Quand la bourgeoisie parle des khmers rouges, elle
parle d'horreur ou de génocide..., le P " C " F en
parle aussi du même point de vue, et parle de
stalinisme ou de maoïsme....
Tout ce sang, toute cette horreur mise en avant
ne doit pas nous empêcher de réfléchir
sereinement et de faire nous-même notre propre bilan.
Bilan qui ne se place aucunement sur le terrain de la
bourgeoisie. Ce bilan ne se fait pas n'importe quand, ni par
n'importe qui.
(ce dossier d'EP-Infos a été
réalisé par des membres du Comité de
Rédaction).
Que disent-donc les marxistes-léninistes ?
Nous devons faire une critique des Khmers
rouges du point de vue politique, et en tant que
communistes. Cette partie de l'histoire humaine ne doit
être ni déformée ni
occultée.
La question de la politique mise en pratique
par les khmers rouges entre 1975 et 1978, n'a pas souvent
été traitée par les communistes
marxistes-léninistes.
En fait, il n'y a pas tellement de textes
(marxistes-léninistes) d'analyses sur cette question.
Si des camarades ou des lecteurs d'EP-INFOS ont plus
d'éléments qu'ils nous le disent.
Partisan
147 (n°2) avril 2000 a publié un article
signé de A. Desaimes et J. Labeil, dans la rubrique "
Socialisme Affronter les leçons du passé ",
sous le titre "
Questions
et réponses sur les Khmers Rouges ".
L'article de Partisan, n'insiste pas
suffisamment sur :
-- le rôle essentiel de
la
théorie des 3 mondes, dans le soutien de
l'époque.
-- l'analyse des différentes
périodes d'actions des Khmers rouges, ni
d'articulation historique.
Dans l'introduction de l'article de Partisan, il est rappelé que
" la guerre et les massacres au Cambodge au cours des
années 70 reviennent au premier plan de
l'actualité. Il nous faut à la fois corriger
les nombreuses bêtises qui se disent toujours à
ce propos, mais aussi accepter de regarder l'Histoire en
face. En effet, en 1975, tous ceux qui se
prétendaient progressistes et révolutionnaires
ont fêté l'arrivée des Khmers Rouges au
pouvoir et beaucoup (dont le courant
marxiste-léniniste dont nous faisons partie) ont
fermé les yeux sur les massacres qui ont suivi.
"
La notion de soutien, apparaît de nombreuses fois
dans l'ensemble de l'article. Cette notion en est même
le sujet central.
-du soutien de la population au soutien
populaire (1)
-du soutien à une révolution populaire au
soutien à une organisation réactionnaire
(2)
-du soutien aux erreurs graves (3)
-du soutien des Maoïstes à l'autocritique du
soutien (4)
Nulle part dans l'article les auteurs n'indiquent en quoi
a consisté le " soutien " des orgas ML de
l'époque.
- Le soutien, quel soutien
?
-
Parler d'une façon
indifférenciée de soutien aux Khmers Rouges
n'est pas juste. L'article de Partisan de ce point de
vue-là, ne nous éclaire pas. Le " soutien "
des organisations ML en France, a été
surtout idéologique et politique. Il a
été parfois financier (collecte). Il a
consisté aussi, à appuyer la reconnaissance
diplomatique du régime Khmer Rouge au Cambodge
(appelé aussi Kampuchéa
Démocratique). Pour comprendre et ne pas tout
mélanger, il importe de bien situer de quelle
période on parle. S'agit-il d'avant la prise du
pouvoir (avant 75) ?, s'agit-il de la période
75-79 ?, s'agit-il de la période 79
(à
partir de l'intervention Vietnamienne) ?
L'intro de l'article de Partisan nous indique qu'il
s'agit de l'après 1975. Précisons que le
Vietnam est intervenu en Janvier 79 au Cambodge, sous le
motif de lutter contre les crimes perpétrés
par le régime des Khmers Rouges (Kampuchéa
Démocratique).
La justification du soutien par
les marxistes-léninistes, quand la question s'est
posée au moment de l'intervention
du Vietnam au Cambodge en 79, était liée à la
situation internationale et l'indépendance
nationale au Cambodge. Le soutien de l'époque
était presque exclusivement la conséquence
de l'analyse et des interprétations de la
théorie des 3 mondes (peut être devrons-nous
expliquer dans un prochain n° d'EP-I
en quoi
consistait cette théorie ? ).
À la question, les Khmers Rouges
étaient-ils " maoïstes " ?, les 2 auteurs
après avoir répondu par la négative
et expliqué que les KR avaient condamné la
révolution culturelle en Chine, notent rapidement
: " Pourtant, il ne sert à rien de tourner
autour du pot : la confusion a été
renforcée car les Khmers Rouges ont
été soutenus par la Chine, bien avant la
mort de Mao Tsé Toung. Pour des raisons de
géopolitique peu glorieuse. "
Dans ce dossier d'EP-I, développons 3
aspects pour une analyse marxiste-léniniste
:
A- Comment différents organes de presse
parlaient du Cambodge en 1975 ?
B- La question du soutien " Pour des
raisons de géopolitique ".
C- Les analyses critiques de la part
de groupes ou partis
marxistes-léninistes.
|
- A- Comment différents organes de presse
parlaient du Cambodge en 1975 ?
