HISTOIRE POLITIQUE DU MOUVEMENT DES FOYERS SONACOTRA (suite)

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Suite è

-III-

Ultime sursaut. Division du C.C., liquidation par les jusqu'au-boutistes.
Fin du mouvement.

..... Cependant depuis quelques temps, les résidents et leurs délégués constatant la débâcle qu'entraînaient les expulsions massives, multipliaient les pressions sur le C.C. Une fraction de celui-ci, la moins engagée dans l'opération syndicaliste, réunit alors de nouveau l'ensemble des délégués de foyers, y compris certains de province comme Reims dans plusieurs réunions début Novembre (il faut remarquer que cela faisait longtemps qu'il n'y avait plus eut de réunions aussi larges de délégués). A l'issue de 3 longues réunions de ce type (où participait l'écrasante majorité des délégués de foyers encore en grève), le C.C. fit connaître publiquement sa nouvelle ligne, le 16 Novembre, dans une réunion où il lut son dernier texte politique publié.
..... C'était un texte en partie de bilan de 5 ans de lutte et qui se terminait pas une modification de la ligne du C.C. quant aux négociations, tenant compte du rapport des forces du moment.
..... Citons les extraites les plus significatifs de ce texte:
"Il y a 5 ans, rompant le silence sur près de 20 ans d'oppression et d'exploitation éhontée, qu'aucun parti de gauche ni aucune organisation syndicale, prétendument défenseurs de la classe ouvrière, n'avaient dénoncé à ce jour, nous, résidents des foyers Sonacotra, ADEF, AFRP 135 000 en juin 78), déclenchions l'une, des grèves les plus longues, les plus dures, mais aussi les plus réprimées de ces dernières années.
..... De ce formidable mouvement de révolte et de refus de l'état d'exception dans les foyers devaient naître:
..-1 Son noyau interne le C.C. (...)
..-2 La plate-forme revendicative générale (...)
..... C'est avec cette plate-forme que, pendant 5 années de lutte, le C.C. a pu:
..... a) Regrouper les ouvriers de 24 nationalités, de 120 foyers Sonacotra, ADEF, AFRP (...)
..... b) Imposer DE FAIT dans les foyers en grève:
...-la liberté face aux gérants racistes (liberté de visite, de réunion, etc).
...-le boycott des règlements intérieurs policiers,
...-la reconnaissance de fait des comités de résidents élus par les A.G. et leur C.C.
...-le blocage des tarifs du loyer pendant plusieurs années.
..... c) Gagner le soutien de plusieurs milliers de travailleurs immigrés mais aussi français pour pouvoir résister victorieusement jusqu'à maintenant à tous les assauts du pouvoir. (...)
..... C'est cela qui a expliqué et explique aujourd'hui l'acharnement avec lequel tout au long de ces 5 années, la bourgeoisie s'est farouchement attachée à briser notre lutte. (...) Mais c'est véritablement au printemps 78, qu'achevant d'unifier son système législatif, il engagera l'assaut définitif contre notre lutte et contre les travailleurs immigrés d'une manière générale, assaut dont les juges marionnettes, racistes au besoin (témoin le juge Fabre) et ses flics enragés se sont chargés d'exécuter les basses besognes contre les résidents en lutte.
..... Cette politique du gouvernement, nous le disons tout haut a reçu le soutien précieux du P.C.F., de la C.G.T., et dans une moindre mesure, de la C.F.D.T. (...)
..... Dès 1975, ils ont tenté sans succès le noyautage des premier comités de résidents en grève, avant de verser dans la calomnie mensongère. (...) .
..... Récemment, à la faveur de l'offensive généralisée du pouvoir, chaussant les bottes de ce même pouvoir, ils proposeront aux résidents la capitulation devant les expulsions par la signature de protocoles d'acceptation de la loi des sociétés gestionnaires (Garges, Aulnay, Nanterre...). Et, comble de trahison.:
...-à Gennevilliers, la C.G. T., sous couvert de bataille contre les "gauchistes", pactisant avec le gérant raciste et les flics, enverra à la prison de Fleury-Mérogis un ouvrier honnête, délégué bénéficiant depuis 3 ans de la confiance de ses camarades, pour extorsion de fonds ! !
....à Villejuif, les militants du P.C.F. remplaceront les flics le soir pour interdire l'entrée du foyer à un délégué expulsé le matin; le délégué était membre du C.C.
...-Enfin, à Garges-Ies-Gonnesses, la municipalité P.C.F. désignera les résidents à la vindicte populaire parce qu'expulsés, ils ont osé camper sur un terrain qui, soit-disant, était destiné à la construction d'une école !
..... Voilà les faits. Ainsi, pour nous, la politique du P.C.F. n'a été ni conjoncturelle ni menée au hasard. C'est la pratique d'un parti et d'une organisation syndicale qui, aujourd'hui comme demain, s'opposeront toujours aux ouvriers partout où ils voudront prendre en main leurs affaires et arracher leurs revendications à la bourgeoisie.
..... La C.F.D.T , quant à elle, a toujours eu un double visage par rapport à notre lutte et par rapport au C.C. (...)
..... Aujourd'hui, après la brutale offensive du pouvoir engagée depuis Juin 78, malgré la courageuse résistance des résidents et de tous ceux qui les ont soutenus contre les feux conjugués de la bourgeoisie et du trio PCF-CGT-CFDT, notre lutte traverse une des périodes les plus dures de son histoire. (...)
..... Face à cette situation difficile, le C.C., refusant tout à la fois les actes de désespoir et la politique du " laisser se dérouler" le rouleau compresseur sur les résidents grévistes -ce qui aurait pour résultat leur écrasement total et l' instauration d'une "paix de cimetière " pendant des dizaines d'années dans les foyers -a adopté, à l'unanimité des foyers qui le composent, les décisions suivantes:
...-chaque comité de résidents pourra ouvrir des négociations avec les seuls représentants des sociétés gestionnaires respectives sur les points (...)
...-à ces points pourront s'ajouter les revendications propres à chaque foyer.
...-aucune signature définitive ne peut être apposée sur un protocole avant accord de l'A.G. et concertation de tous les comités de résidents.
le 13/11/79 "

