.
Congrès de Union
Régionale Basse- Normandie
L'opposition à la main-mise du PS sur la GFDT
était majoritaire à 80%. C'est sur les
questions politiques que s'est principalement
déroulé le Congrès.
La question des Assises a
été largement débattue et à
cette occasion les positions de l'Union Régionale
(U.R.) (Juin 74) ont été
réaffirmées avec force tout au long des
débats, notamment par une intervention du syndicat
PTT de Trouville attaquant vivement la
confédération sur cette question, ainsi
d'ailleurs que les propos de Maire contre Charles Piaget,
intervention saluée par un tonnerre
d'applaudissements. Sur les rapports syndicats/partis de
gauche, un amendement est voté affirmant que, la
gauche au pouvoir, rien ne changera pour les travailleurs,
que "de toute façon, l'affrontement avec la
bourgeoisie étant inéluctable, non seulement
la CFDT ne devra pas faire écran aux luttes des
travailleurs, mais apparaître comme une force de
mobilisation, d'initiative, d'organisation de la classe
ouvrière" ou encore "la transformation de la
CFDT ne se fera que par la prise du pouvoir par les
travailleurs eux-mêmes".
A propos de la tactique de la CFDT dans
l'éventualité d'un gouvernement de gauche, le
texte d'orientation disait que les travailleurs et les
syndicats pourraient accepter de modérer leurs
revendications ou de les échelonner dans le temps.
Une vive opposition s'est manifestée et un amendement
qui supprime cette position a été largement
voté. La méfiance par rapport à la
gauche a aussi été
révélée par une intervention d'un
délégué de Moulinex qui faisant
référence à la période 45/47,
dit qu'on avait toutes les raisons de se méfier et
par rapport à ça, consolider l'autonomie de la
CFDT. Peu de débats sur la question de l'autogestion,
jamais définie clairement. La question du
syndicalisme de masse a fait l'objet d'un large
débat. A cet égard, une expérience
positive a été tentée à la
SAVIEM : tenue régulière de 25 mini-meetings
dans les ateliers qui ont rencontré un succès
important (800 ouvriers ont été réunis)
dans la mobilisation et l'association des syndiqués
de base aux tâches et à la vie syndicales. A
l'exemple de cette initiative, le Congrès a
décidé de lancer le renforcement du syndicat
par les adhésions et par une série
d'initiatives allant dans le sens d'élargir les
noyaux actifs de la CFDT dans les entreprises. Dans le
même ordre d'idées, l'UR a mis sur pied un
comité de soutien interprofessionnel, qui, avec la
participation de toutes les sections, entre en action chaque
fois qu'une lutte se déclenche. Pendant la
grève des postiers, ce comité a
organisé la popularisation, le soutien financier et
un meeting - 6 h pour les PTT - sur le thème:
"postiers-ouvriers, même combat", avec film,
théâtre, expositions, forums.. Le
Congrès a clairement réaffirmé : la
CFDT doit donner les moyens aux travailleurs de prendre
leurs affaires en main, de diriger eux-mêmes leurs
luttes : les divergences entre organisations syndicales
doivent être portées devant les AG de
travailleurs qui tranchent. Le Congrès s'est
prononcé pour les comités de grève et
de soutien là où c'est possible. Voilà
un magistral démenti de l'accord
confédéral CGT. CFDT de juin 74 !
Il a été également
décidé de faire un effort important en
direction des travailleurs agricoles, des retraités,
des femmes, pour les organiser, et pour que dans la CFDT,
ils aient la place qui leur revient.
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