Avant d'aborder la question du soutien " Pour des
raisons de géopolitique " ou les analyses
critiques de la part de partis marxistes-léninistes,
il nous faut préciser comment différents
organes de presse parlaient du Cambodge en 1975 ?
Dés 1975 (mais aussi avant
pour certains...) un " soutien " tacite existait sur la
question cambodgienne de la part des partis
marxistes-léninistes de l'époque et de tout un
courant progressiste (qui avait dénoncé les
crimes US pendant la guerre du Vietnam).
À la fin de la guerre du Vietnam,
l'impérialisme américain a subi une
défaite qui lui a été imposée
par un tout petit peuple.
Quand la " presse " se
déchaîne
Les vaincus déclenchent une
campagne médiatique de haine contre ceux qui ont "
oser lutter , oser vaincre ". La " presse " se
déchaîne de L'AURORE au FIGARO en
passant par le torchon fasciste MINUTE qui en
couverture annonce en titre " Sommes-nous encore capables
de défendre nos nationaux ? " "les otages de
Phnom Penh " " chantage au silence. Massacres en
ville. Un camouflet pour la France " " Quatre
millions de citadins jetés sur les routes. Le
Cambodge livré à une impitoyable
révolution paysanne. 300 cadavres, gorge ouverte, sur
le marché de Phnom Penh ".
Les communistes marxistes-léninistes
devant ce déferlement de haine de la part de ceux qui
ont constamment fait silence sur la réalité de
cette guerre (massacres, bombardements, destruction au
napalm etc...) réagissent dans leurs organes de
presse d'alors. L'hebdomadaire FRONT ROUGE organe
central du PCRml (5) dans son
n°156
du 15 Mai 1975, riposte en publiant en
page
8 plusieurs articles "
Dénonçons
les calomnies et les ragots de la presse bourgeoise
! " "
La
presse bourgeoise et le Cambodge: intoxication,
falsification " "
De
curieux 'otages'... " "
Minute:
Pour une opération 'Talon Wise'...'Made in
France' (6) ".
" La Gueule Ouverte "
critique le FIGARO
L'hebdomadaire écologiste "
La Gueule Ouverte " publie un
article signé Arthur dans son n° 53 de Mai 1975,
intitulé " MAI 75 AU CAMBODGE ", cet
article critique la campagne de la " presse "
française et D'Ormesson patron du FIGARO, il
dénonce déjà les fausses informations,
les " médiamensonges " bien avant la guerre du golfe
ou Timisoara !
Voici de larges extraits de ce qu'il
écrivait " Depuis huit jours, la presse
française chauffait ses lecteurs à blanc : au
Cambodge, il se passait des horreurs pas racontables, des
pogroms de blancs tout-à-fait insoutenables. La vie
des " otages " était en danger. On ne pouvait rien
vous dire encore sous peine d'extermination des
réfugiés de l'ambassade. Mais dés que
le dernier rat aurait franchi la porte de la dernière
écoutille, alors là, vous alliez être
servis. On l'à été. Vendredi matin, la
première édition du Figaro levait enfin la "
censure humanitaire " que respectaient nos zenvoyés
spéziaux : " 300 cadavres, gorges ouvertes, sur le
marché de Phnom Penh , des filles violées au
tesson de bouteille ". C'était du grand " Hara- Kiri
". Le figaro de vendredi ne fut pas mis en vente en
province. On tira vite fait sur une seconde édition
expurgée de ces fracassantes
révélations. Car c'était une fausse
nouvelle. Le journal de M. D'Ormesson avait pris ses
désirs pour des réalités. M. D'Ormesson
apologiste de la haine, du meurtre et du mensonge, est
toujours en liberté.
M. D'Ormesson a montré les
fonds de culotte de son libéralisme mondain. C'est
pas beau à voir.
N'empêche qu'à
Phnom-Penh, un grand vent mauvais a défriché
la civilisation occidentale. Les Khmers rouges ont
passé les bornes de l'ignominie.
L'évacuation des blancs,
à défaut des viols et des carnages attendus
par les lecteurs du Figaro ou de France-Soir, a
été du dernier pénible : les
moustiquaires ! Oui, ils ont été privés
de moustiquaires ! On les a contraints à boire de
l'eau du Mékong, leurs habits de rechange
étaient fripés, les blanchisseries
étaient fermées, les khmers rouges se
taillaient des sandales dans les pneus des
Mercédès, on a trimbalé nos altesses
dans des camions mal suspendus, pas climatisés, sur
des pistes boueuses. Les zenvoyés spéziaux mal
rasés, la voix nouée, ont fait d'hallucinants
récits de cet exode dantesque et le consul de France
a résumé l'horreur de la situation d'un mot :
" on est plus des hommes ". Sous-entendu : on nous traite
comme des bêtes.
Pendant des années, les "
coopérants " blancs de ces pays asiatiques ont
vécu dans le velours, pillant ces terres
hospitalières peuplées de gens nonchalants,
couvrant tous les massacres de jaunes, bénissant les
bombardiers de leurs goupillons
civilisés-chrétiens, fastueuses orgies de
piastres et de petites putes expertes. Et on les prive de
moustiquaires !