..... Une liste jointe reprenait l'essentiel de la plate-forme du C.C., mais en ne faisant plus un préalable de la reconnaissance du C.C., et s'engageant à la reprise des paiements aux prix de Juin 79, sous réserves d'expertises. Concessions majeures, susceptibles d'ouvrir la voie à des négociations de chaque Comité de Résidents, qui recevaient la directive d'envoyer une lettre à la Sonacotra pour ouvrir ces négociations.
..... Sursaut tardif, mais juste. Les maoïstes qui étaient partisans depuis la fin de l'été que le C.C. tienne compte de la nouvelle situation et se préoccupe du sort réel des résidents menacés, vont soutenir résolument cette nouvelle orientation.
..... Nous le faisons immédiatement savoir au C.C. dans sa réunion publique, proposant que dès ce moment une bataille pour ces négociations soient engagée au niveau de chaque foyer comme au niveau d'ensemble. Nous le confirmons les jours suivants dans une lettre adressée au C.C. où nous écrivons que la nouvelle orientation du C.C. traduit:
..... "Votre volonté de ne pas renier les acquis de votre lutte depuis 5 ans... Votre volonté de ne pas tomber non plus dans des positions "catastrophistes ", jusqu'au-boutistes qui risqueraient d'amener l'écrasement complet de la lutte des foyers. Cette nouvelle situation traduit à notre avis le fait que vous êtes tout à la fois:
..... -à l'écoute des préoccupations légitimes des résidents, face aux multiplications des expulsions, saisie-arrêts et autres attaques.
..... -que vous entendez jouer un rôle d'organisation dirigeante, c'est à dire tenir compte du rapport de force d'ensemble qui existe aujourd'hui, rapport de force favorable à la Sonacotra et à l'État et qui exige un certain nombre de concessions provisoires (dont celle majeure, d'engager des négociations dirigées par un ou plusieurs comités de résidents sur la base de la plate-forme du C.C. et sous contrôle des A.G. (...)
..... ..... Mais nous pensons que la victoire de votre orientation actuelle va exiger UNE DURE BATAILLE POLITIQUE: -contre la Sonacotra
..... ..... ..... ... -contre le P.C.F.
..... ..... ..... ....-contre les jusqu'au-boutistes. (...)
..... Nous pensons indispensables que votre initiative... soit renforcée par une grande campagne d'ensemble".
..... Cette " dure bataille " pour les négociations ne sera pas menée par le C.C. Car la fraction " immigrés-immigré ", " jusqu'au-boutiste ", mise en minorité au début Novembre va contre-attaquer, s'appuyant sur les syndicalistes dans le collectif constitué après le rassemblement de Garges, va calomnier la nouvelle position du C.C. et tout faire pour saboter cette nouvelle ligne. Ils iront jusqu'à produire des tracts "Des comités de résidents des foyers en lutte ", s'auto-proclamant " les combattifs " du C.C. et PRATIQUANT LA SCISSION. Face à eux, la partie du C.C. porteuse des négociations, de "sauver ce qui pouvait l'être" fut en fait incapable de mener l'offensive. Pour cela il lui fallait des points d'appuis politiques en particulier:

..... -reconstituer une confiance des résidents des foyers dans cette direction du C.C. par un véritable travail de masse dans les foyers, bilan autocritique sur l'absence de débats et de directives de la période précédente.
..... -affirmer clairement que son orientation était liée à une voie d'unité réelle d'unité français-immigrés, s'appuyer sur les forces politiques prêtes à la soutenir réellement, dénoncer les "jusqu'au-boutistes" comme des liquidateurs et des diviseurs.
..... ..... Toutes tâches, décisions politiques non prises en main. Au lieu de cela cette fraction du C.C. tenta de ménager tout le monde et fut en fait paralysée par les "jusqu'au-bou-tistes-syndicalistes" qui avaient comme politique de liquider de fait le mouvement pour mieux se consacrer à leur opération syndicaliste de lutte contre les lois.
..... CETTE DISPARITION DU C.C. EN TANT QUE DIRECTION D'UN MOUVEMENT DE MASSE et la fin de celui-ci comme mouvement d'ensemble FUT DANS LES FAITS SANCTIONNÉ DES LA MANIFESTATION DU 1er DECEMBRE 79 contre les lois. C'est la première manifestation de masse où le C.C. ne rassemble plus aucun résidents (ou quelques dizaines). Cette manifestation sanctionne par ailleurs qu'il y a bien une nouvelle période et qu'il existe 2 voies pour s'opposer aux lois: une de ralliement syndicaliste et d'impuissance, l'autre de l'unité français-immigrés et du combat contre toutes les politiques racistes.
..... ..... Les évènements qui suivirent le 1er Décembre seront marqués par cette nouvelle période, le choix qui se dessinait dès alors entre:
..... * la capitulation derrière la politique raciste du P.C.F. dont on voit les effets dans les foyers où celui-ci réussit à rentrer en force pour négocier à la place des résidents.
..... * l'isolement et le repli sur soi par nationalités, entre immigrés qui n'empêchèrent pas les dernières expulsions et dislocations de foyers comme plus tard R. Rolland-St-Denis, le bastion des "jusqu'au-boutistes".
..... * s'inscrire dans le combat prolongé pour l'unité français-immigrés, ce qui permit à certains foyers d'appliquer la dernière orientation du C.C. et d'obtenir des protocoles d'accord assez favorables comme à Reims, Pierrefitte, Villemomble, Massy...