Pendant des années, les journaux
occidentaux, tous les journaux, ont appelé les
nazillons Thieu et Lon Nol " Monsieur le président "
et ont couvert d'anathèmes sanglants les fourmis
rouges qui crevaient dans les rizières pour chasser
l'envahisseur. Et aujourd'hui que les cruels soldats khmers
triomphent, on prive ces journaux de sensationnel : pas
d'exécutions sommaires, pas de bain de sang,
même pas un demi-viol, rien que la traditionnelle
hospitalité cambodgienne rendue austère par le
radicalisme des khmers qui ont raccompagné leurs
bourreaux à la frontière, sans
méchanceté, mais fermement. Les journalistes
frustrés remballent leurs adjectifs
flétrisseurs. Ce sera pour la prochaine
révolution…
Mais par contre, quelle
leçon de ces paysans khmers en guenilles, de ces
révolutionnaires en culotte courte, de ces paysans
déportant une ville entière à la
campagne dans le pur style Alphonse Allais.
Si massacre il y eut, ce fut un
massacre des symboles, un massacre de l'objet. Une
révolte radicale, prolongement de la révolte
noire de Watts au USA et en quelque sorte aussi de mai 68 en
France, contre la société de consommation,
contre ce règne de la pacotille où trône
la marchandise. Là est le vrai sacrilège pour
un esprit occidental (bourgeois ou non). On peut
exécuter, fusiller, violer, ce sont là les
règles d'un jeu où la " civilisation "
occidentale n'a pas donné sa part aux cochons,
à croire qu'elle l'a inventé, ce jeu, avec ses
millions de morts-pour-des-prunes dans les dernières
guerres mondiales, avec Hiroshima et ses radieux
prolongements dissuasifs. Mais piller les magasins,
brûler les bagnoles, pisser sur le matériel
hifi, casser les montres, bref tourner le dos au "
progrès industriel " et au catalogue de la Redoute
réunis, alors là, c'est vraiment un CRIME * "
(…)* " Faudrait pas pousser bien loin l'analyse pour voir
également le communisme occidental condamner ses
actes impies. Si " L'HUMANITE " relève fort justement
la crapulerie du " FIGARO ", elle ne dit rien du sens exacte
de la révolution cambodgienne. Les khmers ont
défoncé au bulldozer l'ambassade d'URSS. ''Du
passé, faisons table rase''. C'est Marx et
Lénine qui serait heureux !.
". (article complet de la GO
n°53)
- B- La question du soutien " Pour des raisons de
géopolitique "
Pendant la période 75-78, le PCML
(7) va apporter son soutien total au
Kampuchea Démocratique.
Une
délégation du PCML va être
reçue par les dirigeants du Parti Communiste du
Kampuchéa. Cette délégation qui a
séjourné du 9 au 16 septembre 1978
était la première délégation
française à se rendre dans ce pays, depuis la
libération de Phnom Penh, le 17 avril 1975. Le
soutien au PCK se fera principalement sur la base de la "
théorie
des 3 mondes " chère à l'Etat chinois
(n'oublions pas
l'intervention
de l'armée chinoise au Vietnam qui aura lieu en
février 1979 ) et au nom du combat contre " la
superpuissance social-impérialiste
soviétique " notamment représentée
en Asie du Sud-est par le Vietnam considéré
comme " expansionniste " et agent de l'URSS. C'est à
cette époque que des " tensions " des " agressions "
ont lieu à la frontière entre le Vietnam et le
Cambodge. Ce qui se traduira par une intervention militaire
directe du Vietnam au Cambodge.
" Prolétariat "
(8) n° 18 quatrième
trimestre 1978, titre " Asie du sud-est
jusqu'où ira le Vietnam ", dans son
édito nous pouvons lire en page 5 " Les
impérialistes américains ont été
chassés du Vietnam, du Laos, et du Kampuchéa
depuis plus de trois ans ; ils ont perdu du terrain dans
d'autres pays de la région qui furent autrefois leurs
avant-postes. L'heure de la paix et de la
sécurité a-t-elle enfin sonné dans le
Sud-est asiatique ? Nullement. Dans le cadre de sa
stratégie de domination mondiale, le nouvel
impérialisme soviétique s'efforce de
s'infiltrer dans la région et de la contrôler :
c'est la cause principale des troubles et des tensions qui
l'agitent ces derniers mois. L'histoire est dure aux peuples
d'Asie du Sud-Est; hier sorti victorieux d'une guerre
dévastatrice et meurtrière, le peuple du
Kampuchea doit aujourd'hui reprendre les armes pour
défendre l'indépendance de son pays. Ce
faisant, il se tient à l'un des premiers fronts de la
lutte anti-hégémonique aujourd'hui. Cette fois
encore, le soutien de notre Parti lui est acquis sans
réserves : il faut organiser sans attendre la
solidarité à sa lutte. " (…) " Mais les
choses ne sont pas si simples. Depuis le printemps 1975, une
campagne sans précédent s'est
déchaînée contre le Kampuchea
Démocratique en Occident, et particulièrement
dans notre pays. Comme les révolutions
soviétique et chinoise en leur temps, la guerre de
libération victorieuse, du peuple du
Kampuchéa, sa révolution socialiste
engagée sont aujourd'hui couvertes de saletés
abjectes, de mensonges grossiers et stupides, d'injures et
de haines. Rien n'y fait, ni les témoignages directs
de ceux qui reviennent du Kampuchea Démocratique, ni
les indications de ses propres dirigeants : on
déforme les faits, on calomnie à longueurs de
colonnes et d'antennes.
Il
y a bien une mauvaise intention là derrière.
Or au même moment, alors que cette campagne reprend de
plus belle en ce début d'automne 1978, des divisions
vietnamiennes se pressent à la frontière du
Kampuchéa, un pont aérien de Moscou à
Hanoï débarque du matériel militaire et
des ''conseillers'', les troupes vietnamiennes multiplient
les incursions et les préparatifs pour une nouvelle
agression d'envergure. "
la suite de l'article revient sur la campagne
médiatique " anti-cambodgienne " et dénonce
par avance la future intervention du Vietnam au
Cambodge.
" Comment ne pas voir dans ces faits plus qu'une
simple coïncidence ? La campagne anti-cambodgienne
n'est nullement innocente en effet. On crie au
''génocide'', à la ''dictature sanguinaire''
des communistes Khmers, on s'en prend à ses
dirigeants, et si demain les troupes vietnamiennes occupent
Phnom Penh, on acclamera les ''libérateurs'' ! le
tour sera joué et on n'y aura vu que du feu ici ; les
dirigeants vietnamiens et leur soutien soviétique
auront occupé le Kampuchea en toute impunité !
Tel est le sens de la campagne anti-cambodgienne actuelle ;
c'est une préparation idéologique à
l'agression du Kampuchea. le procédé est vieux
comme l'impérialisme : ne l'a-t-on pas
pratiqué de longues années pour masquer
l'agression américaine au Vietnam ? Combattre avec
force et patience cette campagne aujourd'hui encore, c'est
contribuer à rompre l'isolement du Kampuchéa
en Europe, c'est trouver des soutiens à sa cause
d'indépendance, c'est l'une de nos tâches.
".
Toute la logique du soutien que certaines
organisations ml (dans la logique de l'Etat Chinois
) vont accorder au PCK (9)
(Khmers Rouges) est décrite dans
l'édito de 'Prolétariat' :
- -la lutte contre le " nouvel
impérialisme soviétique "
qui devient l'ennemi principal.
-la lutte "
anti-hégémonique "
contre le social-impérialisme
soviétique, avec comme
conséquences l'alliance
avec l'impérialisme américain, le
soutien à l'union des bourgeoisies
européennes etc…
-la campagne "
anti-cambodgienne " de "
mensonges grossiers " de 1975 est
la même que celle de 1978. Elle ne sert
qu'à masquer et justifier l'occupation
Vietnamienne du Cambodge, car celui-ci s'oppose
à " l'hégémonisme
soviétique " et son pion dans la
région " l'expansionnisme
vietnamien ".
- tous ceux qui ne soutiennent
pas le régime Khmer Rouge sur le plan
diplomatique - politique - militaire - sont des
alliés du social-impérialisme
soviétique qui prépare la
troisième guerre mondiale.
|
Quand l'URSS par la suite interviendra en Afghanistan,
toute cette logique sera confirmée, et il sera
très difficile dans ce contexte d'analyser la
politique des Khmers Rouges sereinement.
|
- C- Les analyses critiques de la part des
marxistes-léninistes.
Voici 2 textes :
a) Un article extrait de " LA VIE DU PARTI
" bulletin intérieur du PCRml n°37 (mai
1979).
b) Un article du Groupe pour la
fondation de L'UCFML (mai 1980).
Il va de soi, que ces articles sont à
replacés dans leur contexte, et qu'ils illustrent
comment la répression menée par les Khmers
Rouges était analysée par une partie des ML en
France.
a) Article du PCRml extrait de " LA VIE DU PARTI "
n°37 (mai 1979).
A propos du
P.C.K.
Le Comité Central a
examiné les interrogations qui peuvent exister sur la
nature même du PCK (Parti Communiste du
Kampuchéa), compte tenu surtout des erreurs qu'il a
pu commettre et qui ont été largement
répercutées si ce n'est
démesurément amplifiées par les moyens
d'information.
Nous devons
écarter toute démarche métaphysique qui
consisterait à décerner le " label " de
communiste, à partir d'une série de
critères préétablis auxquels il
faudrait se conformer. Nous savons que l'édification
d'un parti communiste n'est pas quelque chose de
figé, de donné d'emblée, qu'il s'agit
de tout un processus, d'une lutte permanente.
A partir du moment
où un parti, comme le PCK, se réclame du
marxisme-léninisme, se fixe dans son programme, comme
objectif, l'édification du socialisme, la dictature
du prolétariat pour l'avènement du communisme,
nous devons examiner sa pratique, sa participation, depuis
sa création (1960) à la lutte de classe dans
son pays, les tâches révolutionnaires qu'il a
prises en main en les rapportant aux conditions
concrètes du pays, à chaque
étape.
Pour apprécier la pratique du PCK, il
est donc nécessaire de prendre en compte ses
différents aspects, à chaque moment dans
l'ensemble de son histoire.
Rappelons quelques données.
LA PERIODE DE LA RESISTANCE A
L'IMPERIALISME US
D'abord, la résistance opposée à
l'intervention directe de l'impérialisme US durant
cinq années de 1970 à 1975, à l'ampleur
des moyens de destruction et d'extermination mis en œuvre
par celui-ci, la rapidité - " surprenante " pour les
observateurs - avec laquelle l'essentiel du territoire fut
libéré, moins de deux ans après le coup
d'Etat pro-américain de Lon Nol, la capacité
manifestée pour déjouer les manœuvres de
subversion de l'URSS, tout cela ne peut s'expliquer
indépendamment du rôle joué dans la
conduite de la lutte, par le PCK.