Les maoistes de l'U.C.F.M.L. dans cette dernière période, devant la disparition de fait du C.C., s'engagera alors en son nom propre dans les combats pour faire sortir de prison Bouaziz, membre du C.C., délégué de Gennevilliers envoyé en prison sur dénonciation calomnieuse de la CGT (le C.C. en tant que tel ne s'est jamais occupé de la défense de Bouaziz). Et l'U.C.F.M.L. apporta son soutien à la voie des négociations, par tracts, discussions avec les résidents, réunions publiques dans des foyers comme Reims, Villemomble, Pierrefitte...

..... Début 1980 donc, le mouvement comme mouvement d'ensemble prenait fin. Fin ne signifie pas défaite. Dans certains foyers, ce fut une défaite, dans d'autres une victoire partielle. Fin signifie qu'une période est terminée, que les problèmes ne sont plus les mêmes qu'en 75, qu'il faut trouver de nouvelles réponses politiques où la question de l'unité français immigrés est centrale, où de nouvelles questions se posent dans les foyers (chômeurs, jeunes...) et dans le lien entre foyers et cités.
..... En s'appuyant sur tous les acquis de ce grand mouvement des foyers, en comprenant les raisons politiques de ses faiblesses.

SUR LE SOUTIEN

INTRODUCTION: IMPORTANCE DE LA QUESTION

..... La question du soutien au mouvement des foyers a été une question importante pendant le mouvement lui-même et l'est également dans son bilan.
....* Car les actions de soutien ont joué un rôle effectif à tel ou tel moment du mouvement, même si le soutien fut dans son ensemble trop limité. Il a permis en particulier certaines des manifestations les plus significatives de la période, qui ont porté comme une question de masse le combat pour l'égalité des droits français-immigrés. De ce point de vue il a ouvert la voie à l'engagement prolongé de forces dans la lutte pour l'égalité des droits, l'unité français-immigrés. C'est en grande partie adossées au mouvement des foyers que se sont constituées et développées les Permanences Anti-Expulsion (P.A.E.).
....* Le bilan de cette question est également important car
..... -à travers sa conception du soutien se traduit une partie de la politique du C.C., en particulier de son rapport à la question de l'unité français-immigrés.
..... -il permet de tirer les leçons de la dynamique, des difficultés et limites d'organisations comme les "Comités de Soutien".
..... -il éclaire enfin le rôle des différentes forces politiques, leur attitude face au mouvement des foyers et à tout ce dont il était porteur de nouveau, d'antagonique à cette société impérialiste.
..... Pour l'avenir du combat pour l'égalité des droits, l'unité de la classe ouvrière internationale de France et l'unité français-immigrés du peuple, il est donc essentiel de tirer le bilan de ce qui fut le soutien au premier mouvement portant ces tâches comme des questions de masse.

- I -

RAPPEL DE QUELQUES MOMENTS SIGNIFICATIFS DU " SOUTIEN "

FIN 75: les résidents du foyer Romain Rolland de St Denis sortent leur PREMIÈRE BROCHURE contenant leurs principales revendications, organisent localement (avec le soutien des maoïstes) un meeting pour discuter avec les habitants de la cité H.L.M. voisine.

DÈCEMBRE 75: L'U.C.F.M.L. sort la première " feuille " NATIONALE de soutien à la grève, la liant au combat prolongé pour l'égalité complète des droits français-immigrés (Voire documents).

21 FÉVRIER 76: PREMIER GRAND MEETING à l'appel du C.C. des résidents des foyers en grève, à la Mutualité de Paris. Plus de 3000 personnes. Beaucoup de résidents, encore peu de gens pour les soutenir. Une seule intervention d'organisation politique, celle de l'U.C.F.M.L. Les autres groupes "marxiste-léniniste" (H.R., P.C.R.) ont également soutenu l'appel, le reste de l'extrême-gauche présente pour la forme. A noter que le P.C.F. appelait à la même heure à une contre-réunion dans un foyer qui est un échec total. L'idée de Comités de Soutien est lancée à ce meeting.

-24 AVRIL 76: à l'appel du C.C., PREMIÈRE GRANDE MANIFESTATION DE SOUTIEN A LA GRÈVE: contre l' expulsion de France de 18 délégués quelques jours plus tôt par la police. 15 000 personnes, beaucoup de résidents mais aussi de nombreux ouvriers et gens du peuple, défilent de Barbès à Ménilmontant. Le mot d'ordre " Français-immigrés, égalité des droits" devient un mot d'ordre de masse. L'extrême-gauche, la CFDT parisienne sont présents. Le P.C.F. ne fait pas mention de la manifestation dans l'"Humanité".

-FIN ÉTÉ 76: organisation par le C.C. d'une première centralisation des comités de soutien existants.

-23 OCTOBRE 76: à l'appel du C.C. DEUXIEME MEETING DE SOUTIEN à la Mutualité. Moins de résidents que le 21 Février, plus de gens en soutien, en particulier des jeunes français. Appel au développement du soutien par le C.C. Seules l'U.C.F.M.L., l'H.R. et l'O.C.F.M.L. appellent à ce meeting. Les autres (PSU, LCR, PCR) ainsi que la CFDT sont absents.