La naissance du PCK, dont le congrès de fondation,
tenu clandestinement à Phnom Penh, date de septembre
1960, sanctionne une victoire du mouvement communiste du
Kampuchéa pour affirmer son autonomie, sa
liberté de conduite, hors des pressions
extérieures. Si les premières forces
communistes au Kampuchéa son apparues dans le cadre
du PC indochinois, crée en 1930 par Ho Chi Minh, il
est vrai que jusqu'à la fin des années 50,
elles ont toujours été tributaires semble-t-il
des prétentions vietnamiennes, à
régenter le mouvement communiste dans les trois pays
indochinois, prétentions qui reflétaient sans
doute, aussi bien les déviations de type chauvin que
des habitudes du mouvement communiste international à
désigner dans chaque région du monde, des
partis-pères, coiffant les autres partis.
Le regroupement de
militants tels que Saloth Sar (ou Pol Pot), Hou Youn, Kieu
Samphan, etc…, qui n'avaient pas suivi la voie des militants
communistes kampuchéans, rejoignant le Vietnam du
Nord, après les accords de Genève de 1954, ou
celle des militants se fondant purement et simplement dans
le régime de Sihanouk après ces accords,
jouera un rôle déterminant dans la fondation,
en 1960, du PCK.
Dans son premier congrès (1960) le PCK
fixant comme objectif premier la réalisation de la
révolution nationale et démocratique, se
livra, en se référant au
marxisme-léninisme, à une analyse de classe de
la société du Kampuchéa, et
définit la tâche de rassembler toutes les
forces du peuple en un vaste front uni dirigé contre
l'impérialisme US qui, dés ce
moment-là, multipliait les manœuvres portant atteinte
à la souveraineté du pays.
Désignant la paysannerie comme force
principale, et la classe ouvrière comme force
dirigeante, le PCK appelait à constituer un Front
incluant les personnalités patriotes, dont Sihanouk.
Dans les années 60, le PCK sera partie prenante des
luttes politiques de masses de plus en plus importantes,
dans les villes et les campagnes, dirigées contre le
féodalisme et l'impérialisme. C'est dans cette
période que vont apparaître à
l'initiative des communistes les premiers foyers de
guérilla. Face aux pressions croissantes de
l'impérialisme US et au peu de garanties offertes par
le régime de Sihanouk au sein duquel les forces
pro-américaines tentaient de limiter de plus en plus
la marge de manœuvre du prince, la lutte armée va
être déclenchée au début de 1968.
Des militants qui, tels Kieu Samphan, participaient dans le
cadre du travail légal, au régime de Sihanouk,
prennent alors le maquis.
FRONT UNI, ET LUTTE ARMEE
La constitution de bases d'appui, de zones de
guérilla sur une partie du territoire, comptant
jusqu'à un million de personnes (sur 8 millions
d'habitants), la formation d'unités combattantes, -
réalité incontestée - fourniront une
base matérielle précieuse au rapide
développement de la guerre populaire, lorsque les
Etats-Unis interviendront directement, avec leurs fantoches
de Saïgon, et de Phnom Penh, à partir de mars
70…
Et lorsque le 23
mars 70, Sihanouk proclamera à Pékin la
formation du FUNK (10) et du GRUNK
(11), les dirigeants du PCK
répondront aussitôt positivement à cette
initiative qui contribuait notablement à la politique
de Front Uni qu'ils entendaient développer. Cette
politique, combinée avec le développement de
la lutte armée, sera dirigée à
l'intérieur du pays par le PCK, dont l'impulsion
pèsera de manière décisive dans la
réalisation des conditions de la victoire. Les
premiers pas de la lutte armée avant 70, puis la part
prise ensuite par les communistes kampuchéans dans la
lutte, contribueront aussi à ce que rapidement le
gros des combats, au Kampuchéa avec
l'impérialisme US, soit le fait non d'unités
des forces de libération vietnamiennes utilisant le
territoire du Kampuchéa, mais de l'armée
populaire du Kampuchéa. Le PCK a certainement
joué un rôle déterminant pour maintenir
ferme la ligne de résistance dans les moments les
plus critiques comme le premier semestre de 73 où le
peuple kampuchéan avait à faire face aussi
bien à la concentration sur le Kampuchéa des
bombardements US en Indochine (après les accords de
Paris entre les Etats-Unis et le Vietnam) qu'à la
multiplication des manœuvres de l'URSS -qui maintiendra
jusqu'à la libération de Phnom Penh, ses
relations avec les fantoches- pour mettre sur pied une
prétendue " troisième force ".
La
libération de Phnom Penh de la domination US, le 17
avril 1975 -deux semaines avant la défaite
américaine à Saïgon- résultat
d'une longue offensive dont le plan -devait être mis
au point en juin 1974 par le Comité Central du PCK-
marquera une étape nouvelle dans la lutte du peuple
du Kampuchéa.
AVRIL 1975 : UNE NOUVELLE
ETAPE
La période qui s'ouvre, et qui va de la
libération de Phnom Penh en avril 1975, à
l'invasion vietnamienne de janvier 1979, est celle
visée par la plupart des critiques ou des
condamnations portées contre le PCK.
Les tâches
qui se présentent à ce moment sont celles de
l'édification d'une économie
indépendante, l'ébauche de la construction
d'une société socialiste, dans un pays qu'il
faut relever de ses ruines et d'une misère que la
guerre a décuplée. Le pays a été
dévasté par la politique de " terre
brûlée " des Américains, tandis que la
moitié de la population, fuyant les bombardements US,
d'une intensité inouïe, s'était
regroupée dans Phnom Penh, ou à ses abords
immédiats.
UNE LUTTE CONTRE LES RAPPORTS
D'EXPLOITATION
De fait, la lutte engagée à partir d'avril
75, pour l'édification du pays, vise clairement la
liquidation de toutes les tares léguées par la
société féodale, et de toute forme
d'exploitation. Il n'est pas anodin d'observer que parmi les
accusations portées contre le régime du
Kampuchéa démocratique, s'il est fait
état de " méthodes dictatoriales ", il n'est
jamais question de la constitution d'une nouvelle caste ou
classe privilégiée, les critiques
évoquent plutôt volontiers, à propos des
dirigeants, un mode de vie " spartiate ".
Cela reflète assez la
difficulté à trouver trace dans la politique
menée à partir de 75, du développement
de nouveaux rapports d'exploitation, prenant la place des
anciens. Si la voie choisie après 75 n'était
pas celle de la tentative utopique de réaliser une
société purement agraire, ou de
rétablir une sorte de société
féodale, elle n'était pas non plus celle de la
constitution d'une société de type capitaliste
d'Etat. Et il est à noter les succès
très importants pour l'amélioration des
conditions d'existence du peuple, remportés dans
divers domaines. Par exemple la suppression de la famine,
liée notamment au développement
considérable de la production de riz, depuis la
libération de 75, au point de pouvoir commencer
à en exporter à partir de 77, et de
créer ainsi une source de rentrée de devises ;
la suppression de l'analphabétisme ;
l'élimination du paludisme, etc…
Ces
résultats, à porter à l'actif du bilan
de trois années du Kampuchéa
démocratique, sont d'autant plus significatifs qu'ils
n'ont pu être obtenus que sur la base de la
mobilisation, en toute indépendance, du peuple du
Kampuchéa. La volonté d'indépendance
manifestée dans la tentative d'édification
d'une société nouvelle est le prolongement de
la ligne de conduite indépendante qui avait
prévalu dans toute l'étape
précédente de la guerre de libération.
L'acharnement mis par les expansionnistes vietnamiens dans
leurs agressions contre le Kampuchéa, l'ampleur des
moyens que ceux-ci ont mis en œuvre, l'aide et
l'encouragement considérables qu'ils ont reçu
pour leurs entreprises, de la part des
sociaux-impérialistes soviétiques, ne
témoignent-ils pas du caractère
indépendant de la politique du Kampuchéa
démocratique, de l'obstacle que celui-ci
représentait pour les tentatives des
hégémonistes, de main-mise sur la
région, de la contribution que le Kampuchéa
démocratique apportait ainsi au mouvement des
non-alignés.
DES ERREURS ULTRA GAUCHISTES
C'est dans le cours de cette lutte menée par le
PCK, qu'ont été commises de graves erreurs,
qui paraissent relever pour l'essentiel du
gauchisme.
Egalitarisme, tentative de " communisation "
rapide de la société par une anticipation
gauchiste brûlant les étapes
nécessaires, ne prenant pas en compte les
contradictions au sein du peuple, assimilées trop
souvent à des contradictions avec l'ennemi :
voilà qui semble avoir marqué fortement la
pratique du PCK, dans le cours de sa tentative d'impulser
l'édification d'une société nouvelle,
indépendante, socialiste.
Certaines manifestations concrètes de
ces déviations gauchistes dans la politique du PCK
sont bien connues. Par exemple la suppression pure et simple
de la monnaie dans les échanges ne prend pas en
compte l'état de développement de la base
économique, les contraintes, les lois qui la
régissent et fait comme si on pouvait les surmonter
par un effort volontariste. De même pour la
suppression des salaires, qui en découle. Les
réponses apportées sur ce point par les
dirigeants du Kampuchéa, dont le secrétaire
général Pol Pot, lors de la visite de la
délégation des journalistes yougoslaves
notamment ne paraissent guère satisfaisantes :
justifier cette mesure par ce qui pouvait exister dans les
zones libérées, durant la guerre de
libération contre l'impérialisme US,
l'envisager non comme provisoire mais comme durable,
apparaissent en décalage par rapport aux exigences
concrètes de l'étape. L'évacuation de
la population de Phnom Penh et des autres villes, telle
qu'elle s'est effectuée, semble bien aussi participer
du même type d'erreur. Réduire les effectifs de
la population des villes était évidemment une
mesure indispensable, une question de survie : si l'on prend
le cas de Phnom-Penh, la capitale, elle avait vu sa
population passer en quatre ans entre 70 et 75 de moins d'1
million d'habitants à 4 millions, la moitié de
la population totale du pays. Il va de soi que ce gonflement
artificiel de la capitale, conséquence de la guerre
américaine qui faisait fuir la population des zones
bombardées vers la capitale - repaire des fantoches,
donc non bombardée - nécessitait des mesures
d'urgence une fois les Américains battus. Le retour
massif et rapide dans les campagnes, les rizières,