-FIN 76: à l'initiative du C.C. et des Comités de Résidents, PREMIERS APPELS A MANIFESTER AUX PROCÈS pour saisie-arrêts qu'organise la SONACOTRA. Appels locaux, le jour et l'heure du procès. Présence souvent nombreuse des résidents du foyer concerné, qui ne vont pas travailler ce jour-là pour venir. Vu les conditions (heures de travail en semaine) c'est un succès, par contre assez peu de gens pour soutenir (sauf quelques exceptions comme Montreuil le 23 décembre 76 environ 1000 personnes). Une seule manifestation en dehors des heures de travail à Saint-Denis le dimanche 12 décembre 76. Ce type de manifestations le jour et l'heure du procès se multiplieront (plusieurs dizaines en tout) aussi bien contre les saisie-arrêts que plus tard pour les premières expulsions de foyers.

-FIN 1976: CREATION DE LA COMMISSION CULTURELLE, chargée de soutenir l'animation culturelle dans les foyers. Assez créatrice au début, elle participe entre autres à la réalisation d'un montage-diapo sur la grève, elle contacte des groupes d'accord pour se produire dans les foyers en particulier lors des JOURNÉS PORTES OUVERTES qui seront organisées pendant toute la grève par des Comités de Résidents de foyers.

-20 MARS 1977: RETOUR DES DELEGUES expulsés de France, après l'annulation par le Conseil d'Etat des arrêtés d'expulsion. Pour leur accueil victorieux à Orly, le C.C. appelle à une "grève générale" mais sans aucune préparation. Des résidents se rendent à Orly mais pas de mouvement d'ensemble.

-2 AVRIL 77: 3ème et dernier MEETING CENTRAL parisien pour fêter le retour des délégués expulsés. Un peu moins de résidents que dans les meetings précédents (2000 en tout), meeting d'ailleurs marqué par le problème de l'arrêt de la grève dans certains foyers et l'extension dans d' autres.

-AVRIL 77: PREMIER NUMERO DU JOURNAL DU C.C. " Foyers Sonacotra en lutte " , 2 ans après le début de la grève. II y aura en tout 5 numéros assez espacés (Av 77, Juin 77, Juin 78, Aout 78, Janv. 79).

-11 JUIN 77: PREMIERE FÊTE DE L'UNITÉ FRANÇAIS. IMMIGRÉS à Champigny, toute une journée. Spectacle de groupes culturels immigrés et français, montrant que la grève peut être aussi un point d'appui à un échange culturel entre français et immigrés. Présents 2 à 3000 personnes, majorité d'immigrés des foyers. La "tenue" politique est plus faible, pas de débat sur la grève ou le soutien, pas d'intervention politique centrale du C.C.

-19 NOVEMBRE 77: MANIFESTATION CONTRE LES PREMIERES MESURES STOLÉRU (arrêt de l'immigration, interdiction de l'immigration familiale, le "million" pour le retour). Précédé d'une campagne pour l'abrogation de ces mesures de l'U.C.F.M.L. et des C.P.A.C. L'unité pour l'appel à cette manifestation se fait autour du C.C. qui l'impose en particulier aux courants trotskystes et syndicalistes. Ces derniers manoeuvrent en vain pour reporter la manifestation, la mettre sous direction C.F.D.T (qui ne viendra pas à la manifestation). 8 à 10 000 personnes défilent, depuis Barbès avec une présence importante d'ouvriers, employés, jeunes, femmes français. Mots d'ordre contre les mesures Stoléru, pour la victoire de la lutte des foyers, pour l'égalité des droits. L'U.C,F.M.L. appelle à la création des P.A.E., organisation anti-raciste, d'unité français-immigrés, contre les expulsions, les attentats et les décrets racistes.

-10-11 JUIN 78: DEUXIEME FÊTE DE LA RENCONTRE FRANÇAIS.IMMIGRÉS à Chelles. A peu près autant de monde que la première, moins de français mais plus de résidents de province (voir plus loin). Moment pour les camarades immigrés de faire vivre leur propre culture, mais aucun débat politique (moins de panneaux au stand que la première fois).

-8 JUILLET 78: MANIFESTATION PARISIENNE CONTRE LA RÉPRESSION DE LA GRÈVE, appelée par le C.C. Malgré la date (début des vacances scolaires), 4 à 5000 personnes dans la rue. Cette manifestation est la réponse à Stoléru qui venait de déclarer "avant la fin de l'été, la grève sera terminée". Présence des forces d'extrême-gauche, absence de la C.F.D.T. Le P.S. envoie une délégation d'"huiles" (Mauroy, Sarre, Le Garrec) au début de la manifestation, ils font un petit discours confus puis repartent.

-12 AOUT 78: MANIFESTATION A METZ de plus de 1000 personnes, contre les premières tentatives de fermeture de foyers dans l'Est. Dans cette période, la Sonacotra concentre ses attaques sur la province, surtout l'Est où de nombreux foyers se sont mis en grève depuis 77 (Metz, Thionville, Florange, Strasbourg, Longwy...). Malgré l'isolement plus grand encore en province qu'à Paris des foyers, les résidents vont faire preuve de leur détermination en multipliant manifestations (2000 personnes encore à Metz le 28 Octobre 78, à Strasbourg...), meetings (comme à Thionville le 23/09), journées portes-ouvertes (Florange...) et cela malgré aussi une répression policière brutale ( comme au foyer de Woippy le 18 Octobre).

-18 NOVEMBRE 78: 4ème ET DERNIÈRE GRANDE MANIFESTATION PARISIENNE à l'appel du C.C., contre les procès et menaces d'expulsions qui se sont multipliées pendant et depuis l'été, contre la prétendue "semaine du dialogue" de Stoléru .Manifestation massive (15 000 personnes, la plus importante avec celle du 24 Avril 76), avec une présence significative de détachements organisés de la jeunesse lycéenne et étudiante (c'est l'époque des circulaires Bonnet contre les étudiants étrangers). La C.F.D.T. parisienne est également présente.