était bien une nécessité
impérieuse. Une nécessité pour pouvoir
nourrir la population, jeter les premières bases
d'une économie indépendante, pour laquelle les
acquis des zones libérées, dans le domaine de
la production, constituaient un atout précieux, mais
bien incapable de suffire aux besoins d'ensemble. S'il
fallait donc agir rapidement sur le rapport
villes-campagnes, sur la répartition de la
population, le problème posé est de savoir
dans quelle mesure, de quelle manière ? il n'aura pas
fallu beaucoup plus de quelques jours, en avril 1975, pour
que la population de Phnom Penh passe de 4 millions à
20 ou 30 000 habitants, essentiellement concentrés
dans des activités industrielles de la banlieue de la
capitale. L'ampleur et la hâte combinées, de
l'opération n'ont pas pu être sans
conséquences, mettant en cause la vie de nombreuses
personnes qui affaiblies par les privations, y compris
malades ou blessées, étaient dirigées
sur les routes, aux quatre coins du Kampuchéa, vers
une campagne où très souvent - suite à
la guerre - il fallait, pour la production repartir de
zéro, sans matériel adéquat, etc…
LE SORT DES COUCHES CITADINES
Dans ce cadre-là, se pose la question du sort
réservé à différentes couches
citadines de la population, nullement prêtes ni
habituées au travail des champs, et pour qui le
départ des villes posait un problème
spécifique par rapport aux paysans qui ne
s'étaient réfugiés à Phnom Penh,
qu'entre 70 et 75, sous les effets de l'agression
américaine. La mise en oeuvre de la politique : "
tous aux rizières " appliquée à tous
sans distinction, contraignait les intellectuels, les
couches citadines, bourgeoises ou petites-bourgeoises,
celles notamment qui composait la population de Phnom Penh
avant l'intervention américaine directe, a
bouleversé complètement, de façon
expéditive, et sans transition, leur mode
d'existence. Et sans non plus que soit réellement
envisagé, semble-t-il leur apport possible -
grâce à leur instruction, leur formation, leurs
connaissances techniques ou autres - à
l'édification du Kampuchéa
démocratique. Des témoignages abondent,
indiquant par exemple comment des médecins, dans le
cadre de la politique égalitariste menée, se
sont trouvés contraints de se consacrer exclusivement
aux travaux rizicoles. La manière dont ont pu
être traitées certaines couches de la
population, soumises ainsi à la coercition, revenait
à les traiter en ennemis.
LES REPRESAILLES
Que des militaires, des fonctionnaires, des cadres du
régime Lon Nol aient fait l'objet de
représailles, que les villes, où les fantoches
avaient installé leurs quartiers avec leurs
partisans, et se livraient à de florissants trafics
avec l'occupant, soient apparues comme des univers de
corruption aux yeux des patriotes qui durant quatre ans,
dans le maquis, avaient supporté le poids de la
guerre, rien de surprenant. Rien de surprenant à ce
que des résistants aient voulu régler leurs
comptes avec un certain nombre de " collabos ". Mais, que le
nouveau régime ait, comme cela semble avoir
été le cas, étendu les
représailles en procédant à de
nombreuses exécutions, cela revenait à
sous-estimer les possibilités de rallier ou de
neutraliser un certain nombre de gens qui sans être
des tortionnaires du régime Lon Nol, avaient
entretenu plus ou moins de relation avec lui.
LES PERSONNALITES PATRIOTES
A fortiori, le traitement réservé à
des personnalités patriotes, qui avaient combattu Lon
Nol et les américains, témoigne de la mauvaise
résolution des contradictions au sein du peuple, de
la tendance à élargir la cible de la
révolution et à réduire le camp du
peuple, en réprimant toute force politique, toute
expression politique se trouvant en contradiction avec le
parti communiste. Les aspects largement positifs du Front
uni, durant la période de guerre de libération
anti-américaine, semblent disparaître au
lendemain de la libération, alors qu'une politique de
front uni, réajustée en fonction de la
nouvelle étape, et faisant converger des forces de
classes, des points de vue différents, vers la
réalisation des tâches d'édification de
la nouvelle société, restait
nécessaire.
Le cas de Sihanouk
est significatif, si les masses du Kampuchéa n'ont
pas oublié que Sihanouk n'a pas hésité,
au cours des années 60, à pourchasser les
éléments les plus conséquents de la
résistance contre la main-mise américaine, et
à envoyer l'armée contre les premiers maquis -
pas très longtemps avant le coup d'Etat
pro-américain de 1970 - elles ne
l'appréciaient pas moins, comme personnalité
patriote. C'est à ce titre qu'il joue un rôle
important et positif de 70 à 75. Sa mise à
l'écart de tout rôle politique après
cette période reflète une mauvaise
résolution des contradictions quel que soit le
degré d'opposition de Sihanouk à la
perspective socialiste.
La tendance
à nier l'existence de contradictions au sein du
peuple, à les traiter comme des contradictions avec
l'ennemi, s'est forcément manifestée dans la
manière de traiter les contradictions politiques au
sein même du PCK. La disparition de certains
dirigeants, tel Hou Youn, un des fondateurs du PCK, ministre
de l'intérieur dans le gouvernement de la
résistance du Kampuchéa, jusqu'en 75 en est
peut-être un exemple.