-HIVER 78/79 -PRINTEMPS 79: L'Etat durcit la répression par le contrôle plus strict de l'appareil judiciaire, qui multiplie les décisions d'expulsions. Face à cela sont organisées des ripostes de masse mais au seul plan local ou régional (la plus forte, le 23 Décembre 78, de 2 à 3000 personnes sillonnant Nanterre et ses environs contre la menace d'expulsion de foyers de cette région). Initiatives en province où les expulsions se multiplient (2 Avril, Strasbourg), et même d'un Comité de soutien en son nom propre (21 Avril à Montreuil). Mais il n'est plus organisé, par le C.C., d'initiatives centrales.

-16 JUIN 79: MANIFESTATION CONTRE LES DECRETS ET PROJETS DE LOIS RACISTES DE STOLERU-BONNET à l'appel de l'U.C.F.M.L., des C.P.A.C., des P.A.E., de l'O.C.F.M.L., de l'U.E.G. (Etudiants Guyanais) et de l'U.N.E.E.C.I. (Etudiants de Côte d'Ivoire). Le C.C. accepte que l'on fasse l'appel dans les foyers mais ne s'associent pas à la manifestation. Plusieurs milliers de personnes, français et immigrés, contre les lois racistes, pour l'Egalité des droits et le soutien à la lutte des foyers.

-23 JUIN 79 ET 1er JUILLET 79: 23 Juin, expulsion du foyer de Garges-les-Gonesses. Les résidents campent autour face aux C.R.S., des résidents d'autres foyers viennent les soutenir (mais sans appel central du C.C.). Les maoistes, les P.A.E., dès le 24 Juin organisent une première manifestation de soutien et surtout le 1er JUILLET, PLUS DE 1000 personnes manifestent de St-Denis jusqu'au terrain de Garges. Cette maRifestation est également appelée par 1'O.C.F.M.L. (et de quelques autres ralliés P.C.R., L.O...). Les C.R.S. se retireront du terrain 2 jours plus tard.

-7 JUILLET ET 29 SEPTEMBRE 79: Le C.C., qui n'a pas appelé à la manifestation du 1er Juillet, organise avec des sections syndicales C.F.D.T. et des organisations immigrées, et sans les organisations politiques, deux rassemblements à Garges, alors que les flics sont déjà partis. Rassemblements où il n'est rien proposé pour la poursuite du mouvement de grève, la lutte contre les expulsions ou les réintégrations; il n'est question dans ces rassemblements que des projets de lois racistes, pas de la défense du mouvement des foyers durement attaqué.

-AOUT/SEPTEMBRE 79: Quelques résistances locales aux expulsions qui se multiplient, rassemblements où les maoïstes sont souvent présents (Aulnay, Gennevilliers, Sannois...). Mais le C.C. ne fait plus de propositions.

-13 OCTOBRE 79: Après avoir organisé fin Septembre (avec l'O.C.M.L.F.) une réunion contre la menace d'expulsion d'un délégué du C.C. -Konaté ., l'U.C.F.M.L. appelle (avec les P.A.E.) à une première manifestation contre l'emprisonnement de Bouaziz, délégué du foyer du Port de Gennevilliers, emprisonné après des manoeuvres crapuleuses de la mairie P.C.F. et de la C.G.T. Ce sera le lancement d'une campagne avec tracts, brochures, films, manifestations... qui aboutira à la libération de Bouaziz le 9 Avril 80. Le C.C. ne se mobilisera jamais pour cette libération, alors que Bouaziz était membre du C.C.

-1er DÉCEMBRE 79: Manifestation contre les projets de lois racistes, où syndicalistes et C.C. refusent de défiler unitairement avec les maoistes. Deux cortèges séparés; dans celui du C.C. et syndicats, il n'y a presque plus de résidents des foyers ce qui sanctionne LA FIN DE FAIT DU MOUVEMENT ET DU COMITÉ DE COORDINATION.

 - II -

CONCEPTION POLITIQUE DU COMITÉ DE COORDINATION

..... Dans la première période de développement et d'organisation de la grève, les résidents des foyers sont principalement occupés par l'élargissement de la grève, la lutte contre les ennemis intérieurs (offensive du P.C.F., Amicales...). Ils affirment pourtant que leur lutte fait partie de toute la classe ouvrière, du combat pour son unité, du combat pour l'égalité des droits français/immigrés; quelques initiatives de propagande locales sont prises (R. Rolland). Il y a alors accord pour que les organisations politiques qui soutiennent le mouvement (fort peu il est vrai à cette heure-là) l'expliquent dans les foyers, soutiennent l'extension de la grève. Au meeting du 21 Février 76, le C.C. propose aux forces politiques qui l'ont soutenu d'exprimer leur position à la tribune.

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..... A ce meeting, le C.C. lance l'idée des Comités de Soutien. Mais ce n'est qu'après les expulsions de délégués d'Avril 76 et la grande manifestation de riposte qu'ils deviendront une réalité. Jusqu'à ce moment-là, le C.C. affirme son rôle de dirigeant dans des initiatives de soutien tout en discutant avec les organisations politiques du rôle de chacun dans le soutien, comment organiser les appels comme celui de la manifestation. Dans les premiers comités de soutien qui se créent, d'assez nombreux résidents y participent.
..... Après l'été 76, après l'échec des premières négociations avec la Sonacotra, il se produit une rupture, une transformation dans la conception politique du C.C. en ce qui concerne les questions du soutien. Quelles sont les raisons de cette transformation ? A notre avis. plusieurs raisons politiques se sont conjuguées. Nous les exposerons plus loin.
..... Caractérisons d'abord cette nouvelle conception politique du C.C.: son point politique principal est le REFUS DU C.C. D'ENGAGER MASSIVEMENT LES RESIDENTS DES FOYERS EUX-MEMES DANS L'ORGANISATION D' UNE VERITABLE CAMP DE SOUTIEN. Ce refus, ce non-engagement vont avoir de nombreuses conséquences qui ne vont que s'amplifier tout au long du mouvement:

..... ** LA PREMIERE CONSÉQUENCE VA ETRE LE PEU DE VIE INTERNE, DE DYNAMIQUE DE RALLIEMENT DES COMITÉS DE SOUTIEN.
..... Certes, dans chaque Comité de Soutien sont présents des membres des comités de résidents, dans le Comité de Soutien central, il y a présence et direction du C.C. Mais cette direction, nécessaire, va se transformer en contrôle méfiant de toute initiative proposée. Car les Comités de Soutien vont souffrir de l'absence significative en leur sein de la force du mouvement lui-même, les résidents.
..... Une "plate-forme de soutien" ne traduit pas à elle seule la force d'un mouvement aux yeux des gens qui pourraient être mobilisés à soutenir cette grève. Il est facile d'imaginer la force de ralliement qu'aurait pu avoir une dizaine de grévistes intervenant avec le comité de soutien sur un marché, aux portes d'une usine ou dans un lycée. Au lieu de cela, les quelques personnes inorganisées rentrées dans les comités de soutien n'avaient que peu ou pas du tout de rapport avec les grévistes eux-mêmes. : les journées "portes ouvertes" organisées de temps en temps ne pouvaient faire office de lieu prolongé et solide entre gréviste et gens du soutien.
..... Dans ces conditions, les appels répétés du C.C. pour que les comités de soutien soient des "organisations de masse" et pas des " cartels d'organisations" n'étaient que des positions de principe. Leur efficacité réelle était fortement limitée par le refus du C.C. lui-même de donner aux comités de soutien une dimension de masse par la présence de nombreux résidents. Et cette faiblesse ne va que renforcer la conception du C.C. de considérer les C.S. comme lieux de regroupement de ceux destinés à remplir les tâches techniques de soutien et de propagande ( et uniquement cela). Il n'est pas question de négliger les tâches matérielles de soutien (collage d'affiches, distribution de tracts, service d'ordre, voitures pour les déplacements, soutien financier...). Mais ne voir que ces tâches revient à considérer les membres du soutien que comme "des bras à utiliser". Avec en plus un mépris parfois ouvert de certains membres du C.C. vis à vis de ces gens qui n'en "font pas assez". Rien d'étonnant alors à ce que de nombreuses personnes quittent les C.S. ou que des organisations qui y avaient investi des forces significatives se révoltent. Exemple "O.C.M.L.F-Drapeau Rouge" à l'origine de nombreux CS en Bretagne (ce que le C.C. en son temps considérera comme "exemplaire" du soutien) qui finira par envoyer une lettre ouverte au C.C. s'indignant de sa volonté "d'utiliser les militants 24h sur 24 ...tout en ayant honte du soutien des organisations politiques" .

..... ** DEUXIEME CONSÉQUENCE: LA MÉFIANCE PAR RAPPORT AUX INITIATIVES DES ORGANISATIONS POLITIQUES.
..... Dans certains cas, même, la tentative de contrôler leur travail propre. Le C.C. avait, après l'été 76, déjà interdit de discuter avec les résidents des foyers, d'intervenir dans les foyers, aux organisations soutenant pourtant la plate-forme du mouvement et la direction du C.C. (Cette interdiction soi -disant destinée à empêcher que les résidents soient influencés par des ennemis de la grève et que la direction du C.C. soit affaiblie, n'empêchera en rien à la fin du mouvement l'entrée en force du P.C.F. et de la C.G.T. dans les foyers pour casser la grève). Mais en plus, le C.C. refusera à de rares exceptions des initiatives communes ou mêmes des débats communs.
..... ..... Le C.C. aura en fait une double attitude:
..... -d'un côté tendance à considérer les membres des organisations comme devant uniquement populariser ses propres directives et textes et regardant avec méfiance toute initiative autonome, d'élargissement du soutien, vite baptisé "tentative de récupération ou de publicité".
..... -de l'autre, récriminations du C.C. critiquant le peu de " français" amenés par les organisations dans le soutien mais en refusant de débattre des raisons politiques de ces difficultés.
..... Il était juste que le C.C. soit vigilant de sa propre direction sur le mouvement, de son autonomie d'où il tirait une partie de sa force ( et qui permit par exemple son rôle d'unificateur pour l'appel à la manifestation contre les premiers décrets Stoléru).
..... Il était erroné de se méfier à priori et mépriser le travail politique propre des organisations qui prenaient des initiatives en leur nom pour élargir le soutien. Car c'était ne pas voir que le soutien réel, c'était aussi le rôle du mouvement des foyers dans l'ensemble de la situation politique en France à cette époque. Donc des questions politiques comme les leçons pour tout le peuple, de la force d'un mouvement autonome et opposé au P.C.F. et à son embrigadement, l'importance de l'unité politique entre ouvriers français et immigrés...
..... L'exemple le plus clair des conséquences de cette position de méfiance fut donné à Garges, le 1er Juillet 79. Après 7 kms à pied, une manifestation de plus de 1000 personnes en plein été appelée principalement par l'U.C.F.M.L, les P.A.E. et l'O.C.F.M.L. arrive au camp de Garges pour soutenir les résidents expulsés. Moment d'enthousiasme et d'unité entre résidents et manifestants. Mais un des délégués du C.C., accueillant la manifestation, osa dire qu'il fallait maintenant COMMENCER (!) le travail de soutien; considérant que cette manifestation, ces 1000 personnes n'existaient pas ! Et que le seul travail était d'appeler les organisations syndicales! Alors que justement ces 1000 personnes venaient témoigner leur soutien à des résidents tenant bon face aux flics, malgré les calomnies du P.C.F. et de la C.G.T. !...