DES ERREURS EXPLOITEE PAR LES AGRESSEURS
VIETNAMIENS
Les méthodes adoptées, face à des
contradictions au sein du peuple, le mécontentement,
les divisions qu'elles ont pu susciter, ont
été exploitées par les agresseurs
vietnamiens. Si le FUNSK (Front d'Union Nationale pour le
Salut du Kampuchéa) n'est qu'un pouvoir fantoche
installé à Phnom Penh, à la pointe des
baïonnettes vietnamiennes, il est indéniable que
les contradictions non correctement résolues au
Kampuchéa se sont traduites entre 75 et 78 par des
mouvements de mécontentement, voir des
révoltes locales, ou l'entrée en dissidence de
certains cadres. Par ailleurs, la mise à
l'écart de personnalité comme Sihanouk,
bénéficiant d'un grand prestige international,
s'ajoutant à une certaine tendance à confondre
la politique de compter sur ses propres forces avec
l'autarcie, ceci combiné avec l'exploitation par les
mass média impérialistes des erreurs au plan
intérieur, tout cela contribuait à
créer un terrain favorable au Vietnam et à
l'URSS pour tenter d'isoler le Kampuchéa
vis-à-vis de l'opinion internationale. Les agresseurs
vietnamiens ont donc pu bénéficier des erreurs
du PCK pour développer leur entreprise. Ces erreurs
liées pour une part à la faiblesse du poids du
prolétariat au sein de la société du
Kampuchéa, à la faiblesse du PCK, dans sa
capacité à maîtriser correctement les
contradictions au sein de la nouvelle société
kampuchéane, n'ont cependant pas empêché
le PCK de s'affirmer comme le fer de lance de la
résistance à l'agression vietnamienne. Et cela
est un élément décisif dans
l'appréciation que l'on doit porter sur ce
parti.
LE PCK DANS LA NOUVELLE RESISTANCE
Le fait que la résistance se soit
organisée, développée depuis janvier,
et qu'elle ait pu porter des coups sévères aux
agresseurs, est une indication importante sur les rapports
existants entre le PCK, le régime du Kampuchéa
démocratique et les masses du Kampuchéa. Si le
PCK et le régime installés à Phnom
Penh, depuis avril 75, n'avaient été - comme
les ont présentés nombre d'observateurs en
parfait accord avec la propagande vietnamienne et
soviétique - que des instruments de coercition, de
dictature sur les masses, les exploitant et les opprimant,
ils auraient du disparaître complètement et
rapidement sous les coups des agressions vietnamiennes et de
leurs fantoches, et le peuple aurait dû se rallier
à ses " sauveurs inespérés ".
Mais, il n'en a
rien été. Depuis janvier, Phom Penh est
toujours vide, comme l'ont montré plusieurs
reportages, la population n'y est pas revenue ; les
vietnamiens ne contrôlent que des villes vides et des
grands axes de communication, d'ailleurs constamment
coupés par les patriotes du kampuchéa.
D'importantes batailles ont été menées
par la résistance, et la protection massive et
rapprochée de la capitale lors de la visite du
premier ministre vietnamien, Phan Van Dong,
témoignait de la vitalité de cette
résistance. En témoigne aussi le renforcement
constant des unités dépêchées par
Hanoï pour l'occupation du Kampuchéa. Face
à la récente offensive vietnamienne, à
proximité de la frontière thaïlandaise,
on a vu aussi la population cambodgienne passée en
Thaïlandaise, pour échapper aux agresseurs,
regagner rapidement le Kampuchéa dans les zones de
résistances tenues par l'armée
révolutionnaire que dirige le PCK, et non pas
s'installer dans les camps de réfugiés de
Thaïlandaise.
En janvier,
Sihanouk, interviewé à New York, sans rien
minimiser de ses critiques à l'égard du
régime du Kampuchéa démocratique avait
souligné que les " khmers rouges " n'avaient pas
besoin de volontaires extérieurs, qu'ils avaient "
assez de paysans avec eux ". Tout cela indique une
réelle adéquation entre une large partie des
masses et le PCK. Celui-ci s'est engagé dans la
réalisation des tâches de la nouvelle
étape caractérisée par la lutte contre
l'occupation étrangère. Il développe
son activité comme l'indiquent ses dirigeants et
comme le montrent les développements de la
résistance, dans la perspective de mener une guerre
prolongée, mettant en œuvre les principes de la
guerre du peuple. Si l'on prend en compte l'ensemble des
éléments dont nous disposons sur l'histoire du
PCK, et sur la lutte qu'il a menée et qu'il
mène depuis sa création, il apparaît que
le PCK a effectivement pris en mains, aux différentes
étapes, les tâches qui incombaient au parti
communiste :
Lutte contre l'impérialisme et le
féodalisme, guerre de résistance à
l'agression américaine, ébauche
d'édification d'une société nouvelle
libérée de l'exploitation, puis nouvelle
guerre de résistance contre l'occupant vietnamien. Il
a joué un rôle décisif dans l'impulsion,
l'organisation et la victoire de la guerre populaire contre
l'agression américaine et il assume aujourd'hui la
direction de la résistance populaire à
l'occupant vietnamien. Certes il apparaît qu'il a
commis des erreurs graves, de caractère
ultra-gauchiste, notamment dans la période 1975-1979.
Mais ces erreurs, nous devons les considérer comme
appartenant à nos erreurs, à celles que
peuvent commettre, dans leur lutte, les communistes. Elles
n'ôtent pas au PCK son caractère de parti
communiste, qui pour s'édifier devra
nécessairement tirer la leçon de ces erreurs
et les surmonter.
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