..... ** ON EN ARRIVE A LA TROISIÈME CONSÉQUENCE, de plus en plus forte au fur et à mesure de la grève. La ligne du C.C. QU'IL N'Y AVAIT D' ALLIANCE INTÉRESSANTE QU'AVEC LES SYNDICATS, que ceux qui le soutenaient devaient consacrer leurs efforts à convaincre les sections syndicales, surtout C.F.D.T. Liée à des déclarations en direction des résidents que " tous les français étaient racistes", cette position faisait l'analyse que seuls les syndicats pouvaient avoir de l'influence sur les ouvriers français. D'où les tentatives répétées du C.C. pour s'allier avec ces forces, pourtant opposées sur le fond à cette grève, d'où ses échecs répétés.
..... Car les syndicats étaient contre les justes revendications de la grève et plus encore contre une direction autonome comme le C.C. On le vit bien quand vers la fin du mouvement (printemps-été 79), le C.C. privilégia les contacts avec la C.F.D.T., puis ses sections syndicales: ce sont ces dernières qui imposèrent au C.C. des concessions comme le refus d'unité avec les organisations politiques, l'arrêt des critiques contre les ennemis comme le P.C.F... Et tout cela en échange d'une fausse mobilisation des sections syndicales (et d'un refus de la C.F.D.T.)... mais d'une vraie démobilisation des résidents. Plus le C.C. considérait le soutien comme une question d'unité avec des organisations syndicales seulement, d'unité entre appareils ( nous le C.C. les immigrés, vous les syndicats les français), plus il eut tendance à mépriser le travail de masse, le débat prolongé avec le reste du peuple (français, familles immigrées). Et cette absence de confiance dans le peuple finit par s'appliquer aux résidents des foyers eux-mêmes, dans certains foyers il n'y eut plus de discussions ni de mobilisations. Mais une grande faiblesse quand Sonacotra et P.C.F. attaquèrent.

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..... Bien sûr, le C.C. prit des initiatives positives sur l'organisation du soutien: la création même des C.S., la participation de résidents aux appels aux grandes manifestations, la recherche du soutien le plus large (y compris de sections syndicales) sous sa direction et la reconnaissance de la plate- forme du mouvement. Et la situation politique d'ensemble était difficile pendant la grève des loyers.
..... Mais la critique de ces positions erronées est importante; car au-delà des conséquences négatives sur le soutien lui-même, elles traduisent des positions fausses mais encore présentes aujourd'hui. L'absence de mobilisation des résidents dans le soutien montre que le C.C. n'avait pas une compréhension complète de ce qui fait la force d'un mouvement de masse; qu'à côté de la justesse de ses mots d'ordre, la mobilisation des gens concernés eux-mêmes est indispensable pour une vraie mobilisation de soutien. Pourquoi cette absence de mobilisation, ce refus du C.C. Deux raisons principales à notre avis:
..... -1) Mobiliser les résidents dans le soutien, c'était les plonger dans les nécessaires débats politiques sur la situation d'ensemble en France, en particulier sur les usines. Et débattre de leur rôle à eux ouvriers immigrés pour transformer cette situation. Or le C.C. a craint que ce débat, ce travail, remettent en cause sa direction politique sur le mouvement lui-même. Il avait comme conception de créer un " mur" entre résidents et le reste du peuple (par exemple, il interdira aux résidents d'aller diffuser aux portes des usines). Pensant que les seules "alliances" possibles étaient celle d'organisation à organisation, "représentant" chacune une fraction du peuple, d'où ses tentatives d'alliance avec les syndicats "des ouvriers français", lui étant l'organisation des "ouvriers immigrés".
..... -2) UNE CONCEPTION DOMINANTE à partir de l'été 76 au sein du C.C. D'UNE OPPOSITION A L'UNITÉ POLITIQUE ET ORGANISÉE DE L'UNITÉ FRANÇAIS- IMMIGRÉS, ce que l'on appelle le courant " immigrés-immigrés". Ceci s'explique en partie par des raisons objectives. Quand le mouvement des foyers a commencé, travailler, défendre l'unité organisée français-immigrés était une position de classe, antagonique à l'ensemble des forces bourgeoises de cette société. C'était mettre en avant le mot d'ordre d'"unité de la classe ouvrière internationale de France" contre toutes les politiques de divisions, surtout celle du P.C.F. Et le mouvement des foyers, par son ampleur, fit de cette question une question de masse où les ouvriers immigrés étaient à l'avant-garde.
..... Mais dans cette situation, le C.C. eut une position ambigüe. D'un côté, il ne prendra pas en main les tâches politiques de cette unité de classe, ce qui était juste dans la mesure où le C.C. tenait sa force d'être la direction d'un mouvement de masse particulier. Mais en même temps, il tenta d' INTERDIRE DE FAIT aux résidents comme aux organisations politiques de travailler à cette unité politique, d'où sa tendance de plus en plus forte de se considérer lui comme l'organisation "des immigrés" (avec ceci dit un désintérêt complet vis-à-vis de l'immigration qui n'habite pas en foyer).
..... Cette double conception du C.C. le fit évoluer d'une position au début de la grève où il était affirmé que cette grève participait de la "lutte pour renforcer l'unité de la classe ouvrière" à une position dans la deuxième période du mouvement ou de fait le C.C. ne considérait l'unité français-immigrés que comme uniquement le "soutien", la solidarité dans la fin du mouvement parlaient de l'absence d'"aide" des français, n'ayant jamais vraiment pu débattre de leurs propres tâches et responsabilités pour travailler à cette unité politique. Ceci explique aussi pourquoi le C.C. considérait d'un "mauvais oeil", voire s'opposait pour une partie de ses membres, aux organisations qui travaillaient à l'unité politique organisée entre français et immigrés.

- III -

LES COMITÉS DE SOUTIEN

..... Nous avons dans une partie précédente déjà analysé ce qui faisait à notre avis une des raisons essentielles de la faiblesse des Comités de Soutiens. Nous ne faisons ici que rappeler et préciser certains points supplémentaires sur leur travail et leurs difficultés.
..... Des C.S., il yen a principalement eu autour des foyers en grève les plus importants de la région parisienne (Montreuil, St Denis, Massy, Ivry...), de province dans l'Est en particulier (Strasbourg, Thionville...), Dijon, Lyon aussi. Il y en aura eu une vingtaine. Les C.S. les plus importants regroupaient une vingtaine de personnes, militants d'organisations politiques et dans certains cas des gens inorganisés.
..... Ils avaient donc une "plate-forme de soutien" (Voir documents) qui marquait la direction du C.C. Celle-ci était en plus renforcée par la direction des C.S. par les délégués des foyers liés au C.S.
..... Leur rôle fut principalement de populariser le mouvement par des interventions de propagande (surtout les marchés, quelques usines, lycées...). Et de soutenir les initiatives du C.C. ou des Comités de Résidents (manifestations, journées portes-ouvertes...).
.... ..... . Les C.S. ont permis une plus grande popularisation du mouvement. Ils ont été dans certains cas un point d'appui pour organiser des gens autour des actions de soutien.
..... Mais en même temps, ils ont eu une grande difficulté à stabiliser des nouvelles personnes (autres que des militants) dans le soutien, ils ont joué un faible rôle dans les moments décisifs de la grève (saisie-arrêts, expulsions...), ils ne furent que très peu des lieux véritables d'unité français-immigrés et en général, les gens les composant ne continuèrent pas le combat prolongé pour l'égalité des droits quand le mouvement prit fin. Pourquoi ?
..... * Les C.S. n'avaient pas la possibilité d'initiatives autonomes, ils étaient en fait seulement des courroies de transmissions des appels du C.C. Ils n'avaient pas de vie, de dynamique réelle d'une organisation pouvant rallier de nouvelles personnes. Pas de débat politique interne sur l'importance pour chaque fraction du peuple de soutenir la grève et ce que cela leur apportait (par exemple que les foyers soient des points d'appui aux gens dans une cité pour se réunir, faire leur unité, passer des films...).
..... ..... Sur les raisons des difficultés de travail.
..... * Pas de matériel propre d'intervention, de journal central. Le journal des foyers eut 4 ou 5 numéros, essentiellement d'information du C.C.
..... * Pas de centralisation, d'échanges d'expériences entre eux, sous direction du C.C. Les réunions centrales étaient surtout destinées à l'exposé par le C.C. de ses demandes.
..... * Enfin, pas de véritables initiatives particulières. Il dut y avoir dans toute la France et en 4 ans au maximum quelques initiatives d'appels de C.S. à des réunions en son nom, en fait dans les lieux où il n'y avait pas de grève comme la Bretagne. (Rennes...).et une SEULE (Montreuil) dans une région ou il y avait grève. C'est peu. Et pas d'interventions dans les meetings centraux du C.C., pas de DEBAT PUBLIC sur l'organisation du soutien.
..... Les C.S. ne pouvaient rallier beaucoup de monde en n'étant pas une véritable organisation. Or le C.C. les considérait principalement comme des exécutants, non le lieu d'unité politique de TOUS (résidents et gens soutenant) ceux qui considéraient comme important et juste cette grève dans la situation actuelle en France. On peut signaler le peu de cas que faisait finalement le C.C. des C.S. dans le fait qu'à la fin du mouvement, quand il chercha à faire alliance avec la C.F.D.T et d'autres organisations immigrées, il ne leur proposa pas de rentrer dans les C.S., mais discuta avec ces organisations directement en excluant les C.S.
..... Il est vrai que les C.S. ont plutôt existé dans une phase défensive du mouvement, pas dans sa période de batailles offensives, qu'ils étaient dans une période de "guerre de positions", d'initiatives locales, pour " tenir" .
..... Il est vrai enfin que la grève des foyers était porteuse de l'égalité des droits entre français et immigrés, était une vraie lutte d'une fraction de la classe ouvrière et que dans cette période d'embrigadement du peuple par le "programme commun", la soutenir était un engagement politique important.
..... Mais toutes ces raisons ne font que renforcer la nécessité de concevoir les C.S. comme des LIEUX D'ALLIANCE entre ouvriers immigrés et autres détachements du peuple (gens des cités, jeunesse, démocrates... ) et comme une organisation ayant ses propres initiatives, responsable de son travail sous direction du C.C. C'est le sens des propositions que nous avons faites au C.C. dans une réunion commune, en particulier:
..... -que les C.S. aient leur propre matériel central (journal) et local d'intervention, rendant compte des initiatives prises, des progrès et des difficultés du travail.
..... -que les C.S. soient responsables d'initiatives particulières, comme par exemple des meetings locaux ou même des meetings parisiens de soutien.
..... Bien sur ces propositions auraient amené, à l'intérieur des C.S. des débats sur l'importance du mouvement des foyers dans l'ensemble de la lutte de classes en France, l'intérêt politique pour les gens des cités, les ouvriers d'une usine, les jeunes, de soutenir cette grève.
..... Cela aurait pourtant permis de dépasser le " débat de cartel d'organisations politiques à l'intérieur des C.S." dont se plaignait le C.C. mais dont la raison principale était le peu de dynamique interne des C.S. eux-mêmes. 

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